1
0
O »®s »44
w
fieuUlc Mensuelle
SPECIALEMENT CONSACREE
ACX
INTERETS DE LA FAMILLE VAUDOISE
« Ilh dion (fu’ es V a u d e s . .. >1
a Ils disent qu’ il est Vaudois »
Nobla leyczon.
tcwivetc ccmjim
P I 6N0 OL
IM V B ianE B IX D S JO SEPH OHXAHTOBE.
4848
49.
^
3
TABLE DES MATIERES
r.ONTENliES
DANS
CE
VOLl' ME.
IIIS T O IB E T A r n O lS E
La_ place du château de Turin eu 1338 et 18ii8.
paye
1
I/Église de Durnholzhauser......................................................
Les Vaudois d’ Allem agne..................................
• • •
J^es Barbes ou les Missionnaires (fnnjmeiU d’n«« histaire
des Vaudois racontée aux e n f a n t s ) .............................id3
Le 17 f é v r i e r ..........................................................................
Ine lettre i n é d i t e ........................................
Confession des péchés des anciens Na\idois (poème inédit) 1j 5
Le seigneur d’Alenc (fruyment d'nne histoire des Vuadois
racontée aux e n f a n t s ) .................................. •
■ •
Les enfants de Mérindol (fragment d'une histoire des l aa~
dois racontée aux enfants)
É G E IS E Y A E D O IS E
Quelques mots à propos du prochain Synode de l’Eglise
vaudoise
..........................................................................
Synode de l’Église v a u d o i s e ........................................•
53
Lettre du Major-Général Beckwitu au Modérateur de
l’Église v a u d o i s e .........................................................................dO
Adresse des pasteurs et ministres vaudois au Synode
constituant des Églises Réformées de France . . .
62
L’ Église vaudoise : Quest-ce que l’Eglise vaudoise ? . .
91
Que croit l’Églisevaudoise?
. .
110
Comment se gouvernel’ Église vaudoise? l^i.3
M o ra le, É a w ca U a n, InsIrwteUon, U y g ié n e
Quel est un de nos principaux défauts comme peuple ?
93
De l’éducation des enfants (opinion des anciens Vaudois
à ce s u j e t ) .................................................................................97
Comment remédier à notre manque de courage moral? 129
État de l’instructionpublique dans les Vallées Vaudoises 175
De la s a n t é ................................................................................ 99
B I O G R A P H I E ^ A H E C U O T E S ^ PEHÎSÉES
En exemple de r e s titu tio n ..............................................
12
Le pasteur Josué M e i l l e .......................................................... Uh
Un soldat V a u d o is ...................................... ............
79
Lavater et sa f e m m e ................................................................ 82
17
89
4
Dorniers inonients de Mr le pasteur Appia . . page 142
Michel ou le salut par g r â c e ......................................191
P en sées................................................................................ 193
POIilTIQUE
Des différentes formes de g o u vernem ent..................... 21
l^a C o n stitu tio n .................................................................Hii
Le Slaluto coniinenlé et expliqué dans ses principaux points 148
KCOiVOlTIIE 1(0?tIESTIQlTE
ir i —
*
Pensées économiques extraites de Benjamin Franklin
68
87 187
25
64 84
101 113
AGRICEliTERE
Reelierclics sur le marin-blanc
Considérations générales sur l’Agriculture
CORRESPOfliRAMCE
Lettre du syndic de St Jean au rédacteur de YEcho des Vallées
Lettre au rédacteur sur la G ym nastique...........................
30
161
POESIE
L’amour du prochain
160
VARIETES
La Garde Nationale et la fête du Corpus Domini
Du travail dans les jours de fête catholique .
Un mot aux Vaudois sur la situation présente
Paul T o u rn .................................................................
C’Amico del P o p o l o ......................................................
De l’usage du français dans les Vallées .
Entretiens intimes ; I’E ternel règne . . . .
D’un monumenta élever par les Vaudois au roi Charles-Albert
Le tout est de s’entendre . . . . . . . .
Quelques mots aux lecteurs de YEcho
9
11
48
52
69
77
158
182
182
185
AOWEEKiES
Nouvelles religieuses : jjagfcs 12, 29, 55, 70, 88, 102, 116, 153,
» 151, 162, 185, 195.
Nouvelles politiques : n 14, 30, 54, 117,156, 152,165, 185, 196.
5
I'* A K N E E
EE I S J U IE E E T 1 * 4 »
BIES
V
feuille IHensucUe
SPÉCIHLEHeNT COmCBËE ÎUX IÏÏÉRETS DE U EiNiLLE VÄDD0IEI
<• Uh d ion <ju’ es y a u d e s .
tt
u
lu disent qu’ il est Vaudois «
Nobta leyczoïi.
SoMHAiRE;La place du Château de Turin e n l5 â 8 e t en 18ft8. — Quelques mots
à propos du prochain Synode de l’Église vaudoise. — La Garde nationale et
la Fêle du Corpus-Domini. — Du travail dans les jours de fêle catholique.
Un exemple de restitution. — Nouvelles religieuses. — Nouvelles politiques.
B C E N Z S H I S T O R IQ U E S
Mja $»lac0 «fM VHâteaw ( f e Vwritm, e n 1 5 A 9 e t e n 16411
D è s le matin du
jour du mois de mars de l’aii 1 3 5 8 , un
mouvement inaccoutumé, comme celui d’un jour de grande fête,
se faisait remarquer jusque dans les rues les plus écartées de la
capitale du Piémont. Mais nulle part ce mouvement n’était aussi
apparent que sur la place dite du Château et dans les rues qui l’a
voisinent. Il n’était encore que neuf heures, et déjà cette place
immense, capable de contenir des milliers et des milliers de per
sonnes, regorgeait de peuple; tandis qu’aux fenêtres, aux balcons,
sur les terrasses et jusque sur les toits de ses palais, partout où il
avait été possible de poser le pied, l ’œil n’ apercevait que têtes ser-.
réesles unescontre lesautres, s’étageantàuneprodigieusehauteur.
A quel spectacle accourait donc si m atin, et en apparence,
avec tant d’empressement. cette population entière, où se
confondaient et se heurtaient nobles et manants, bourgeois et
prêtres, hommes et femmes; tous parés Cfnnme pour un jour
de réjouissance publique ?
6
—
12
—
Un grand [joteau piaulé eu terre, vis-à-vis de la porte orientale
du Cliàlean ; autour de ce poteau du bois amoncelé ; plus loin ,
vers le milieu de la place, un vaste amphithéâtre destiné à servir
de tribunal, disaient assez que ce spectacle était un supplice . et
que le feu était l’instrument choisi pour l’ infliger.
Maisà quelle catégorie de criminels appartenait le malheureux
(|ûi allait subir un si affreux martyre? — Si vous aviez adressé
cette question à quelqu’un de la foule, il vous eût répondu que
cet homme n’avait ni tué, ni volé, ni empoisonné de fontaine , ni
jeté un sort sur un fils unique ; qu’il n’ avait trahi ni le ro i, ni la
patrie.................Et qu’ avait-il donc fait pour mériter un pa
reil châtiment? — Aucun mal: seulement il portait un nom q u i,
à celte époque, constituait à lui seul un crime plus grand que tous
les crimes ensemble; un nom qui avait déjà faitallumer des bûchers
par centaine de milliers, et qui, pendant longtemps, devailenallumer encore; cet homme était un hérétique, un Faudois, et son
crim e , crime horrible pour le temps dont nous parlons, était
d’adorer Dieu d’une autre manière que le grand nombre, de cher
cher son salut par une autre voie que celle que les Conciles avaient
indiquée, et autorisée. L ’ âme d’un tel homme était perdue, irrémissiblement perdue, perdue pour l’ éternité, puisque « hors de
l’Église point de salut »; et comme si ce n’était pas déjà là pour
lui un assez grand malheur, on se croyait obligé d'anticiper par
les tourments et les supplices sur ce jugement de la justice divine :
tant on avait perdu de vue cette vérité, que la foi est une grâce ;
tant cette loi de charité dont le Sauveur du monde a fait la loi
fondamentale de son royaume avait été oubliée et méconnue !
C ’était donc pour faire acte de bon chrétien, en croyant d’ac
complir une œuvre méritoire, que ce peuple tout entier, que ces
femmes, que ces jeunes vierges, surmontant les sentiments les plus
naturels à leur sexe, venaient repaître leurs regards des dernières
convulsions d’ un agonisant. ^ A ce sentiment s’ajoutait, il est
v r a i, pour plusieurs, la curiosité naturelle toujours, mais celle
fois tout particulièrement excitée par les circonstances extraordi
naires du personnage qui en était l’objet. En effet, cet homme qui
allait étrebrûlé comme Vaudois, n’était point sorti du milîeü d’eux
et c’était plutôt dans'les rangs de leurs persécuteurs, que parmi les
martyrs de leur cattse','qu’ on se serait attendu à le rencontrer.
{} s'appelait
et avait vU le jour àBusca, petite
v^ 'é située d a 'n ^ marquisat de Saluées.'’Fils unique d’un père
qui s’ était distingué parmi les chefs de la terrible croisade dirigée
7
— 3 —
fonlre les V^audois en
il n’avait point déineuli son origine,
elavait, devenu moine,continué, par la parole, l’œuvre de conver
sion que son père avait commencée avec l’épée ; mais l une était
restée aussi impuissante que l’au tre, elle s subtilités du Fran
ciscain , comme le fer du Chef-de-bande, étaient venus se briser
contre la fermeté inébranlable de ces montagnards, et leurbumble
soumission à la Parole de Dieu. Peut-être, fut-ce le moine »¡ui,
sans s’en rendre bien compte, emporta de ce combat les blessures
les plus profondes. Ce qu’il y a de certain, c’est que bientôt après,
les rigueurs de son Ordre ne suffisant plus à la soif de |)erfeetion qui
le dévorait, Fra Gialîredo avait abandonné les Franciscains, pour
entrer aux Capucins que l’on venait d’instituer. Les austérités
excessives, la haute réputation de sainteté, mais plus encore l’élo
quence sans égale de Fra Bernardino da Sienna, répandaient sur
cet Ordre dont, à deux reprises, il fut nommé général, un éclat
extraordinaire. De toutes parts, on leur demandait des Prédica
teurs , et c’est en cette qualité que Gialîredo et douzeautres moines
avec lui avaient parcouru, en compagnie de Bernardino, les prin
cipales villes de l’Italie. Quand ce dernier, ne pouvant dissimuler
plus longtemps ses véritables convictions, quitta sa patrie pour se
se retirer à Genève, le grand scandale qui en résulta ne put que
rejaillir sur ces eompagnons lesquels, devenus suspeets à la Cour
de Borne , furent aussitôt rappelés dans cette ville, et soumis, du
rant quelques années, à la plus étroite surveillance. Gialîredo, plus
soupçonné probablement que les autres, n’avait été rendu à
une entière liberté, que lorsqu’il eut consenti à échanger le froc du
raoinecontrel’habitduprêtreséculier.Sousce nouvel habit, pourvu
d’une pensionetde larges bénéfices, ilavaitsuiviàla Cour de France
le Légal du Pape; puis, de retour de cette ambassade, se trou
vant à Lyon, comme les doutes qui dès longtemps le travail
laient au sujet de ses croyances, n’ avaient fait que se fortifier, il
avait pris congé du Légat et s’était retiré à Genève. Cela se passait
en 1556 : Gialîredo avait alors
ans. Environ une année après,
l’Eglise de S. Jean, dans le Val-Luserne, sollicitant un Pasteur,
il y avait été envoyé, et il exerçait depuis quelques mois un mi
nistère béni au sein de ce même peuple qu’il avait jadis combattu,
lorsque, pressé du désir de visiter sa ville natale et les quelques
fidèles qui s’y trouvaient, ainsi que dans les environs. Use décida à
entreprendre ce court voyage. Hélas ! les adieux qu’il fil à ses pa
roissiens en les quitlantdevaientétre les derniers. A sonretour, pas
sant parla ville de Barge, il y avait été arrêté et jeté en une prison
8
— U—
d’où, ayaiitpu s’enfuir et ne l’ayant pas voulu, pour nepas manquer
à sa parole , il avait été envoyé à Turin pour y être jugé comme
hérétique. Là , questionné sur son passé, sur ses relations, sur
ses croyances, il avait tout confessé avec la plus entière franchise.
En vain, l’Archevêque qui l’avait connu dans de meilleurs temps;
en vain, le Président de St. Julien et d’autres membres du Parle
ment avec lesquels il s’était rencontré plusieurs fois familièrement
lors de sa mission en France, le sollicitèrent-ils par toutes sortes de
considérations et à différentes reprises de se rétracter, il était de
meuré inébranlable, disant « qu’il ne voulait croire autre chose
que ce qui est contenu dans les Ecritures du Vieux et du Nouveau
Testament » et s’estimant heureux de seeller de son sang les vé
rités que le Seigneur lui avait fait connaître.
Tel était l’homme dont la foule attendait l’apparition avec
une impatience plus facile à deviner qu’à décrire.
Enfin onze heures sonnèrent à l’horloge principale du Château.
A ce signal, les cloches detoutes les Églises s’ébranlèrent, et, presqu’aii même instant, l’on vit défiler par la rue qui, de la Cathé
drale, débouche sur celte place, unlong cortège précédé d’unPorlecroix et d’une richebannière sur laquelle était peinlel’image deS.
Victor premier évêque de Turin: c’était l’Archevêque avec son
Clergé et une cohue de moines qui, s’avançant lentementaumilieu
(les génuflexions de la multitude, vinrent prendre place sur les
gradins supérieurs de l’amphithéâtre dont nous avons parlé. Ils y
étaient à peine assis, quand le pont-levis qui, du Château condui
sait â cette partie de la place, s’abaissa, et un second cortège, tout
composé cette fois de personnages en toge noire, parut, lequel vint
occuper les sièges qui lui étaient destinés au-dessous des premiers:
c’étaient les membres du Parlement de Turin, qui y administraient
la justice au nom du roi de France, Henri II, alors en possession de
la plus grande partie des domaines formant le patrimoine de la
Maison de Savoie.
Cette double apparition, au lieu de calmer l’impatienccdesspeclateurs, ne fit que l’accroître, et tous les regards se portèrent avec
une nouvelle avidité vers le pont qui était resté baissé, et par où la
victime devait arriver. Tout-à-coup un cri immense retentit, poussé
par des milliers de bouches à la fois : « le Faudois ! . . . . voilà le
« Faudois ! . . . . mort au Faudois!. . . mort à l'hérétique!... »
et chacun désignait de la main un groupe qui venait de se mon
trer sur le seuil de la porte du Château. C’était Varaglia escorté de
quelques moines qui psalmodiaient à voix basse et d’un ton plaintif
9
les litanies des agonisants. Le corps enveloppé d’une longue tu
nique couleur de souffre, la tête découverte, le Ministre vaudois
s avançaitau milieudes imprécations de la foule, aussi serein etaussi
calme ques’il eût marché à un triomphe. Quandil futarrivéprès du
bûcher et aprèsque le bourreau l ’eut attaché au poteau, la Cour lui fit
demander une dernière fois s’il voulait se rétracter et abjurer ses
hérésies. — « Avec l’aide de Dieu » répondit le martyr, « je ne
« me rétracterai point, à moinsquc, parlesEcrilures, onnememon« tre la fausseté des choses quej’aiavancées. » —Alorsle greffierlut
à haute voix, l’arrêt du Parlement, portant sentence de mort contre
Varaglia. C ’était un résumé des différentes réponses faites par ce
lui-ci à ses juges, auxquellesonavait joint une quantité d autres
accusations, les unes méchantes, les autres simplement absurdes,
toutes sans le moindre fondement de vérité. La conclusion en était
que: « vu les réponses du dit Varaglia, par lesquelles il a enlière« ment persisté enses fausses et hérétiquesopinions; vu les conclu« sions du Procureur général du roi ; vu aussi la sentence donnée
« par le Vicaire de l’Archevêque de cette ville de Turin, par la« quelle le dit V'araglia a été déclaré hérétique et schismatique,
« réprouvé et séparé de l’Église, et renvoyé à son juge séculier
« pour être puni selon la loi; et ouï de rechef les gens du r o i ......
« la dite Cour a condamné et comdamne le dit Varaglia à être
« étranglé, puis brûlé en la place du Château de cette\ ille, comme
« hérétique et schismatique, et comme séducteur et lurbateur de
« la paix de la République chrétienne, et infracteur des ordon» nances et des édits royaux. »
Pendant toute celte lecture qui avait été fort longue, Varaglia
n’avait cessé de prier en lui-même avec la plus grande ferveur.
Quand elle fut finie, promenant sur la foule qui l’ entou
rait un regard plein à la fois de gravité et de bienveillance :
« Peuple de Turin, s’ écria-t-il d’ une voix ferme, au nom
« du Dieu trois fois saint, en la présenceduquel jevais paraître, je
« vous adjure de m’écouter. On m’accuse d’être un hérétique:
« Dieu m’ en préserve! Ce que moi et les brebis du milieu des« quelles on m’a arraché, nous croyons fermementet de tout notre
'> cœur, c’est tout ce qui est contenu dans les Saintes Écritures
« du Vieux et du Nouveau Testament: notre foi est celle des Pro« phètes, celle des Apôtres, celle des premiers Chrétiens, celle de
« tous les Saints et de tous les Confesseurs qni ont laissé leur vie
« pour le nom du Seigneur Jésus-(]hrist. Voilà notre fo i, nous
10
— G —
« n en voulons point d’autre. » — Prenant ensuite l’un après
l’autre les articles fondamentaux de cette croyance, il les déve
loppa avec tant de conviction, et en les appuyant d’un si grand
nombre de déclarations de l’Écriture , que ses auditeurs en étaient
visiblement très-émus. 11j ^ l a avec la même vigueur les accu
sations mensongères contenues dans l’arrêt de condamnation, sa
voir: qu’il autorisait les désordres, qu’il méprisait les Saints et la
Vierge Marie , et qu’il poussait à la rébellion contre les princes,
puis il ajouta: « Peuple de Turin, seigneurs, prêtres, bourgeois,
« vous tous, de quelque condition et de quelque âge que vous
« soyez, qui êtes venus assister à ma mort, jevous en conjure par
« le saint nom de Dieu qui nous jugera; par le salut de vos âmes,
« lequel doit vous être plus précieux qu’aucune chose au monde,
« attachez-vous à l’Évangile, puis qu’en lui seul sont contenues
« les paroles de la vie éternelle ! Quant à moi, s’écria-t-il, en le« vant auCieldes regards où se peignaient lajoie et le triomphe, je
« sais en qui j ’ai cru, et je suis assuréque, ni lamort,nila vie, ni
« aucune créature, ne pourra jamais me séparer de la tendre di« lection dont m’a aimé mon bénin Sauveur J.-C ! ............. »
Quand le Ministre vaudois eutcessé de parler, un murmure d’éton
nement et de compassion parcourut toute la foule. Plusieurs, émerveillésdecequ’ilsvenaientd’entendre, ne pouvaients’empêcher de
dire à haute voix : « Que veut-on dire de cet homme qui parle
« tant bien et tant saintement de Dieu et de la Vierge Marie et de
« toutes choses ? c’est à tort et sans cause qu’on le fait mourir ! »
Le bouiTeau s’étant approché et lui ayant, selon l’usage, demandé
pardon de sa mort : « Non seulement, lui dit Varaglia, je te par« donne, mais je pardonne aussiàceux qui m’ontfaitemprisonner
H à Barge, à ceux qui m’ ont amené en cette ville, et à
« ceux qui m’ont condamné à cette mort: prends courage et exé« cute ta charge, ma mort ne sera pas inutile. » Après cela « fit
« son oraison â Dieu, et en l’invoquant à haute voix, le bourreau
« l’étrangla par derrière, et mit quand et quand le feu au bois. »
« Plusieurs, ajoute le na’if historien auquel nous empruntons
« ces détails, récitent pour chose mémorable advenue en cette
« mort, qu’ une colombe voltigea à l’entour du feu , qui fut es« timée pour signe et témoignage de l’innocence de ce martyr du
« Seigneur ; mais nous avons plutôt à insister au principal que de
« s’arrêter par trop curieusement aux choses extérieures ou
« rares. «
La suite au prochain N°
11
— 7 —
9 V x i >q v e s m o t s
A P B O P O S O O P R O C H A IN ST-N O D C D E 1.’ É G L IS E
V A D D O IS E
(ie Synode déclaré loul-à-iail indispensable par la V . T able,
déjà dans sa séance du 19 mai 18U7: sollicité à peu prés en même
temps par un certain nombre de Paroisses ; accepté par la grande
majorité de celles-ci, au commencement de novembre dernier,
sera finalement réuni, nous assure-t-on, à la fin de ce mois ou au
commencement du mois prochain. — Comme on le v o it, ce n’est
pas par trop de précipitation en allai res que nouspéchons. Patience!
s i, en allant plus lentem ent, nous allons d ’un pas plus ferme. Pa
tience! si ce synode tant renvoyé, tant retardé, répond, par ses
résultats, à l ’ importance des motifs qui en ont fait demander la
convocation.
Mais pour qu il en soit ainsi, ce n est pas assez de désirer, il faut
agir. Le désir sans l’action est aussi incapable d’opérer le bien, (‘ii
quelque sphère que ce soit, que le désir d ’une riche moisson, sans
le travail nécessaire , est incapable de la produire. Notre Synode
sera ce que nous l ’aurons fait: un Synode riche en bons résultats
si, pénétrés du caractère et de la mission d’ une telle assemblée
nous mettons tous nos soins à n’y envoyer, comme députés, que
des hommes comprenant le vrai bien de l ’Église et le voulant ; un
Synode, nonseulement insignifiant, mais désastreux, si, par indif
férence , ou cédant à des considérations purement extérieures ou
personnelles, nous en ouvrons l’entrée à des hommes ne possédant
aucune des qualités qu’un « représentant de l’Eglise » doit revêtir.
Que chacun donc quecela concerne, y fasse une sérieuse attention.
Q u ’on ne dise pas, ce que nous avons si souvent entendu répéter
en pareilles circonstances : « cela ne me regarde pas l » Non. cela
ne vous regarde pas, si membre de l ’Église vaudoise uniquement
par la naissance et par le baptême que vous y avez reçu, vous ne
portez aucun intérêt à ses destinées. Mais, s’il en est autrement;
si heureux d ’appartenir à une Église qui a pour fondement et pour
règle l ’Evangile; à uneÉglise que la foi de ses confesseurs a rendue
célèbre dans tout le monde, vous mettez sa prospérité au nombre
de vos plus chers désirs, comment quelque chose d ’aussi impor
tant pour cette Eglise qu’ un Synode chargé de régler tout qui la
concerne, ne vous regarderait-il pas? Serait-ce parce qu’il n’y a
pour vous, dans les résultats d’une assemblée de ce genre, aucun
avantage matériel à espérer?En effet, il estassez probaîde que votre
12
—
8
—
fortune ne se ressentira ni eivbien, ni en mal, des décisions qui y
seront arrêtées. Mais n’y a-t-il donc au-dessus de ces intérêts
purement matériels, rien absolument qui nous regarde, rien
à quoi nous devions nous intéresser?— Ce n’est pasvous, frères,
vous les descendants d’hommes qui ont tout sacrifié à leur foi, qui
oserez le prétendre! Ou bien cela ne vous regarderait-il pas par la
raison que, n’assistant point vous-même au Synode, la responsa
bilité de ce qui s’y passe ne saurait vous revenir? — Mais songez-y
bien : celui que vous députez ou que vous laissez députer au Sy
node, si ce n’est pas vous, c ’est un autre vous-même. Ce qu’il y
fait, pour autant que vous avez concouru à sa nomination, soit en
agissant, soit en n’agissant pas, c ’est vous qui le faites, lebien comme
le mal est votre ouvrage, et devant Dieu, si ce n’est devant les
hommes, vousaurez à en répondre. Comment donc direz-vous en
core: cela ne me regarde pas?
Vous ne voulez pas vous en mêler, dites-vous, pareequ’en vous
en mêlant, vousvous mettriez mal avec tel ou tel, et qu’avant tout,
c'est la paix que vous voulez. Triste paix ! honteuse paix ! croyezmoi, que celle qu’on ne craint pas d’acheter au prix de son devoir,
au prix de sa conscience.
Mais à quoi bon, ajoutez-vous encore, puisqu’au bout du compte
ce sont toujours les plus intrigants, les plus ambitieux qui l’empor
tent?-Je le crois bien, quand vous faites tout pour leur rendre la vic
toire le plus facile possible ! En ceci précisément est la cause prin
cipale du mal qui se commet dans le monde, c ’est que pendant
que les méchants parlent haut et agissent avec énergie, ceux qui
veulent le bien se taisent, et s’en cachent presque comme d’une
mauvaise action.
Trêve donc! de cette parole désolante: « cela ne me regarde pas »
Oui, cela vous regarde, autant et plus qu’aucun autre intérêt que
vous puissiez avoir ici bas; oui ceite affaire est votre affaire, une
affaire importante, uneaffaire qui veut être traitée avec consci ence,
avec sérieux, en même temps qu’avec beaucoup de prières. A
l’œuvre donc dans cet esprit! et Dieu qui nous a déjà tant aidés
et tant bénis, nous bénira encore cette fois, et avec son secours,
l’Église vaudoise comptera le Synode qui s’approche, au nombre
de ceux qui auront le plus contribué à sa prospérité.
13
—
9
—
EM€ÌMra»,‘l¥nltoMut€f e t la F ê l e «fw Caet»u»~ O o t a t a i
)
Ce n’a pas été sans une grande surprise, que nousavons vu af
fiché au pilier public de St. Jean , l’avis dont voici la traduction :
l,c Syndic de St. Jean soussigné, désirant célébrer avec solennité les Fêles
du Corps du Seigneur et de S. Jean patron de ce lieu, qui auront lieu, la
l « le "J2, et la 2"*' , dimanche prochain, vingt-cinq du courant, se fait un
devoir de prévenir tant les commandants, que les officiers et sous-officiers
et soldats de cette milice communale qui désirent d’y intervenir libre
ment et de leur spontanée volonté, qu'il en sera fait mention honorable à
l’autorité supérieur«.
Donné à S. Jean le 18 Juin 1848.
Le Syndic M. P ertcsio.
Que signifie, nous permettrons-nous de demander, une pareille
invitation venantd’unepareillesource?QuedansuneCommunedont
1a Garde est toute composée de Catholiques, croyant à la présence
deD ieudansl’hostie,cette Garde, dans un esprit de dévotion, et de
son plein gré, se mette souslesarmes pour solenniser, parce moyen,
un dogme qu elle accepte, cela se comprend. Mais que dans une
Commune dont la Garde est presque exclusivement composée de
Vaudois, c’est-à-dire, d’hommes dont les croyances sont en opposi
tion directe avec ce dogme, on invite cette Garde à contribuer, par
sa présence, à la solennité de la fête qui le consacre ; que cette in
vitation lui soit adressée par le Syndic, et avec promesse de faire
mention honorable à l’autorité supérieure de ceux qui l’auront ac
ceptée, voilà ce que nous ne comprenons plus aussi bien !
INous ne le comprenons pas, d’abord, pareeque l’invitation du
Syndic, dans de telles circonstances, froissant les convictions reli
gieuses de la grande majorité de la population, il est à supposer
qu’elle ne sera pas acceptée, et que par conséquent, cette considé
ration qui doit entourer Jusqu’aux moindres actes de l’autorité,
en recevra une atteinte préjudiciable.
(■) Fête du Corps du Seigneur, ainsi appelée à cause du but de sa fondation
ui est d’honorer d’une manière ||iarticulière le dogme de la présence réelle de
ésus-Cbrist dans l’hostie, une fois consacrée par le Prêtre. Cette fête, dont la
première idée remonte à une Religieuse de la ville de Liège, qui prétendit l’avoir
reçue par révélation expresse du Seigneur, ne fut d’abord célébrée que dans ce
Diocèse. Prescrite en 126a par le Pape Urbain IV à toute l’Église, elle ne fut
définitivement sanctionnée qu’au Concile de Vienne, l’an i 3 i l Le Concile de
Trente l’appelle; le triomphe de la f o i, la désignant par là comme ce qui sé
pare le pins l’Église de Rome, des Églises Évangéliques.
3
14
— <0 —
Noüs lie'le comprenons pas, en 2“^ lieu, pareeque nous ne vo
yons pas ce que peut faire à l’autorité supérieure ( autorité eUnïe
s’entend ), la présence d’un certain nombre deVaudois à une cé
rémonie du culte catholique pour que « mention honorable «
doive lui en être faite ; l’intention de cette autorité, nous en som
mes sûrs , n’étant point de gêner, ni par son approbation, ni par son
blâme, la conscience religieuse des individus.
Mais si le moyen imaginé par le Syndic de St. Jean pour faire
agréer son invitation, nous parait assez mal choisi, le but pour le
quel il l’a faite vaut-il mieux? Nous ne le pensons pas. Ce but, dit
l’affiche, c’est de « célébrer avec solennité la fête du corps du Sei
gneur. » Mais sans vouloir examiner si c ’est là, oui ou non, quel
que chose qni entre dans les attributions d’un Syndic, comme tel,
nous nous permettrons seulement de demander : le Syndic de St.
.leari ignore-t-il que, pour qu’une fête religieuse soit solennelle
ment , c’est-à-dire , saintement célébrée, la première condition
est que les hommages qu’on y offre à Dieu partent du cœur, et que
tout hommage qui ne provient pas d’une telle source est plutôt un
outrage qu’une chose agréable à la Divinité? Et sachant cela, com
ment la pensée a-t-elle pu lui venir, de faire concourir à la solen
nité d’une fête qui exalte le dogme de la présence de Dieu dans
l’hostie, une Garde nationale composée presqu’uniquement d’hom
mes dont la croyance, ainsi que nous l’avons déjà dit, est en
opposition formelle avec ce dogme? La chose, quant à nous, nous
parait si énorme que nous ne serions nullement surpris d’ap
prendre q u ’il en a été vertement censuré par l’autorité ecclésias
tique.
Si maintenant, nous envisageons cette invitation au point de
vue des personnes à qui elle aétéadressée, nous sommes obligésde
déclarer qu’elle leur est une insulte, et une insulte d’autant plus
grave que les sentiments auxquels elle s’adresseront d’un ordre
plus élevé. C’est leur dire en tout autant de termes: « Nous savons
'< bien que vous prétendez avoir une croyance, mais nous savons
aussi que cc n’est pas sérieusement que vous le dites; votre
« conscience, s: tant est que vous en ayez u n e, est assez élastique
« pour se prêter avec uneégale facilitéauxchoseslespluscontradic« toires ; et voilà pourquoi nous n’hésitons pas de vous demander
« à vous, prétendus Chrétiens évangéliqaes, de contribuer, par
« votre présence! à Teclat de celle de toutes .nos fêtes qui sépare le
« le plus profondément notre Gomronnion, de la vôtre !
*
Yaudois ! voulons-nous que ce soit ainsi qu’on nous juge. ?
15
— a —
De grâces, ne nous laissons pas faire illusion par les mois de
complaisaîice, de fraternité dont on se sert pour obtenir de nous
des actes qui nous déshonorent. Complaisants, soyons-le, non pas
un peu seulement, mais autant qu’il est possible de l’être . . . en
respectant toujours notre co'nscience. Que jamais l’accent d’une
ame honnête et généreuse faisant apj)el à notre fraternité, ne nous
trouve insensibles à cet appel; mais repoussons comme un ennemi
quiconque, nous appelant ^rère, ne craint pas de nous proposer
ce qui tendrait à nous avilir. En toutes choses, agissons de ma
nière à n’avoir jamais à rougir de nos actions ni devant Dieu, ni
devant les hommes. Nos pères ne nous ont pas laissé un autre
exemple, laissons en un aussi beau à ceux qui viendront après
nous.
Inutile d’ajouter après ce qui vient d’être dit, avec quelle satis
faction nous avons vu la noble attitude prise par la Garde-nationale
de St. Jean et de quelques autres localités vaudolses dans cette cir
constance. Si ce qu’on nous a rapporté, à cesujet, d ’une portion
petite, il est vrai, de la Garde-nationale de Rora, est fondé, nous en
sommes peinés ethumiliés: ce n’est paslàceque nous eussions at
tendu des compatriotes de Janavel.
O
m
t r a v a il Antxtt tvm Jo u r» «fe fê t v va lh oliQ t*«
A qui la permission de travailler les jours de fête catholique
doit-elle être demandée? Voici, pour ceux de nos frères qui seraient
dans le doute à cet égard, ce qui est statué par l’Edit du 20 juin
1730, art. 1", et la ligne de conduite qu’ils devront suivre, pour
tout le temps que cet édit eontinueraà être en vigueur.
« L’Edit du 2b juin 1620 leur permettant (aux Vaudois) de
« travailler dans les joui's de fête commandés par la Ste Eglise,
« mais seulement dans leur maison et à porte close; nous décla« rons que nous voulons de plus, qu’ils puissent faire ces ouvrages
« publics qui seront de temps à autre permis aux catholiques »
(fenaison, moisson, vendange et en général tout travail qui ne souf
frirait pas de retard ) « et aux mêmes heures qui sont permises à
« ces derniers, pourvu qu’wndes dits Vaudois, pour tous les autres
« en demande la permission au Juge ou Châtelain, et, dans les
« lim x où Un’y aura ni Juge ni Châtelain, qu’il suffise qu’il la
« demande au Syndic ou à un Conseiller catholique, dans les lieux
« où il y en aura ». Ainsi, un seul peu» demander la permission
16
— i2 —
pour tous et celte permission doit être demandée au Juge, ou au
Syndic , et s’il n ’y a dans la Commune où l’on réside, ni Juge ni
Syndic, à un Conseiller catholique, mais à personne d’autre.
Eæ etnttie tie reglittttion
Le trait suivant dont l’authenticité est parfaitement constatée,
ne sera pas mis en vain, nous l’espérons sous lesyeux de plus d ’un
de nos lecteurs :
Après la mort d’un des Officiers du Landgrawe de H ..., on
trouva dans ses papiers la lettre suivante qui lui avait été adressée:
« Je vous envoie ci-joint un florin (45 sous). Il y a 12 ans que j ’ai
« fait tort de 12 batz, (36 sous) à son Altesse le Landgrawe, dans
« une emplette de bois. Or comme vous avez le compte entre les
« mains, je vous renvoie ceque j ’avais pris à ce seigneur, et vous
« prie de vouloir bien ajouter ces 12 batz à votre compte; car je
« n’ai pas de repos en ma conscience, jusqu’à ce que j ’aie restitué
« cet argent. J ’espère que vous aurez cette bonté, et que vous
« ferez cela par charité. Les trois batz (9 sous) de surplus doivent
« être pour le port. Je n’ai point d’ami que je connaisse, et que
« je puisse charger de cette restitution. Cette lettre vous est adres« sée parceque Dieu m ’a pardonné pour l’amour de Jésus-Christ. »
Un article sur le marin blanc des vers-à-soie que, faute de place ,
nous n ’avons pu insérer dans ce N”, paraîtra dans le N“ prochain.
]VOW7rJEJLM,JÊBS tiÆ M ^ M fÎM J E V S Æ ^
VALLÉES VAIJD01SE5; Le 21 juin, le corps des Pasteurs, réuni sous la pré
sidence de la vén. Table, a, conformément à ce qui avait été statué au dernier
Synode de ISïti, procédé à la nomination de la Commission chargée d’examiner
la gestion de la V. Table, et de présenter son rapport au Synode qui doit s’as
sembler prochainement. Cette Commission a été composée de Messieurs Monastier et Rollier, pasteurs; Joseph Malan et Voile procureur, laïques.
FRANCE; Du 10 au 25 mai dernieraeu lieu, à Paris, une réunion des délégués
des^Églises Réformées de France, dans le but de rendre à ces Églises leur
ancienne organisation synodale, sous laquelle elles avaient été si florissantes,
et que la persécution d’abord, puis les vues égoïstes du pouvoir civil leur
avaient depuis longtemps ôtée: 88 délégués, pasteurs et laïques, étaient pré
sents. Les discussions sérieuses et approfondies auxquelles l’assemblée s’est
livrée pendant quinze jours consécutifs , ont eu pour premier et excellent
résultat de mettre à nu la vraie position de ces Églises; et si, à côté de beau
17
—
13
—
coup de faits dont il faut se réjouir, de grandes, de douloureuses misères ont
été révélées, cela aussi a son bon côté, puisqu’on ne peut eflicacéinent remé
dier à un mal quelconque, que lorsqu’on l’a bien connu et bien approfondi. Le
fait principal de ces réunions, a été la convocation à Paris, pour le 9 septembre
prochain, d’un Synode constituant, chargé d’élaborer une conslitulion ecclé
siastique qui sera plus tard soumise à la votation des Eglises.
En même temps que cette réunion, ont eu lieu les assemblées générales des
différentes sociétés religieuses protestantes dont le siège est à Paris: société
des traités religieux; société évangélique de France; société des Missions Evan
géliques; société biblique française et étrangère etc. etc. Dans l’assemblée gé
nérale de la société des Missimis Évangéliqnes qui est celle à laquelle sont
destinées les collectes qui se font au milieu de nous, en faveur de cette œu
vre, le comité dont les ressources ont été considérablement atteintes par les
événements de ces derniers mois, ayant posé à l’assemblée la question: s'il de
vait abandonner l’œuvre si remarquablement prospère que ses missionnaires
poursuivent au sud de l’Afrique, le cri de l’assemblée a été qu’il ne le fallait
point, et à l'issue de cette séance plus de 5,500 fr. ont été déposés ou souscrits
sur le bureau. On a vu, à cette occasion, non seulement des riches, mais même
des domestiques et de simples ouvriers s’arracher les bijoux de diverses sortes
qu’ils portaient sur eux, et les offrir avec joie pour la conversion des idolâtres!
Dans une des conférences dites générales qui se réunissent à celte même
époque et qui se composent de Professeurs en Théologie, de Pasteurs, de Mini
stres et d'Anciens, l’assemblée, ensuite d’ une chaleureuse allocution qui lui fut
adressée par un de nos compatriotes, le vénérable pasteur Appia de Francfort,
a vôté aux fidèles de l’Église vaudoise, au sujet de leur récente émancipation,
l'adresse suivante que nous sommes heureux de pouvoir communiquer à nos
lecteurs :
Paris le 19 mai 18(i8.
Trés-chers et honorés frères en Jésus-Christ !
L'Église Évangélique, se souvenant de votre zèle et de voire constance au
milieu des épreuves, vous applique depuis longtemps, avec respect et avec
douleur, la sentence de notre divin Maitre : < Heureux ceux qui sont pei'sécutés
pour la justice». Nous nous sommes réjouis de voir se lever pour vous l’aurore
de la liberté religieuse. Nous vous en félicitons de tout notre cœnr, et nous sup
plions notre Dieu de faire tourner les bienfaits temporels qu'il vient d’accor
der à vos Églises, par la juste protection de votre roi, à I affermissement de
votre foi, de votre gratitude, de votre dévouement à l’Évangile.
Bien aimés frères, l’un des vos nobles rejetons, notre vénérable frère Appia,
pasteur à Francfort, présent en ce moment à Paris, s’est fait, par mission qu'il
en a reçue, l’ organe de vos vœux et de votre affection envers nous, pasteurs,
anciens, diacres, etautres membres de l’Eglise de France, réunisence moment
à Paris, pour améliorer notre organisation ecclésiastique. Votre nom et votre
démarche ont excité dans nos cœurs une vive sympathie, et nous avons senti
le besoin de vous exprimer, en retour, des vœux non moins fervents et une
affection non moins profonde.
Puisse une sainte émulation de zèle nous porter à glorifier à l’ envi, dans deux
contrées voisines, le Maître miséricordieux et puissant que nous voulons servir.
Heureux de ces rapports de fraternité religieuse dès long temps établis
entre nous et renouvelés aujourd’hui dans des circonstances bien solennelles,
nous le serions davantage de les voir devenir habituels et fréquents, pour l’en
couragement et le succès de nos travaux consacrés au salut des âmes, et à
l'avancement du règne de la grâce.
Recevez, très-chers et honorés frères, l'assurance de notre affection dévouée
en noire Seigneur et Sauveur J . C.
'
(Suivent tes signatures).
18
—
U
—
SUISÜIÎ. Les persécutions de la part du Gouvernement du Canton de Vaud
contre les pasteurs démissionnaires (t) et contre l’iiÿ/tseiiiwe en général, con
tinuent de la manière la plus brutale. Bon nombre de ces pasteurs, surpris en
prière avec quelques uns des membres de leurs trompeaux, ont été, sans autre
forme de procès, séparés de leur famille et conduits dans leur Commune, par
les gendarmes, absolument comme on conduit les vagabonds. Ç’ était derniéremeiit le tour du vénérable M .’‘ Germond. le fondateur de l’Établissement des
Diaconesses à Echallens, pasteur aussi éminent par son éloquence, que par sa
piété et son ardente cliarité. Les choses en sont venues à un tel point, dans ce
pays qui porte pour devise ; liberté et patrie , qu’ une réunion d’ amis, autour
d’ une table de famille, s’ ils n’ ont le privilège d’appartenir à l’ Eglise du gou
vernement, constitue un crime pour lequel l'amende, si vous n’ êtes point pas
teur, l’ amende et le renvoi à la commune si vous l’êtes, ne sont envisagés que
comme de légères punitions. — Quelle profanation du sacré mot de libertél
ANGLETERRE; Voici surquelques unes des sociétés religieuses de ce pays, des
détails qui nous ont paru de nature à intéresser nos lecteurs.
La première en importanceestassurémentlasociété biblique, britannique et
étrangère fondée en 1804. Decotte époque à aujourd’hui, cette société a imprimé
et répandu au de là de vingt initiions d'exemplaires des Ecritures, dans plus
de cent-cinquante quatre langues ou dialectes, et a déjà employé à cet effet la
somme énorme de septante-cinq millions de francs. Revenu annuel, d’après le
dernier rapport; deux m illions, huit-cent- septante cinq mille fr.
Société Missionnaire de l’Église Anglicane, fondée en 1800. Cette société
a des stations à l’ouest et à l’est de l’Afrique, dans l’ Inde, dans la Chine, dans
les iles de la Méditerranée, et dans dilTérenles parties de l’Amérique et de
l’Océanie. Revenu annuel ; Deux m illions, neuf-cent mille francs
Société Missionnaire de l’Église M^esléyenne,foadéeeo 1786, définitivement
organisée en 1816. Elle a des stations au nord et à l'ouest de l’Afrique, en
Amérique, en .Australie, dans l’Inde, dans l'Océanie, et sur le Continent. Re
venu annuel : deux millions, neuf-cent mille fr.
Société pour la propagation de l’Évangile dans les lieux étrangers.. Elle a
des stations dans les cinq parties du monde. Revenu annuel : deux millions,
trois-cent, septante-cinq mille fr .
Société pour lu propagation des connaissances chrétiennes, fondée en 1698.
Elle met chaque année en circulation plus de quatre millions d’exemplaires,
entre Bibles, liturgies et autres livres de piété. Revenu annuel : deux millions,
deux-cenl-cinquante mille fr .
Voilà une partie seulement de ce que l’Angleterre protestante dépense annuellemonl pour les progrès de l'Évangile!
Il) On appelle ainsi dans le canton de Vaud, les Pasteurs au nombre de
plus de i3u qui, il y a environ 3 ans, donnèrent leur démission comme pasteurs de
l’Eglise snlariée par le gouvernement, celui-ci exigeant d’eux des choses con
traires 3 leur conscience. Avec ceux de leurs paroissiens qui leur restèrent
fidèles, ils fondèrent l’église appelée Eglise libre, par la raison qu’elle ne reçoit
pas de salaire de l’Etat.
JV O V W B E sM sE S F O M s M T M Q U E S
ÉTATS ITALIENS; R oyaume de la haute I t a l ie : l a guerre se poursuit en
Lombardie avec une lenleurque certaines gcnsappellent du mauvais vouloir, et
<qui n'est peut-être qu’un effet de la nécessilét ou le résultat des négociations
19
— iri
de |)!ii\ i|ue l'un dileiilainées depuis longtemps. Quoiqu'il en suit, il n'y a
plus eu, après la glorieuse journée de Go'ilo, du 50 Mai, aucun fait d'armes d’une
importance remarquable, mais de fréquentes rencontres, quelques unes même
asser. vives, dans lesquelles la victoire est toujours restée de notre côté. La
même chose n’a pas eu lieu dans le Vénitien, où dansle couvant de juin,plusieurs
desplusgrandescités,Vicence,Trévise,Padoue,Rovigoet tout récemment encore
la forteresse de Palma-Nuova, ont dù capituler avec l’ennemi. Venise lient bon,
et il parait qu’elle est en étal de tenir longtemps.
L'événement capital du mois qui vient de s’écouler, c’esiruuion de la Lom
bardie et des (|uatre provinces vénitiennes de Vicence, de Trévise, de Padoue
et de Rovigo, avec les étals sardes, pour ne former qu’un seul royaume, sous
la dynastie (l)de la Maison de Savoie. Cette union, acceptécie 28 par la Chambre
des Députés, aura comme conséquence la prochaine convocation d’une Consdluante, ou assemblée chargée d’arrêter la Cotistitulion de celte nouvelle
monarchie, laquelle assemblée sera nommée par le moyen du suffruge uni
versel. c’est à-dire, non plus seulement par les électeurs payant un cerlain
impôt, mais par tous les citoyens ayant atteint l'àgc de majorité, qui jouissent
de leurs droits civils.
Monseigneur Charvaz, ci-devant évêque de Pignerol, vient d'èlre nommé
Député par le collège de Mouliers, en Savoie. Si les vues politiques de Mgr
Chana/, sont encore ce qu’elles étaient en 1854, où il se déclarait disposé à
user de toute son influence pour faire revivre dans toute leur rigueur les nom
breux édits oppressifs concernant les Vaudois, ceux-ci auront singulièrement
à se féliciter de celte nomination !
É tats Romai.v s ; Le Pape continue à aller en avant aussi vite que le lui per
mettent son double sceptre et sa triple couronne. Faire marcher de front, sans
([u'ils SC heurtent, des intérêts souvent aussi opposés que ceux de prince italien
et de Père commun des fidèles est, il faut l’avouer, une chose assez difficile.
Pie IX l’aura déjà plus d’une fois senti; d'autres qui l’avaient senti depuis long
temps, le sentent mainlenanl plus fortement que jamais, qu’en résultera-1-il v
En attendant, ce ministère romain, où,jusqu’àces derniers temps, aucun laïque
ne pouvait avoir accès, est maintenant si bien et si complètement la'ique, qu'il
a failli donner sa démission, parceqiie le Pape voulait lui imposer un Cardinal
comme minislre Jes affaires étrangères.
Naples ; Apres les affreux massacres du mois de Mai, après l’état de siège
qui en a été la suite, celte capitale a repris une apparence de Iranquillilé. Mais
ce n’est qn’une apparence: l’inquiétude est au fond de tous les esprits; le roi
que l’on avait dit mort, non seulement ne l’est pas, mais il arme avec activilé;
les provinces aussi, mais contre lui. Les Calabrais, assure-t-un, auront bientôt
organisé une armée de 60,000hommes avec laquelle ils comptent marcher sul
la capitale. Que de sang va s’ajouter peut-être à celui qui a été répandu déjà 1
FRANCE : Les journées du 23 au 26 Juin, ont été pour Paris des journées de
malhenr eide sang dont le souvenir ne s’effacera jamais. 'Voici pour ceux de
nos lecteurs qui ne sont pas fort au courant des affaires politiques, ce qui a
donné lieu à ces épouvantables massacres. La révolution de Février qui ren
versa du trône Louis-Philippe et proclamma la République, avait fait au peu
ple et surtout à la classe ouvrière les plus magnifiques promesses. « L’ouvrier,
« disait on, ne devait pins manquer du nécessaire; c’est à la nation à fournir
« du pain à celui qui n’en a pas. > Ces idées existaient depuis bien longleni|)s,
mais dans les esprits seulement. La Révolution voulut les mettre en pratique.
Pour cela des atteliers de différentes industries furent ouverts, aux frais et
pour le compte du Gouvernement, à tous les ouvriers qui s’y présentèrent et
ji) Suite de rois d'un pays. -- Venise aussi a vôté pour l’union te 3 Juillet
20
— lü —
qui, buiis uu iiiaiivais, y recevaient une paye à peu près égale. On les appela
des atleliers nationaux, et les ouvriers y affluèrent bientdt au nombre de plus
de 100,000. Qu’en résulta-t-il? c’est que les industries privées ne pouvant sou
tenir la concurrence des atteliers de l’Etat, elles tombèrent, et les capitaux
disparurent. Or sans capitaux, point de commdrce: le gouvernement se trouva
bientôt tellement surchargé de produits qu’au lieu de donner du travail à cent
mille ouvriers, il pouvait tout au plus en donner à 20,000. C’était pour lui une
espèce d’économie de payer les autres 80,000 pour ne rien faire. Mais cette
économie le ruinait; l’Etat le sentit, et sous divers prétextes, chercha à réduire
d’abord, puis à .supprimer les atteliers nationaux. De là, la révolte. Elle fut,
nous l’avons dit, terrible. Durant trois jours et trois nuits, malgré une pluie
battante, la fusillade et les coups de canon ne cessèrent presque pas de se
faire entendre dans cette vaste capitale. Les rebelles cachés derrière leurs bar
ricades d’où ils faisaient pleuvoir un feu des plus meurtriers sur la troupe et
sur la garde nationale, ne se sont rendus qu’à la dernière extrémité, et se sont
montrés d'une férocité inouie. Leurs pertes sont immenses. Celles de l’autre
côté ne le sont pas moins, et il y en a parmi de très-douloureuses, entr’autres
celle de plusieurs membres de l’Assemblée nationale, de plusieurs officiers de
haut rang, etde l’archevêque de Paris qui est tombé, percé d’une balle, au mo
ment où il cherchait, par ses exhortations, à faire rentrer les rebelles dans le
devoir. Plusieurs maisons ont dù être démolies à coups de canon, pour en dé
busquer les insurgés. Paris est dans un état de désolation affreux à concevoir.
Enfin la victoire est restée au bon ordre, et peut-être par cette victoire des
malheurs incalculables ont-ils été épargnés à la France et à l’Europe tout
entière. Le nombre probable des morts est de douze mille.
ALLE.MAGNE : Constitutions péniblement élaborées, émeutes, démembre
ments de royaumes, luttes de nationalités entr'elles, voilà en deux mots l’aspect
que présente non pas un seulement, mais la plupart des Etats formant la Con
fédération Germanique. Le manque de place ne nous permet pas d’entrer dans
les détails.
ANGLETERRE : L’agitation n’a pas manqué non plus dans ce pays; mais l’at
titude énergique du Gouvernement et le concours efficace qu’il a rencontré
dans la partie bien pensante de la population ont fait échouer toutes les tenta
tives de désordre.
Le Gérant: J, P, HEiLLE.
Ce Jaurnal parait le premier Jeudi de chaque mois, par livraisons de i6 pages in S”.
Prix de l’abonnement franco-frontière, 3 fr. 5o c.
Pour les abonnements et les réclamations, s’adresser au bureau du Journal, à
La Tour, vallées vaudoises. Lettres et envois franco.
N. B. Des circonstances tout*à-fait indépendantes de notre
volonté ont retardé la publication de ce premier N“.
Pignecol
184
B, imprimerie de Paul Ghighelti