1
s* année
Août 1867.
/V.» ».
L’ECHO DES VALLEES
—(NOUVELLE SÉRIE)—
Que toutes les choses qui sont véritables....... occupent
vos pensées — ( Philippiens., IV. 8. )
SOMMAIRE — Nouvelles Eglises vaudoises. — John Henderson de Park.
Nouvelles locales.
NOUVELLES ÉGLISES VAUDOISES
Une grave décision a été prise par le dernier Synode : la
Commission d’évangélisation lui ayant dentendé de bien vouloir établir les conditions auxquelles telle ou telle congrégation
pourrait, le cas échéant, s’agréger comme nouvelle paroisse
à l’Eglise vaudoise , l’Assemblée accueillit la demande en
chargeant une Commission spéciale de la rédaction d’un
projet de règlement à présenter au prochain Synode sur cet
objet ( Voy. Actes du Synode XX ).
La question n’est pas nouvelle. Déjà au Synode du Pomaret
1851, les habitants vaudois de Pignerol, encouragés par
l’exemple et le succès de leur coréligionnaires de la ville de
Turin , avaient manifesté le désir de se constituer en paroisse
de l’Eglise vaudoise, pour avoir le bénéfice d’un culte régulier
ainsi que les écoles qui en sont en quelque chose le complément nécessaire. — Si le Synode , qui avait accueilli deux ou
trois ans auparavant la demande de la Congrégation protestante
de Turin, ne crut pas alors en devoir faire autant pour celle
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— 114
de Pignerol, c’est uniquement parceque les conditions n’étaient
pas égales des deux côtés, l’une ayant déjà donné des preuves
suffisantes de sa viabilité , l’autre formant à peine encore une
congrégation un peu régulière. Plus de quinze ans se sont
écoulés depuis, et il ne paraît pas que les choses aient
changé au point de donner tort au Synode de 1851.
Mais si l’on est demeuré stationnaire aux portes des Vallées,
il n’en a point été ainsi partout où l’Evangile a été annoncé ;
le mouvement a même été si rapide que personne en 1851
n’aurait seulement osé espérer l’extension qu’a prise aujourd’hui notre œuvre d’évangélisation en Italie. — Ce n’est
pas des Vaudois de Pignerol ou de Turin que le Synode recevait
l’année dernière une nouvelle demande d’agrégation à l’Eglise
vaudoise , c’est du centre même de la Péninsule, c’est de Florence. Demain peut-être ce sera d’un autre coin de notre
patrie, après demain d’un autre encore ; ainsi le veut le cours
naturel des choses, et nous croyons que le Synode a fait
preuve d’une sage prévoyance en prenant la mesure dont nous
avons parlé.
Mais une difficulté se présente tout d’abord à la pensée : l’Eglise vaudoise, pourrait-on craindre, pense donc sérieusement
à la possibilité de s’étendre en s’agrégeant comme paroisses
nouvelles toutes les congrégations qui lui en feront la demande
aux conditions qui vont être posées... Et la déclaration du Synode de 1855, confirmée par le Synode de 1866, que deviendrat-elle dans ce cas ? — Si l’Eglise vaudoise en faisant annoncer
l’Evangile hors de son sein, se propose uniquement d’amener
les âmes à la connaissance et à l’obéissance du Seigneur JésusChrist , sans chercher à imposer aux congrégations italiennes
ses propres formes ni sa constitution ecclésiastique,'comment
peut-elle avoir la pensée de s’accroître des nouveaux membres
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— M5 —
qui de deux-cents Heues de distance viendront s’oirrirà elle à
titre de confédérés ? Le principe posé en 1855 ne sera-t-il pas
renversé par le règlement de 18G8 , et ne l’a-t-il pas été déjà
virtuellement par le vote de 1867 ?
Nous ne le pensons pas ; et quand nous aurions quelqiK'
souci à cet égard , il nous resterait encore le ferme espoir que
l’expérience ne tarderait pas à nous remettre clle-môme dans la
droite voie. Le droit chemin pour nous, en effet, c’est toujours
le principe établi par le Synode de 185o , et plus que personne
au monde nous serions affligés de voir notre Eglise s’en départir, lors même qu’elle le ferait par mégarde. Si au lieu de
travailler en vue de faire passer les âmes de la puissance de
Satan à celle de Dieu, notre Eglise en venait jamais à se proposer son propre agrandissement; elle aurait fait en cela moins
une erreurqu’une chiite, et ce n’est pas nous qui voudrions l’engager dans cette voie. Mais qu’on veuille bien partir du principe
même de la liberté des congrégations parvenues à l’âge de maturité, et cette liberté nous garantira du danger que l’on redoute.
Prenez le premier exemple qui se présentera : une congrégation vient de se constituer en église : trois voies s’ouvrent
devant elle : ou bien jalouse de conserver toute son indépendance , elle voudra n’entretenir avec les églises de môme foi
qu’elle d’autres rapports que ceux de la fraternité chrétienne ;
ou bien ses sympathies l’attireront du côté de l’Eglise vaudoise
èf cé sera le cas alors de détérminer clairement de part et
d’autre lés conditions d’admission ; ou bien encore tout en
remerciant l’Eglise vaudoise de lui avoir donné naissance par
là prédicalioù de l’Evangile, la nouvelle église trouvera son
avaiiiage k se ranger sous un drapeau différent. Dans l’une
conànie' dàuS'l’autre de ces .alternatives l’essentiel est que le
chcliX*reste parfâitetnent lifei^e. Or cette pleine et entière liberté
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que nous souhaitons aux jeunes congrégations , nous sommes
persuadé que les Vaudois sauront toujours la respecter ; nous
en avons pour garant, outre cette déclaration du Synode de
1855, l’intérêt même de notre Eglise, laquelle n’a certainement
rien à gagner à se grossir de quelques paroisses situées à de
très-grandes distances de son centre actuel. Autant il y aurait
pour elle d’infidélité à rentrer en quelque sorte dans sa coquille
en abandonnant à qui la veut la tâche d’évangéliser l’Italie ,
autant nous verrions de danger à vouloir faire de notre Eglise
la mère d’une nombreuse famille. Outre qu’elle serait dans
l'impossibilité de pourvoir à tous ses enfants le pain quotidien,
elle se replierait peu à peu sur son ouvrage et finirait par s’y
complaire ^tellement qu’elle no ferait plus autre chose. Nous
aurions l’espoir de nous entendre un jour appeler du titre
pompeux d’Eglise d'Italie, que cela ne nous consolerait point
de la perte que nous y ferions au point de vue spirituel. Certes
ce serait avec bonheur que nous verrions revenir ces temps
( XV® siècle ), où , au dire de Gilles ( ch. iv), « Dieu bénissait
merveilleusement les Eglises des Vallées, les multipliant de
jour en jour, et leur faisant la grâce d’être comme mères
fertiles de tant d’autres églises éparses çà et là, et dont elles
avaient toujours un soin singulier ». Mais autre chose est
d’avoir dans la Péninsule ou ailleurs un certain nombre
d’églises évangéliques, fruit de notre œuvre, et partageant
notre tâche aussi bien que notre foi, autre chose d’avoir tout
un système de rouages dont la force motrice et l’impulsion
viendrait d’un centre commun.
Pour dire dès à présent toute notre pensée : le temps peut
venir où les églises des Vallées ne seront plus seules à avoir
leurs synodes; mais il n’arrivera jamais qu’un synode vaudois
prenne à sa charge, — même quand il en serait prié, — toutes
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les églises évangéliques vaudoises qui auront pu se former en
Italie. Les grandes agglomérations sont rarement homogènes
et la papauté seule est de force à couvrir de son lourd manteau
toutes ces masses avec ce qu’elles renferment ; — le pain
qu’elle donne à son monde chrétien ne serait pas de nature
à satisfaire notre monde à nous, et la soumission dont elle se
contente serait pour notre Eglise un trop maigre hommage. —
Qu’est-ce donc qu’il nous faut? .\i plus ni moins, croyons-nous,
que ce que va nous donner le prochain synode : non plus le
dangereux privilège pour l’Eglise vaudoise d’avoir des églises
filles ; mais bien la possibilité de voir bientôt du sein des
stations qu’elle a fondées surgir à l’heure voulue autant d’églises sœurs, — sœurs, avant-tout, par leur foi et leur obéissance au même céleste Berger, sœurs ensuite , si elles le
désirent, par leur constitution ecclésiastique et leur activité
chrétienne. — A ce titre-là nous serons heureux de nous
sentir en famille, même en famille nombreuse, dût notre renom
y perdre quelque chose. Des sœurs plus jeunes, des sœurs
plus robustes et plus vivantes, voilà ce que nous pouvons
accepter sans péril pour nous ni pour autrui ; voilà ce qui est
un vrai besoin pour l’Eglise vaudoise dans les circonstances
où nous sommes. La tâche de l’évangélisation est devenue
si grande que nos forces n’y suffisent décidément plus ; c’est
aux congrégations les plus prospères à nous venir maintenant en aide en se constituant en églises, et en prenant
résolument leur part du travail et des soucis.
Le vote du dernier synode en effet n’intéresse pas moins
les églises naissantes que celles des Vallées. Si commode
qu’il soit d’être enfant, on ne saurait l’être toujours ; après
l’enfant que l’on conduit à la lisière, vient le jeune homme avec
sa fougue et ses imprudences ; après le jeune homme vient
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l’homme fait : sur ce chemin deux accidents peuvent seuls
nous arrêter : la mort ou l’imbécilité. Or il ne convient à nos
stations ni de rentrer dans le néant en se laissant mourir,
ni de s’arrêter h l’état d’enfance. Il y a un temps d’écouter
l’évangile, et un temps de l’annoncer à d’autres ; un temps
de recevoir et un temps de donner. C’est ce qu’elles semblent avoir senti déjà, c’est ce qu’elles sentiront de jour
en jour plus vivement. Il arrive un moment où tout être responsable sent le besoin de se faire le centre d’une famille
nouvelle , où il puisse à la fois se suffire à lui-même et devenir
le soutien de ceux que Dieu lui donne. — Nos stations n’échapperont point à cette loi : si elles veulent continuer à vivre,
il faut quelles avisent aux moyens de gagner elles-mêmes
leur pain et d’en fournir les multitudes au désert où elles
errent comme des brebis sans berger. Leur manque-t-il quelque
chose encore? Qu’elles se hâtent de l’acquérir, car déjà de
toutes parts on les invite à l’œuvre. S’y refuser, ce serait se
condamner à tourner sur elles-mêmes comme une porte sur
ses gonds ; l’inaction les appauvrira, la pauvreté les fera
mourir. — Réfléchit-on suffisamment à cette condition de
toute vie, que celui qui ne veut point travailler ne doit point
manger non plus ? A-t-on calculé ce que la paresse des églises
nous a donné d’erreurs et de stériles disputes ? Si les églises
de Corinthe et de Galatic avaient travaillé un peu plos, elles
auraient sans doute eu beaucoup moins de temps à dépenser
en folles questions. Leur faiblesse même les eût plus ¡souvent
ramenées à la source de toute force, et nous aurions une
épître aux Galates un peu différente de celle que nous connaissons. — Que nos jeunes congrégations y prennent garde s:
de tous les ennemis qui les attendent sur le chemin' qu’elles
sont appelées à parcourir, elles n'en ont pas de plus à craindre.
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pour le moment, que l’aise et les amusements et l’inaction
d’une enfance trop prolongée.
Nous ne nous arrêterons pas à chercher si la Commission
d’évangélisation peut trouver son compte elle aussi à ce que
des églises nouvelles viennent successivement prendre leur
part du fardeau, d’abord parceque nous n’aurions qu’à répéter
ce que nous avons dit de l’Eglise vaudoise qu’elle représente
et dont elle dépend , et ensuite parceque c’est la Commission
elle-même qui a provoqué le vote du dernier synode sur la
question qui nous occupe. —Quand on est arrivé à dépenser
annuellement pour l’évangélisation la somme de cent mille
francs, qu’il faut chercher, on peut dire , intégralement hors
de l’Eglise qui vous délègue; quand au nombre déjà si insuffisant
des ouvriers dont on peut disposer , la mort vient encore faire
les brèches que nous savons, en nous enlevant d’abord un
jeune candidat au saint ministère, du plus grand espoir, puis
un évangéliste plein de zèle, puis un des pasteurs les plus amis
de l’œuvre, et tout récemment un évangéliste encore, et l’un
des plus dévoués, il serait bien étonnant qu’on ne se sentît
pas le besoin de s’asseoir un instant pour voir s’il n’y a personne
qui vous aide. —Si résolue que soit notre Commission d’évangélisation à surmonter les difficultés, elle sera toujours la première intéressée à provoquer la formation de nouvelles églises,
capables de lui apporter un secours efficace. Le rapport du
consistoire de Florence (5 mai 1B67 ) l’a dit avec beaucoup de
raison : « les fidèles se dispersent dès qu’ils n’ont plus rien à
faire en commun ; et nos congrégations, si elles ne se hâtent de
prendre une part active à la propagation de l’Evangile , ne tarderont pas à devenir elles mêmes un sérieux embarras ».
Soit donc qu’on envisage la formation et l’agrégation de nouvelles églises au point de vue des intérêts de l’Eglise vaudoise
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et de la Commission d’évangélisation, soit que on l’envisage
au |3oint de vue des intérêts de ces congrégations elles-mêmes,
tout nous conduit à nous réjouir de la résolution prise par le
dernier synode et à nous faire désirer une solution favorable,
bien entendu qu’il y aura des deux parts des conditions à poser ;
mais ce point-ci pourra faire l’objet d’une autre étude.
JOHIV HEIVOjBI^SOIV
tlo F*arlc.
Un membre influenl de l’Eglise presbytérienne-unie d’Ecosse, Mf le
Docteur Andrew Thomson a consacré à la mémoire du grand philanthrope chrétien John Hendei’son de Park une esquisse biographique
que nous sommes heureux de faire connaître à nos lecteurs.
John Henderson, né en 1782 , est mort le 1’' mai 1867, à l’âge de
85 ans. 11 était le fils d’un respectable commerçant et propriétaire
de vaisseaux de la petite ville de Borrowstonness sur le Eorlh; il
reçut sous le toit de son père une éducation excellente et solide et
fut élevé dans la connaissance qui rend sage à salut. Tout jeune
encore, il rejoignit un frère aîné du nom de Robert, qui s’était établi
à Glasgow, le grand centre commercial de l’Ecosse ; leur application
tranquille, leur bon sens , leur honnêteté , et un esprit à la fois
économe et entreprenant, accrurent dès l’abord leurs succès ; et. par
la bénédiction de Dieu, leur trafic prospéra si bien qu’ils purent
élargir considérablement le cercle de leurs opérations , de sorte qu’à
Glasgow les deux frères associés conquirent bientôt une haute réputation d’intégrité , de sagesse et de solidité.
W Henderson s’est trouvé de très-bonne heure sous l’influeuce de
la religion et de l’Esprit de Dieu. Mais, il n’y a qu’un quart de siècle,
un événement eut lieu qui eut pour effet de le soumettre plus complètement que jamais cà celte influence et de lui faire consacrer en-
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tièrement ?a vie à la gloire de Dieu et au bien de ses semblables.
Il avait acheté depuis peu de temps la propriété de Park , près de
Renfrew, sur les bords de la Clyde, et avait l’habitude d’y passer la
plus grande partie de l’été. Comme il quittait un jour le bateau à
vapeur, en compagnie de son frère, du D'' King son pasteur, et d’une
domestique, un second bateau survint inopinément et fit chavirer la
barqne qui les portait. M' Henderson et le D'' King ne réussirent
qu’avec beaucoup de peine à prendre terre ; M*' Robert Henderson et
la domestique furent amenés sans vie au rivage. M'' Henderson succéda donc â son frère, doublant ainsi une fortune déjà considérable;
mais le déplorable accident, dont il avait failli être la victime, eut
des conséquences plus importantes qu’un simple accroissement de
richesses ; il en fut tellement impressionné que depuis lors un sentiment profond de la réalité et de la proximité du monde invisible
se grava dans son âme en traits ineffaçables, et il s’éveilla en lui le
désir d’administrer ses grands revenns sous l’impulsion de la charité,
avec la conscience bien claire qu’il était, vis-à-vis de Dieu , dans la
position d’un économe responsable.
Ce n’est point qu’il n’eût déjà auparavant l’habitude de donner;
car l’on pourrait citer avant cette époque tel humble pasteur de campagne , chargé d’une nombreuse famille, auquel un bienfaiteur
anonyme envoyait de temps à autre , et toujours à propos , des dons
plus ou moins considérables, dont la provenance ne se pouvait en
aucune manière découvrir. Mais il est certain qu’aussitôt après l’accident de la Clyde, les libéralités de M' Henderson prirent des allures
plus systématiques et vraiment princières ; et l’opinion publique n’a
rien exagéré en fixant leur chiffre à la somme annuelle de 800 mille
francs, et même davantage, .lamais on n’avait vu, en Ecosse, la bienfaisance chrétienne s’exercer sur une aussi vaste échelle , et semer
autour d’elle à pleines mains la totalité des profits de l’année.
Un des objets qui ont activé le plus l’intérêt et la philanthropie de
cet excellent homme, c’est la sanctification du dimanche. Lors de la
construction des premiers chemins de fer en Ecosse, l’on s’était forcé
d’obtenir que les nouvelles voies de communication demeurassent
ouvertes le jour même du repos ; il lui parut qu’une concession de
ce geni’e priverait une foule de personnes d’un précieux privilège et
d’un droit, contribuerait à amoindrir dans tout le royaume le respect
dû au jour du Seigneur, et qu’en s’y pliant dès l’abord', on serait
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bientôt amené à en faire d’autres, à mesure que le réseau des nouvelles routes s’agrandirait, et que ce serait ainsi prêter la main au
débordement des eaux. Sa résistance sur ce terrain le porta naturellement à des efforts plus vastes dans le but de mieux défendre la
sainteté de l’institution menacée. Il engagea des ministres de dénominations diverses à publier des essais sur les nombreux côtés de la
question et provoqua de la sorte l’expression du sentiment collectif
des Eglises que contient le volume connu sous ce titre familier :
« Le sabbat chrétien ». Non content de ce premier résultat, il proposa
des prix aux ouvriers pour la tractation de ce même sujet ; plus d’un
millier de concurrents répondirent à son appel , et une telle circonstance révéla dans cette classe de la société une somme de dignité
et de talent véritables en même temps qu’elle servit à faire pénétrer
dans la masse des conviclions plus solides sur la sanctification du
dimanche. Il surgit ainsi toute une littérature que M*' Henderson
s’empressa de faire connaître , quoiqu’â beaucoup de frais , en ré-,
panrtant au floin ses meilleures productions ; et il eut la joie de
constater les heureux fruits de son œuvre- C’est parcequ’il était luimême un homme d’afi'aires très-occupé qu’il savait apprécier pour
tous le bienfait de l’institution divine ; non pas que ses vues personnelles fussent à cet endroit rigides et sévères à l’excès : tous ceux
qui ont eu le plaisir de passer chez lui une journée de dimanche
savent qu’il n'en était rien. Son sabbat à lui c’était le sabbat primitif
baptisé en Christ. Il n’avait certes pas de tolérance pour l’opinion de
ceux qui font de ce jour un mélange hybride de piété et de mondanité; c’était chez lui, au contraire, une sage succession d’exercices de
piété et d’actes de sociabilité chrétienne , que ne cessaient d’illuminer
les rayons d’une sainte gaieté ; et c’est lâ , dans ces heures d’épanchement et de plus grand épanouissement, qu’il était loisible d’admirer les ressorts cachés de sa persévérante philanthropie et de sa
munificence dépourvue d’ostentation.
Losqu’eut lieu, en 1846, la création de l’Alliance évangélique,
M' Henderson , qui en avait été le promoteur , s’en montra aussi le
défenseur zélé et énergique. 11 saluait en elle une institution destinée
à manifester au monde l’unité essentielle et indestructible de tous les
vrais chrétiens , en même temps qu’à resserrer les liens de l’amour
fraternel, à réduire la ’diversité individuelle à de justes proportions,
k adoucir les aspérités , à mitiger l’èsprit de controverse. Sur ce large
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terrain, il contracta des amitiés solides avec grand nombre de diréliens
distingués dont plusieurs ont quitté ce monde avant lui, mais qu’il a
rejoints maintenant pour entrer avec eux dans les liens d’une amitié
éternelle. Personne plus que lui n’a prodigué autant de secours
pécuniaires pour subvenir aux frais de l’Alliance, et plus d’un déflcit
considérable a été effacé par lui d’un joyeux trait de plume.
Un des fruits les meilleurs de l’Alliance évangélique a été l’accroissement des bons rapports entre les différentes Eglises protestantes du
continent, et la vaste extension d'une fraternelle correspondance dont
cette société a été plusieurs années l’agent principal. Se jetant dans
cette voie avec son zèle chrétien et sa princière munificence, l’excellent homme devint, en peu d’années , l’appui le plus solide du protestantisme militant de l’Europe continentale. Dans de courtes et
fréquentes visites aux petites et fidèles communautés évangéliques ,
il répandait parmi leurs églises , leurs écoles , leurs orphelinats ,
plusieurs milliers de livres sterling, au grand soulagement et à la
joie de plus d’un comité particulier. Des étudiants français , belges ,
genevois, italiens étaient entretenus à ses frais à l’oratoire de Genève,
ou à l’une des facultés de théologie d’Irlande ou d’Ecosse ; et plus
d’un pasteur retiré dans un paisible village de France ou dans un
coin perdu des Alpes vit doubler son aisance par des dons généreux.
Mais il n’est pas de communauté religieuse sur le continent qui ait
captivé autant son intérêt, pendant ces dernières années, que l’Eglise
Vaudoise. Il l’aimait à cause de sa glorieuse histoire , à cause de sa
fidélité éprouvée, et il l’aimait surtout parcequ’il la regardait comme
un des grands instruments de l’évangélisation italienne. Il nous souvient d’avoir vu le vénérable philanthrope pleurer comme un enfant
à telle grande réunion, d’un caractère à la fois historique et religieux, qui rassemblait les Vaudois au pied de la Balsille. Leur école
de théologie à Florence est en grande partie un monument de sa
libéralité ; et à son départ de ce monde sa générosité lui suggérait
de leur laisser un legs de 125 mille francs.
Un des objets qui tout récemment encore attiraient son attention
était Iq fusion de toutes les Sociétés bibliques d’Ecosse. Il prévoyait
que, pût-elle s’accomplir, les frais diminueraient d’autant, les efforts
isolés recevraient une impulsion une et énergique, l’intérét du public
s’accroîtrait et les revenus aussi en proportion. Seul il se mit à
l’œuvre lorsque"'tout autre aurait échoué; et après une correspon-
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dance et des négociations poursuivies pendant des années , après
maint découragement, après mainte rebuffade , il eut le bonheur de
réaliser son rêve le plus caressé. La Société biblique nationale existe
dès lors comme un monument de lui.
Dans la sphère de sa propre Eglise (l’Eglise presbytérienne-unie),
sa libéralité était incessante et universelle. Presbytères et lieux de
culte ne se bâtissaient point sans lui ; pasteurs dans la gène, pasteurs
invalides, veuves de pasteurs étaient au fait de sa prompte générosité ;
l’extension de l’Eglise Unie en Angleterre , l’établissement et l’avancement des missions aux Indes et ailleurs ne rencontraient pas
seulement chez lui un vote approbateur, mais une coopération royale,
impériale, hendersonienne, qui ne faisait jamais mieux briller l’œil des
trésoriers de comités qu’aux réunions annuelles du mois de mai à
Londres. Là sa joyeuse présence montrait de combien son zèle dépassait le cercle des œuvres même de sa propre Eglise ; il n’était
probablement pas de demeure en Angleterre où l’on connût mieux
qu’à Park le mouvement et les opérations de toutes les grandes
sociétés de bienfaisance , et jusqu’aux noms de leurs stations et de
leurs missionnaires. Il y avait là, à côté de M‘‘ Henderson , une personne , une honorable dame, maintenant en deuil, qui lui suggérait
plus d’un acte de munificence , et en tout et partout ne cessait de
l’encourager. Et de combien d’aumônes invisibles ne fau(|jrait-il pas
parler, si l’on voulait se faire une juste idée de la puissance de la
• grâce de Dieu qui était en lui ? »
En jetant un coup d’œil rétrospectif sur la carrière de M' Henderson,
l’on est frappé de plus d’un trait qui la distingue.
1. 11 ne donnait jamais sous l’empire de la première impulsion ;
mais il prenait du temps pour examiner, pour péser les raisons déterminantes, pour rechercher, au besoin, des avis, persuadé que les
yeux de la charité doivent être ouverts aussi bien que ses mains.
2. Rien de plus remarquable que sa manière de combiner l’éco
comie avec la générosité. Le même homme qui. donnait de bon cœur
un millier de livres, n’aurait pas souffert qu’on lui eût fait tort d’un
denier; car le Seigneur, qui nourrit miraculeusement cinq mille
personnes, n'ordonna-t-il pas aux disciples de recueillir les restes, afin
de ne rien perdre? ’ .c
3. Ses résolutions une fois prises], il y persévérait jusqu’au bout
avec une ténacité singulière], à travers les bons et les mauvais rapports.
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s’inquiétant peu de légères imperfections, réelles ou imaginaires; ne
se lassant jamais , lors même que les objets de son intérêt perdaient
en nouveauté. Ainsi faisait-il à l’égard de ses amitiés ; circonspect
d’abord. fidèle et vrai ensuite comme Jonathan envers David.
4. Il ne dépensait pas son argent seulement ; il donnait aussi son
temps, son jugement exercé, sa mûre expérience. Tout le jour occupé
â Glasgow, et souvent occupé à diriger la marche d’œuvres de bienfaisance , il consacrait encore à sa vaste correspondance bien des
soirées à sa résidence de Park.
5. Toujours modeste au milieu de toute sa munificence , jamais il
ne se permettait une allusion à ses libéralités , et sa • main gauche
ne savait point ce que faisait sa droite ».
D’une piété entièrement exempte d’ostentation, il était souvent
debout bien avant le jour, et seul avec Dieu dans son cabinet. Toujours
prêt â s’entretenir de sujets religieux, toujours heureux d’y voir
amener la conversation , comme un oiseau aux ailes déployées il
avait en lui l’aptitude de s’élever en haut. Sa bienveillance était enracinée dans sa piété ; aussi au sein de sa retraite de Park et pendant
les trois dernières et paisibles années de sa vie, il ne perdit jamais
rien de sa sympathie pour les bonnes causes, et il ne cessa de suivre
avec un intérêt intense les progrès des missions, les luttes pour la
sanctification du dimanche , 1e rapprochement des Eglises pi'esbytériennes indépendantes, tandis que le fleuve de ses libéralités s’écoulait
à pleins bords et sans interruption jusqu’à l’heure du départ.
fEvangelical Christendom, June 1867-y
NOUVELLES LOCALES
Bit coitcour«« Le 21 août a eu lieu à La Tour, par devant la
Commission des écoles , un examen de concours pour donnér un
maître à l’école dite de la ville.
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Des cinq concurrents qui se présentèrent, trois n’étaient munis
d’aucun brevet ; un quatrième n’en avait point encore , mais ayant
été proposé par la V. Table pour l’obtenir, il est probable qu’elle le
lui accordera. Il a en outre l’espoir d’obtenir , l’année prochaine,
la patente du gouvernement à la condition de refaire une partie de
l’examen pour laquelle il a été renvoyé cette année.
Le cinquième seul était muni du brevet de capacité de la V. Table
et de la patente de premier degré du gouvernement, constatant,
outre le bon résultat d’examens obligatoires, l’heureuse issue de quelques examens facultatifs subis en même temps, ce qui lui donne le
pas sur ceux qui n’auraient pas subi de pareils examens. Il possédait
aussi les meilleures attestations des autorités d’où dépendaient les
écoles par lui jusqu’alors dirigées.
La Commission l’a toutefois obligé de subir l’examen avec les
autres comme si, pas plus qu’eux, il n’avait eu aucune des pièces
sus-mentionnées.
Il a d’abord protesté qu’il n’était pas obligé de faire l’examen avec
des concurrents non brévetés ; mais le président se récria et maintint,
avec sa vivacité ordinaire , le droit de la Commission ( par qui lui
est-il conféré ce droit? nous l’ignorons) de faire subir l’examen quand
même et il fallut bien s’y soumettre.
Deux des concurrents eurent le bon sens de se retirer; les trois
autres continuèrent la lutte jusqu’au bout.
Il dépendait donc des hasards d’un examen subi à la hâte, et, par
là même nécessairement superficiel, qu’un individu sans brevet,
peut-être pour ne Tavôir, pu obtenir, et dont on ne pouvait constater
à fond les capacités et les qualités, fût choisi pour diriger l’école depréférence à celui qui, non sans dépense et labeur, avait remporté
toutes les pièces exigées dans notre pays pour l’enseignement primaire ; et qui de plus avait déjà l’expérience de quelques années
d’enseignement dont ü.jfqqrnisspt ^ ^boqsi témoignages.
La chose aurait forfmen pu àirivér’si rexànien, au lieu d’être assez
varié pour manifester quelque peu les connaissances et les aptitudes
des postulants, avait été restreint à quelques points que la Commission
aurait pu tenir comme essentiels et suffisants , ainsi que cela s’est
déjài pratiqué d’autres fdis« j; i, jù" I‘", " f« l
. Outeei qu’un tel procédé est antiilégal, puisque la loi veut que Tin*
dividu patenté soit absolument préféré'à célûi qui nè l’est pas ; il
15
— 127 —
nous paraît être peu sage de la part d’une Commission qui doit avoir
du respect pour l’Autorité, puisqu’elle est, à bon droit, si jalouse de
ia sienne , et qui désire certainement avoir pour les écoles qu’elle
administre les meilleurs maîtres possibles.
Il est peu sage de sa part de se croire plus clairvoyante que les
autorités qui ont délivré les brevets et les patentes. Car ces autorités
prononcent en suite d’un examen très-circonstancié et approfondi ,
auquel sont consacrées, non des heures, mais des journées ; elles sont
aussi édifiées sur la conduite et l’application des postulants par les
informations les plus précises. Mais la Commission des écoles pense
prononcer avec plus de sûreté d’après un examen presque improvisé
et nécessairement très-restreint, puisqu’elle le fait subir en quelques
heures.
Evidemment c’est dire à la Table et au gouvernement : vos diplômes
nous les considérons comme nuis et non avenus ; nous en faisons si
peu de cas, que nous obligeons ceux qui en sont munis à subir l’examen avec les premiers qui pourront se présenter, eussent-ils même
été renvoyés par vous comme incapables.
C’est dire à ceux qui travaillent à former de bons instituteurs dont
l’aptitude est constatée par le brevet: vous faites une œuvre très-inutile;
ce brevet qui coûte tant de sueurs â ces pauvres jeunes gens , c’est
un morceau de papier sans valeur dont on peut fort bien se passer.
C’est surtout dire aux jeunes gens : vous êtes stupides de reste que
d’aller gémir des années sur les bancs de l’école dans l’espoir d’obtenir un brevet, et d’aller ensuite livrer le reste de vos épargnes et
passer une sem'aine d’angoisses pour avoir la patente du gouvernement.
Tout cela est en pure perte.
Voyez en effet : se présente-t-il une école à pourvoir, fût-ce même
une école de quartier, si vous la voulez , vous serez obligés de concourir avec tous ceux qui se présenteront ; la Commission fixera le
programme comme bon lui semblera, et avec vos brevets vous courrez
risque de vous voir préférer un homme qui n’en aura point. Tandis
que vous mêmes , sans aucun brevet, vous pourrez vous présenter à
tout concours. Payez seulement d’audace et vous avez chance de
réussite.
La Commission dira sans doute qu’elle fait subir d’abord l’examen,
se réservant de statuer ensuite relativement au brevet. Nous réjpondons
que si l’examen ne doit pas être la base de sa décision, il est inutile
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de le faire subir , et si c’est d’après l’examen qu’elle prononce , le
brevet ne peut plus entrer en ligne de compte.
Jeunes gens qui travaillez consciencieusement en vue d’obtenir un
brevet qui vous ouvre les portes de l’enseignement, espérez que les
Commissions des écoles ne seront pas toutes de l’avis de celle de
La Tour.
Installation. Le 4 août a eu lieu l’installation dans la paroisse
de Massel de M' le ministre L. Monastier, régulièrement élu quelques
semaines auparavant par l’assemblée électorale. Mf le Prof' Rivoir a
présidé â la cérémonie.
Comba llibaiid. Le 15 août a eu lieu dans cette localité le
meeting annuel auquel la population vaudoise ne cesse d’accourir
avec empressement. Le compte-rendu que nous avions préparé ne
pouvant trouver place dans ce numéro , nous sommes obligés de le
renvoyer au mois prochain. Il ne perdra que peu de son actualité,
car il renferme des suggestions et des conseils qui auront leur valeur
en tout temps.
'Pignerol, J: GhmStokb Impr
& IftHisa Gérant.
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'JM
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