1
Septlènoie année.
N. 8.
23 Février ISTS.
L’ECHO DES VALLEES
FEUILLE HEBDOMADAIRE
Spécialement consacrée aux intérêts matériels et spirituels
(le la Famille Yaudoise.
Que toutes les choses qui sont véritables.oceupenf
vos pensées — { Philippiens., IV. 8.)
PRIX d’abonnehent :
Italie, à domicile Cttn an) Fr. 3
Suisse....................*5
France................* 6
Allemagne.............» 6
Angleterre , Pays-Bas . • 8
Un numéro sepnré : 5 cent.
Vn mtméro arriéré : 10 cent.
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ToRRR-PEr.r.icE : Via Maestra,
N. 42. (Agenda bibliografica)
PrGNERor. : J. Chlantore Impr.
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près le iN. 22.
Florhncr : Libreria Evangelica, via de'Panzani.
ANNONCES : 5 cent, la ligne
ou purtion de ligue.
Lettres et envois franco. S’adresser pourradministration
an Bureau <i Torr.e-PelUce,
via Maestra N. 42 — polirla
rédaction .* â Mr. E. J)Ialan
Prof * à Torre-Pelice.
Somnxalr'e.
La discussion de Rome. — Nouvelles
religieuses. — Avertissement aux émigrants. — Souscription pour la Société
Biblique do Rome.
LA DISCUSSION DE RODE
Le format de VEcho des Vallées ne nous
permet pas d’entrer dans beaucoup de
détails sur la discussion religieuse qui a
excité un si grand intérêt eu Italie pendant toute la- semaine dernière. C’était
réellement un fait nouveau et de la plus
haute importance. La question discutée a
sa valeur en elle-même, au point de vue
de l’Eglise de Rome ; mais ce qui nous
importe, plus que la question, c’est que
cette discussion ait eu lieu, qu’elle ait eu
lieu à Rome, le siège de la papauté, seize
mois après que cette ville a été rendue à
la liberté; qu’elle ait eu lieu à armes
égales et d’une manière honnête et courtoise de part et d’autre. Ce qu’il y a de
très nouveau et de très important aussi,
c’est que le pape ait permis et autorisé
une telle dispute. Car maintenant personne ne doute plus que cette autorisation
n’ait été donnée aux trois ecclésiastiques
catholiques ; peut-être les deux présidents,
le prince Chigi et l’avocat de DominicisTosli, ont-ils été spécialement chargés en
haut-lieu de veiller à la marche de la
discussion. — Devons-nous croire, après
cela, que le pape, les cardiuaux et le collège des jésuites aient changé de système,
soient prêts à renier les maximes de l’Encyclique et du Syllabus? Certainement non.
— Pour nous celte discussion est un fait
anormal au point de vue do l’Eglise romaine, et nous ne sommes pas éloigné de
l’avis de ceux qui l’expliquent par un caprice de Pie IX, caprice qui ue fait pas
honneur à sa prétendue infaillibilité. Nous
pensons que 1« pape n’a pas attendu à
aujourd’hui de se repentir de l’autorisation donnée et qu’il a déjà juré, mais un
peu tard, qu'on ne l'y reprendra plus.
Du reste, pourquoi ne le dirions-nous
pas ? Nous aurions préféré, nous aussi,
que le sujet de la discussion eût été un
point plus essentiel de la doctrine chrétienne. Mais nous comprenons que les
évangéliques n’aient pas été libres de
choisir et que, défiés sur ce point (sur lequel M. Sciarelli ne comptait qu’avoir des
conférences plus particulières), ils ne furent pas libres d’en proposer un autre
plus fondamental ; nous comprenons aussi
qu’à Rorael, en face du Vatican, demeure
de celui qui se dit l’infaillible successeur
de S. Pierre, premier évêque de Rome,
il ne: soit pas indifférent de prouver que
S. Pierre n’a pas été 25 ans évêque de
Rome, pas même dix ans,pas même uu
an, qu’il n’a pas même été à Rome,
comme l’a montré M. Sciarelli après bien
d’autres, d’après les Ecritures, et surtout
2
-(58)
d’après les Actes des Apôtres et les Epîtres de S. Paul et rie S. Pierre; mais nous
no pouvons bannir de notre mémoire ce
que disait le bon Luiber, c’est que, si le
pape lui permettait d’enseigner et rie prêcher d’après lu parole de Dieu, la justification par la foi , il n’exigeait pas autre
chose. Nous savons que Luther demandait
ce (]ue le pape ne pouvait pas lui accorder ; nous savons qu’il ne pouvait pas
être fidèle à la parole de Dieu et obéir à
Jésus-Christ et au pape en même temps;
mais ce que nous apj)récions dans la conduite de Luther, dans la manière dont il
s’y prit pour amener une réforme, c’est
que l’habileté humaine n’eulre pour rien,
ni res[)rit de système et d’opposition, mais
le besoin d’obéir au Seigneur et de suivre
les prescriptions de la conscience réveillée. Au fond , quelle est la dilférence essentielle entre le romanisme et l’Evangile
que nous professons, entre les catholiques
et les évangéliiiues ? C’est que le romanisme exige l’obéissance à l’autorité de
l’homme, c’est qu’il met celui-ci_à la place
de Dieu ; c’est le prêtre et le pape tout
particulièrement, qui enseigne, qui délivre et pardonne, à qui il faut obéir; c’est
par cerlaines omvres qu’on est sauvé ;
pour les évangélicpies. c’est la parole de
Dieu (]ui éclaire et instruit à salut, c’est
le Seigneur qui rachète, qui pardonne en
son lils.iésus-Chcist. Croire en Jésus-Christ
le seul roi de l’église, le vrai prophète de
la nouvelle alliance, le seul et unique sauveur et médiateur, le souverain sacrificateur qui s’est sacrifié pour nous obtenir
le pardon des péchés et le droit et le
pouvoir de devenir des enfants de Dieu,
voilà l’Evangile que nous professons. —
Quand on a prouvé, comme on l’a prouvé
pour nous, d'une manière victorieuse^
d’après les Ecritures, la vraie et la plus
sûre autorité dans cette question, quoi
qu’eu dise le prêtre Guidi, que S. Pierre
n’a été à Rome ni 25 ans, ni un jour, on
n’a pas renversé le romanisme, cela est
vrai ; cependant comme tout se tient dans
ce système parfaitement bien construit,
nous comprenons qu’une pierre arrachée
à cette muraille chinoise puisse en faire
tomber bientôt une autre, puis une troisième ; mais n’oublions pas d’attaquer les
fondements et d’en revenir toujours aux
choses essentielles, comme l’Ecriture toute entière nous en donne l’exemple avec
le précepte.
La grande importance de cette discussion est, selon nous, d’avoir attiré l’attention des Italiens sur la question religieuse,
d’avoir fait connaître l’jnuvre d’évangélisation qui se fait dans toute l’Italie et à
Rome en particulier. Le journalismejs’est
emparé de cette question , et en a parlé
dans des sens divers; les feuilles libérales d’une manière généralement sympatique aux évangéliques, les feuilles cléricales dans un sens parfaitement opposé.
Rien n’était plus propre à nous [révéler
les pensées des cœurs et les opinions de
beaucoup de nos compatriotes sur la question religieuse.
VEco délia verilà passe en revue un
certain nombre de journaux ; — nous lui
empruntons quelques uns de leurs jugements et nous eu ajouterons quelquesuns que nous avons pu recueillir, nous
même.
REVUE DES JOURNAUX.
Le correspondant de La Nazione, journal
conservateur de Florence, voyait d’abord
des dangers dans cette discussion, mais il
s’est [remis de ses craintes et il s’est exprimé comme suit; Hier au soir a eu lieu la
lutte annoncée Les chos^ se sont très
bien passées. Rien de plus parlementaire;
deux grands partis, une droite, une gauche, aucun centre ; les Evangéliques d’un
côté, les catholiques de l’autre; courtoisie
réciproque, égards infinis; il en sortira
un nouveau code de chevalerie ascétique...
Le public se partageait en deux partis....
A la fin soit les uns, soit les autres sortirent de la lice avec la même foi, avec
les mêmes profondes convictions avec lesquelles ils étaient entrés....
L’Opinione, journal ministériel, écrit le
11 courant;
La thèse Saint Pierre a-t-il éléà Rome?
est un problème historique plutôt que
théologique; et nous pouvons le dire,
c’est un problème résolu après les importants travaux de critique publiés surtout en Allemagne sur les premiers siècles
3
-(59)
dti christianisme. Les résultats de cette
critique seraienf'que l’Eglise de Rome a
été fondée sans Paul et sans Pierre ; mais
nous ne voulons pas entrer dans cette
discussion, laquelle du reste n’a rien à
faire avec la religion, dont la vérité ne
dépend pas du fait matériel du voyage de
Saint Pierre ou de l’autre fait qu’il y eût
des chrétiens à Rome avant que le grand
apôtre des gentils y arrivât...... Parlant
ensuite de la discussion elle-même , le
correspondant de ce journal dit: « Le
langage des catholiques fut un peu plus
modéré que celui des dissidents Fabiani a fait preuve de beaucoup d’érudition et d’une connaissance peu commune
de beaucoup de langues étrangères mortes
et vivantes. Mais ses arguments n’ont pas
pénétré bien profondément dans les convictions des auditeurs.... Dans la seconde
séance, Gavazzi, malgré la longueur de
son discours, a littéralement absorbé toute
l’attention de l’Assemblée;... la réponse
du prêtre Guidi, trop scolastique, n’a pas
fait grande impression. Nous n’entendons
pas nous prononcer; nous nous limitons
par conséquent à reconnaître avec éloge
la civilité et la courtoisie réciproque des
deux partis, lesquels, donnant un démenti aux prévisions malignes, ont démontré que, même dans le centre du catholicisme, l’intolérance et la haine de la
libre discussion ont fait leur temps.
Le Fanfulla a d’abord tourné en ridicule la question qui était sur le tapis;
mais il en parle plus tard d’une manière
sérieuse :
« Les impressions laissées par la dispute.... soit dans les esprits du clergé romain en général, soit plus particulièrement au Vatican, ne sont pas du tout
satisfaisantes. On avait bien auguré de
l’issue de la première journée et le discours de Fabiani fut beaucoup loué. On
attendait beaucoup plus de Guidi qui devait combattre le père Gavazzi. Mais les
arguments de Guidi ont laissé à désirer.
Maintenant on attend les actes authentiques de la dispute..,. On croit que Pie IX
a déjà donné ordre pour qu’on n’accepte
plus de semblables défis, et ait révoqué
celui de se mettre à disputer avec les
acatholiques dans leurs propres temples.
La Perseveranza fait les considérations
suivantes :
« Il s’est passé ces derniers jours un
fait nouveau dans l’histoire ecclésiastique,
depuis la fameuse dispute de Leipzig de
1519 entre protestants et catholiques. C’est
précisément une dispute entre calholiques
et évangéliques sur la question de savoir
si Saint Pierre a été ou n’a pas été à
Rome.....
» De quelque manière (|ue l’on juge la
question historique, les conclusions perdent presque toute leur importance devant le fait qu’une discussion do ce genre
ait pu avoir lieu à Rome , sans aucun
doute avec le consentement du Vatican.
Est-ce une résolution individuelle du pontife? Inaugure-t-on ou au moins essaye-t
on une nouvelle route?.....Quelles (|u’en
soient les causes, il est évident que cette
dispute est une déviation do cette ligne
droite et sévère que la curie romaine a
suivie depuis des siècles jusqu’à ce jour,
et dans laquelle, je crois pouvoir le prédire sans grand danger, elle se hâtera de
rentrer. En tout cas c’est un hommage
rendu à la science, à la critique, aux
études, hommage qui a relevé (?) l’esprit
des catholiques forcés jusqu’ici à se renfermer dans le refus d’accepter toute espèce
de discussion. Sous cet aspect la dispute
de Rome a été jugée par tous, croyants
et incrédules, avec la plus grande faveur.
Il est hors de doute (?) que le pape et
le Vatican y ont moralement gagné ; pareequo ils se sont maintenus dans leur
système, qu’ils se sont occupés de leurs
affaires, de religion et de foi. et ont
laissé la politique à qui elle appartient».
Le Secolo de Milan est moins optimiste
dans le sens catholique :
« Je suis d’avis, dit-il, que, en face du
public, les catholiques n’y ont pas gagné.
» Si nous extrayons tout le suc de leurs
discours, nous devonsavoner qu’il n’ont
rien trouvé de mieux' pour soutenir leur
thèse que d’en appeler.à la tradition et au
fait que le siège de l’Eglise se trouve à
Rome: ils disent: S. Pierre a été à Rome
4
-(60)
et y est mort, parcequ’on l’a toujours cru ;
Saint Pierre est venu à Rome et y a souffert le martyre pareeque l’Eglise romaine
se trouve à Rome.
» Les Evangéliques au contraire, s’ils
n’ont pas des preuves positives, ont en
leur faveur une forte présomption, fondée sur le fait que la Bible ne parle pas
du voyage de Saint Pierre, et plus spécialement Saint Luc, dans les Actes, lequel ne nous dit pas que cet apôtre ait
jamais été à Rome pendant qu’il nous
parle do ses voyages et de son séjour à
Lidde, a Joppe, à Samarie, à Césarée et
0 Jérusalem ; et cela est d’autant plus
étonnant qu’il aurait établi à Rome le
siège du christianisme!.... Dans le passé,
les prêtres de l’Eglise romaine n’admettaient pas de discussion sur certaines
questions; maintenant non seulement ils
l’admettent mais combattent même avec
des excommuniés.... On espère de nouvelles discussions et spécialement sur la
thèse de la suprématie que les catholiques veulent que Jésus-Christ aient accordée à Saint Pierre, et que le Pape s’est
ensuite arrogée, comme successeur de
Saint Pierre. Nous verrons! ».
Le Corriere di Milano s’exprime comme
suit;
« Ce qui nous paraît plus important que
le résultat de la controverse, quel qu’il
soit, c’est le fait vraiment nouveau, qu’à
Rome, des catholiques et des évangéliques aient pu discuter ensemble d’une
manière pacifique, au grand avantage de
la liberté de conscience et d’examen. Aux
temps d’Arnauld de Brescia, de Luther, de
Giordano Bruno, MM. Gavazzi, Ribet et
Sciarelli n’auraient pas pu discuter tranquillement dans une salle, au centre de
Rome, sous la présidence d’un avocat
consistorial, et d’un prince romain, neveu
d’un pape. Ils auraient été brûlés vifs et
leurs cendres jetées dans le Tibre.
» Même, il y a deux ans seulement,
quelqu’un qui aurait essayé upe semblable
discussion dans la ville éternelle, aurait
été jeté, en prison eu au, moins banni. Il
est vrai de dire que cette tolérance n’est
pas tm mérite de la religion catholique,
dont les prinqjpes sont ¡résumés, d.ans TEoi
cyclique de Pie IX et dans le Syllabus;
elle a été importée du dehors.
» Nous nous réjouissons cependant de
ce progrès ; il nous permet de voir les
partis religieux, qui se trouvent eu présence, débattre enlre eux leurs différends
avec serieux et avec les armes courtoises
de l’éloquence et de la persuasion ».
Ce même journal dans un article subséquent dit; « La discussion de Rome a, à
notre avis, la gravité d’un évènement historique; et il est à regretter qu’une grande
partie do la presse l’ait considérée très
légèrement et l’ait mise en ridicule. Nous
ne voulons pas entrer dans le mérite de
la question, ni analyser les divers discours qui ont été prononcés. Les prêtres
ne sont pas entrés dans l’arène pour leur
propre compte et sans autorisation. Si
les journaux cléricaux ne nous l’avaient
pas dit, le nom du président, l’avocat consistorial De Dominicis Tosti, et celui des
champions catholiques, Fabiani, Cipolla
et Guidi ne laisseraient aucun doute à
l’égard de l’approbation du pape.,..
»11 n’y a guère plus d’un an que la brèche de Porta Pia a été ouverte; et déjà
la civilisation moderne ouvre dans l’Eglise
une nouvelle brèche, celle de la libre
discussion....
» Les Jésuites qui sentent trop bien que
pour avoir des croyants dociles, il faut
que ceux-ci n’entendent qu’une voix, combattront les caprices du pape, ils chercheront à le détourner de la voie dans
laquelle il est entré; et ils y réussiront
pour le moment; mais le premier pas
étant fait, il faudra continuer.
» Chaque pierre qui tombe de la muraille de notre Chine est un triomphe de
la civilisation. Une dispute^religieuse autorisée par le pape doit nous faire espérer que le temps n’est pas éloigné oîi
l’Egli.se devra ouvrir ses portes à la raison
et à la science. Nous italiens, nous en
reiirerons le plus grand avantage; nous
qui commençons à sentir le malheur qpe
nops avons de né pas avoir, comme en
Allemagne et en Angleterre, unq religion
qui, s’accordant avec la civilisation, soit
la plus puissante des forces éducatrices
du peuple ». _^
5
-(61)
L'Italie, sous le titre de Un fait édifiant,
dit, eutr’autres choses, ce qui suit:
« Ce n’est pas la première fois que,
catholiques et 'protestants, préférant les
armes de la raison à celles de l’injure,
descendent dans la lice pour discuter des
matières de foi, en se servant des formes que demandent la civilisation et l'éducation; mais le défi qui a eu lieu dans
la salle de l’Académie ïibérine, a un
caractère tout particulier de nouveauté,
parceque la discussion a eu lieu à Rome
même..... et sur un terrain également
libre pour les adversaires des deux partis.
De même que la plus exquise courtoisie
avait préparé celte lutte; de même, du
commencement à la fin, et les adversaires et le publie qui y assistait, firent
preuve de la plus parfaite modération. Le
public aurait été plus nombreux si la
salle avait été plus grande»....Du reste
Vltalie ne veut pas entrer dans l’examen
de la question et pense qu’elle n’a pas en
elle-même une bien grande importance
pour abattre la papauté.... Quant au résultat définitif de ces débats, Vltalie, comme la Nazione, la Perscveranza, VOpinione
et en général les journaux conservateurs
et rrtinistériels s’exprime comme suit :
«Très probablement, chacun des deux partis, gardant intactes ses convictions, s’est
retiré sans avoir modifié celles des adversaires. C’est, continue le même journal,
le résultat ordinaire de ces sortes de conférences ».
Plusieurs journaux de l’opposilion ou
d’opinion politique plus avancée ont été
plus favorables aux évangéliques et se
sont réjouis plus sincèrement et avec
moins de réticence de l’événement qui
nous occupe.
Nous citons ontr’autres la Capitale de
Rome et la Gazzetta del Popolo de Turin.
Un correspondant do ce dernier journal
disait ; — « Nous avons toujours cru que
Saint Pierre n’avait jamait été à Rome;
mais s’il y était venu, le père Gavazzi
l’en aurait chas.sé ».
La Capitale dit avec raison que les trois
prêtres, pour soutenir leur cause, ont démoli , autant qu’il a été en leur pouvoir,
la valeur de la Bible, et des Actes des
Apôtres en particulier, au point de vue
chronologique et historique, et c’est en
vain, ajoute ce journal qu’ils ont fait leurs
réserves au point de vue des dogmes.—
Ce même journal déclare que les prêtres,
pour être conséquents, doivent descendre
de nouveau sur le lorrain pour discuter
sur la légitimité do la suprématie de l’Eglise de Rome. S’ils refusent de discuter
sur cette seconde question , c’est qu’ils
savent qu'ils seront encore battus... Quoiqu’il en soit, dit la Capitale, nous nous
nijouissons du grand événement de ces
derniers jours et nous fêtons une première victoire do la liberté.
Nous l’avons vu déjè, l’indiiïérenlismo
se fait jour dans plusieurs des journaux
que nous avons cités et dans quelques
autres; et se manifeste dans des mots
comme les suivants: « la conclusion do
la discussion, c’est que les catholiques
ont une opinion autre que celle des évangéliques et que les évangéliques pensent
autrement que les catholiques; » ou bien,
« au sujet du voyage de S.-Pierre on eu
sait autant qu’auparavant » ou bien « la
question agitée n’a pour nous en ellemême aucun intérêt; » quant à moi, conclut un autre correspondant sceptique ,
ou trop crédule, je suis prêt à admettre,
les yeux fermés, que S.-Pierre est venu
à Rome dans d’autres temps, mais je ne
lui conseillerais pas d’y retourner maintenant, parceque les loyers y sont trop
chers. »
Nous sommes obligé de nous arrêter,
non sans citer encore toutefois une remarque du Rinnovamento de Venise qui
croit voir, avec raison, dans le fait de la
dispute, une preuve que l’intérêt pour
les choses religieuses n’est pas mort en
Italie. Les journaux cléricaux seulsVUnità
Cattolica, V Osservatore romano, la Voce
della Verità et la Frusta sont pleins de
fiel.
La discDssion da 9 et da 10 février
1
Rome. Nous extrayons de la Capitale les
points principaux de la discussion qui a
eu lieu entre trois écclésìastiques catholiques et trois évangélistes sur la question
6
-^62).
de savoir si S.-Pierre a jamais été à Rome.
A sept heures précises du soir du 9 courant, l’un des présidents, l’avocat De Dominicis Tosti, donne lecture de la thèse
que M. Sciarelli se propose de développer,
et qui consiste à prouver que S.-Pierre
n’a jamais été à Rome et prie l’auditoire
de ne donner ni des signes d’approbation,
ni de désapprobation.
La présidence, pendant les deux longues
séances, a dirigé les débats avec impartialité et avec dignité et a ainsi beaucoup
contribué à la bonne marche de la discussion.
Cependant, avantquela parolesoitdonnée
à M. Sciarelli, le père Gavazzi propose
que les assistants, dans le sentiment d’accomplir une œuvre sérieuse, s'unissent
devant Dieu en récitant l’oraison dominicale. Celte proposition n’ayant pas été
acceptée par la partie adverse, la présidence accorde quelques minutés, pour
que, qui veut prier et se recueillir le
fasse dans le silence. Alors M. Sciarelli
développe sa thèse. Il nous fait voir l’apôtre S.-Pierre dans l’Orient et jamais dans
l’Occident, ni à Rome. Il montre par les
actes des Apôtres que S.-Pierre en l’année
42 était encore è Jérusalem, en 43 il prêchait dans les petites villes voisines de
Joppe et de Lidde, en 45 il était emprisonné a Jérusalem par Hérode Agrippa et
délivré par Un ange, — Le Synode de Jérusalem eut lieu’probablement l’année 56»
S.-Pierre y était. Les Actes "des Apôtres
ne parlent plus dès lors de S.-Pierre et ne
disent ainsi pas un mot de son voyage a
Rome, En 58 S.-Paul écrit son Epître aux
Romains. Si S.-Pierre avait été à Rome,
il n’aurait pas manqué de le faire saluer;
mais il remplit tout un chapitre de noms
et ne dit pas un mot de S.-Pierre. — Si
S.-Pierre avait été alors évêque de Rome,
même pape, S.-Paul n’aurait pas eu besoin d’écrire sa lettre ; mais c’est qu’il no
se trouvait dans cette ville personne qui
fût capable d’instruire les chrétiens et de
convertir les gentils. — Les 25' ans de
pontificat de S.-Pierre sont ainsi diminués
de 17 années. En 61 S.-Paul arrive à
Rome’. Tous les thrétiens vont à sa rencontre. Certainement Pierre se trouvera
parmi eux ! Poiftt de tout ; il n’en est pas
question. — D’après les épîtres de S.-Paul,
S.-Pierre ii’ést pas allé à Rome après lui,
et l’année 66, S.-Paul écrit à Timothée
que tous l’ont abandonné, excepté S.-Luc,
et qu’il avait été tout à fait seul dans sa
défense. S.-Piôrre n’était donc pas auprès
de lui.
Nous avons deux épîtres de S.-Pierre;
dans la première (16. v. 13.) il salue les
fidèles de la part de l’Eglise de Babylone;
Pierre est donc en Orient et non pas en
Occident, à Babylone oli il y avait beaucoup do Juifs, et non pas à Rome. — M.
Sciarellisoutient, par plusieurs raisons, que
l’on n’est pas autorisé à entendre par Babylone qui était encore une grande ville,
quoique en décadence, la ville de Rome.
Les catholiques romains s’appuyant sur la
tradition; «mais, dit Sciarelli, la tradition est sans valeur en face de la Bible ».
« La critique. Messieurs, conclut l’orateur,
fait autour d’elle des ruines partout oü
elle plante sa barrière, mais ces ruines
sont fécondes. La mal’aria de l’erreur est
dissipée et la vie surgit ».
La parole est ensuite accordée au chanoine Fabiani , qui résuma en cinq points
les arguments de M. Sciarelli :
1) La chronologie.
2) Le silence de la Bible sur la venue
de S.-Pierre à Rome.
3) La mission de S.-Pierre apôtre de
la Circoncision.
4) La question s’il faut entendre Babylone par Babylone ou Rome.
5) Défaut de témoignage des Pères de
l’Eglise dans les premiers temps.
L’orateur renonce à traiter le premier
point et à suivre son adversaire pour ce
qui concerne la chronologie, parceque,
diWil, si nous parvenons à prouver que
S.-Pierre a été à Rome un seul jour nous
avons gagné notre procès». — Le silence
de la Bible est un argument négatif. Le
fait de la venue de S.-Pierre à Rome est
un fait humain qui appartient à l’histoire,
et que l’histoire doit m’enseigner. Le témoignage des Ecritures saintes ne m’est
pas nécessaire.
Le silence de la Bible ne saurait infirmer
la tradition et l’histoire de 14 siècles qui
donnent comme un fait certain, notoire,
la Veéuc de S.-Pierre à Rome.......D’ail-
7
-(63).
leurs, dit-il, nous avons ici, outre le fait
humain , un fait mystérieus qu'on ne peut
connaître que par la tradition. L’orateur
cherche dès lors à prouver par le moyen
de la tradition que S.-Pierre a été à Rome.
Il cite. Papias, Irénée, Clément d’Alexandrie, Origène elc. — Il défend l’interpretation allégorique du mot Babyione dans
l'épître de S.-Pierre, en s’appuyant sur
l’exégèse rationaliste du théologien allemand Ewald. — M. Fabiani d’ailleurs reconnaît qu’il est très important d’établir
que S.-Pierre a été à Rome, parceque de
ce fait dérive la nécéssité pour tout le
monde d’adhérer à Rome et au pape. Sans
avoir rien prouvé, il conclut en disant;
« le fait de la venue de S.-Pierre à Rome
a tous les caractères de la notoriété ».
La parole est donné au ministre évangélique Ribet. — L’orateur s’attache surtout à njpntrer que la croyance au voyage
et au séjour de S.-Pierre à Rome est le
produit d’une insinuation habilement introduite dans l’esprit des peuples, ensuite
changée en décret. Mais, en histoire, il
faut procéder par des faits positifs , constatés et non par des insinualious. Papias,
Clément d’Alexandrie, Ignace ne sont pas
des témoins contemporains; ils ne font
que des insinuations ils ne repètent que
des on dit. S’il y avait une seule parole
de S.-Pierre qui dît: j’ai été à Rome, je
baisserais la tète; mais dans tout le Nouveau Testament il est impossible de la
trouver.... Depuis le 3' siècle seulement ,
les Pères, les uns après les autres, ont
répété la même erreur; cette erreur est
ancienne, c’est vrai; mais elle ne devient
pas vraie parceque elle est ancienne. —
L’orateur après avoir réfuté l’un après
l’autre les arguments de son adversaire
termine en lui disant: « Vous nous'dites
enfin: Si Pierre est venu à Rome seulement pour un jour, tous doivent adhérer
, à Rome et au pape » La conséquence est
I fausse. Quand même S.-Piérre aurait-élé
à Rome 25 ans, ce ne serait pas qn motif
pour que l’humanité s’adressât à un
homme Nous vous adressons à Christ et
non è un .homme, f Applaudissements. —
Le président rappelle à l’assemblée que de
telles manifestations ne sont pas permises.
La venue de S.-Pierre à Rome, conclut
M. Ribet, n’est pas un dogme. La religion
de Christ ne saurait être localisée; elle
n’a pas de capitale, comme l’avait à Jérusalem la religion judaïque. Chacun, en
quelque lieu qu’il se trouve, peut s’adresser à Christ et cela sufiQt.
Alors se lève le curé Cipoll.4.
Il prétend qu’il faut trouver un passage
dans la Bible qui nie la venue de S.-Pierre
à Rome, si l’on veut qu’on n’y prêle pas
foi. — Cette venue est d’une grande notoriété. Aussi longtemps que vous ne nous
prouverez pas que S.-Pierre n’est pas venu
à Rome, nous,croirons qu’il y est venu.
Le discours de cet orateur est rapporté
très brièvement soit par la Capitale, soit
par la Frusta.
Il est onze heures. Ce serait au père
Gavazzi à parler, mais comme il a besoin
de trois heures au moins, on accepte sa
proposition de renvoyer la fin de la discu.ssion au soir suivant. — Nous aussi,
nous renvoyons, à notre tour, au prochain numéro, la continuation de ce
compte-rendu.
ilouoelUd reltjgtcu6C0
La Société évangélique de Genève a
publié une circulaire à la date du 2 février. Cette circulaire s’occupe surtout
de l’évangélisation et du colportage. Les
colporteurs de la société, au nombre de
44, dont 1 pour la Corse, 1 pour le Piémont (vallée de Suse et de Pragelat), 1
pour la Suisse, ont pu distribuer environ
30.000 exemplaires de l’Ami du soldai,
25.000 exemplaires de l’Ahnanach des bons
conseils, 20.000 exemplaires de VAlmanach
des familles, et 18.000 exemplaires de
VAlmanach de la Jeunesse publié à Toulouse. .....
' Nous extrayons do la lettre de Tabbé
Michand à l’archevêque de Paris le pasiSage suivanj;^;^« Pourquoi, m'ont objecté
vos amis, brisez-vous ainsi votre avenir,.,
,eo perdant la considération des catholir- j
ques romains? — J’ai répondu que mon
avenir est dans ^le ciel que mon présent,
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est dans la liberté de rester vrai catholique, dans la liberté de dire tout haut la
vérité, dans l’accord de ma vie avec ma
conscience ; et jamais il ne saurait être
dans la fortune. Et la meilleure preuve
do ma sincérité, c’est que je quitte , en
eft’ct, une situation enviée sous tous les
rapports, sans savoir au juste de quelle
manière la Providence me permettra de
mériter le nécessaire du lendemain. Quelque dur que cela paraisse, J’aime mieux
l’honuemr avec la pauvreté que le remords avec la richesse. Oui, certes, je
préfère une vio agitée avec une conscience en paix à une vie tranquille dans
laquelle ma conscience sera torturée; et
les injures des ultramontains, quelque
haineuses, quelque violentes , quelque
grossières qu’elles puissent être, no l’emporteront jamais dans mon cœur sur l’approbation des honnêtes gens et des vrais
catholiques ». Eu terminant, l’abbé Michaud déclare rester catholique et prêtre.
Il dira sa messe chez lui et continuera
l’administration des sacrements. Comme
nous l’avons déjà publié, il annonce l’intention do publier et d’agir.
AvcrlissenieDl aux Emigrants
Nous lisons dans le N. 49 de la Gazzetta
Ufficiale del Uegno d’Italia :
Le Gouvernement de Buenos-Ayres a
reçu des dépêches du district de Fandil,
oh au commencement du mois avaient
eu lieu les plus horribles atrocités. Il paraît
que le matin du nouvel an, vers 3 heures,
les habitants furent alarmés par les cris;
mort à toits les étrangers. Ces cris provenaient d’une bande de 50 à 100 hommes
qui attaquèrent la prison et s’emparèrent
de force do la garde. En ce moment précisément passait un italien, qui fut renversé et tué sous les pieds des chevaux.
A un mille de distance de la place, la
bande se jeta sur un convoi de chars et
de charretiers, tua 9 de ces derniers qui
étaient basques et en blessa deux autres
qui étaient indigènes. Se dirigeant ensuite
par le chemin qui conduit à Buenos-Ayres
ils tuèrent un pulpero avec son domestique,. puis se divisèrent en deux bandes,
1 une desquelles se dirigea vers le maga
sin de M. Chaparro, et l’autre vers celui
de M. Thompson.
Dans ce dernier endroit', ils tuèrent M.
Smith, sa femme et le garçon de boutique.
M. W. Stirling fut laissé pour mort. Au
magasin de M. Chaparro ils tuèrent 18
basques, M. Chaparro, sa femme et quatre
enfants, dont l’ainé avait 8 ans, et le plus
jeune 8 mois seulement.
Ils se dirigèrent ensuite vers M. D. Ramou , de Santa Marina; dans cet endroit
il furent attaqués par les voisins et par
la garde nationale, qui tua six ou sept
des délinquents et en fit prisonniers un
nombre égal.
...Le chef de celte œuvre infernale est
appelé El Biiigo ou le magicien, à cause
du caractère merveilleux de. ses guérisons
et de ses habitudes spéciales... Il vit dans
les pampa.s, sous tente, sans maison, sans
toit d’aucune espèce... Conspirateur pervers, il n’a épargné aucune des astuces
ordinaires pour obtenir de l’ascendant sur
les esprits des Gauchos... Le premier jour
de celte année, il a annoncé publiquement et par des faits, que sa mission est
l’extermination des étrangers. De|?uis plusieurs mois il avait envoyé des émissaires de divers côtés, en invitant ses complices pour une assemblée.
SOUSCRIPTIONS
EN FAVEUR
de la Société Biblique ilalienne
La paroisse de Rorà Fr. 6 40
Paroisse de Villar, collecte Fr. 27
J. Monnet, syndic » 1
Jh Alio » 1
D' Cayrus régent » 0 50
J. P. Soulier régent » 1
Salomon Michelin Salomon » 1
Aug. Jalla » 1 50
B. Favat » 1
E. Janavel » 1
Josué Fontana ancien » 1
J. P. Plenc ancien » 1
P. Baridon ancien » 1
J. P. Gaydou ancien » 1
P. Gay » 1 10
M. Gay pasteur » 1
Caroline Gay » 1
Agio sur une pièce de 10
fr. en or trouvée dans
la collecte ci-dessus à
la porte du côté des
femmes » 0 55-42 65
Fr. 49 05
E. Malxn Directeur-Gérant.
Pignerol, Impr. Chiantoro.