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9e année
Juillet 1867.
7.
L'ECHO DES VALLEES
(NOUVELLE SÉRIE)—
Que toutes les choses qui sont véritables......... occupent
vos pensées — ( Philippietis., IV. 8. )
SOMMAIRE — Les écoles de l'Evangélisation — Correspondance. — Vallées
vaudoises. — Mélanges. — Nécrologie.
LES ÉCOLES DE L’EVANGELISATION
Dans le courant de l’année dernière VEcho des Vallées a en l’occasion de donner à ses lecteurs un aperçu de l’état de l’instruction
publique au sein des anciennes paroisses de l’Eglise vaudoise. Il y a
d’autres écoles appartenant elles anssi à notre Eglise et méritant à
ce titre notre plus vif intérêt, desquelles l’aperçu en question ne s’occupait pas ; ce sont les nombreuses écoles que nous avons la joie de
voir surgir au sein de nus stations d’évangélisation. Voici à leur
sujet quelques détails extraits du Rapport de la Commission au dernier
Synode et qui recueillis, sous un seul chef, serviront peut-être à faire
connaître l’importance de cette branche de notre œuvre en Italie.
I.
Voici d’abord, pour les amateurs de statistique , quelques chiffres
instructifs. Nous avons dans nos deux 22 stations italiennes (Nice et
Marseille, qui sont en France demeurant en dehors) 35 écoles dirigées
par 16 maîtres et 19 maîtresses et fréquentées par un maximum de
1227 enfants des deux sexes. Il y a eu de plus pendant l’hiver 8
écoles du soir qui ont réuni 288 adultes et 24 écoles du dimanche
suivies par 754 enfants.
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— 98 —
Ces chiffres comparés à ceux de l’année précédente marquent un
progrès très-réjouissant. Six nouvelles écoles ont été ouvertes et par
conséquent le personnel enseignant compte six membres de plus.
Le nombre des élèves des écoles diurnes n’était l’année dernière que
de 796 ce qui donne en faveur de cette année un accroissement de
431. Les écoles du dimanche en augmentant en nombre ont gagné
200 élèves. Les écoles du soir, dont le rapport précédent ne parle
presque pas, ont sans doute progressé elles aussi dans une proportion
analogue.
11 serait intéressant de connaître d’une manière exacte le nombre
d’enfants catholiques romains qui fréquentent nos écoles Le tableau
qui termine le rapport ne le fait pas ressortir, et en parcourant le
rapport lui-même, il est facile de voir que nos diverses stations sont
très-inégalement partagées à cet égard. Dans telle école les catholiques
romains sont la très-grande majorité ; dans telle autre ils forment
encore une minorité très-respectable; dans telle autre enfin l’on n’en
rencontre que très-peu ou point du tout. Nous ne pensons pas courir
le risque d’exagération en disant qu’un tiers pour le moins des 1227
enfants qui se sont assis sur les bancs de nos écoles, peut-être même
la moitié , appartiennent à cette classe. Dans les écoles du soir la
proportion est plus forte encore. Et quoique les écoles du dimanche
considérées comme services religieux soient à ce titre particulièrement
suspectes à des parents catholiques , elles n’ en sont pas moins fréquentées en bien des endroits par un certain nombre des enfants de
cette religion qui suivent nos écoles sur semaine.
II.
Si du général nous descendons au particulier, afin de nous rendre
compte de qui se fait dans chacune de nos stations, il nous faudra
les diviser en trois groupes.
Le premier groupe se composera de toutes les stations qui possèdent
ce que nous serions tenté d’appeler un système complet d’écoles, c’està-dire , au moins, une école enfantine , comme premier degré, avec
une école de garçons et une école de filles comtne secoM degré. Il
est vrai que ces deux degrés sont à peine suffisants; l’église de Florence qui doit être classée dans ce groupe se plaint dans le rapport
de devoir se séparer trop tôt des élèves de ses écoles en les aban-
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donnant à des influences opposées , et cela parceque ses écoles ne
peuvent encore s’élever au dessus de l’enseignement élémentaire. Cette
plainte, nous n’en doutons pas, aura trouvé de l’écho dans bien d'autres
stations qui sont dans le même cas. D’un autre côté il ne serait pas
possible que chaque station fût pourvue d’écoles supérieures. Ne pourrait-on pas remédier en grande partie au mal et rendre nos écoles
beaucoup plus utiles et plus prospères en nous défaisaut de la ridicule coutume que nous avons , je ne sais vraiment trop pourquoi,
acceptée comme un progrès, qui consiste à parquer dans des écoles
différentes , comme si nous avions les mœurs de la Turquie, les petits
garçons et les petites filles , nous astreignant ainsi à une double dépense pour n’obtenir que des résultats inférieurs? .Vu lieu de deux
écoles égales, divisées en trois, souvent en quatre classes différentes
au grand embarras du maître ou de la maîtresse, et au détriment de
l’instruction , ne vaudrait-il pas infiniment mieux avoir deux écoles
divisées chacune seulement en deux classes et se continuant l’une
l’autre ? Le gain que feraient à ce changement les maîtres et les
élèves serait trop évident pour qu’il soit nécessaire de s’y arrêter.
Hélas ! il n’y a encore que sept stations que Ton puisse compter
appartenant à ce premier groupe : Turin, Gênes, Livourne, Rio Marina,
Naples et Paierme sont les seules qui soient favorisées au point de
posséder cette gradation si nécessaire au progrès de Tinslruclion.
Aussi quel en est le résultat? C’est que là surtout. Ton poun’ail presque
dire là seulement, noirs avons des écoles véritablement prospères. Voici
des chiffres qui parleront plus haut que tout: Turin a dans ses
écoles 181 élèves. Gènes 72, Florence 117, Livourne 148, Rio Marina,
quoique très-petite station, 64, Naples 22i et Paierme 173 (sans
compter les écoles sérales ) , en tout 969 élèves, c’est-à-dire plus des
3;4 du nombre total pour toutes les stations. Chacune des 21 écoles
comprises dans ce premier groupe compte une moyenne de 46 enfants.
Le second groupe se compose des stations qui n’ont qu’une école
ou des écoles d’un même degré. Pignerol, Aoste, Courmayeur, Monte
Castello , Milan , Brescia , Còme , Guastalla, Favale , S. Pier d’Arena ,
Pise et Bordighera, 12 stations' en tout, se trouvent dans ce cas.
Il n’est pas nécessaire de faire ressortir toutes les difficultés que doit
nécessairement rencointrer dails ^’accomplissement dé sa tâche et le
peu de siiccés que peut obtenir un maître ou une maîtresse obligés
d’instruire en même temps des enfants dont Tàge peut varier entre
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5 et 14 ans. Evidemment des écoles aussi mal réparties relativement
au développement des élèves ne sauraient donner les mêmes résultats
que les précédentes. Il ne faut donc pas s’étonner si les quinze écoles
de ce groupe n’ont à se partager que 258 élèves et ne peuvent en
avoir plus de 17 ou 13 chacune tandis que dans le premier groupe
nous avons une moyenne de 46 élèves par école. Ces chiffres sont
très-significatifs et montrent la nécessité pour chaque station d’arriver
le plus tôt possible au point de pouvoir au moins distribuer ses
élèves sous deux maîtres différents, dont l’un continue la tâche de
l’autre. Pour plusieurs stations peut-être cela ne sera pas faisable de
longtemps ; des difficultés locales, souvent même l’exiguité de la station
s’y opposent. Il nous semble cependant que toutes doivent tendre là.
Lors même que la station serait petite et ne pourrait pas fournir
un fort contingent, des écoles bien dirigées ne manqueraient jamais
d’être fréquentées par des catholiques. Un fait le prouve ; C’est dans
les écoles du premier groupe que se trouve la plus forte proportion
d’enfants de cette communion. Autant que nous avons pu nous en
assurer d’après le rapport même il doit y en avoir plus de la moitié,
Les écoles du second groupe par contre n’en comptent presque pas.
Le troisième growpe enfin se compose des stations qui n’ont point
d’écoles encore. Venise doit naturellement être comprise dans ce
nombre; Ivrée ne pourrait que difficilement réunir tous les jours les
32 enfants de parents évangéliques dispersés dans une douzaine de
villages quelquefois très-écartés les uns des autres. Mais pourquoi
Pielra Marazzi n’aurait-il pas un maître ou une maîtresse pour ses.
32 enfants évangéliques? ou si peut-être la raison de la dépense les
arrête, pourquoi les plus grands d’entr’eux au moins ne profiteraient-ils
pas de l’école de Monte Castello qui n’est qu’à vingt minutes de
distance ? Les enfants de nos montagnes se rendent de bien plus loin
à leurs écoles, et souvent à travers une neige bien plus épaisse que
les bords du Tanaro n’en ont jamais vu. Lucques aussi avec ses 39
enfants dont 23 appartenant à des familles converties à l’Evangile et 14
à des protestants de naissance, aurait besoin d’écoles.
k ces exigences l’on aurait sans doute bien des difficultés à objecter.
Mais lorsque tout aura été dit, la question n’aura pas été résolue
encore. Est-il prudent de laisser sans instruction élémentaire ou exposés à ne recevoir que l’instruction que donnent les prêtres un si
grand nombre d’enfants de nos coréligionnaires? Ne pourrail-on pas
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faire pour ceux d’enlr’aux qui se trouvent isolés dans de petits
villages, quelque chose de semblable à ce que nous avons dans nos
écoles dites de quartiers ou de hameau?
III.
Les chiffres en dépit de leur précision apparente ne satisfont pas
toujours pleinement notre curiosité. Après tout ce qui a été dit plus
haut, l’on désirerait encore pénétrer plus avant dans le sujet, entrer,
pour ainsi dire, dans ces écoles , s’enquérir de la valeur de l’enseignement qui y est donné, et s’assurer surtout si elles sont supérieures
aux écoles municipales qui les entourent ; sans cette supériorité l’on
sent bien que comme moyen d’évangélisation elles n'ont guère de chance
de succès, à peine de raison d’être.
Voilà des questions auxquelles le rapport ne touche pas, auxquelles
il ne pouvait pas toucher peut-être. Elle ne sont pas cependant sans
réponse. D’après les chiffres donnés plus haut il est évident que par
la faute des circostances, et non par celles des maîtres et des maîtresses,
toutes nos écoles ne se trouvent pas au même niveau. Celles du
premier groupe , beaucoup mieux partagées sous tous les rapports ,
sont aussi évidemment supérieures à celles du second.
Nous pouvons être assurés d’une chose , c’est que nos maîtres
d’école, et nos maîtresses d’ecole, ceux d’entr’eux surtout qui sortent
de notre Ecole normale et de notre Ecole supérieure de La Tour,
malgré tout ce qui leur manque à bien des égards, et surtout sous
le rapport de la langue, sont cependant supérieurs à la généralité des
maîtres des écoles municipales et gouvernementales qui les entourent,
soit pour les connaissances et le don de l’enseignement, soit surtout
pour l’esprit dans lequel ils s’acquittent de leur noble tâche et le but
bien plus élevé qu’ils ont en vue. La grande preuve d’ailleurs de la
supériorité de nos écoles nous l’avons donnée déjà ; ce sont ces centaines d’enfants catholiques qui s’y pressent et qui seraient bien plus
nombreux encore si nous pouvions faire droit â toutes les demandes.
Ce n’est pas seulement la proximité ou la convenance qui les attirent:
pour qu’ils viennent en si grand nombre, il faut apparemment qu’ils
en reconnaissent la supériorité.
Mais malheur à nous , si nous nous reposons sur cette supériorité
qui nous est acquise , il est vrai, mais que nos efforts seuls peuvent
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maintenir. L’on fait beaucoup déjà en Italie pour l’avancement de
rinstriiction populaire et l’on fera toujours davantage. Le gouvernement, les communes {dans les villes surtout) le clergé catholique
lui-même , qui, voyant le désir général d’instruction , multiplie les
écoles pour conserver son influence, les particuliers, tous s’en mêlent.
Le peuple , de son côté , se montre vraiment désireux de donner à
ses enfants l’instruction dont il a été privé lui-même. L’on commence
à préférer un maître d’école à une capitaine , peut-être même à un
général, une salle d’asile à une caserne , une école du soir à une
frégate cuirassée. Avec de pareils éléments nos écoles doivent s’attendre à une concurrence formidable et se préparer à la soutenir.
Qn mot encore. Les écoles de nos stations doivent être avant tout
des instruments d’évangélisation ; que nos évangélistes et nos maîtres
d’école )ie le perdent pas de vue. Convenablement dirigées, elles
peuvent être en effet de puissants moyens d’avancer le règne de
Dieu. Si toutefois l’on nous faisait cette question : des milliers
d’enfants catholiques romains qui ont déjà passé à travers vos écoles
combien en est-il resté dans vos églises? Nous ne pourrions peutêtre pas on indiquer un grand nombre. Mais est-ce de cette manière
([ue nous devons constater le résultat de nos efforts ? Sans doute
l'influence que le maître peut exercer sur des enfants en bas âge et
d’une mobilité extrême n’est pas bien grande ; elle est de plus contrebalancée et souvent complètement détruite par des influences contraires rencontrées en dehors de l’école, au sein même de la famille.
Mais oubliées peut-être pour un temps , les leçons salutaires reçues
dans l’enfance ne sont pas perdues pour toujours. Elles exerceront,
quoi qu’on fasse, leur empire sur la vie tout entière; on s’en souviendra aux jours mauvais , elles consoleront dans la douleur ; bien
tard peut-être elles conduiront à la croix de Christ plus d’un pécheur
repentant. « Instruis le jeune enfant à l’entrée de sa voie ; lors même
» qu’il sera devenu vieux, il ne s’en éloignera point« ( l’rov. XXII 6).
A nous de remplir avec fidélité la tâche que Dieu nous a donnée , à
Lui de bénir nos efforts quand et comme II trouvera bon.
I !
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- 103 —
CORRESPONDANCE
L’intérêt qui s’attache à la réorganisation de notre instruction
secondaire, et en pariiculièr du collège, nous vaut une troisième
lettre sur la question. La voici, à part quelques retranchements,
auxquels l’auteur a bien voulu consentir :
Prarustin, juillet 1867.
....Veuillez me faire l’honneur de publier ces reflexions par lesquelles
je ne fais que continuer et compléter avec de légères modifications
les idées émises dans le numéro d’avril par un homme que nous
vénérons à bon droit. On a écrit des volumes sur la question de
l’enseignement secondaire et classique ; mais votre honorable correspondant , converti par l’expérience et guidé par son bon sens, a
exprimé en peu de mots la quintessence des arguments que l’on peut
faire valoir en faveur de cette maxime , si vraie en pédagogie, qu’il
faut aller du connu à l’inconnu , du facile au difficile et par conséquent n’entamer le grec et le latin qu’avec des élèves déjà formés à
la connaissance de la grammaire et doués d'un certain jugement afin
de les initier d’une manière plus vive, plus rapide, plus intéressante
et par conséquent plus utile à l’étude de l’antiquité. Je ne m’arrêterai donc pas à ressasser des arguments qui pour les personnes
intelligentes ont déjà perdu l’attrait de la nouveauté et l’odeur d’hérésie,
mais j’entre directement en matière et vous communique un plan
qui dormait depuis tantôt sept ans dans mon portefeuille.
Ce plan consisterait à organiser les études qui se font au collège
et à l’Ecole normale de telle sorte que les élèves puissent s’y préparer non seulement pour la carrière d’instituteur ou pour entrer à
l’université ; mais aussi pour entrer dans les Instituts techniques ou
môme directement dans les carrières industrielles et commerciales ,
et que dans tous les cas ils ne perdent pas leur temps s’ils ne
peuvent séjourner que deux ou trois ans dans nos établissements.
Dans mon idée , nous aurions ; 1“ L’école préparatoire de la durée
de trois ans en deux classes ; 2“ Le collège proprement dit, de la durée
de six ans , divisés en trois classes ; 3o L’Ecole normale et technique
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d’une seule classe do deux ou trois ans avec deux catégories d’élèves
qui auraient en commun la plupart des enseignements.
En thèse générale et pour atteindre le but indiqué, il faudrait que
le plan d’étude embrassât, en les distribuant avec une gradation
convenable et en les considérant comme le minimum à parcourir,
toutes tes matières que l’on enseigne dans les gymnases, les lycées,
les écoles téchniques et les écoles normales de l’état.
On enseignerait à VEcole préparatoire les langues française et italienne,
l’arithmétique, la géographie, l’histoire sainte (ancien testament), le
dessin et la calligraphie , sans compter les exercices de chant et de
gymnastique. La première année formerait une classe , et les deux
suivantes l’autre classe.
Au College proprement dit, on continuerait, comme par le passé, à
donner aux élèves les cours qui constituent la culture classique ,
scientifique, littéraire et philosophique. La première année ou troisième
classe répondrait à la classe la plus avancée du collège inférieur
actuel ; les seconde et troisième années formeraient la seconde classe et
répondraient à la rhétorique ; enfin les trois dernières années ou la
première classe répondraient à la philosophie
A l’Ecole normale et technique l’enseignement commun aux élèves des
deux divisions aurait pour base et comme minimum les programmes
du gouvernement pour ce qui concerne l’italien, l’histoire, la géographie , les mathématiques , les sciences physiques et naturelles , le
dessin, le chant et la gymnastique ; le français et la religion seraient
étudiés en commun avec un égal profit. La séparation ou , comme
on dit, la bifurcation n’aurait lieu qu’en tant que les élèves qui se
destinent à l’enseignement suivraient un cours de pédagogie, tandis
que les autres étudieraient une troisième langue moderne, telle que
l’anglais ou l’allemand , le cours élémentaire de morale civique
prescrit par le gouvernement et tel autre cours qu’il serait possible
de leur faire donner dans le but d’en faire des aspirants aux emplois
publics ou aux carrières privées.
Si vous me demandez maintenant mon avis sur la manière dont
il faudrait répartir tous ces enseignements entre les difiérents professeurs ; je répondrai que la chose est faisable avec un personnel de
dix enseignants qui auraient la bonne envie de se prêter un mutuel
secours , selon leurs aptitudes et les besoins de notre établissement.
Deux professeurs et un instituteur, attachés à Vécole préparatoire s’en
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— 105
partageraient tout l’enseignement ( excepté l’italien dans la classe
plus avancée) et disposeraient encore de quelques heures en faveur
de l'école normale et technique, surtout pour des leçons de dessin , de
calligraphie, de chant, d’instruction civique, d’anglais ou d’allemand.
Un professeur de langue et littérature italienne serait chargé d’enseigner
cette partie soit dans la classe plus avancée de l’école préparatoire ,
soit au collège , soit à l’Ecole normale et tèchnique. 11 aurait un minimum d’environ vingt leçons à donner.
Un professeur de langue et littérature grecque et un professeur de langue
latine consacreraient chacun 17 ou 18 heures à l’enseignement de
leur branche respective dans les trois classes qui composent le
collège.
Le professeur de philosophie et de littérature française qui n’aurait selon
moi qu’une quinzaine de leçons à donner au collège pourrait prêter
sa collaboration à l’école normale et technique pour telle partie qui
lui conviendrait, par exemple un cours élémintaire de logique et de
psychologie. J’en dis autant du professeur d’histoire et de religion qui
n’aurait au collège qu’une quinzaine de leçons. Le professeur de
sciences physiques et mathématiques serait en principe chargé de cet
enseignement dans les trois classes du collège , et devrait en considération du temps que les élèves seraient obligés d’accorder dorénavant à l’étude des langues anciennes, distribuer ses matières d’après
un plan qui lui permît de développer son programme dans quinze
leçons par semaine.
Le professeur de pédagogie enfin , chargé de la direction de l’école
normale et technique , aurait probablement encore une douzaine de
leçons à donner en dehors du cours de pédagogie.
Telle est la réorganisation que je proposerais pour celle belle et
utile institution de notre église que nous appelons avec un certain
orgueil noire collège.
Elle ne porte aucune atteinte au but primitif que se proposaient
ses généreux fondateurs; elle en facilite plutôt la réalisation en
laissant aux élèves le temps de réfléchir sur leurs aptitudes et de
n’entamer qu’avec connaissance de cause les éludes classiques dont
le terme ordinaire est l’école de théologie. Mon plan ne fait que donner
satisfaction à un besoin légitime que nos jeunes gens commencent à
satisfaire ailleurs , que l’on satisfera malgré nous et à La Tour même et
qu’il nous importe de ne pas laisser dégénérer en pur mercantilisme
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— lOG —
ou utilitarisme. Mon plan se rattache autant que possible à ce qui
existe , ne dérange que médiocrement les habitudes prises , respecte
dans la mesure de la plus stricte équité les positions et les droits
acquis ; mais dût-il coûter quelques sacrifices personnels et pécuniaires il faudrait s’y résigner et ne plus ajourner à la fin du courant
siècle un progrès qui se réalise partout. Salus juventutis suprema lex
esta. Je ne partage pas l’illusion de votre honorable correspondant au
sujet d’une collecte à faire au sein de notre population pour trouver
les honoraires ni d’un , ni de deux professeurs. Le temps viendra,
mais il n’est pas encore venu , où les Vaudois feront des sacrifices
réguliers en leur propre faveur pour le culte, l’instruction et la bienfaisance.
Je crois plutôt, et le minerval que l’on paye à l’école supérieure
des demoiselles en fait foi , je crois que , si au lieu de payer les
écoliers qui daignent venir au collège on exigeait une rétribution
de ceux-lâ surtout qui appartiennent aux familles aisées, et qui se
vouent à une carrière lucrative , [on respecterait du même coup la
science et l’équité.
Deux mots encore sur l’établissement du Pomaret. Comme son
organisation se règle forcément sur celle de La Tour, si l’on décidait
de ne maintenir que les trois années qui correspondent à ce que
j’ai nommé l'Ecole préparatoire, il est évident que le personnel enseignant actuel suffirait; mais s’il devait donner aussi l’enseignement
de la première année du collège, il est évident qu’il faudrait y attacher encore un troisième professeur essentiellement chargé de l’enseignement du grec et du latin.
Je pense enfin que si la Table faisait au Ministère un exposé de
nos besoins , le gouvernement ne refuserait pas son concours à une
œuvre d’utilité publique comme celle que je propose et que je crois
aussi réalisable que nécessaire.
Tout à vous
Jean Jacques Parander Pasteur.
Nous ne croyons pas devoir, aujourd’hui môme , exprimer notre
opinion ni sur l’ensemble de cette lettre ni sur l’ensemble de la question à laquelle depuis le numero d’avril, l'Echo a ouvert ses colonnes.
Nous attendons pour cela de nouvelles communications, â commence^
par celles que pourra nous adresser la Commission synodale chargée de
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— 107 —
préparer le règlement du collège. Les bases de son travail , tout an
moins, seront portées à la connaissance de notre public; il sera temps
alors d’examiner nous mêmes l’importante question , que nous sommes
heureux de voir ainsi portée à l’ordre du jour par nos divers correspondants.
VALLÉES VAÜDOISES.
•-es promotions annuelles pour l'école supérieure des demoiselles , pour l’école normale et pour le collège, se sont faites à La
Tour le 12 juillet; celles de l’école latine du Pomaret avaient eu lieu
la veille. — Depuis une vingtaine de jours 177 élèves environ, dont
GO jeunes filles, 27 élèves régents et 90 collégiens, en comptant ceux
du Pomaret, n’avaient fait que passer d’un examen à un autre examen
et il tardait à chacun dç voir arriver le jour où finissent les fatigues
de l’année.
I-'école supérieure des demoiselles doit venir en première
ligne. La verdure et les fleurs qui ornaient le pupitre et les parois,
la présence de plusieurs dames ainsi que de hon nombre de messieurs,
avaient complètement enlevé à la salle l’aspect sévère que lui donnaient auparavant les examens. Après la prière et la lecture de la
parole de Dieu, le Modérateur-adjoint, M"' Et. Malan, donna connaissance aux élèves du chiffre obtenu par chacune d’elles; et M'’ le
Modérateur Lantaret , heureux de voir que sur 60 élèves, 37 avaient
atteint ou dépasse le chiffre de 80 centièmes , leur en exprima son
entière satisfaction. Précisément pareeque, eu égard à la pauvreté de
notre Eglise , c’est presque un luxe pour elle que d’avoir un établissement comme celui-là, l’on se sent d’autant plus à l’aise quand on
y voit le temps bien employé. — M' le Modérateur profite de ce
résultat réjouissant pour témoigner la reconnaissance de la Table soit
aux personnes qui ont pu y contribuer par leur travail , soit particulièrement à la directrice M‘*® Emma Ducloux, et à la sous-directrice
M“® A. Nicolini, qui ont e.u à supporter le plus gros du fardeau.
— Mieux placés que lui, nous pouvons accorder sa bonne part d’éloges à la Table elle>même pour la surveillance affectueuse et assidue
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1Ü8 —
qu’elle n’a cessé d’exercer sur l’écoje par le moyen de son Modérateuradjoint, M'’ le prof'- Etienne Malan. — Les prix distribués, et M" le
prof.'- Nicolini ayant encore adressé aux jeunes filles quelques bonnes
paroles sur le meilleur parti à tirer des vacances, M" le pasteur B.
Malau termina par la prière cette petite fête qui avait été aussi agréable pour les assistants qu’elle dut l’être pour les élèves. — Pourquoi
donc faut-il que nous ayons à parler de changements quand les
choses vont si bien ? Il n’est que trop vrai cependant que M”® Ducloux
ne pourra pas reprendre l’année prochaine la place qu’elle a si avantageusement occupée jusqu’ici. Souhaitons-lui de pouvoir longtemps
conserver de son séjour dans nos Vallées le souvenir que nous garderons d'elle et des soins qu’elle a donnés à nos jeunes filles.
Ecole norniole. N ayant pas sous les yeux les chiffres assignés
à chacun des élèves , nous sommes obligés de nous en tenir aux
résultats généraux que voici : — Les leçons des trois classes ont été
suivies une grande partie de l’année par vingt neuf jeunes gens, dont
vingt sept sont arrivés jusqu’à l’époque des examens. De ce nombre
on en compte douze qui ont obtenu la proipotion, — plus d’un avec
80 ou même 84 centièmes : ce qui n’était pas facile avec vingt sujets
d'examen. — Sept ou huit autres pourront encore être promus en
automne , s’ils subissent à cette époque d’une manière satisfaisante
les examens non réussis aux dernières épreuves. — Le directeur de
l’école, M® Charbonnier, fait connaître en outre que deux élèves-régents
ont droit au brevet de la Table pour être instituteurs dans notre
Eglise , et il rend à plusieurs le témoignage d’avoir consciencieusement travaillé.
Ee collëiee de ■>» Tour a été fréquenté cette année par 70
élèves , nombre dont il faut retrancher tout d’abord 3 externes , et
ensuite sept écoliers qui n’ont pu se présenter à aucun examen, soit
pour avoir été malades , soit pour n’avoir pas suffisamment travaillé
pendant l’année. — Sur les 22 étudiants des quatre années du collège supérieur ( rhétorique et philosophie ) deux sont échoués, cinq
ont été renvoyés à l’automne pour un ou deux examens à refaire ,
et des quinze qui ont été promus immédiatement on en compte 9
qui l’ont été avec des chiffres allant de 80 á 90 centièmes , ce qui
veut dire avec satisfaction complète. — Les 38 élèves qui se sont
présentés aux examens dans les quatre années du collège inférieur
ou préparatoire, donnent un écolier échoué, sept renvoyés pour un
13
t09 —
ou deux examens; et sur les trente qui ont obtenu la promotion le
joirr même, dixhuit ont atteint ou dépassé les 80 centièmes.
Dans les trois classes du Pomaret, qui répondent aux trois
premières années du collège de La Tour, un élève est échoué, deux
ont eu un examen à refaire, et des dix-sept qui ont été promus sur
le champ, huit ont obtenu de 80 à 92 centièmes.
En résumé , ce serait donc pour le collège tout entier , y compris
l’école du Pomaret, 90 élèves, dont 80 examinés ; et sur ces derniers
4 échoués, 14 renvoyés pour une ou deux branches, et soixante-deux
promus dès le 12 juillet, savoir 27 avec moins de 80 , et 35 avec 80
centièmes et au delà. Il est juste d’observer en outre que même en
comptant les élèves admis à refaire un ou deux examens, il n’y en a
eu que six qui soient restés au dessous de 70 centièmes.
Les promotions mêmes ont eu lieu dans le temple de La Tour, où
se trouvèrent réunis vers les quatre heures avec les élèves du collège et de l’école normale , leurs professeurs et quelques amis ou
parents toujours plus clair-semés. La parole fut d’abord accordée à
M’’ le proP Antoine Monastier, qui lut sur l’éducation chrétienne, son
importance, son but, son esprit, ses moyens, un discours tout semé
de pensées aussi justes qu’heureusement rendues. — Ce fut ensuite
Lantaret qui en sa qualité de directeur du collège se leva pour
manifester à l’assistance l’impression que lui ont laissé les examens
de 1867. — Passant par dessus les élèves qui sont définitivement
échoués pour ne regarder qu’à ceux qui ont été renvoyés à l’automne
ou qui n’ont pu arriver aux 80 centièmes, il s’étonne qu’un si grand
nombre se soient résignés à se faire les représentants de la médiocrité. N’avoir ni pauvreté ni richesses , c’est une condition fort désirable dans le sens que nous savons ; mais dans les études rien n’est
plus dangereux : et plusieurs, pour n’avoir pas visé plus haut que la
médiocrité, sont tombés au dessous.
Des examens de l’Ecole de ihëolosie de Elorence nous ne
savons rien d’assez précis pour en donner aujourd’hui connaissance
à nos lecteurs , si ce n’est que quatre étudiants ont à peu-près terminé , et que déjà sans même avoir pu prendre le repos qu’on leur
eût souhaité, ils sont à l’œuvre qui à Brescia, qui à' Milan , qui à
Turin ou aux environs.
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— 110 —
IVIELAIVOES
Mort «le l’empereur du Mexique. Il y a plus qu'un enseignement politique dans la courte et lugubre histoire de cet empereur
Maximilien qui vient de terminer si misérablement ses jours dans le
pays môme où il avait résolu de ramener un peu d’ordre. — Après
avoir, le 10 avril 1S64 , accepté des mains des cléricaux du Mexique
la couronne impériale qu’ils étaient venus lui offrir, Ferdinand Maximilien d’Autriche avait quitté Trieste le 16 du même mois pour
aller à Rome implorer du pape une bénédiction que les grands et
les petits feraient bien de chercher plus haut. Elle était toute prête ,
et c’est sous le poids de la bénédiction papale qu’il débarqua le 20
mai à Vera-Cruz, pour faire le 12 juin 1864 son entrée solennelle à
Mexico.
Vainement il s’efforça de répondre à l’attente des cléricaux, vainement il signa pour leur complaire le sanglant décret du 5 octobre
1865, si fatal au pauvre prêtre Hernandès et plus tard à lui-même.
Maximilien fut trop honnête, paraît-il, pour contenter entièrement le
clergé. Aussi abandonné de tous, abattu par les nouvelles toujours
plus décourageantes qu’il recevait de Miramar sur le compte de l’impératrice Charlotte qui, depuis sa dernière visite à Rome, n’a plus
jamais recouvré la raison, l’infortuné monarque avait déjà repris la
roule d'Orizaba et de Vera-Cruz , décidé à quitter le Mexique, lorsqu’un
rév'' père Fisher vint au mois d’avril dernier détourner sa résolution
en lui faisant au nom des cléricaux de nouvelles promesses. Séduit
une fôis encore par l’habile confesseur, Maximilien consentit à revenir
sur ses pas et à reprendre la défense de l’empire , jusqu’à ce que,
vendu par un traître, il tomba finalement au pouvoir de Juarez , et
fut avec plusieurs de ses gens, impitoyablement passé par leâ armés
à Queretaro le 19 juin 1867, trois ans et vingt jours après sou arrivée
à Vera-Cruz. — Telle a été la fin lamentable de cet homme si jeuüe
encore (35 ans) qui, béni par le pape, appuyé sur les Cléricaux,
abandonné par les cléricaux, puis de nouveau retenu par les clérieaux ^ dépensa, ou plutôt perdit, à leur service des forces et une
vie qu’on eût aimé voir réservées pour un Maître meilleur,
lie centenaire de la mort de Pierre. Les papes ayant,
quoique sans preuves, décidé que l’apôtre S* Pierre n’a pu être mis
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à mort qu’à Rome, et juste le 29 juin de l’an 67 après J. C., c’est
sur l’année courante que devait tomber le dixhuitcentième anniversaire , ou si l’on aime mieux le dixhuitième centenaire de cet événement. — On ne pouvait à Rome laisser passer une pareille occasion
sans en retirer quelque profit. Dès le printemps le pape fit donc
savoir à toute l’armée de ses prêtres qu’ils eussent à se trouver à ses
pieds pour le 29 juin 1867. Sa voix fut si bien entendue que malgré
les chaleurs de l’été et certains bruits de choléra, la population de
Rome se vit promptement accrue de cent mille dévôts, au nombre
desquels on compte 10,000 prêtres et 496 prélats, et cela juste au
moment où la grande exposition de Paris et l'arrivée de plusieurs
monarques d’Europe dans cette brillante capitale aurait eu la force
d’attirer de ce côté, sinon tout le monde , au moins les curieux. —
Mais « la bouche qui profère de grandes choses • est encore plus
puissante qu’on n’a quelque fois l’air de le croire: on en a la preuve
dans ces cent mille étrangers qui ont accompagné à Rome ces dix
mille prêtres et prélats ; on pourrait en avoir une autre dans les fortes
sommes d’or et d’argent qui de millions de bourses ont afflué dans
les coffres de Sa Béatitude. Le 14 avril le denier de S*' Pierre se recueillait dans tous les diocèses de l’empire français ; de son côté ,
l’archevêque Manning apportait à lui seul d’Angleterre deux millions
et demi de francs; les évêques d’Espagne faisaient présent au pontife
émerveillé d’un vaisseau d’argent long d’un mètre , lesté d’or et tout
chargé de pièces du même métal ; un évêque n’avait, disait-il, à offrir
qu’un vil bâton, mais ce bâton se trouva être d’or massif; enfin les
cent villes d’Italie vinrent présenter au pape un don de papier, nous
voulons dire un Album, non toutefois sans l’accompagner de plusieurs
centaines de mille francs. — Mais qu’est-ce que cela au prix de la
soumission absolue que les cinq cents prélats sont «fenus promettre
â l’évêque des évêques? — Appelés à signer une Adresse au saint
pontife, tous ces évêques, d’un commun accord, ont déclaré de vouloir
« croire et enseigner tout ce que le pape croit et enseigne , en condamnant tout ce qu’il condamne». Et pourquoi ce profond anéantissement ? Pour garantir au pape-roi «la liberté du pouvoir et le
pouvoir de la liberté » , pour maintenir l’autorité qui fait les législateurs et les rois.
Il est vrai qu’en retour de leur humiliante abdication, les évêques
ont reçu du f'pe, outre l’avantage d’assister aux fêtes fort peu reli-
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gieuses du centenaire et la grâce de lui parler à '^noux, la faveur
sans pareille de voir deux douzaines de bienheureux pàsser au rang
des saints; — nous ne comprenons pas dans le nombre l’inquisiteur
P. d’Arbuez , dont le seul litre â la canonisation serait d’avoir fait
périr â sa manière quatre mille personnes soupçonnées de judaïsme.
— Ezifln, pour comble de bonheur, les évêques ont appris à Rome la
prochaine convocation d’un concile universel, d’où pourrait bien
sortir quelque chose comme la proclamation tant désirée de l’absolue
infaillibilité du pape. — Que pourrait-on attendre de mieux?
Une douloureuse nouvelle vient de nous attrister profondément. Le
jeune évangéliste de Naples , M'’ Gtoirachino Oregorl} que nous
avons vu à notre dernier Synode si plein d’entrain et d’animation ,
a été enlevé à Catania par le choléra dans la journée du 2? juillet
(lundi), après une fort courte maladie d’à peiue douze heures.
Ce cher ami se proposait, depuis quelque temps déjà, de se rendre
à Catania ( en Sicile ) pour voir de ses yeux « la porte ouverte par
le Seigneur à l’Evangile » ; et son séjour dans cette ville s'était déjà
prolongé de quelques semaines ; même le moment approchait où il
se disposait à retourner à son poste, lorsqu’il fut atteint et moissonné
à la fleur de son âge (28 ans) par la maladie mystérieuse qui recommence chaque année ses ravages en Europe et semble y avoir
élu domicile.
Cette perte prématurée est un nouveau coup bien sensible à notre
(Buvre d’évangHisation ; en moins d’un an la brèche s’est rouverte,
et un ouvrier plein de zèle et d’activité a été rappelé par le Maître
de la moisson.
Serrez vos rangs , ô milice de Christ, et priez le Maître souverain
qu’il remplace les soldats qui tombent !
Pignerol, J. Chiantorb Impr.
H. Jahier Gérant, j
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