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année
Avril 18G7.
N ° 4.
L'ÉCHO DES VALLÉES
—(NOUVELLE SÉRIE)—
Que toutes les choses qui sont véritables....... occupent
vos pensées — { Philii)piens., IV. 8. )
SOMMAIllE — fioionie du Rosario. — Education du ver-à-soie. — Correspondance. — Evangélisation. — Vallées vaudoiscs.
COLONIE DU ROSARIO
Le moment est-il venu de raconter la fondation et le développement
de la Colonie Vaudoise du Rosario Oriental? L’on peut avoir, à ce sujet,
des vues divergentes pour ne pas dire diamétralement opposées. Il semblerait, au premier abord, qu’un établissement qui date de la fin de 1856.
et qui, depuis le commencement de 1859, est entré dans une phase
nouvelle d’existence plus stable, est susceptible d’avoir quelque chose
ressemblant à de J’histoire. Ne serait-il pas intéressant, en efl’et , de
rechercher les causes qui ont nécessité cette saignée à notre petite
population, d’en peser la valeur, d’en montrer l’enchaînement? Ne
pourrait-on pas se demander pourquoi nos colons ont émigré dans
le Nouveau Monde , plutôt que de se répandre , comme nos vieilles
colonies d’avant la Iléformalion , en Italie même, et pourquoi, surtout,
ils ont préféré l’Amérique du sud , catliolique et espagnole, à la vie
sociale et politique de la grande république protestante du nord ? On
aimerait les suivre en 1856 à la Florida et les voir lutter avec les
premières difficultés de leur siluation ; puis, visiblement encouragés
par le Consulat d’Italie et par le bon accueil d’une société agricole ,
s’établir définitivement au Rosario Oriental, à 2o lieues de chemin de
Montevideo. — D’autre part , il ne nous coûte rien d’avouer qu’il est
telles questions personnelles engagées dans un pareil récit, qui ren-
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di-aient notre tâche passablement difficile. Ce qui est différé n’est
pourtant pas perdu. Et si nous devons renoncer, aujourd’hui , â écrire
une page de notre histoire contemporaine avec la liberté d’esprit qui
ne nous ferait pas défaut, s’il s’agissait de parler de nos vieilles
colonies de Provence , du marquisat de Saluces , du comté de Suze ,
de Calabre, de Fouille, et du Wurtemberg , — ce n’est point que le
désir nous en manque et que nous ne puissions, tôt ou tard, céder
à la tentation.
Malgré la réserve que nous nous imposons, on ne nous en voudra
pas, nous l’espérons, d’avoir inscrit, en tête de cet article le nom
de la Colonie du Rosario. Et puis , quand ce titre n’aurait piqué la
curiosité que d’un seul de nos lecteurs, encore faut-il la satisfaire,
d’une façon ou d’une autre.
Un ami a eu l’obligeance de nous communiquer une lettre en date
du mois de novembre 1866, dont nous extrayons les détails qui vont
suivre sur l’état actuel de la colonie. Ces détails portent sur un point
très-important qui a donné lieu , dans nos Vallées , à beaucoup de
commentaires, et, au sein de la colonie, à de nombreuses discussions.
Il s’agit, on le devine , de certain conflit entre le pasteur et le Consistoire auquel le rapport de la Table de 1866 (pp. 8 et 9) a accordé
une attention méritée.
D’où ce conflit a-t-il pu naître ? L’auteur de la lettre constate que,
pendant les premières années du ministère de M., les affaires
marchaient assez bien. Le culte public était régulièrement fréquenté ; et, outre le service du dimanche matin , l’instruction des
catéchumènes, poursuivie pendant cinq ou six mois de l’année,
avait lieu trois jours par semaine, à 8 heures du matin. Quelques
personnes , il est vrai, auraient désiré un service de plus , dans
l’aprês-midi du dimanche , mais ce n’est point de ce côté qu’aurait
pu se produire un différent. En général, les premiers germes de
désaffection , il faut bien le dire, résident dans des impressions toutes
personnelles et fort peu raisonnées; ainsi l’on reprochait à M. son
peu de familiarité et son air sérieux. Entendait-on par là un manque
d’affabilité ? Nous ne saurions l’affirmer d’une manière certaine ; ce
qui seul est évident, c’est que certaines imperfections de caractère ,
imaginaires ou réelles, ne laissent pa.s que de causer beaucoup de
tort à l’œuvre pastorale. Tous ces reproches , dit l’auteur de la
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— 51 —
lettre , auraient en partie passé inaperçus, si Mr M. avait eu à faire
avec des personnes d’un peu de caractère et d’éducation. Mais,
continue-t-il , lorsqu’on se trouve au milieu d’une population iguo)-ante et qu’on est appelé à la servir , il devient presque impossible
de la contenter , car le plus ignorant est toujours le plus grognard....
Malgré tout cela, la situation était tolérable; et elle eût continué
de l’être, sans l’arrivée en 1862, de M’’ P. que la correspondance de
quelque colon , mécontent du pasteur , avait sans dovüe indisposé
contre M"" M. Depuis lors tout alla de mal en pis: notre témoin, bien
que professant beaucoup de gratitude envers M” P, ne peut s’empêcher
de dire qu'il a trop écouté les flatteries de certaines personnes. Il
nous paraît donc équitable de constater que , dans ses rapports personnels avec les colons qui lui doivent tant, M'' P. n’a pas fait preuve
de tout le discernement désirable, et que son antagonisme avec M''M.
n’a certes pas contribué à améliorer la situation.
A cette cause vint s’en ajouter une autre d’un caractère très-grave
qui acheva de précipiter la crise. Les subsides collectés à l’étranger
par M' P. pour les honoraires du pasteur et de l’instituteur devaient,
au bout de cinq ans, être fournis par les colons eux-mêmes ; question
tout ausi difficile à résoudre au Rosario qu’elle pourra l’être chez
nous , si nous ne prenons d’avance nos précautions. Il s’agissait de
débourser une somme assez considérable et U semblait à nos Vaudois
que ce devrait être la fm du monde que d'être obligé de payer en bonnes
pièces d’or le trop juste salaire d’un pasteur et d’un régent- Celui-ci, plus
libre dans ses mouvements, opéra sa retraite dès que les honoraires
eurent cessé ; mais il n’était pas aussi loisible à M“' M,, chef d’une
famille assez nombreuse , de se retirer en Europe ou ailleurs.
Il fallait donc prendre des mesures qui ne fussent pas de simples
expédients. L’on proposa successivement un impôt du dixième sur le
revenu, et un impôt proportionnel sur la propriété ; mais les deux
projets furent écartés presqu’aussitôt. Ils méritaient bien de l’être ;
car s’il est quelque chose de choquant, c’est sans contredit l’impôt
en matière ecclésiastique. Après beaucoup de pourparlers, on parvint
à s’entendre à demi.... et c’était encore pour établir un impôt, sous
la forme d’une capitation , cette fois. Aussi , dans l’application . le
désaccord recommence de plus belle ; un sémestre s’écoule et le comité
collecteur n’a rien retiré , ou fort peu de chose. — Il est bon de savoir
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que chaque chef de famille s’engageait à payer anmiellcinent la somme
de deux piastres fortes ( plus de onze francs ) pour chaque membre
de sa famille. — Bien plus , aux réclamations du pasteur le comité
répond , faut-il le dire ? par des injures , et déclare qu’il ne veut plus
se mêler des affaires.
Que fait alors M” M. ? Armé du contrat passé entre lui et le comité ,
contrat non légal , à ce qu’il paraît , il a la malheureuse idée de
recourir en justice. Le directeur de la colonie , nanti de la question,
assigne un terme aux contribuables récalcitrants (soixante sur 128 à
peu près ) ; et, ce terme échu , les oblige de payer les arrérages, et
les frais en sus. L’on paie de fort mauvaise grâce , s’entend ; et il
s’ensuit enfin que, la position n’étant plus tenable, le pasteur donne
sa démission.
Les choses en sont là maintenant ; il est inutile d’entretenir nos
lecteurs des récriminations auxquelles se sont livrés, depuis lors, et
pasteur et consistoire , tous deux démissionnaires du reste. Au point
de vue matériel, la colonie se trouve , dit l’auteur de la lettre, dans
un état florissant, avec la perspective d’abondantes récoltes, surtout
en blés. Il est donc fâcheux que , dans de pareilles conditions de
prospérité, la colonie ne sache point prendre sur elle le soin de
subvenir aux besoins du culte et de l’instruction dans son sein ; et
il est particulièrement désagréable de la voir établir de véritables
impôts là où les principes volontaires devraient remporter un triomphe
signalé.
ÉDUCATION DES VERS-A-SOIË
f Seconde lettre J
La Tour, 4 avril 1867.
Le ver-à-soie appartient à la classe des insectes, que l’on nomme
ainsi parceque les animaux qui en font partie, parvenus à une certaine
phase de développement, ont le corps, pour ainsi dire, coupé par le
milieu en deux parties bieu distinctes, dont l’antérieure porte les
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— T) 3
jambes, quelque fois encore les ailes, et la postérieure forme le
ventre.
Avant d’arriver à l’état d’insecte parfait, il est cependant obligé de
passer successivement par plusieurs transformations remarquables.
et souvent môme tellement complètes qu’on les croirait impossibles
si l’observation journalière ne nous en démontrait la merveilleuse
réalité.
La première période de son existence, pour ne pas dire de sa vie ,
commence, à proprement parler, dans la graine, où il se trouve dans
les mêmes conditions que le poussin dans l’œuf de la poule.
On le désigne alors sous le nom à'embryon. Pour que l’embryon se
forme dans l’œuf, il faut nécessairement que le papillon dont l’œuf
provient se soit trouvé quelque temps en rapport avec un papillon mfde.
Sans cette condition , l’œuf n’en serait pas moins , il est vrai , pondu
par la femelle ; mais il ne serait pas fécondé. — Aucun embryon ne
s’y développerait, et par conséquent la graine demeurerait tout-à-fait
stérile. Bien plus , pour que la graine fécondée éclose, et surtout pour
qu’elle éclose dans des conditions convenables , il faut qu’il se soit
écoulé un certain temps entre le moment de la ponte et celui où
l’éclosion devrait normalement se faire ; il faut que la graine mûrisse ,
et c’est cette période que la graine traverse généralement dans nos
climats pendant l’hiver.
L’époque de l’éclosion venue, et sous des conditions données ,
toujours indispensables, d’un certain degré de température et d’humidité , l’embryon occupe peu à peu dans l’œuf une plus grande place
aux dépens des sucs nourriciers qui s’y trouvaient déjà.
La petite enveloppe change sensiblement de nuance ; elle finit par
se percer sous l’effort du germe même qu’elle renferme . et celui-ci
sort de sa prison sous la forme d’une petite larve, comme l’appellent
les naturalistes, ou d’un ver, selon l’expression ordinaire.
Dans cette seconde période de son existence le ver-à-soie ne diffère
en rien de la plupart des chenilles qui vivent sur nos haies et les
ravagent quelquefois.
Son corps est formé de douze anneaux dont les trois premiers
portent chacun une paire de petits pieds écailleux, et cinq des suivants cinq autres paires de pieds qui ne diffèrent des premiers qu’en
ce qu’ils sont membraneux et lisses. Leur peau est garnie de petits
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poils noirs qui disparaîtront bientôt, dès que l’animal aura acquis
un plus grand développement.
Quand on observe avec un verre grossissant, on découvre de chaque
côté de l’insecte une ligne formée par neuf petites ouvertures ovales
que l’on appelle trachées. Les trachées sont autant d’organes par le
moyen desquels l’animal respire , et qui représentent par conséquent
autant de bouches par lesquels l’air pénètre dans le corps , et en
ressort après s’être mis en rapport avec le sang.
Ce n’est donc pas proprement par la bouche placée dans la tête
que l’animal respire. Celle-ci ne lui sert que pour se nourrir. Elle
est armée de deux fortes mâchoires en forme de scies, qui se meuvent
horizontalement l’une contre l’autre , de manière à hacher la feuille
eu la prenant comme le ferait une paire de ciseaux, ou mieux encore
cette espèce de pinces dont le cordonnier se sert pour monter les
souliers.
Immédiatement au dessous des mâchoires , se trouve une petite
ouverture, une filière,-pav où sortira bientôt un petit fil de soie trèsfin , qui est fourni par deux organes secréteurs particuliers , placés
derrière cette ouverture dans l’intérieur du corps.
Sur l’arrière de la tête on distingue plusieurs replis , et enfin sur
le dernier anneau du corps se trouve un tubercule charnu, qui représente une espèce de queue.
Comme toutes les chenilles , le ver-à-soie change plusieurs fois de
peau à mesure qu’il se développe.
Régulièrement ces changements, ou mues, sont au nombre de quatre,
et correspondent à ce que l’on appelle vulgairement dormies. Souvent
cependant, mais toujours exceptionnellement, on n’en compte que trois.
Comme le ver-à-soie se développe très-rapidement, on comprend
aisément que sa première peau dont le tissu est d’ailleurs fort peu
élastique, ne puisse pas s’étendre convenablement en si peu de temps
pour se prêter à un pareil développement. Elle doit abandonner l’insecte après s’être desséchée ; mais Dieu a pourvu aux conséquences
de cette crise. — Sous cette peau qui se dessèche et ne tardera pas
à s’en aller, s’en prépare une seconde, puis successivement une troisième et enfin une quatrième, de la même manière que sous la dent
de lait de l’enfant il s’en forme déjà une autre toute prête à la remplacer, lorsque le moment sera venu.
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Vers l’époque de la mue, le ver-à-soie cesse de manger, ou mange
heaucoup moins ; il émet une quantité sensiblement plus abondante
de matière fécale ; son corps s’amincit de la sorte à un degré remarquable.
En môme temps il file de petits brins de soie qu’il fl.xe çà et Id
sur ce qu’il trouve à sa portée et par lesquels sa peau sera également
retenue lorsque lui-même fera des efforts en avant pour s’en dépouiller.
Une fois débarrassé de cette enveloppe le ver-à-soie se trouve
comme épuisé de fatigue ; il tombe dans une espèce de langueur, et
pendant les deux premiers jours il a peu d’appétit; mais bientôt la
faim lui revient ; il se remet à manger avec voracité, jusqu’au moment
où recommencera pour lui une nouvelle mue.
Les trois autres phases qui suivent celle que nous venons de décrire
n’offrent rien de particulier, si ce n’est quelque différence dans le
temps qui les sépare. C’est ainsi qu’en supposant une éducation normale et une température de 19® R, la première phase dure environ
cinq jours; la seconde, avec 18® R, quatre jours; la troisième cinq ,
et la quatrième six. Du moins pour les vers-à-soie provenants du Japon ;
car ceux qu’on élevait autrefois avec la graine du pays , mettaient,
en général, plus de temps pour passer d’une mue à l’autre.
Nous observerons en outre que les conditions de température peuvent faire varier considérablement l’échelle que nous venons d’établir.
C’est ainsi par exemple, que, avec une température initiale de 22® â
23® R, et en nourissant sans discontinuer les vers , on pourra leur
faire traverser toutes les mues en moins de 16 jours , pendant que
sous des conditions inverses , avec une température de 15® à 16® seulement et des repas peu fréquents on pourra prolonger la période des
mues bien au delà du double de ce temps. Quant à nous , nous
pensons que l’éducation la plus convenable est celle qui tient le
milieu entre ces deux extrêmes, celle dans laquelle la quatrième mue
s’opère vers le vingtième jour après l’éclosion. Mais s’il fallait opter
entre les deux extrêmes , nous préférerions toujours une éducation
trop hâtive à celle qui serait trop lente. Le froid ne fait pas périr ,
il est vrai , les vers-à-soie ; mais par le fait qu’il retarde leur développement , il les laisse plus longtemps exposés aux accidents divers
qui peuvent leur être funestes ; et ce qu’il y a de bien certain aussi,
c’est que la soie qui provient de vers dont l’éducation aurait été
hâtée , est généralement plus abondante et de qualité meilleure.
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En sortant de la quatrième mue , le ver-à-soie a une teinte jauneclair ; mais vingt-quatre heures après il a repris sa nuance ordinaire
gris perlé , et ce changement est un signe assez certain que l’animal
est dans des conditions de santé satisfaisantes. Peu à peu, néanmoins,
la partie postérieure de son corps, et particulièrement les deux dernières paires de pattes prennent une nuance d’un jaune rosé qui
finit par envahir tout le reste ; de sorte qu’en regardant alors le ver
à la lumière, il paraît transparent comme un morceau d’ambre jaune.
Enfin, au bout de quatre , ou tout au plus cinq jours , si l’espèce
est verte, le ver-à-soie est mûr. Son corps, jusque là gros et résistant,
devient à la fois mou et plus eiTilé ; il cesse entièrement de manger;
il court çà et là sur la feuille ; il lève la tète d’un air inquiet ; il émet
déjà quelques brins de soie , et s’il trouve à sa portée quelque objet
où il puisse commodément se fi.xer et construire son cocon , l’instinct
le lui fait reconnaîire ; il s’y rend, y grimpe sans hésiter si cet objet
est placé plus haut ; sinon il établit sa demeure au milieu môme de
la feuille qu’il n’a pas achevé de manger.
Ici commence pour le ver-à-soie une nouvelle et importante période
de développement. Il va se bâtir une demeure close, une espèce de
tombeau où il s’ensevelira tout vivant, et pour quelque temps, et se
transformera en chrysalide.
A cet effet il commence par attacher çà et là cette soie dont sou
corps est en quelque sorte rempli , et qu’il fait passer peu à peu et
sans discontinuer par sa filière , comme la ûleuse fait passer entre ses
doigts le lin qu’elle allonge en fil.
A mesure qu’elle se déroule , la soie croise en tous sens les portions
qui sont déjà fixées , et auxquelles elle se colle moyennant une gomme
dont elle est enduite. L’espace que le ver-à-soie occupe se resserre
toujours davantage, et devient en même temps plus régulier et mieux
déterminé. Le tissu soyeux, d’abord lâche et inégal , se resserre et se
raffermit ; il s’est formé un cocon, dans l’intérieur duquel le ver-à-soie
continue , il est vrai, à travailler encore pendant quelque temps,
mais sans plus être aperçu.
Le temps que le ver met à filer toute sa soie, et à achever son
cocon , ne va guère au delà de quatre jours ; mais quel changement
merveilleux il a subi dans ce court espace de temps ! Il est devenu
méconnaissable. Son corps s’est raccourci de plus de la moitié ; de
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blanc cl mou qu’il élail, il est devenu raide et presqu’incapable
d’aucun mouvement.
Quinze jours suffiront pour que cette chrysalide ait pris des ailes,
poussé des espèces de cornes frangées , retrouvé de nouveaux pieds ,
et acquis des yeux qu’on ne lui avait jamais supposés possibles ;
elle ramollira un point de son enveloppe , au moyen d’un liquide
particulier , la percera et finira par en sortir, véritable ’pa-pillon , pour
traverser une dernière phase de son existence , et se prépiarer des
successeurs.
Agréez , M''...
Hippolyte Rollier.
ÉVANGÉLISATION
Le ?1 février a eu lieu, à Edimbourg, un grand meeting de la Société auxiliaire 'Vaudoise (Waldensian aid Society), laquelle se propose,
comme on le sait (voir l’Echo des Vallées de I860 n» 2 ) de venir en aide
à la Commission d’Evangélisation par un système régulier de contributions et de collectes. Fondée vers la fin de I860, cette Société auxiliaire
a étendu ses rameaux dans plus d’une ville et plus d’un district de
l’Ecosse. Dans chaque localité visitée par nos députés, M'' le D’’ Revel
et NR Prochet, une réception enthousiaste a été immédiatement suivie
de la formation d’un comité local qui se propose de recueillir des
souscriptions régulières et de perpétuer l’intérôt en faveur de notre
œuvre en Italie.
Il serait trop long , pour le peu d’espace dont nous pouvons disposer, de donner un aperçu des discours adressés par divers orateurs
au meeting en question. Le Rév'’ D'’ Guthrie, qui présidait , les Rév'*«
D” M" Ewan et Cairns , ainsi que les Rôv<i^ Somerville et Robertson
ont tour à tour insisté sur l’urgence et l’opportunité sans égales
d’une œuvre d’évangélisation en Italie , sur la part qui en revient à
l’Eglise Vaudoise et le caractère de vraie catholicité que celte Eglise
missionnaire y déploie. Ces sentiments , développés avec beaucoup de
chaleur et avec l’accent d’une conviction énergique, se sont fait jour
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dans une motion du Cairns , ainsi conçue : « L’ancienne Eglise
» Vaudoise ayant à l’œuvre des évangélistes et des instituteurs bien
» formés et actifs , il est du devoir de nos Eglises évangéliques de
» fournir les moyens de soutenir ces ouvriers, en tant qu’instruments
» bien appropriés à la propagation de l’Evangile dans un pays où les
» barrières qui s’opposaient à la promulgation de la vérité viennent
» de tomber par un concours remarquable de circonstances ».
Veut-on juger maintenant de l’activité déployée par les différents
comités locaux fondés en Ecosse dans ce but ? Qu’on jette les yeux
sur le tableau suivant des collectes versées entre les mains du comité
central ;
‘ d)
Edimbourg . . • » • L. 738 18 8
Dumfries . . . n 103 10 0
Ayr u 90 0 0
Greenock . . . 0 176 18 0
Stirling .... n 34 6 6
Perth .... » 41 12 0
Upper Strathearn u 25 7 6
Aberdeen . . . » 260 5 2
Brechin .... )) 23 1 1
Montrose . . . 0 91 11 11
Arbroath . . . « . » 34 6 6
Dundee .... n 148 0 0
Forfar .... 4 7 6
Cupar-Fife . . . » 30 0 It
S* Andrews . . B 62 12 2
Dunfermline . . tt 51 1 6
Kirkaldy . . . )) 84 0 0
Dalkeith .... B 50 14 4
Kelso •) 73 17 9
Innellan . . . B 5 18 2
Berwick-on-Tweed » 5 2 1
Total L. 2180 3 9
Ajoutez à ce total L. 620 collectées à Glasgow et L. 116 à Paisley,
et vous obtiendrez une somme d’environ L. 3000, soit 75 mille francs.
( 1 ) Livres sterlings , shillings , pences.
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Quand serons-nous émus à jalousie ? Quand verrons-nous , 6
Vaudois des Vallées, se former au sein de chaque Eglise un comité
auxiliaire pour venir en aide à l’œuvre de l’évangélisation en Italie ?
Les lignes qui précèdent étaient imprimées, lorsque nous reçûmes
une nouvelle lettre de notre correspondant vaudois résidant à Lyon.
Notre compatriote se défend avec beaucoup de chaleur d’avoir jamais
eu l’idée de mettre brusquement de côté les deux pasteurs de S'Jean
dans le but d’amener une conciliation entre les deux fractions de
la communauté protestante. Nous n’avons pas de peine à l’en croire,
surtout (juand il déclare expressément qu’il n’entre nullement dans
sa pensée de sacrifier à la paix la vérité. — Notre réponse visait au
même but; il ne faut point, croyons-nous avec notre correspondant,
poursuivre la paix aux dépens de la vérité ; nous sommes donc
très-heureux de nous entendre si bien avec lui.
A côté de cet accord fondamental de sentiments et d’idées , il nous
importe peu de voir entre nous des divergences sur des points
accessoires.
Nous avons hâte maintenant d’en revenir au sujet de l’article qui
précède. Nous avons éprouvé une satisfaction sans mélange à la
lecture du post-scriptum de notre correspondant. et nous sommes
assurés que nos lecteurs la partageront amplement, en lisant ces
lignes après nous :
« le Directeur , — J’ai l’honneur de vous adresser par la prô» sente un mandat sur la poste de fr. 26, 50=, produit d’une petite
• souscription que quelques Vaudois résidant à Lyon ont faite en
» faveur de l’Evangélisation en Italie. Les soussignés ayant appris
» avec joie les rapides progrès qu’a faits l’Evangile dans toute l’Italie,
» et la part active qu’a prise l’Eglise Vaudoise à cette œuvre , ont cru
M qu’il était de leur devoir, non seulement de faire des vœux et
» d’implorer le secours d’En-haut sur une œuvre qui a toute leur
» sympathie, mais d’y contribuer selon leurs faibles moyens; c’est
» pourquoi ils vous prient de bien vouloir faire parvenir au Comité
» auxiliaire de La Tour le montant de leurs faibles offrandes. —
» Recevez d’avance, M"’ le Directeur, de la part des soussignés, leurs
» plus sincères remerciements, et croyez-les vos très-obligés;
12
— GO —
Un Vaudois de S» Jean . . . . fr. 2 )»
David Albarin 3 •
Jean Goss 2 »
J. Negrin ...... . . » 1 50
Michel Bellion • » 3 »
1 •
.1. P. Benech 2 »)
D. P 3 »
H. Jahier . > 2 B
Baptiste Odin • • " 3 »
H. Bounous 2 «
Jacques Rostan .... . . >» 2
Total . . fr 26 50
Nous profitons de l’occasion pour donner ici-même la somme des
souscriptions recueillies par le Comité depuis sa fondation.
En 1864 ont été recueillis frcs 67 00
En 1865- id. J) 113 40
En 1866 id. U 167 00
En 1867 id. » 158 00
CORRESPONDANCE
A MM. les Rédacteurs de l’Echo des Vallées.
La Tour, mars 1867.
Permettez, Messieurs , que je profite de votre journal pour adresser
au public vaudois quelques mots relatifs à un projet de réorganisation de notre Collège inférieur. L’idée n’est pas nouvelle. Déjà un
essai de ce genre avait été tenté il y a quelques années. Il est tombé.
Je le relève parceque je le crois utile et approprié à nos circonstances.
Le voici donc avec une légère modification.
Je propose d’abord de rendre au Collège inférieur les cinq années
qu’il a toujours eues jusqu’à ces derniers temps, ensuite de renvoyer
à la cinquième année l’étude du grec et du latin.
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Ouant au premier point, une seule observation suiEra, savoir que
cette année surnuméraire est réclamée par presque tous les Professeurs
comme une nécessité pour donner à la rhétorique des élèves mieux
aü'ermis sm- la grammaire. Ün ne réussit guère pour rintelligence à
la faire marcher à la vapeur.
Quant au second point, voici les motifs qu’on peut alléguer en
faveur de la mesure proposée.
Un fait a dû frapper quiconque a observé depuis un certain nombre
d’années le mouvement du collège et de l’école normale. Des jeunes
gens entrent au collège uniquement parcequ’ils n’ont pas l’âge requis
pour être admis à l’école normale. Je vous laisse à penser quelle ardeur
ils mettront à étudier le grec et le latin , branches principales de
l’enseignement que l’on donne dans les classes inférieures du collège.
Ils soupirent après le moment heureux où on les délivrera des Grecs
et des Romains. En attendant peu ou point de progrès. — D’nn autre
côté , l’école normale se trouve encombrée de jeunes gens qui ne
songent nullement à devenir un jour des régents, et qui n’ont d’autre
désir que d’acquérir, sans passer par le grec et par le latin, des connaissances jugées par eux indispensables pour leur future profession.
Or la mesure proposée .satisferait à ce besoin , et fournirait une
bonne préparation soit aux élèves régents, soit à ceux qui ont en vue
le commerce, l’industrie ou le service militaire. Je dis une préparation,
car on ne peut exempter personne de faire ce qu’on appelle la pratique de sa profession spéciale. Les quatre classes inférieures du
collège, quoique délivrées du grec ou du latin, ne cesseraient pas de
faire partie intégrante du college même. De celte manière son but
essentiel ne serait en rien compromis. La question se réduit donc à
savoir si un an d’études de la langue grecque et de la langue latine
suffira pour porter les jeunes gens en rhétorique. L’expérience nous
permet de répondre affirmativement. Plus d’un élève , au bout d’un
an consacré à l’étude des langues grecque et latine, a pu devenir
étudiant régulier en rhétorique et même n’être pas des derniers parmi
ses condisciples, uniquement parcequ’il avait suivi deux ou trois ans
l’école normale et qu’il était à cet âge où l’intelligence et le corps sont
plus robustes qu’il ne peuvent l’être à dix ans. N’oublions pas que
le jeune élève, dans les quatre ans de préparation , aura acquis bien
des connaissances d’arithmétique, d'histoire, de géographie, de français
et d’italien ; que les difficultés grammaticales seront presque toiites
résolues et que par conséquent il ne s’agira plus de perdre un temps
infini à écrire des parallèles grecs et latins et à graduer péniblement
des thèmes sur les principales règles de la syntaxe.
Au bout d’un mois ou deux, consacrés à l’étude des formes régulières de la langue grecque et latine, on pourra jeter le jeune homme
en pleine traduction de César et de Xénophon , et le faire aborder
heureusement en rhétorique.
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La simplicilé, et peut être aussi le bon sens, demande que l’on ne
coure pas deux lièvres à la fois. Enseignez d’abord le français et l’italien ;
car nos élèves ne connaissent ni l’un ni l’autre, du moins assez
bien pour traduire une langue morte. Ensuite vous ferez étudier avec
fruit les deux autres langues qui se prêtent d’ailleurs un appui
mutuel. De cette manière nous irons du connu à l'inconnu , et la
multiplicité des langues ne sera pas comme les fêtes catholiques dont
l’une fait tort à l’autre.
Je crois donc la mesure que je propose tout-à-fait réalisable : elle
ne porte pas atteinte au but du collège ; elle l’ouvre à un plus
grand nombre de jeunes gens et répond à un besoin réel de notre
population.
Mais avant de terminer, je dois ajouter que cette mesure exige deux
professeurs surnuméraires , l’un pour le collège de La Tour, l’autre
pour l’école latine du Pomaret. Les Vaudois doivent songer à leur
traitement. Qui veut la fin, veut les moyens. Du reste qu’on ne s’effraye pas. Une souscription annuelle de quarante centimes par tête
suiîira et guérira de la peur. Je demande bien pardon à mes compatriotes de mettre une main indiscrète dans leur bourse, et de leur
réserver des herbes amères pour la fin du repas, si tant est que je
leur aie servi un festin et qu’ils aient goûté mes idées.
J. R.
La Tour, le 10 avril 1867.
Monsieur le Rédacteur,
Vous avez bien voulu faire mention , dans votre intéressant Echo ,
de quelques simples et modestes séances que j’ai tenues cet hiver et
l’an passé, au sein de notre population vaudoise, sur différents sujets
pratiques , ou scientifiques , mis à la portée de nos chers eorréligionaires. — Vous avez aussi parlé de mon faible concours dans la
constitution et la direction de nos Ecoles sérales, choses pour lesquelles ,
en-véritè,je ne mérite ni éloges, ni mention, car chacun a sa tâche
ici-bas, et la mienne est précisément de travailler toujours, selon mes
moyens, au bien intellectuel et autre de mes semblables; et, â la
fin du jour , il faut s’humilier , parcequ’on n’a rien fait, ou qu’on n’a
fait que ce que l’on devait faire, et rendre grâces à Celui qui daigne
vous fournir et l’occasion et les moyens de Lui montrer qu’on l’aime ,
en aimant le prochain.
Cela dit, mon cher Rédacteur, laissez-moi vous faire un reproche
relativement à ce même article de votre journal, où vous parlez de
tout le monde, excepté de vous seul. Et cependant nos écoles vous
15
— 63 —
(luivcat beaucoup. Vous vous y ôtes dévoué de tout voire cœur ; et
alors que quelques uns de nos concitoyens naturellement désignés
d’avance par leur position officielle pour se prêter avec nous à la
direction de nos écoles sérales . s’y sont refusés , votre zèle et votre
concours non interrompu ont d’autant plus été appréciés ; et le Municipe et le Public vous doivent , à cet égard , une reconnaissance
bien méritée. Recevez-en, par ma bouche, cher professeur, la sincère
expression ; reconnaissance que nous manifestons également à ces
jeunes collégiens , à ces aimables demoiselles, qui comme vous et
avec vous, ont, tout l’hiver, présidé à l’enseignement séral dans notre
commune ; — et eu faisant le vœu que dans notre chère patrie l'instruction progresse toujours davantage, et, avec l’instruction , la moralité et la fraternité, je vous prie d’agréer l’assurance des meilleurs
sentiments avec lesquels je suis , etc.
-4médée Bert , Conseiller communal ,
M. du S. E.
A M'~ le Professeur B. Tron.
VALLEES VÂUDOISES.
VillMr-Pélice. — Le 31 mars l’assemblée générale des électeurs
de cette paroisse, présidée par le ministre officiant JP J. JsParander,
a élu, en remplacement du défunt pasteur François Gay, de bénie
mémoire, JP Matthieu Gay, pasteur émérite, et évangéliste à Pignerol.
— Sur 102 votants, Mr M. Gay a obtenu 97 suffrages ; précieux témoignage de confiance et d’affection , car Mr Gay ne devient pas
pasteur du Villar , il le redevient, afnul toujours conservé un souvenir
très-doux des heureuses cinq années qu’il avait passées déjà au sein
de la même paroisse. L’installation aura lieu probablement dans le
courant de mai.
S* JTenn. — Nous apprenons avec plaisir la fondation récente d’un
cabinet de lecture aux Blonats. Le nombre des associés, nous assure-t-on,
s’élève à une trentaine. Tout nous porte à croire que cette utile
association pourr| se maintenir et qu’elle deviendra un moyen efficace de développement intellectuel et de rapprochement.
Missions. — Dans le tableau que nous avons donné le mois
dernier des collectes faites aux Vallées en faveur de l’Œuvre missionnaire parmi les païens, il faut augmenter la contribution de La Tour
de la somme de 18 francs, produit d’ouvrages et de dons des élèves
de M“® Caroline Meille, et faire figurer à la collecte de St Jean les
16
— 64
?5 francs recueillis par l’Ancien D. Lantaret. — La conliibution totale
des églises pour les missions s’élèvera donc cette année à fr. 1342, 75,
sans y comprendre les quelques centaines de francs qu’un généreux
anonyme a coutume d’y joindre annuellement.
Un concert. — Qu’on dise encore qu’il n’y a rien de novrveau
sous le soleil ! — Ne vient-on pas de nous donner à La Tour un
concert on toute forme? Un concert vocal et instrumental, s’il vous
plait. De znémoire d'homme jamais pareille chose ne s’était entendue
dans notre village. La clarinette avec l’aigre miaulement d’un méchant
violon, c’était presque notre unique ressource en fait de musique;
déjà même le rustique flageolet avait disparu , et l’on n’entendait
plus guère à nos fêtes que le tambour. Mais que ne peut la nécessité
sur les hommes et sur les choses ! La Société de travail pour les pauvres
s’étant trouvée un peu à l’étroit, un petit nombre de demoiselles et
de messieui's eurent l'idée de lui venir en aide en quelque façon.
— Restait à savoir comment — Heureusement ils avaient lu je ne
sais oi'i , que « l’homme qui est esprit, se mène volontiers par les
yeux et les oreilles «. Sûrs de leur aifaire ils se mettent à l’œuvre
sans retard , et le 22 avril l’ecole de S*® Marguerite s’ouvrait à près
de deux cents personnes venues les unes pour jouer ou chanter, les
autres pour entendre et payer —Dessolos,des chœurs, des morceaux
de musique exécutés sur deux excellents pianos avec non moins de
talent que de goût et de précision, c’en était assez pour nous procurer la plus agréable soirée. Serions-nous donc à la veille de voir
une société de chant déclarer la guerre à la très-fade, très lamentable
et très-sommnolente chanson vaudoise ? Ce serait bien là une autre
surprise à nous faire....
Pignerol , J. CniAJiTonE ]mpr.
II. Jaiiier Gérant.
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