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1« année
Janvier ISGfi.
L’ECHO DES VALLEES
—( NOUVELLE SÉRIE )—
Que tt)iites les choses qui sont véritaMes.
vos pensées — ( Phili¡>pú-ns., IV'. 8. ;
ooi'tipcnf
SOMMAIRE. — Un mot d'introduction. — Qucsüons ccdcsiasliiiues. Libortù dos
Egli.ses. — A propos d une consécration. — Instnielion H hhnatmi. La ville di’
Turin et l'instruction. — Glamires. .Au plus fou ! — Fnils ilU'crs. — Ninailh\
locales. — Correspondance. — Condilions d'abonnement.
l]N MOT D INTRODUCTION
G est une Lien humble chose que nous allons enfreprendre !
— Une feuille mensuelle du format et du nombre de pages
que voici. Peut-on se produire avec moins d’apparence? Encor
si cette modestie nous servait de recommandation ! Mais c’esf
tout au plus si nous osons l’espérer. Un journal, pour être
accueilli, doit toujours promettre beaucoup ; libre à lui de
tenir ensuite ce qu’il peut. Et puis, rappeler par le nom une
feuille d’heureuse mémoire , qui avait à son service la plume
qu’on sait, n’est-ce pas s’exposer à se faire , par la comparaison , plus de fort que de bien? — Nous nous sommes dit
tout cela et quelqu’autre chose encore ; mais ne fait pas le
grand qui veut ; et tout compte fait il nous reste, pour commencer humblement, toutes sortes de raisons dont plus d’une
est exceUente et facile .à deviner.
Ce qui est bien autrement sérieux pour nous, ce sont les
ditücultés réelles que nous aurons à rencontrer dès l’entrée.
Si humble que soit cette publication , nous avons un très-vif
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sentiment de notre insuffisance pour l’amener seulement au
point où nous voudrions la voir arriver. Qu’on ajoute à cela
ce que nous aurons de peine à trouver des lecteurs, dans un
pays où , sans parler des personnes qui en sont réduites à
prendre un verre pour faire un 0, il'en est un si grand nombre
qui ne peuvent lire qu’avec lenteur et avec effort, — et l’on
pourra nous dire si nous avons raison de nous effrayer. Quant à
ceux qui ont le bonheur de pouvoir lire , et lire couramment,
reste à savoir si à notre tour nous aurons l’avantage de les
compter au nombre de nos futurs abonnés. Sans doute le bas
prix de notre feuille serait fait pour tenter; mais ceux qui lisent
ne manqueront pas de livres ni de journaux; et il faudra tout
au moins qu’ils soient bien bons pour s’abaisser jusqu’à nous.
Que faire alors ? — « Promettre plus et mieux que cela,» —
nous diront nos amis, — « ou bien profiter de cette bonne occasion....pour vous taire » — Avouons que ce parti-là serait
commode. — Serait-il sage également ? Nous voudrions pouvoir
le croire; mais une voix nous crie qu’il est temps de donner à
notre peuple une part de ce qui aura pu nous intéresser nousmêmes dans nos lectures journalières. Que ùe nouvelles, soit
politiques soit religieuses, que de simples faits qui, à eux seuls,
seraient souvent aussi instructifs que tout un raisonnement !
Que d’enseignements à recevoir sur la famille et la pairie, sur
l’Eglise eiVécolel que de belles jüensées, que de traits à recueillir
« comme des pommes d’or dans une corbeille d’argent » et
qui se perdent comme les miettes de notre table ! — Placés
comme nous le sommes entre beaucoup de livres et une population qui ne lit presque pas, n’avons-nous pas à cet égard
comme une dette vis-à-vis de nos semblables moins heureusement partagés que nous?—A tort ou à raison nous avons dû
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répondre aiTirmativement et c’est à ce sentiment (pu; nous
avons fini par céder.
Si nous sommes seuls de notre avis, nous nous hiiterons d(;
rentrer tout entiers dans le cercle étroit de nos occupations
particulières ; mais s’il plaisait au Seigneur de bénir notre essai,
s’il daignait nous procurer la sympathie et la coopération d(‘
quelques amis, nous serions trop heureux de prendre sur nos
faibles épaules cette nouvelle charge avec tout le souci ([u’elh'
nous promet.
QUESTIONS ECCLÉSIASTIQUES
LIBERTE DES EGLISES
Les Eglises Vaudoises viennent de déclarer, par l’organe de
leurs assemblées électorales, qu’elles jouissent, dans leur gouvernement intérieur, de toute la liberté désirable.
Trois paroisses (S. Jean la première, puis la Tour et Prarustin)
avaient demandé au Synode de 1863 que l’on modifiât l’article
IX de la constitution dans le sens de la libre nomination des
pasteurs (1). Depuis lors on a rapporté deux fois sur cette demande aux deux synodes de 1864 et 1865. Ce dernier, appelé
à se prononcer d’une manière définitive, admit le principe delà
libre nomination des pasteurs en y attachant comme condition
le principe d’une compensation pécuniaire en faveur des paroisses les moins favorisées. 3Iais désireux sans doute de procéder
avec ménagement avant de modifier une constitution bien jeune
encore, il invita les paroisses elles mêmes à se prononcer individuellement sur les deux points en question.
Les paroisses ont répondu en repoussant, à la grande majo-
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rité, les deux propositions qui leur étaient soumises. — Que
penser de ce vote négatif ?
En fait de sacrifices pécuniaires, l’on avait simplement proposé une contribution d’un centime par semaine pour chaque
membre de l’Eglise. Etait ce demander trop ? La question a-telle été mal posée et partant mal comprise ? Ou bien sommesnous tellement déshabitués de donner régulièrement que nous
ne sachions plus nous y résoudre, même quand il s’agit des
besoins de notre propre Eglise ? Nous ne pouvons croire encore
qu’il en soit vraiment ainsi; et en jetant les yeux sur les arrêtés
des paroisses (Voyez les Nouvelles locales) nous préférons admettre que dans la plupart des cas, un malentendu a pu seul fausser
le vote des électeurs.
Les occasions ne manqueront pas de nous expliquer là dessus.
Mais quiconque a à cœur comme nous de voir triompher dans
notre Eglise les principes les plus élémentaires de la libéralité et
de la liberté Chrétiennes, ne pourra que regretter vivement
réchec qu’ils viennent de subir dans la plupart de nos assemblées électorales. Saint Paul disait déjà aux Corinthiens : « que
chaque premier jour de la semaine chacun mette à part quelque
chose (1 Cor. XVI. 2 ) » Bien loin de voir dans des contributions
régulières un impôt forcé, on devrait donc, et on le doit maintenant plus que jamais, en montrer le parfait accord avec l’esprit et avec la lettre de l’Evangile qui n’a jamais cessé d’être
une loi de liberté et de spontanéité.
(1) Voici l'article en question • — « Les différentes Paroisses dont se compose
» l’Eglise Vaudoise obéissent toutes au même gouvernement ecclésiastique , et
» aucune d’elles n’a de supériorité sur les autres. Toutefois, eu égard à la nature
» fort diverse des lieux et des circonstances où elles se trouvent placées, et dans
« le seul d'assurer à chaque paroisse, pour autant que faire se pourra, le Mi« nistère qui lui convient le mieux, les paroisses de l'Eglise Vaudoise sont pour
» ce qui concerne la nomination des Pasteurs, groupées en différentes catégories,
» chacune desquelles est tenue de se conformer, pour cette nomination, aux lois
» qui la concernent. » ( Constitution, art. IX).
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À PROPOS D’UNE CONSÉCRATION.
Ayant eu l’occasion de jeter les yeux sur le Lien du 30 décembre dernier, nous y avons lu une lettre de Genève contenant,
à propos de la consécration au saint ministère dans cette \illc
de M.*' R. originaire des Vallées du Piémont, des accusations
injustes à l’adresse de l’Eglise Vaudoise , et des allégations
d’une remarquable fausseté relatives à la non acceptation par
cette Eglise du candidat en question. Nous nous mettions en
devoir de repousser les unes et de rectifier les autres sur le
terrain des faits, lorsque nous eûmes communication de la
lettre suivante que M.‘‘ le pasteur Lantaret Modérateur de
l’Eglise Vaudoise avait adressée à ce meme sujet au Bulletin
du monde chrétien.
Pomaret , Vallées Vaudoises , le 13 janvier 1866.
..............Monsieur le pasteur G. Collins eu sa lettre du 11
décembre rend compte au Lien d’une Consécration qui a eu lieu dans
le temple de S‘Pierre sous la présidence de M'le pasteur VioUier, et
donne une analyse du discours de ce prédicateur. Des deux candidats
qui reçurent â cette occasion l’imposition des mains , l’un appartenait
à l’Eglise de Genève , l’autre à « ces Eglises des Vallées Vaudoises qui
• prétendent ( telle est d’après M” Collins la substance des paroles de
» M' Viollier) n’avoir jamais fléchi le genou devant l’autorité papale,
» n’avoir pas eu besoin d’ètre réformées parce qu’elles possédaient et
Il suivaient l’Evangile avant les jours de Huss, de Luther et de Calvin. ..
» Il est venu étudier à Genève, et, au terme de ses études , a de» mandé à ses maîtres s’il était apte à devenir un bon ministre de
» Dieu. Il a reçu leurs encouragements, a eu leur approbation. Puis
» il a été demander à son Eglise natale la consécration pour se vouer
» au service de cette Eglise qu’il aime. Alors , on a tiré des archives
» un vieux parchemin que nos pères de Genève avaient envoyé à
» ses pères des Vallées, et on a lui demandé s’il pouvait souscrire à
» toutes les doctrines énoncées dans cet antique document. Il s’est
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I' trouvé entre ses croyances et celles des temps passés des différen» ces ; et on lui a refusé la consécration qu’il vient aujourd’hui nous
» demander. Etre repoussé par l’Eglise de ses pères, par l’Eglise au
» service de laquelle on voudrait se vouer , repoussé de sa patrie par
» le fait qu’on est repoussé de son Eglise, c’est dur ! De ces faits, il
» résulte qu’il y a de nos jours un protestantisme , celui de la Table
» Vaudoise et d’autres corps ecclésiastiques, qui repose, comme le
» nôtre , sur l’Evangile, mais , à l’encontre du nôtre , sur l’Evangile
» et l’autorité des confessions de foi ».
J’ai dû transcrire textuellement ce long fragment de l’analyse du
discours de M'' Viollier. Laissant naturellement à M'' Collins la responsabilité de sa reproduction et la tenant pour exacte , je ne puis qu’être
surpris et affligé de voir un pasteur convertir la chaire évangélique
en un tribunal, du haut du quel il n’hésite pas à flétrir , pour autant
qu’il dépend de lui, une Eglise qui n’a pas mérité , je crois , d’être
traitée aussi cavalièrement. Mais si le temps et le lieu étaient, selon
moi, assez mal choisis pour une polémique de cette nature, il y a
quelque chose de bien plus grave encore ; c’est que les faits allégués
sont complètement faux, et M'' le pasteur Viollier aurait dû le savoir.
Peut-être est-il jeune encore et doué d’une de ces imaginations brillantes qui sur un mot bâtissent un récit auquel rien ne manque. —
Voici du reste comment les choses se sont passées.
Mr R., le jeune Vaudois dont il est question , parvenu au terme de
ses études théologiques faites à l’Académie de Genève , désirant recevoir l’imposition des mains au sein de son Eglise, s’est présenté avec
quatre autres candidats devant le Corps des pasteurs réuni pour leur
faire subir l’examen de foi et de convictions religieuses prescrit par nos
réglements ecclésiastiques. Ses certificats d’études avaient été reconnus
parfaitement suffisants.
Les questions sur lesquelles roula l’examen et qui étaient les mêmes pour tous les candidats furent les suivantes :
a) La personne de Christ ; — 6) La Grâce ; — c) Le salaire du péché; —
dj Des confessions de foi dans les Eglises ; — e) La vocation du candidat.
Le Corps des pasteurs réuni au nombre de 21 membres fut unanime
à déplorer l’inconcevable faiblesse du candidat au point de vue de la
doctrine et essentiellement à celui des connaissances bibliques. Mais
comme jamais peut-être un candidat ne s’est trouvé en présence de
juges aussi unanimément disposés à la bienveillance que le fut envers
M^ R. le Corps des pasteurs, il fut fait à son égard ce qui jamais ne
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s’était vu parmi nous ; un pasteur fut délégué auprès de lui pour l’engager’à se retirer volontairement et à se représenter plus tard; la
Commission d’évangélisation aurait pu ainsi l’employer dans l’intervalle
comme elle l’avait déjà employé provisoirement avant l’examen. Car
il est bon d’ajouter que notre Eglise n’admet à recevoir l’imposition
des mains que les candidats qui ont déjà reçu un appel.
Quand j’ai lu dans l’analyse du discours de Viollier qu’au moment
où M’’ R. s’est présenté pour recevoir la consécration « on a tiré des
archives un vieux parchemin » ( pasteurs et candidats n’avaient (jue la
Bible devant eux) je me suis demandé si par aventure il serait question
de la Bible qui, pour plusieurs , même parmi ceux qui se disent ministres de l’Evangile , est en effet quelque chose de bien vieux et qu’ils
travaillent de toutes leurs forces à corriger et à rajeunir. Mais non , MM.
Viollier et Collins savent très-bien que ce parchemin là ce n’est pas
Genève qui l’a donné , puisque c’est l’Eglise Vaudoise qui l’a donné
aux Eglises de langue française.
Il s’agit donc bien de la confession de foi que l’Eglise Vaudoise a
la faiblesse de vouloir retenir dans un temps où l’on pense que ces
sortes de vieilleries nuisent à l’épanouissement complet de l’Evangile
par la hberté. Or, dans l’examen de M” R., il n’a en aucune manière
été question de cette confession, que les candidats ne sont appelés à
signer qu’après être sortis honorablement de l’épreuve de l’examen et
du sermon dit d’épreuve , qui fait partie intégrante de cet examen.
Si M'R., qui avait demandé et obtenu jusqu’au lendemain pour réfléchir à la proposition qui lui était faite , ne daigna donner aucune
réponse; si le Corps des pasteurs appelés à se prononcer sur l’examen ,
le rejeta à l’unanimité, c’est à dire par 19 bulletins négatifs et 2 blancs;
si après cela M*’ R. jugea bon de s’expatrier et d’aller se faire consacrer
à Genève , il me parait que c’est abuser étrangement du langage que
d’affirmer qu’il a été repoussé par son EgÜse et par sa patrie ; comme
si, pour être membre d’une Eglise et citoyen d’un Etat, il fallait de
toute nécessité être ministre, ou revêtu de fonctions pour lesquelles
on n’est pas encore préparé.
Puisque M' Viollier a cru devoir parler de la Table Vaudoise et de
son protestantisme qui repose sur l’Evangile et les confessions de foi,
je dirai encore que la Table n’a fait autre chose que soumettre au
Corps des pasteurs les certificats des candidats en les déclarant authentiques et suffisants, et présider par Tun de ses membres aux actes de
cette convocation. Ses attributions ne vont pas âu delà et il n’est en
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son pouvoir ni d’accepter ni de repousser un candidat que conformément à la décision du Corps des pasteurs.
Du reste je crains bien que le respect pour notre confession de foi
ne constitue pas la seule différence entre l’Evangile de notre Eglise et
celui du correspondant du Lien. Nous aussi nous croyons que par l’Evangile seul on est amené à la liberté glorieuse des enfants de Dieu , mais
pour nous l’Evangile est avant tout et par dessus tout la propitiation
par le sang de Jésus-Christ ; sans l’expiation telle que notre vieille
Bible nous la présente, l’Evangile ne mérite plus ce nom. Les exemples
les plus sublimes ne sont rien, la morale la plus pure est sans efficace comme sans attrait aussi longtemps qu’une vie nouvelle ne nous
a pas rendus capables d’aimer cette morale et de suivre ces exemples.
Si nous étions d’accord sur ce point fondamental, nous serions trèsprès de nous entendre sur tout ce qui est accessoire , par exemple
l’usage et l’utilité d’une confession de foi pour une Eglise évangélique.
Telle est à-peu-près clans son entier la lettre de HP Lantaret.
Nous aurions bien quelque chose à y ajouter, n’était la crainte
de prolonger trop cet article déjà bien long. Nous aurions, par
exemple, voulu dire à HP V. qu’outre la relation du Lien, il
nous est parvenu, par la répétition de divers échos que nous
désirons ne pas croire fidèles, certaines expressions qui lui
auraient échappé dans son discours et qui nous paraîtraient non
seulement peu évangéliques, mais encore un abus de cette liberté qu’il nous donne comme corrélative de l’Evangile. Notre
Eglise est aussi misérable qu’il le voudra, mais elle ne se glorifie pas de ses armoiries; elle ne veut se glorifier qu’en la
croix de Jésus-Christ, mort pour nos offenses et ressuscité pour
notre justification.
Nous sommes très-obligés à V. de nous apprendre que
ses pères de Genève ont envoyé à nos pères des Vallées le
vieux parchemin qui contient notre confession de foi ; nous
pensions bonnement qu’il y avait alors dans nos Vallées assez
de parchemin pour écrire une confession de foi, sans qu’on dût
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l’envoyer de Genève. Mais puisque M"“ V. nous le dit de la
chaire, lui qui est sans doute très-à-même de le savoir, il faudra
bien le croire.
Et, cela étant, notre reconnaissance envers ses pères, à qui
nous sommes débiteurs de tant d’autres bienfaits, n’en serait
que plus grande encore.
INSTRUCTION ET EDUCATION
LA VILLE DE TURIN ET L’INSTRUCTION
Un journal italien ( Opinione 29 décembre ) recevait dernièrement de
Tarin même, sur les progrès de l’instruction publique dans cette ville ,
des renseignements que nous croyons utile de recueillir ici en les
adaptant à notre but.
Dans le courant de l’année scolaire 1864-1865 les Ecoles Elémentaires
ont été à elles seules fréquentées par 5600 jeunes garçons et par 4444
jeunes filles, soit en tout par plus de dix mille écoliers , formant le
1^20 d’une population que le recensement de 1861 évaluait à 205
mille âmes.
Si aux écoles élémentaires nous ajoutons les autres écoles soit secondaires, soit professionnelles, c’est alors au 1|8 des habitants, c’està-dire à quelque chose comme 26 mille élèves qu’il faudra porter le
nombre total des sujets qui, sous une forme ou sous une autre, ont,
en 1864 , reçu le pain de l’instruction dans notre ci-devant capitale.
— Encore faut-il avertir que dans ce nombre ne sont compris ici ni les
quelques centaines d’étudiants de l’Université , ni les élèves à écoles
militaires , ni les enfants des écoles privées , qui sont à la charge des
particuliers ou du Gouvernement.
Pour l’entretien des écoles de son ressort, la ville de Turin n’a pas
dépensé cette année moins de 521 mille francs , nombre rond. — C’est
une somme respectable.
L’on pense bien qu’il n’en a pas toujours été ainsi : sans remonter
à l’année 1800 où, pour une popolation de 78 mille âmes , la ville
de Turin ne payait pour ses écoles que la somme insignifiante de
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5,200 francs , que l’on compare seulement le budget de 1864 avec
les pauvres 47 mille francs employés en 1848 pour instruire une population de 136 mille âmes , et l’on verra s’il y a eu progrès et à quoi
il faut l’attribqer. — Gomme c’est à la famille vaudoise que nous désirons tout spécialement nous adresser , nous laissons à nos jeunes
arithméticiens le plaisir de nous dire ce qu’a dû coûter à la Municipalité de Turin chacun de ses 26 mille écoliers pendant l’année scolaire 1864-1865 , et ce qu’aura dû payer pour sa quote part chaque
famille de cinq membres et chaque individu. — Quant à nous , il nous
reste à faire l’aveu que , malgré tant de sacrifices , notre ancienne capitale , sur chaque millier d’habitants , en compte encore 330 qui ne
savent ni lire ni écrire ; ce sont 28,864 homnîes ou garçons , et 47,737
femmes ou jeunes filles ! — On voit que Te moment n’est pas encore
venu de se reposer sur ses lauriers. — Néanmoins, quand on sait que
pour les autres villes du Royaume , cette proportion s’élève à 780 sur
mille*, et que sur moins de 22 de nos concitoyens il y en a 17 qui ne
savent ni lire ni écrire , force nous est bien de reconnaître avec le
Ministre Natoli, qu’en fait d’instruction c’est encore à Turin que TItalie doit accorder la palme. Espérons que l’illustre ville sairra garder
ce poste honorable.
Ce n’est pas notre intention de parler ici de ce qu’a fait pour l’instruction de l’enfance la Congrégation Vaudoise de Turin ; mais nous
apprenons avec plaisir qu’aux florissantes écoles de Porte-Neuve la
Commission se propose d’en ajouter d’autres à Porte-Milan. Puissent
tous ces efforts être bénis de Celui qui seul peut faire porter à l’instruction du peuple les fruits salutaires qu’on a droit d’en attendre !
GLÂNURES
Au plus fou! C’était l'usage, il y a quelques siècles, pour les grands
seigneurs d’avoir dans leurs châteaux des fous ou bouffons chargés de
les amuser et de les faire rire. — En dépit du nom qu’ils portaient
ces fous ne laissaient pas, â l’occasion, de décocher à leur sot entourage de rudes vérités. — On. en jugera par le récit suivant.
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Ua Seigneur avait donné à son fou un bâton avec ordre de le garder
jusqu’à ce qu’il eût pu le remettre à plus fou que lui. Quelques années s’écoulèrent, lorsque le seigneur tombé dangereusement malade
sentit approcher sa fin. Le fou étant venu rendre visite à son maître ,
celui-ci lui üt comprendre d’un air tout marri qu’il était bien près de
son départ. — Et où veux-tu aller? demanda le bouffon. —Dans un
autre monde. — Et quand seras-tu de retour? dans un mois peutêtre ? — Hélas ! non. — Dans un an ? — Pas davantage. — Et quand
donc? — Jamais. — JamaisI répéta le fou avec surprise; tu as donc
ton passe-port en règle , sans doute ? — Le malade ne répondit pas.
— As-tu pourvu à ton entretien dans ce monde où tu vas te rendre?
— Nullement. — Alors tu comptes sur quelque ami pour t’accueillir
en son château par là? — En aucune façon. — Comment! fit le bouffon,
devenu presque sérieux ; et tu as résolu de partir quand même ? Tu
t’en vas pour toujours , sans savoir ni où, ni chez qui, ni comment
tu seras , et tu n’as pourvu à rien absolument ! Eh bien ! voilà ton
bâton, tu peux le reprendre; car pour moi je n’ai trouvé jusqu’à présent
aucun insensé de cette force.
Pensëc. L’homme sage a toujours trois cuisiniers qui assaisonnent
ses plus simples mets : la sobriété, le travail, et ce contentement d’esprit
qu’un apôtre appelle un grand gain.
FAITS DIVERS
Une ancienne malaon Juive. L’Opinione du 8 janvier tient du
C. Mercantile qu’à Nadir Sarape en Syrie, l’on vient de mettre à découvert toute une habitation juive, telle qu’elle devait exister un siècle
ou deux avant l’êre chrétienne. — Après deux milles ans on y verrait
encore des salles parfaitement conservées ainsi que maint ustensile.
— Mais des divers objets qui ont attiré l’attention, aucun ne devait
exciter autant d’intérêt que les livres : c’est qu’outre un petit recueil
de poésies hébraïques il ne s’agissait de rien moins que des Psaumes de
David et des Livres de Moïse. — Quelle bonne fortune pour les savants !
— Ils ne manqueront pas d’examiner lettre après lettre ces antiques
parchemins, et de livrer au public le résultat de leurs découvertes, s’ils
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en font. — Ces précieux volumes ont été envoyés à la Société Asiatique de Londres, et si nous en avons d’autres nouvelles, nous en
ferons part à nos lecteurs.
I.e mois de Janvier. — Nous venons d’avoir, pour commencer
l’année 1866, l’un des plus agréables mois de janvier dont on se souvienne aux Vallées — A part les deux doigts de neige qu’il est tombé
dans la soirée du neuf au dix, le reste du temps n’a été qu’une suite
de journées aussi douces que sereines, dont n’ont pas tardé a profiter
la primevère et la pâquerette. — C’est à vous faire regretter ce mois
de janvier d’ordinaire si redouté. — Ceci nous met en mémoire qu’un
savant anglais, M'' Glaisher, après avoir trouvé par ses calculs que
depuis 1770 la température moyenne des Iles Britanniques s’est élevée
déplus d’un degré, a pu s’assurer ensuite que c’est particulièrement
sur le mois de janvier que porte cette augmentation de cBaleur. —
Si l’année 1866 s’est ouverte aussi tiède en Angleterre qu’ici. elle aura
confirmé pour sa bonne part l’observation de Glaisher. — Chose
étrange ! tandis qu’on jouissait dans nos Vallées d’un soleil de printemps,
il faisait dans l’Amérique du nord un froid à pierre fendre. — En plus
d’une ville des Etats-Unis le thermomètre était descendu, la nuit du
6 au 7, jusqu’à 23 degrés au dessous de zéro; et à la latitude de
Turin ou même de Naples, on vit la glace couvrir fleuves et portes
de mer, au point d’interrompre un moment la navigation. — Ce qui
est plus triste, c’est qu’on parle de personnes mortes de froid. — Une
femme, entre autres, aurait été trouvée dans sa chambre avec un
enfant qu’elle serrait de ses deux bras contre son sein pour le réchauffer. — Au matin, l’enfant put effectivement être sauvé; mais la
mère était morte. — ^D’après /’Eco d’Italia de N. York 11 janvier J.
Bàlane«« de précision. — Nous apprenons par les journaux
que la maison Decker de Turin vient de construire pour l’Hôtel des
Monnaies de Naples des balances d’une remarquable perfection. Les
plateaux étant équilibrés par un poids de 150 (cent cinquante) Kilogrammes , il suffirait, pour rompre l’équilibre , d’ajouter à l’un des
bassins une de ces petites pièces neuves de 20 centimes, c’est-à-dire
un gramme tout au plus.
A l’œuvre on connaît l’artisan; et une pareille sensibilité-pour des
balances d’une telle portée fait également honneur à l’atelier de le
chevalier H. Decker et à l’industrie du pays.
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NOUVELLES LOCALES
Arrêtés des Paroisses \andoises sur ia question de la libre nomination
des Pasteurs. — A tout seigneur tout honneur. La Paroisse de S. Jean
ayant été la première à demander la libre nomination, c’est par elle
que nous allons commencer. Nous nous abstenons de tout commentaire.
L’assemblée électorale de la Paroisse de S. Jean, réunie le 17 décembre 1865 , « après avoir entendu les motifs allégués par les défen» seurs des deux principes , considérant que la libre nomination pour» rait produire de plus grands inconvénients que le réglement actuel,
» — arrête : La Paroisse de S. Jean repousse le principe de la libre
» nomination et exprime le vœu que Nos paroisses continuent à être
» régies comme elles l’ont été jusqu’ici dans ce qui a trait au choix
i> de leurs pasteurs ». L’Assemblée ayant repoussé le principe de la
libre nomination • n’a pas cru devoir s’occuper, pour le moment, de
» la seconde proposition » relative à une imposition régulière de 50
centimes pour chaque membre de l’Eglise. — Cette résolution a été
votée à la majorité de 15 contre 7.
Prarustin (5 novembre), la seconde des trois paroisses pétitionnaires,
a évité de se prononcer. « Comme la table » a-t-on dit « a par devers
» elle'les fonds destinés à la rétribution des Pasteurs , elle peut les
» répartir de manière à ce qu’aucun d’eux n’ait à souffrir ; et s’il arrive
» un cas de besoin senti et reconnu, elle pourra toujours faire appel
» à la charité de l’Eglise » Cette résolution a été votée par la grande
majorité des 25 électeurs présents.
La Tour { 5 novembre ) « considérant la circulaire de. la Table eh date
» du 3 octobre relative à la libre nomination des pasteurs et au mode
» de compensation en faveur des paroisses de montagne, ainsi que les
» besoins de VEglise en général, — arrête-: L’Assemblée se prononce nou» vellement pour la libre nomination des pasteurs par chaque paroisse.
» Elle adopte le principe d’une contribution régulière et volontaire par
» chaque membre de l’Eglise, dans le sens de la circulaire de la Table».
Cette résolution a été votée à la très-grande majorité de 80 électeurs
présents.
A Angrogne (26 novembre), après une longue discussion sur les avantages de la liberté dont on veut doter l’Eglise et les inconvénients de
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cette même liberté pour un grand nombre de paroisses, l’Assemblée,
estimant que la liberté n’est qu’un leurre et que le projet de compensation est impraticable, se prononce pour le statu quo à la majorité de
51 votants contre H.
Au Villar (26 novembre) «considérant 1® qu’il n’est pas convenable
» de changer facilement la constitution d’une Eglise ; 2® que le chan» gement projeté, — la libre nomination, — a déjà été essayé a la
» fin du siècle passé et qu’on l’a abandonné comme ayant de funestes
» conséquences; 3® que cette paroisse n’avait pas demandé ce chan» gement, qu’elle ne croit pas nécessaire; — l’Assemblée générale, au
» nombre de 59 votants, rejette à l'unanimité le changement projeté
« et maintient l’art. IX de la constitution tel qu’il est. — Quant au
» projet de contribution, qui est une dépendance du premier, il n’est
» pas non plus accepté. »
A Bohy (12 novembre), l’Assemblée, au nombre de 82 votants, rejette à l’unanimité la libre nomination des pasteurs et par conséquent
le projet de contribution, « en tant qu’il est une véritable utopie. » Le
vote est appuyé sur quatre considérants : « 1° On ne saurait user de trop
» de prudence quand il s’agit de changer les actes constitutifs de l’E» glise ; — 2® dans les paroisses de première classe , où se trouvent
» les trois qui ont demandé la libre nomination, il y a une assez grande
» liberté, puisque l’une d’elles étant vacante, elle a un choix de 25 à
» 28 ecclésiastiques avant d’arriver au premier en rang de la seconde
» classe ; — 3® une augmentation quelconque des honoraires des pas» leurs de seconde classe est impuissante pour (aplanir les montagnes
» et pour en changer le climat ; — 4® le statu quo est la seule voie
» qui puisse assurer un ministère régulier aux paroisses de la mon* tagne, qui â cause de leur position, ont droit à toutes nos sympathies. »
A Rora ( 5 novembre ) l’Assemblée électorale, « tout en manifestant
» le désir de posséder une telle liberté, a rejeté à l'unanimité la con» dition qui lui est imposée pour l’obtenir. »
fLa fin au prochain numéro. J
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CORRESPONDANCE
Monsieur le Directeur de I’Echo des Vallées ,
Comme il y a probablement telle paroisse qui n’envoye pas encore
directement à la Commission ses dons pour l’Evangélisation en Italie,
plus d’une personne sera peut-être bien aise d’apprendre l’existence
de notre petite société, et je m’assure que vous ne refuserez pas de
faire dans la dernière page de votre journal naissant une place à
l’avis que voici.
Votre affectionné B. Tron.
AVIS.
Persuadés que bon nombre de personnes au sein de notre
Eglise vaudoise nourrissent pour l’œuvre d’Evangélisation qui se
poursuit au milieu de nos concitoyens , un intérêt qu’elles seraient heureuses de manifester en quelque mesure, les personnes
ci-dessous nommées ont cru tout à la fois remplir un devoir personnel et répondre au désir de plusieurs en fondant à la Tour une
SOCIÉTÉ AUXILIAIRE
POUR l’eVANGÉLISATION en ITALIE.
f suivent les noms J
Statuts de la Stociété.
1.
La Société auxiliaire fondée à la Tour au mois de janvier
1864 , a pour but de venir en aide à la Commission du Synode
vaudois pour l’Evangélisation en Italie, comme aussi de faire de
cette œuvre un moyen d’édification pour ses propres membres.
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2.
La Société se propose d’atteindre son but soit par des réunions
spéciales de prières en faveur de l’Evangélisation, soit par des
rapports oraux sur les progrès et les difficultés de l’œuvre', soit
au moyen de contributions volontaires.
3.
Les moindres dons sont reçus avec reconnaissance, et enregistrés avec la désignation des donateurs , devenus ainsi membres
de la Société pour l’année.
4.
La Société nomme dans son sein un Comité responsable et directeur.
5,
Au 30 avril de chaque année les dons recueillis seront transmis à la Commission d’Evangélisation, pour être publiés dans
son rapport au Synode.
NB. Les dons seront reçus à La Tour par MM. les Professeurs Charbonnier,
Revel , Monaslier , Etienne Malan , et B. Tron , ei dans les autres paroisses
par ceux de MM. les Pasteurs et Régents qui voudraient bien se charger de
nous les remettre avec les noms des donateurs.
Les personnes qui ne renverront pas ce premier numéro seront
considérées comme abonnées. On est prié d'affranchir.
Pignerol , J. Chiantore Impr.
H. Jahier Gérant.
CONDITIONS DE L’ABONNEMENT.
L'ECHO DES 'VALLÉES paraîtra chaque mois.---Prix d’abonnement annuel
payable en souscrivant : Pour l'intérieur , rendu franc de port fr. 2. 50 pour
l’étranger, les frais de poste en sus.
On ^abonne = à Torrb-Pellice , chez le Gérant Mr. H. JaMer Relieur
Libraire. = A Pignerol , chez Mr. J. Chiantore Inmrimeur Libraire. = A
Turin, chez Mr. J. Js. Tron Libraire, portici della Fiera num. 25.
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15 cent la ligne.
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franco au Gérant.