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8' année
Février 1868.
¿V.- «.
L’ECHO DES VALLEES
—(NOUVELLE SÉRIE)—
Que toutes les choses qui sont véritables.....:, occupent
vos pensées — ( Phili}>piens., IV. 8. )
SOMMAIRE — L’Ancien et le Diacre — Rome, le Pape et l’Italie — Nécrologie ■
Philippe Perron. — Vallées Vaudoises- Le 17 février 1868.
L’ANCIEN ET LE DIACRE
La Constitution de l’Eglise Vaudoise (§26) admet ¡quatre
ordres de fonctionnaires: les Pasteurs, les Evangélistes, les
Anciens, et les Diacres. A proprement parler, les deux premiers
n’en font qu’un ; les circonstances toutes spéciales au milieu
desquelles se meuvent les évangélistes ne les empêchant pas
d avoir un troupeau à paître et à conduire, ils n’en sont pas
moins pasteurs que ceux de leurs collègues revêtus de ce titre,
et ceux-ci de leur côté, quoique placés à la tête d’un troupeau
déjà formé, n’en sont pas moins Evangélistes, car leur tâche
consiste également à prêcher l’Evangile. Il est vrai que^ la
Constitution semble tracer une ligne de démarcation entre ces
deux ordres de fonctionnaires, en assignant (§34) aux Evanr
gélistes pour fonction spéciale de travailler à la diffusion de
l’Evangile et au progrès de la vie chrétienne , soit au sein de
l’Eglise, soit au dehors. Mais de fait qu’y a-t-il de spécial
danSjCette fonction qui ne soit pareillement dévolu à .Captivité pastorale ? La distinction est vraiment trop subtile, et
2
— 18
vouloir la iiiainlenir équivaudrait presqu à dire que le pasteur
n’est pas tenu de travailler de son côté à la diffusion de
l’Evangile.
A un excès de distinction correspond parfois un excès
tout opposé ; c’est ce qui est arrivé à la Constitution, car elle
a négligé de délimiter les attributions des Anciens et celles des
Diacres. Reconnaissons cependant que, convenablement interprétée, elle ne se refuse pas d’une manière absolue à la
démarcation désirable ; si elle présente sur ce point quelqu’enchevêtrement, rien n’empêche de débrouiller l’écheveau par
le moyen des règlements organiques en voie d’application,
rien ne s’oppose à user de moyens tout ordinaires pour
mettre un peu plus de clarté là où règne le crépuscule.
Que dit en effet la Constitution? Elle assigne aux Anciens
l’administration des intérêts généraux, spirituels et temporels
de la paroisse (§14) ; et quand elle en vient aux Diacres ( § 42),
elle fait consister leurs fonctions dans l’administration des
mêmes intérêts généraux, spirituels et temporels. Mais,
me dira4-on, vous avez mal lu ; il n’y a pas, comme vous le
prétendez, simple répétition, car 1“ les Diacres ne sont dans
le Consistoire que des membres consultants; et 2° ils ont pour
fonctiôn spéciale ou essentielle le soin des pauvres et des
malades. Je réponds qu’il n’y a là rien de spécial, car, au § 14
déjà cité, il est dit positivement que les Anciens pourvoient,
de concert avec le Pasteur, aux besoins des pauvres et des
malades ; et l’on ne peut objecter qu’il s’agit ici de besoins
spirituels, car le même article enjoint om. Anciens d’administrer
la bourse des pauvres et les legs et ofb'andes de toute espèce ;
ce qui rentre par conséquent dans la sphère des besoins temporels.* Ainsi de toute cette fantasmagorie Ton ne peut tirer
que cette seule différence entre l'ordre dès Anciens et celui
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— 19 —
des Diacres, c’est que ceux-ci ont simplement voix consultative.
11 valait bien la peine de créer un ordre spécial de fonctionnaires, pour ne lui assigner au fond aucune fonction spéciale.
Le bon sens de la grande majorité de nos Eglises a fait
justice de ce cercle vicieux... par la suppression pure et
simple de l’ordre des Diacres.
Faut-il s’en tenir à cette solution? — Oui et non. Oui, si les
règlements organiques se refusent à dégager les fonctions
respectives des Anciens et des Diacres ; — non, s’ils comblent
la lacune que nous venons de faire observer. Tout règlement
est œuvre imparfaite et faillible, comme toute œuvre humaine,
et ne saurait lier la conscience des chrétiens qu’autant qu’il
est conforme à la lettre, ou en harmonie avec l’esprit de 1a
Révélation. On ne m’accusera donc pas de vouloir innover si
proposant une révision, que je crois nécessaire, du texte de
nos règlements sur un point laissé dans l’ombre, je tâche
avant tout d’interroger la lettre et l’esprit du Code évangélique.
La forme du gouvernement de la primitive Eglise a, de
l’aveu commun, sa source et son modèle dans l’organisation
de la synagogue. Il est en effet, dans le N. Testament, deux
séries de passages dont on ne saurait s’expliquer âutrement
l’exact parallélisme. Les uns nous parlent d’un juif
et de preskjtres ( ou Anciens) juifs associés aux ministres du
culte et aux interprètes de la loi ; les autres nous montrent
un presbytérion chrétien conférant à Timothée l’imposition des
mains de concert avec l’apôtre Paul , et des presbytres (ou
Anciens) chrétiens associés aux apôtres comme collègues,
ou bien aux diacres comme surveillants [évêques). Dans la
forme de gouvernement on a donc suivi celle de la communion
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- 30 —
religieuse avec laquelle la congrégation chrétienne avait le
plus d’affinité par son origine et par son caractère particulier.
Et en effet l’imitation de la synagogue juive a été si naturelle
que la première fois qu’il est fait mention des Anciens dans
le livre des Actes (XI, 30), il n’est pas expressément parlé de
leur charge ; d’où l’on peut conclure, en passant, que l’institution du presbytérat chrétien doit être de beaucoup antérieure.
Mais qu’était-ce donc que l’Ancien (ou presbytre )? Et quelles
étaient ses fonctions?
Laissons-nous aller au gré du courant historique retracé
par le livre des Actes et nous ne tarderons pas à répondre.
Dès le chapitre XI, v. 30, les Anciens nous apparaissent à
Jérusalem comme un corps organisé auprès duquel on accrédite des députés et auquel se transmettent les dons destinés
à la diaconie, c’est-à-dire à l’assistance des pauvres. Au
chapitre XIV (v. 2l3), nous voyons Paul et Barnabas , pendant
leur premier voyage établir plusieurs Anciens dans chaque
église; ceux-ci avaient donc à charge la conduite elle gouvernement des congrégations nouvellement formées, devoirs
que les apôtres ne pouvaient remplir eux-mêmes, car ils
n’avaient pas le don de l’ubiquité. Au chapitre XV (vss. 2!, 4,
6, 23), Paul et Barnabas sont députés par l’Eglise d’An
tioche auprès des Apôtres et des Anciens de Jérusalem pour
s’occuper de la grande question de la circoncision ; le synode
se réunit, et ne semble d’abord se composer que des seuls
apôtres et anciens, mais derrière eux se trouve pourtant
toute l’Eglise (Comp. aussi XVI, 4). — Au chapitre XX se
trouve un passage des plus importants ; l’Eglise d’Ephèse ,
est-il dit, comptait dans son sein plusieurs Anciens ; Paul les
mande à. Milet pour leur faire ses adieux, et entr’autres sé-
5
— il
Heuses exhortations il leur adresse celle-ci : « Prenez garde
à vous-mêmes et à tout le troupeau sur lequel le Saint Esprit
vous a établis évêques pour paître l’Eglise de Dieu qu’il a
rachetée par son propre sang» (vs. ¿8). L’on en doit conclure
que Ancien, Evêque et Pasteur sont des termes identiques
quant au sens et désignent une seule et même charge, laquelle consiste à nourrir le troupeau de la saine doctrine et
à veiller au maintien de la vérité évangélique (Comp. 1 Pierre
II, 25 ). — Au chapitre XXI ( vss. 17 SS.) apparaissent une
dernière fois les Anciens de Jérusalem , groupés autour de
Jacques , le propre frère du Seigneur et le plus influent
d’entre eux. C’est à eux enfin que Paul fait le premier connaître ses travaux apostoliques, dont ils rendent grâce à Dieu ;
ce sont eux enfin qui ont charge de convoquer l’Eglise.
Du livre des Actes passons aux Epîtres et voyons tout
d’abord ce que disent des Anciens les Apôtres de la circoncision. Jacques (v. 14) parle des Anciens de l’Eglise comme
ayant charge de visiter les malades, de prier avec eux et pour
eux et même de les oindre d’huile, selon la coutume juive
conservée par Jésus-Christ. — Pierre (1™Ep. v. 1) s’appelle
lui-même un Ancien et représente ses collègues dans le presbytérat comme des pasteurs, des évêques et des conducteurs.
— Jean ( 2® et 3® Ep. ) s’appelle également l’Ancien. —L’Epître
aux Hébreux (XIII, 17) appelle les Anciens des conducteurs
et les représente évidemment comme des Evêques, puisqu’elle
dit ; « Ce sont eux qui veillent sur vos âmes, comme devant
en rendre compte ».
La manière de parler de S‘ Paul ne diffère en rien de ce
que nous venons d’entendre. S’il a laissé Tite en Crète (Tite
I, 5), c’est afin qu’il établisse en chaque ville des Anciens ou
Evêques, des économes de Dieu, chargés d’enseigner la
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— 22 —
saine doctrine, des docteurs par conséquent. Dans sa première
Epître à Timothée (v. 17-19) il appelle les Anciens de deux
noms différents, Présidents et Anciens ; et parmi eux il distingue le président-prédicateur et docteur qui lui paraît mériter
des égards tout particuliers. Enfin dans la même épître (III,
1), il exige de l’évêque qu’il sache bien présider sa propre
maison avant que de devenir président au sein de l’Eglise,
et il veut qu’il ait à la fois le don de l’enseignement et celui
du gouvernement; c’est-à dire que l’évêque est, pour S‘ PauT,
à la fois président, docteur et conducteur, et par conséquent
ne diffère en rien du pasteur et de l’ancien.
En résumé , les anciens, considérés dans leur ensemble,
sont un corps préposé à chaque Eglise, institué par les Apôtres
ou par leurs délégués , conduisant et gouvernant les congrégations , convoquant les assemblées populaires, recueillant
les dons et les offrandes, s’occupant de doctrine et d’ordonnances rituelles, nourrissant le troupeau du pain de la Parole,
veillant au maintien de la vérité évangélique, visitant les
malades et priant avec eux, ayant mission d’enseigner, de
prêcher et de présider au culte, — en un mot réalisant;, sous
le nom générique ù’ancien, les charges spéciales d’administrateur, de pasteur, de docteur, de conducteur.
Un seul homme peut-il, dans chaque Eglise, suffire à cette
tâche aussi variée qu’étendue ? Le principe de la division du
travail n’est-il pas clairement indiqué par cette pluralité
d’Anciens apostoliques établis dans chaque congrégation nouvellement formée ? Et le N. Testament ne parle-t-il pas d’une
diversité de dons correspondant à une diversité de ministères?
L’exemple des Apôtres est là pour le prouver ; d’abord ils sont
les seuls évêques et les seuls diacres (V: Actes I: discours del
S*' Pierre ). Mais bientôt leur nombre n’est plus proportionné
7
— i3 —
à l’extension de l’Eglise ; et il se forme à côté d’eux la fonction
des Anciens-Evêques. Cependant ce n’est point assez; le
tra\ ail est encore trop grand et le service en souffre ; alors
les Apôtres eux-mêmes, que nous avons vu se nommer les
collègues des Anciens, déclarent qu’ils vont désormais se
vouer exclusivement au ministère de la Parole et qu’il faut
confier à des Diacres l’administration temporelle. Ainsi à part
ce qu’ils ont de vraiment spéciaî comme disciples et témoins
immédiats du Seigneur, les Apôtres n’ont fait que dédoubler
leur charge pour en tirer celle des Diacres et celle des Anciens.
Mais parmi les Anciens eux-mêmes, il a dû, ainsi que
nous venons de le dire, y avoir diversité de dons. En effet il
est évident qu’ils n’ont pas tous la même sphère d’activité.
Il en est qui sont spécialement chargés du ministère de la
Parole et de l’enseignement, et de ceux-là S‘ Paul fait un cas
particulier (1 Tim. v. 17-19); les autres sont conducteurs et
administialeurs. En un mot les premiers correspondent à nos
pasteurs d’aujourd’hui, dont la fonction principale consiste
précisément à prêcher et à enseigner ; et les seconds correspondent à ce que notre ancienne discipline appelait des Aincfeni
Regidore {Léger :Eist. des Vaudois, t. 1, pp. 191 , 192), les
Ruting Eldcrs des Eglises presbytéiiennes d’Ecosse. C’est sur
ce résultat, bien acquis, il me semble, qu’il convient de baser
les devoirs respectifs des pasteurs et des Anciens.
II.
Passons au Diajamat, -— Dans le N. Testament les mots
diamnie et diacre présentent des sens divers qu’il importe de
fixer, üs n’ont signifié d’abord autre chose que eervir à laMe ;
et de ce premier sens est ¡dérivé celui d'assister et de'prêter
un secours pécuniaire, eu égard tout particulièrement aux
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24 —
saints.,.Jîniin l’idée générale de service religieux, de service
de Christ, appliquée d’abord à l’apostolat, puis aux ministères divers exercés au sein de l’Eglise Chrétienne , s’est
spécialisée jusqu’à donner mx mots diaconie et diacre le sens
d’une institution particulière que nous appelons le diaconat.
]j origine de cette fonction est le fruit de circonstances
accidentelles et extérieures (V. Actes VI). Diverses plaintes
s’étaient fait jour dans l’Egliâé de Jérusalem sur la partialité
dans, la distribution quotidienne des aumônes en faveur des
veuves. Il est possible que cette distribution, contrôlée par
les Apôtres , ait été confiée par eux aux Chrétiens d’origine
juive qu’ils avaient sous la main. De là un défaut d’harmonie entre l’élément juif et l’élément grec ou helléniste,
et par suite un certain degré de partialité dont les Helléniste^, se plaignirent. Peut-être auront-ils manifesté le désir
que les, Apôtres eux-mêmes fussent chargés de cette distribution ; mais, ne voulant pas être troublés dans leurs occupatipn^ spirituelles, les Apôtres refusèrent positivement de
prendre su^ eux ces détails de l’administration, et invitèrent la communauté à choisir elle-même, dans son sein, et
pour cettp fonction , des hommes ayant un bon témoignage
et pleins,de sagesse et de zèle, c’est-à-dire doués de prudençe qt animés de l’enthousiasme du bien public, sentiment indispensable à toute espèce d’activité dans le royaume
de Dieu. On choisit donc sept diacres, ou serviteurs de la
communauté, soit parceque ce nombre était usité, soit parceque , l’Elglise ( était véritablement divisée en autant de parties.
, Dans.la,suiliev j les diacres furent! placés- sous d’influence des
anciensr-administrateurs, car il résulte d'Actes XL 50 que
c’est auîf, hjnciensvqu’on I remettait des sommes d’argent des- •
tinées j^ .Jta; communauté { et l’on comprend que les anciens
9
— 25
donnaient de la caisse générale, à chaque diacre, l’argent
dont il avait besoin pour sa sphère d’action. Mais quoiqu’on
ait pu modifier le diaconat en le mettant avec le presbytérat
dans un rapport de subordination , et quoiqu’on ait ajouté
au diaconat d’autres occupations extérieures , la base de
cette charge fut toujours la même. Dans y Corinthiens XII.
S8, par exemple, il est vraisemblable que le mot secours
(ou assistances) doit se rapporter aux diacres ; dans ce passage se retrouverait de la sorte la distinction fondamentale
entre docteurs et gouverneurs (nos pasteurs et anciens) d’un
côté, et serviteurs ou diacres de l’autre; car tant que les Apôtres furent là, les anciens, comme dans la synagogue juive,
furent chargés bien plus de la direction générale que de
l’instruction et de l’édification ; et après le délogeraent du
dernier apôtre , ce sont les anciens-enseignants qui, au jugemantde Paul, sont dignes entre tous d’un double honneur.
Que les pasteurs entrent donc d’une manière toujours plus
complète dans l’esprit apostolique , et abandonnent, sans
hésiter, les détails du gouvernement et de l’administration
à leurs collègues les Anciens-Hégidors et aux Diacres; la prédication et l’enseignement n’auront qu’à gagner de tout ce
que le pasteur peut perdre du côté visible et extérieur de
l’autorité.
Il est oiseux de pousser plus loin l’examen détaillé des
textes. Le diaconat est mentionné dans plus d’un passage
encore (V. Rom. XII. XVI. Phil. I. 1), et cela de manière
à nous apprendre qu’il y avait deux ordres seulement de fonctionnaires au sein des Eglises apostoliques, à savoir les Anciens et les Diacres, En détaillant les qualités indispensables
aux uns comme aux autres, en exigeant des uns et des autres qu’il aient été mis à l’épreuve et qu’il sachent bien con-
10
— ¿6 —
duire leurs propres maisons, S^Paul (1 Tim. III) n’exige pourtant
pas de tous les mêmes dons ; ainsi il ne demande pas que
le Diacre soit apte à enseigner * mais il insiste d’une façon
toute particulière sur la charge spéciale de ce fonctionnaire:
« qu’il soit, dit-il, irrépréhensible dans l’exerêice du diaconat,
car ceux qui auront bien servi s’acquièrent un bon degré
d’honneur et de dignité, » L’administration, il ne faut pas
se le dissimuler, est un office qui demande pour qu’on s’en
acquitte avec fidélité, une vigueur morale qui ne peut venir
que de Dieu; aussi l’apôtre Pierre (I Ep. IV, 9) dit à ce propos:
« que chacun, selon le don qu’il a reçu, l’emploie pour le
service des autres, comme de bons économes de la grâce si
variée de Dieu. Si quelqu’un parle, qu’il parle comme annonçant les paroles de Dieu ; si quelqu’un est diacre, qu’il
administre comme tirant sa force de Dieu ; afin qu’en toutes
choses Dieu soit glorifié par Jésus Christ».
On aura remarqué sans doute qu’il n’y a pas lieu à éta»
blir des distinctions entre diacre et diacre, comme nous
avons dû le faire pour les anciens; c’est que le diaconat
est, en effet, une charge essentiellement une et homogène»
à son origine comme dans son développement; son objet
unique c’est l’administration, sous l’influence et le contrôle
des anciens, des fonds de la communauté religieuse destinés
aux pauvres- Qu’on y ajoute, si l’on veut, d’autres soins
d’une nature tout extérieure ; l’on n’aura point pour cela
modifié l’essence même de l’institution qui est et doit demeurer une diaconie ^ c’est-à-dire un service, étrangère par
conséquent à toute i ingérence dans le gouvernement de
l’Eglise.
■Ûi : IH. • '
Nous croyons l'avoir démonfré.: il n'est point du toïrt indifférent de définir et de circonscrire les attributions respec-
11
— 27 —
tives des Anciens et des Diacres. A ceux-là le gouveine"
ment, à ceux-ci le service : cette délimitation est en harmonie avec l’esprit et la lettre du Nouveau Testament tout
entier.
Cela posé et l’expression scripturaire du fait dûment constatée, il faut, si nous sommes vraiment des chrétiens bibliques,
nous conformer purement et simplement à la vérité. 11 suffira , je crois, à cet effet, d’introduire dans le règlement
pour le Consistoire deux on trois définitions que nous proposerions sous la forme suivante ;
« Chaque Eglise est administrée par un Consistoire , à teneur du § 13® de la Constitution;
Les attributions du Consistoire sont celles qui se trouvent
indiquées aux §§ 14® et 42® de la Constitution;
Les fonctions spéciales des membres du Consistoire sont:
a) Pour les pasteurs : la prédication, l’enseignement, l’administration des sacrements, l’exercice de la discipline, et
en général la charge de tous les intérêts spirituels du troupeau qui leur est confié (Constit. §§ 32 et 48).
b) Pour les anciens: celles qui ressortent des §§ 14 et 40
de la Constitution, à savoir, dans chacun de leurs quartiers
respectifs, la charge des besoins spirituels, la direction de
réunions de prières, la visite périodique et régulière des
malades, la surveillance des éiîoles, et en général le gouvernement de l’Eglise.
c) Pour les diacres : le soulagement des pauvres, la surveillance du culte public , le prélèvement des contributions,
et en général l’administration temporelle de l’Eglise (Constit.
§§ 42®. 14 b. f. et 15);
Pour tout ce qui regarde le gouvernement de l’Eglise,
c’est-à-dire la surveillance des écoles, l’admission de nou-
12
— Javeaux membres et exercice de la discipline, les diacres iië
peuvent intervenir aux séances du consistoire. Lorsque le consistoire s’assemble pour affaires temporelles, et alors seulement , les diacres prennent part aux séances comme raem^
bres délibérants ».
ROUE, LE PAPE ET L'ITALIE
Î1 a paru sous ce titre , dans la livraison de janvier de la Bibliothèque universelle et Bevue Suisse. un remarquable article dû à la
plume de Ed. Tallichet, où, sans faire de la polémique religieuse,
l’auteur s’est posé des questions dont la portée ne peut être cependant
exclusivement politique. Cela tient , on le comprend , au caractère
même de cet étrange pouvoir aux sanglantes annales, qui a tenté de
recueillir à Rome l’héritage du vieux Empire, et qui s’est attaché aux
flancs de l’Italie comme une malédiction séculaire. • Homme de
péché, fils de perdition, il s’est assis dans le temple de Dieu comme
Dieu et en se donnant pour Dieu». Il a accompli des prodiges de
puissance et des miracles de mensonge (2 Thessal. II); et ce n’a été
que lorsque sa corruption est arrivée au comble que la moitié de
l’Europe a secoué, par le moyen de la Réforme, le joug honteux et
avilissant qui pesait sur elle.
Depuis lors la puissance à la fois religieuse et politique de la
papauté a été singulièrement réduite ; mais ce serait une erreüf
pourtant de penser qu’elle n’a retenu aucun pouvoir; son influence
sur la partie la plus nombreuse et la plus ignorante des populations
latines est et demeure incontestable , soutenue qu’elle est par l’instrument de la hiérarchie catholique , milice sans famille et sans patrie*
sans liens en dehors de l’Eglise , et devant obéissance stricte et ¡ passive aux ordres et aux directions de ses supérieurs.
«Le pape a donc un pouvoir ; on ne saurait le nier; la religion *
ou plutôt l’organisation de l’Eglise lui donne un levier politique dont
l’action, plus ou moins accentuée, s’étend à tous les pays catholiques.
Les gouvernements de* ces pays ont par conséquent un intérêt
pressant à ne pas l’avoir, pour ennemi, et si un souverain parvenait t
â le gagner entièrement, à le mettre à son service , par des con-:
cessions quelconques, en d’autres termes, s’il se faisait une alliances
entre le trône et l’autel^ il est probable,que le premier acquerràit,
momentanément du moins, une grande puissance, chèremeat payée,
mais très-réelle ».''é-. i- '■ »
13
— 29
Là est le danger pour l’Italie ; là est l’écueil que doivent redouter
le plus nos hommes d’état , nos assemblées représentatives et tout
ce qu’il y a d’intelligent dans le pays ; car à entendre M’’ le comte
Menabrea exprimer l’espoir que l’Italie pourra bien un jour devenir
la fxglia prediletta délia < hiesa, comme la France en est « la fille aînée » ,
on se sent pris, il faut l’avouer, d’une vague terreur
Selon M“' Tallicliet, c’est la puissance occulte , irresponsable , et
purement politique du pape qui explique le maintien du pouvoir
temporel. Ce pouvoir en effet assure-t-il , par lui-même , comme on
le prétend, l’indépendance du pape ? Pas le moins du monde ; car il
ne se soutient qu'au moyen de baïonnettes étrangères et de fusils
Chassepot, en dépit de la révolution de 1848, et grâce au joug qu’une
force supérieure a imposé depuis vingt ans à tout un peuple d’ilotes.
Pourrjuoi donc s’obstine-t-on à le soutenir ? Est-ce pour un motif
religieux ? La religion n’a rien à voir céans ; c’est pour un motif
purement politique :
• On veut non point assurer l’indépendance du pape mais annuller
une influence que l’on redoute parcequ’on ignore ce qu’elle pourrait
devenir... Débarrassez le pape de ses états, de sa position extérieure;
mettez-le dans celte situation qu’il n’ait plus de siège fixe et immuable , qu’il puisse exercer son influence hors de l’atteinte des
pressions étrangères, qu’il ne soit plus obligé de garder aucun ménagement à l’égard des puissants de la terre, et nul ne peut savoir
la direction qu’il prendra; il devient immédiatement une de ces
puissances occultes, insaisissables, que tous les gouvernements peuvent
craindre à juste litre , et que les traditions de l’Eglise catholique et
son organisation rendraient plus dangereuses. On ne saurait s’attendre à ce que . rendus à la liberté , les papes s’occupassent exclusivement de leur ministère religieux. L’habitude de s’occuper des
choses de la terre , de s’appuyer sur le bras de la chair est trop
forte, trop profondément ancrée, pour ne pas la dominer... Dès lors
ou ils pourraient s’attacher au plus puissant des états catholiques et
mettre son influence à sa disposition , à la condition de recevoir de
lui un appui de nature à augmenter leur puissance; ou bien,
rompant avec des traditions séculaires, ils pourraient abandonner les
pouvoirs absolutistes pour chercher leur point d’appui dans le mouvement démocratique de notre époque ; éventualité dont on ne peut
considérer sans effroi les conséquences, mais qui n’a rien d’irréalisable. .. »
En se plaçant à ce point de vue , on s’explique pourquoi certains
hommes politiques, voire même des protestants , comme M’’ Guizot,
défendent passionnément le pouvoir temporel, et vont jusqu’à le considérer comme une garantie de liberté et de civilisation pour l’Europe.
Mais expliquer n’est pas excuser ; loin de nous par conséquent l’idée
absurde et blasphématoire que les malheureux Romains sont appelés
14
- 30 —
à être l’ôtage perpétuel destiné à limiter et-par suite à annuller le
pape. Ce n’est point là un principe, c’est un misérable expédient.
Limiter et annuller le pape 1 Qui est mieux qualifié que l’Italie pour
remplir celte tâche ? Seulment il ne suffit pas pour cela de réclamer
Rome comme capitale et de s’épuiser en protestations stériles contre
le maintien , par la force , du pouvoir temporel. Si, d’autre part,
ce que veut l’Italie . ce n’est pas uniquement une capitale historique,
mais Rome centre du catholicisme , Rome avec le pape , impossible
d’imaginer une solution plus fâcheuse. Saurait-on nous dire ce que
deviendraient en pareil cas nos lois et surtout nos libertés acquises
au prix de tant de soufl’rances et de sacrifices individuels ? Plaise à
Dieu qu’on ne réussisse jamais à trouver un modus vivendi ! An reste
• si jamais le pape s’unit à un pouvoir temporel, il choisira le plus
fort, celui qui a les plus puissantes armées et les meilleurs fusils ;
ce ne sera pas l’Italie , qui n’aura fait ainsi que river les chaînes
qu’elle s’est efforcée de rompre »
Quelle est donc la solution radicale de la question romaine ? Nous
n’hésitons pas à le répéter après Tallichet ;
« Le seul moyen pour l’Italie de gagner Rome sans y laisser sa
liberté , son indépendance même , ce serait de rompre à tout jamais
avec la papauté. L’Italie cessant d’ètre catholique-romaine, le pouvoir
temporel des papes tomberait pour toujours , car son vrai point
d’appui c’est la péninsule tout entière et l’autorité religieuse qu’il y
exerce. A un autre point de vue encore , l’Italie aurait besoin de ce
grand changement. Elle a accompli une révolution qui ne pourra subsister que si elle est morale en même temps que matérielle. On ne
met pas du vin nouveau dans de vieux vaisseaux. Tous les embarras de
l’Italie , ses agitations stériles , ses imaginations désordonnées , son
défaut d’esprit pratique, ses finances en désarroi, sa prospérité matérielle compromise , viennent de ce qu’elle a voulu accomplir une
œuvre de liberté avec des hommes formés par le despotisme et qui
ne pourront y devenir aptes qu’eu rompant avec le passé et en
éprouvant une transformation morale et religieuse •.
Pense-t-on pouvoir s’en tirer par « l’Eglise libre dans l’Etat libre?»
Ce mot fameux renferme sans doute le germe d’un glorieux avenir'
Mais de fait qu’a-t-on essayé de sérieux pour assurer la liberté réciproque de la société religieuse et de la société politique ? S’est-on
demandé qu’il fallait avant tout proclamer leur indépendance respective ? Et saurait-il y avoir indépendance là où il n’y a pas séparation ? Le mot d’ordre du grand ministre nous amène une fois de plus
à reconnaître la nécessité d’une rupture religieuse; et qui sait si
une pareille pensée ne s’est jamais présentée à l’esprit de Gavour?
Cette rupture , du reste , hâtons-nous de le dire , ne doit s’accomplir ni par la terreur , ni par la persécution. Jje gouvernement, les
lois , peuvent y aider , en encourageant par exemple le mariage dea
15
— 31
prèlres, et en luttanfcontre la hiérarchie cléricale ; mais c’est d’une
crise morale qu’il s’agit surtout, d’un retour au christianisme primitif, àia' foi positive et individuelle. Si l’on ne tente pas sérieusement , suivant la belle expression d’Edgar Quinet, de transporter le
peuple d’un rivage sur un autre . l’on ne tardera pas à sentir, vaguement d’abord. que notre révolution est mal engagée ; l’on se
convaincra , tôt ou tard , que la liberté et le nouvel ordre moral ne
sont pas nés viables; et à l’instar de la révolution française , nous
serons fatalement ramenés au despotisme.
Vinet a élé'prophète lorqu’il disait en 1832: « Nous ne concevons,
pour un peuple sans foi, aucun repos, aucun point d’arrêt que le despotisme. Pensez-y bien ; tant de liberté et point de croyances ! La
conscience du droit séparée de celle du devoir! De l’intérêt beaucoup,
des affections si peu! Quelles combinaisons! quelles chances! quel
avenir!... Tout nous p.'.rsuade che la liberté est précaire, qu’elle
est menacée par elle-même , qu'elle ne saurait se consolider ni se
régler tant qu’elle ne pourra pas opposer aux tentatives des ambitieux de toute espèce , à qui la carrière est si largement ouverte par
l’état des choses et des esprits, la cohésion d’un peuple éclairé , vraiment civilisé , uni dans une communauté de convictions morales ».
Ce qui a été vrai pour la France peut l’être de nouveau pour
l’Italie, si elle ne se soustrait résolument à ce triste héritage du passé
éloquemment décrit par Machiavelli : • Abbiamo con la Chiesa (di RomaJ
e con i preti noi Italiani questo primo obbligo d'essere diventati senza religione e cattivi » Rien ne prouve mieux que cette amère parole la nécessité d’une rupture avec la papauté, et d’une transformation morale
et religieuse. C’est par là que nous irons à Rome. sans rien perdre.
r*erx*ou. ; I^oyran.
Philippe Perrou. Les deuils se succèdent bien rapidement parmi
les ouvriers de notre Eglise et la jeunesse de nos écoles ! Après la
mort de Jules Jalla, de Louis Meille et de François Gay. nous avons
dû annoncer celle de G. Grêgori , d’Aug. Albarin , de Charles Malan.
C’était beaucoup pour un si court espace de temps Mais voici qu’à
peine entrés dans l’année 1868 nous avons à déplorer trois morts
nouvelles l On n’a pas oublié celle de P. Baret. Quelques jours après
lui c’était le tour de Philippe Perrou de Pral. Rappelé du collège de
La Tour au sein de sa famille par la mort do son père , il n’avait
jamais perdu l’espoir de reprendre un jour ses études Une longue
maladie, puis la mort elle même sont venues briser ces projets, et il
ne nous reste plus de ce jeune ami que le souvenir d’un élève aussi
sérieux qu’il était bien doué (1).'
(1) Le manque d’espace nous oblijre de renvoyer au prochain n” la notice ni'crolofjique sur J. D. Pïtrak.
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- 32 —
VALLÉES VAUrrt>ISES
Le 19 Février 1069. — Après les deuils que nous venons de
l'appeler à nos lecteurs , il comprendront que nous ne soyons que
médiocrement disposés à les entretenir de fêtes et rejouissances. Qu’il
nous suffise de dire que les enfants des écoles ont eu cette année à
souhait clair soleil et beaux chemins. Aussi n’ont-ils pas manqué
d’accourir. A La Tour on en compta dans le temple tout près de
cinq cents, ce qui même en faisant abstraction de ceux qui n’appartenaient pas à la paroisse , formait encore le 7® de la population
vaudoise, si môme il ne faut dire le 6® ; et â S‘ Jean , où l’on a
renoncé à l’idée assurément très-originale de les séparer en deux camps,
les écoliers grands et petits ont fourni la même proportion, ainsi
qu’à Prarustin.
Si le nombre fait ici quelque chose à l’affaire, nous avons lieu de
croire que VUnion Chrétienne de La Tour n’aura pas été mécontente
de sa soirée du même jour. — Jamais nous n’avions vu la grande
école aussi comble ni mieux ornée ; jamais non plus cette fête
n’avait été conduite avec plus de convenance et de sérieuse gaîté. Le
.seul regret que nous ayons à exprinaef-* puisqu’il en.faut. toujours
un pour le moins, c’est qu’à une époque ou â une autre de l’année
il n’y ait pas dans chacune de nos paroisses quelque chose de tout
pareil aux deux ou trois heures que nous avons passées le soir du
17 février dans l’école de S*® Marguerite.
Pignerol, J. Chiamtore Impr.
H. Jabier Gérant
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annuel payable en souscrivant : Pour l’intérieur, rendu franc de port
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Turin, chez Mr. J. Js. Tron Libraire, via Lagrange, près le n" 22.’ = A
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de 15 cent, la ligne. ¡fi i u '
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