1
Septième année.
N. 34.
14 Juin ISTS.
L’ECHO DES VALLEES
FEUILLE HEBDOMADAIRE
Spécialemenl consacrée aux inléréls matériels et spirituels
de la Famille Vaodoise.
Que toutes les choses qui sont véritables.ocoupenl
vos pensées — ( Philippiens., IV. 8.)
FRIS O’iBOMNEMEIIT ;
Italie, a domicile ('K»an)Kr. 3
Suisse....................*5
France.................* R
Allemagne ...... t H
Angleterre , Pays-Bas • 8
Un nnméi'o separé : 5 cent.
Un numéro arriére : 10 cent.
BOREAUZ D’ABOIINEHENT
Torrr-Pem.icb : Via Maestra.
N. 42. (Agenzia bibliografica)
PiGNERoL : J. Chlantore Impr.
Torin:J./. Tro«, via Lagrange
près le N. 22.
Florencb : Libreria Evange^
lica, via de'Panzani.
ANNONCES : 5 cent, la ligne
ou portion de ligne.
Lettres et envois franco. S’a*
dresser pour radministration
au Bureau à Torr.e'Pellice,
via Maestra N. 42 ^ pour la
rédaction : à Mr. E. Malan
Prof • h Torre-Pelice.
Sommaire.'
Eucore uos éducateurs. — Luc promenade à f’ompéi. — Noucelbs religieuses.
— Faits dicers. — Chronique locale. —
Chronique politique.
Ë.\C0KE NOS ÉDUCATEURS
Encore, disons-nous, et pourquoi?
Nos lecteurs auront sans doute oublie que nous avions, il y a dix
mois environ (V. VEcho de l’an
1871, N. 33 et 35), l’avantage de
les entretenir de nos écoles primaires et de leur parler de nos
éducateurs. Nous terminions en
disant : à 'prochaine fois. Si Dieu
ne permit pas que cette fois fût
prochaine, selon notre désir, serait-ce là une raison suffisante pour
ne pas nous souvenir de notre promesse? Mieux vaut tard que jamais,
surtout lorsqu’on traite un sujet tel
que celui qui nous occupe et nous
préoccupe toujours davantage.
Dans nos articles précédents,
nous signalions le rôle -de l’école
dans l’église et' la part que lui
tirent les réformateurs en vue de
l’affermissement des principes évangéliques.
Rentrons maintenant dans nos
modestes vallées. Nous avons assez
dit, soit ici, soit ailleurs, que notre
peuple a une mission spéciale,
aussi nous croyons-nous dispensés
d’y revenir.
Mais tandisque nous parlons
d’école, un personnage que l’on
vient de faire revivre se présente
à notre esprit, nous le rencontrons
sur notre route; il est là, appuyé
sur son bâton et sa jambe de
bois, l’air pensif.... Vous le reconnaissez, cher lecteur, n’est ce pas?
11 nous disait de bonnes vérités,
qui ne blessaient ni ne flattaient
personne, car le général était à
l’abri de cette pluie de préjugés
qui n’épargnent pas ceux qui exercent l’office de prophètes dans
leur patrie. Encore aujourd’hui ,
son témoignage est, devant nos
yeux, comme un livre ouvert, dans
lequel nous avons bien à lire au
sujet de nos écoles.
Beckwith portait dans son cœur
trois convictions bien déterminées.
1, Le peuple vaudois a un ca-
2
ractère religieux, et s'il n'est pas
missionnaire, il n’est rien, comme
sont les gens qui perdent leur
caractère.
2. Il traverse une phase d’engourdissement ou d’apathie, qui ne
saurait se prolonger sans menacer
son existance morale et religieuse.
3. Pour le réveiller et le pousser en avant dans la voie qu’il
doit suivre, voici un grand moyen;
l'école.
On applaudit déjà à cette conclusion, et c’est quelque chose. On
se dispute l’école à Angrogne, à
Rora et on le fera encore ailleurs,
plus ou moins de la même façon.
L’école, on la veut partout, mais
comment la veut-on?
Car, il est telle école pour laquelle le général Beckwithn’aurait
pas donné un bouton de sa tunique, lui qui se dépouillait pour
l’école. Gelle-ci est un chantier
d’où nos enfants se lancent sur
l’océan orageux de la vie, menacés,
d’y périr sans la boussole d’une
conscience droite et le lest de la
foi. Aussi est-il question, pour lui,
d’écoles qui jettent les fondements
de l’éducation, dans le sens le
plus profond de ce mot. Jugez-en
d’après ses propres paroles:
« C’est dans ces pépinières ,
— écrit-il au modérateur l’an 1848'
— que sont jetées les premières
semences de ces grandes vérités
inconnues à Socrate et à Platon.
C’est là qu’on greffe sur ces tendres rejetons la parole immuable
qui annonce Jésus Christ crucifié,
seul médiateur entre Dieu et les
hommes, la parole de celui qui
est le chemin, la vérité et la vie,
de celui sans lequel personne ne
vient au Père et dont le, sang
purifie de tout péché.,,, théologie
capable de sauver^un monde!
Je le sais, on bannit le dogme
au nom de la liberté, dans les
écoles dites de l’avenir. On le veut
par respect aux opinions diverses
des famillesr auxquelles appartiennent les élèves. Mais faut-il, au
nom de la liberté des élèves, poser
un éteignoir sur la conscience du
maître, le condamner pour la vie
à la torture du silence? Peut-on,
au nom des lumières, exiger qu'il
soit une inconnue pour ses élèves
lorsqu’il s’agit de religion, et prétendre, au nom de la'raison, qu’il
soit un mystère ? Est-ce là apprécier la libre manifestation des
convictions? Est-ce élever? « La
» parola educare, — dit un péda» gogue italien, suona cavar fuor,
» stante la stretta analogia che
» corre tra l’alto morale di svol» gere le umane potenze e l’atto
» fisico di estrarre qualche oggelto
» da cosa che lo contenga ». (1)
Comprenez-vous bien, il s’agit
de cavar fuori, et vous parlez de
boucher, passez moi le mot, ou d’arrêter dans son développement naturel le sens religieux, d’en suspendre tout au moins l’infiuence
si grande , si variée, si féconde.
Et vous avez la naïveté de croire
que le bâton que vous jetez dans
les çoues du char du progrès contribuera à le faire mieux avancer?
Laissons-là , et bornons-nous à
dire que l’indifférence en matière
de foi,.ou cette passivité plus ou
moins factice que l’on nomme improprement impartialité, n’est pas
chez le maître d’é
(1) Celssià: Storia delia
liana, — Milano 1872.
pedagogia ita-
3
■__________________________________W7
cole que chez les antres humains.
Toute croyance, bonne ou mauvaise , demande sa manifestation.
Le maître qui croit en l’Evangile
et ne peut en parler , finira par
éclater; et s’il pense faire le philosophe , comme Marc Aurèle , il
se trompe, et, comme cet empereur , il finira par persécuter les
chrétiens.
Si ses convictions, quelles qu’elles soient, positives ou négatives,
ne se révèlent pas au moyen de
sa parole, elles transpireront par
tous ses pores. On sentira son
odeur , qui sera ici « une odeur
mortelle qui tue, » là ■ une odeur
vivifiante qui conduit à la vie ». Un
père de famille nous disait naguère,
en parlant de son fils qui fréquente
une école municipale; « Les maîtres n’enseignent pas l’incrédulité,
c’est vrai , mais ils en posent les
prémisses , et les élèves tirent la
conclusion ». Et il ajoutait avec
un accent d’angoisse inexprimable;
« Mon fils en est venu en une année
à ne croire plus à rien et à mener
une vie de péché ».
Ne serait-il pas plus raisonnable
d’avoir quelque chose comme les
écoles confessionnelles, c’est-à-dire
que les incrédules et les croyants
fissent ménage à part, et que les
divers partis eussent leurs écoles
respectives-?'Quoiqu'il en arrive,
pendant que la Commune fera en
tâtonnant ses propres expériences,
l’église a sa méthode arrêtée et
son allure franche. Pour elle l’instruction est nuisible sans l'éducation de la conscience, et l’éducation de la conscience tout au moins
imparfaite sans l’appui de l’Evangile.
enfants et ne les en empêchez
point; » voilà ce qu’il faut pouvoir
lire, si ce n’est sur la porte de nos
écoles, du moins et en tout cas, sur
le front vénéré de nos éducateurs.
S’ils ne sont pas missionnaires , ils
ne sont rien.
C’était l’opinion de Beckwith,
et c’est, de nos jours, celle de tous
les chrétiens, qui, de Naville à
Cantù, font face à l’influence envahissante de la neutralité sceptique
de l’état.
Nous ne voulons pour nos enfants ni la serre-chaude de la superstition , ni les pentes escarpées
du doute, ni le désert du scepticisme, mais quelques pouces de bonne
terre au soleil de la foi chrétienne.
Mais revenons au maître d'école.
f A suivre). — e. c.
Ine promenade à travers i'ompei.
Me voici à Pompéi, furetant, cherchant,
admirant religieusement tout ce que mon
guide me dit d’admirer; mai.s il est déplorable que l’on ait porté au Musée les
objets trouvés dans les maisons; ce qui
ôte tout moyen de se faire une idée de
l’intérieur des anciens Romains. Mais,
dans cette ville morte, que tout est différent de nos villes d’aujourd’hui l Oue tout
y est plus petit! Les chambres sont eu
miniature, les maisons basses, les rues
étroites et, chose curieuse ! on les a, je
ne devine pas pourquoi, barrées par de
grosses dalles, ne laissant entre elles que
d’étroits passages, système peu commode
aux voitures. N’y avait-il que des piétons
dans cet heureux pays? Mais l’intérieur
des maisons y est beaucoup plus élégant
que les nôtres. Partout des mosaïques,
des peintures, depuis le carte canmn de
Vairium jusqu’aux colonnes du péristyle.
Ce qui m’a surtout frappé c’est la sura
. , bondance des colonnes. Il y en a de tous
Laissez venir à moi les petits [ lesordtes. du dorique au composite; mais
4
-18&
l’ionien et le corinlhieQ prédominent. Les
temples, les théâtres, les lieux publics
en général, sont très beaux. On voit bien
que là était la vie au temps d’alors, té^
moins les thermes de la rue slabienne;
fort bien conservés, et réellement riches
de peintures et de sculptures murales.
L’Amphithéâtre est merveilleusement
intact, bien plus, à mon avis, que ne
l’est celui de Pouzzoles, mais il est plus
petit. Le théâtre tragique et le théâtre
Comique ont un cachet tout particulier,
avec leur forme en fer à cheval et leur
proscenium ovale.
La dernière fouille est près de la maison
de Ghampollion , c’est-à-dire près de l’entrée; mais au train dont on y va, le travail durera encore des années; le tiers
de la ville à peine est découvert et je
doute fort que la génération actuelle déterre entièrement Pompéi.
Les pétrifications des corps humains
sont belles, comme pétrifications. L’expression de la physionomie est étonnamment bien conservée, quoique les traits
ne soient pas parfaitement dégagés. La
pius typique de ces pierres humaines peut
se voir en dessous en descendant quelques marches d’escalier. Sa physionomie
est pleine de révélations sur le genre d’émotions que ce pauvre homme, — car ce
fut un homme, — dut éprouver.
L’on entre dans Pompéi par la porte de
la Marine, soit en montant jusqu’au second étage de l’hôtel Diomède, soit en
tournant ce môme hôtel. Pompéi était relativement assez élevé au dessus du niveau de la mer, — relativement, c’està-dire d’une cinquantaine de mètres; ce
qui devait déjà en faire une belle falaise,
lorsque la mer venait battre ses murs.
— Les habitants, d’anciens colons romains,
intraitables, paraît-il, môme soüs Néron,
— différaient notablement des campaniens
proprement dits, et laissaient échapper
peu d’occasions de faire le coup de poing
avec les habitants de Nocère. Us en sortaient vainqueurs, du moins leurs ins-|
criptions le disent; mais les nocériens
répliqueraient sans doute, s’ils pouvaient
parler. '
Bonnes gens, au demeurant, et assez
exempts de préjugés, les babitants de
Pompéi acceptaient indifféremment dans
leur Olympe tous les dieux qui voulaient
bien en être, et les adoraient avec une
égale ferveur, sans distinction de nationalité. Le temple d’Isis était en excellente
relation de voisinage avec celui de Vénus,
et, pour très peu de chose, ils auraient
élevé des autels au Dieu inconnu. Leur
morale me paraît avoir été plus que légèrement relâchée à en juger par différentes choses.... et je soupçonne assez
panem et circenses d’avoir été leur cri de
guerre; les gladiateurs qui mouraient avec
grâce, coram populo, et les martyrs dévorés par les lions de Nubie, pourraient
témoigner que ce cri alternait avec celui
de christianos ad leoncs.
Le forum est une belle place'rectangulaire où l’on est heureux de pouvoir ramener sa pensée sur d’autres lutles que
celles du pugilat; probablemeut Cicéron,
qui avait une villa pompéienne, il avait
des villas un peu partout, s’y est-il fait
entendre; peut-être ce forum a-t-il été
une grande arène parlementaire, ou les
libertés communales , poussées très loin
chez les romains, ont produit des hommes distingués, peut-être aussi tous les
orateurs y ont-ils été passablement plats.
C’est ce que l’histoire a négligé de nous
apprendre. Se taîrait-elle pour cause? Je
préféré croire que non et que c’est faute
d’encre que les copistes ne nous ont guère
conservé que Cicéron, le dessus du panier. — S’ils étaient aussi forts à coups
de langue qu’à coups de poing, leurs discours devaient encore être assez présentables. fA suivre J. — A. M.
ilouDcUce reltigku$ed
France. Extirpation de l’hérésie. —
Voici, d’après Veuillot, dans un article
de YUnivers, la recette dont il faut faire
usage pour atteindre ce but, et dont, à ,
son grand regret, on ne s’est pas suffisamment servi ; «L’hérésiarque, examiné
et convaincu par l’Eglise, était livré au
bras séculier et puni de mort. Rien ne
m’a semblé plus naturel et plus nécessaire.
DI lis de cent mille hommes périrent par
5
-189
suite de l’hérésie de Wiclef; celle de Jean
Huss en a fait périr plus encore. On ne
peut mesurer ce que l’hérésie de Luther
a fait couler de sang, et ce n'est pas fini.
Après trois siècles, nous sommes à la
veille d’un recommencement.
« Pour moi, ce que je regrette, je l’avoue franchement, c’est qu’on n’ait pas
brûlé Jean Huss plus tôt. et qu’on n’ait
pas également brûlé Luther; c'est qu’il
ne se soit pas trouvé quelque prince assez
pieux et assez politique pour mouvoir une
croisade contre les protestants ».
La Semaine religieuse, d’après laquelle
nous reproduisons la citation ci dessus,
ajoute : « de telles paroles sont significatives , et elles montrent jusqu’ou peut
aller le fanatisme religieu.v. Elles ne sont
pourtant que la conséquence naturelle
des principes proclamés par le syllabus ,
charte iul'aillible du pape infaillible. Ilàtons-nous d’ajouter que, par bonheur,
les hommes ne sont pas toujours conséquents avec leurs principes et que d’ailleurs, de nos jours, trop île progrès ont
été faits dans la voie de la tolérance et
de la liberté pour qu’on pût espérer réussir
en renouvelant les persécutions religieuses ».
La Bible. Dans les pays de la Bible,
le livre par excellence se trouve dans les
moindres chaumières. A cause de ce livre
on a des âmes libres; à cause de ce livre,
on a des peuples libres; lô cause de ce
livre on a la liberté.
Agënor de Gasp.vrin.
Le Comité Neufchâlelois pour l’évangélisation des internés français s’occupe de
donner un pasteur aux protestants de Gap,
qui fut autrefois le Siège d’une Eglise
protestante. C’est dans la banlieue do celte
ville, aux Fareaux, que naquit Farel, le
réformateur de Neuchâtel.
^Eglise Libre J.
Instruction en Allemagne. — L’empire
d^’Alleroagne possède, en chiffres ronds,
60,000 écoles primaires, dans lesquelles
sont instruits 6 millions d'élèves. Il y a,
en moyenne, environ 150 élèves par millier d’habitants. Il y a , en Allemagne, 330.
gymnases et d83 écoles professionnelles.
Le nombre des élèves de ces écoles et
gymnases, s’élève h l'77,400. — L’.Allemagne
a 20 universités où 15,600 étudiants sont
instruits par 1,624 professeurs. Il y a de
plus, dans l’Empire, 10 écoles polytechniques, comptant 360 professeurs et 4500
élèves, et il faut encore ajouter è celte
énumération les écoles militaires et navales, les académies forestières, des mines
etc.
Une nouvelle maison de Missions. — Les
amis des missions de l’Allemagne du nord
se proposent d’élever à Berlin une nouvelle maison do missions, dans le genre
de celle de Bâle. Le Doct. Wangemann ,
inspecteur de la Société des .Missions de
Berlin, propose de consacrer, dans ce but,
une partie des impôts que les chrétiens
allemands eussent dû payer à la France,
si celle-ci avait été victorieuse. Déjè un
don généreux a permis à ces amis de faire,
dans ce but, l’achat d’un terrain propice.
.Nous rappelons à ce propos que la Société
des missions de Berlin occupe en ce moment 43 missionnaires dans 31 stations,
et qu’elle n’y compte pas moins de 3846
païens baptisés.
Le Sonnlagsblatt dit que les habitants
do l’île glacée, d’Islande, las do leur triste
existence, veulent émigrer en masse aux
Etats-Unis. Presque la moitié de la population, environ 25,000 habitants, ont décidé de se fixer dans le Michigan septentrional, où leurs agents ont acheté de
vastes territoires,
Oï'enatle. Un pasteur anglais qui
a assisté à une réunion religieuse présidée
par Alhama rapporte que les auditeurs
étaient au nombre d’environ 80, dont 40
ont pris part à la S. Cène. L’école,^qui
vient d’être ouverte par la fille de M. Alhama, compte déjà 28 élèves. Le local
loué à cet.effet se trouve tout près de
l’Alhambra, sous les célèbres tours maures
de couleur rouge.
Le Synode nationale en France. — D’après une circulaire envoyée aux présidents
des Synodes particuliers par le ministre
6
-MO
des cultes, c’est le jeudi 6 juin que le
Synode général des Eglises réformées de
France s’est réuni à Paris dans le temple
du Saint-Esprit. Le conseil présbytéral de
Paris, pensant avec raison que l’ouverture
du Synode devait être précédée d’un acte
religieux, a prié M. le pasteur Babat de
tiîmes de prêcher le mercredi 5, à 8 heures
du soir, dans le temple de l’Oratoire, et
a invité tous les membres du synode à
assister à cette réunion religieuse.
Il s’est passé, il y a quelque temps, à
Florence un fait étrange. — Mgr. Carli
évêque de Palmira in partibus, jouissait
dans cette ville d’une réputation d’excellent exorciste. A ceux qui no voulaient
pas se faire exorciser de bon gré. Sa
Grandeur s’imposait de force, témoin certain Givelli, pauvre ouvrier atteint d’épilepsie, que l’évêque a fait amener dans
la chapelle d'une villa, aux environs de
Florence, et a tenu lié et presqu’à jeun
pendant 52 heures. Le tribunal correctionnel de Florence a trouvé la plaisanterie
un peu grossière et a condamné l’évèque
et une espèce do sorcière qui lui a servj
d’acolyte, à six mois de prison chacun,
et aux frais du procès. Il va sans dire,
que l’exorcisme n’avait produit d’autre
effet que des blessures et une maladie.
— Mgr. Carli avait cru devoir prendre le
large et a été condamné par contumace.
Mais il vient d’appeler du jugement et va
se présenter devant le tribunal.. Les débats ne manqueront pas d’être des plus
curieux.
Recensement de Milan. Population 199.009,
Catholiques .... 193,997
Evangéliques. . . . 2,898
Israélites .... 891
Autres religions, libres penseurs.. 1,223
Total 199.009
Statistique cléricale de Rome en 1810 :
Evêques 36
Cardinaux . .34
Prêtres séculiers . 1457
Moines . -i. • . 2569
Religieuses . , 2031
Chronique locale
La fête du Statuto. Les élèves
du Collège ont presque seuls donné signe
de vie dans celle belle journée. Après le
culte, la compagnie de collégiens s’est
rendue sur la place principale oU elle a
fait trois décharges avec assez de précision, ensuite, accompagnée de cinq musiciens de la Société des ouvriers, elle
s’est montrée un peu partout à la Tour,
à Saint Jean et à Luserne. Le soir, le collège a été illuminé, mais, ainsi que cela
arrive ordinairement chez nous, celte
partie de la fête a le moins bien réussi.
Le vent qui s’est levé tout juste an bon
moment, et bientôt après, la pluie, ont
un peu gâté le plaisir que ces jeunes
gens s’étaient promis.
La fête-t>leu à la Tour. —
Cette fêle a été célébrée par une procession dans le bourg de la Tour. Nous n’en
dirions rien, si un fait, qui s’y est pas.sé,
ne nous obligeait, chroniqueur fidèle, d’en
parler. Pendant que l’étroite rue principale du bourg était encombrée par la
procession, do la place du Municipe à celle
des Ormeaux, uu jeune homme rentrant
tranquillement chez lui, s’est entendu aposlropher, et, presque en même temps,
a reçu un soufflet sonore, dont il a porté
l’empreinte jusqu’à sa demeure. Il ne sait
qui remercier de cette caresse.
Nous savons c(ue le ppre du jeune homme en a parlé au syndic de la Tour et
en a informé ensuite 'le Sous-Préfet.
M. le syndic a déclaré que la permission de faire la procession est venue de
l’autorité supérieure. Ainsi, comme dans
d’autres occasions semblables, dans celleci encore, on s’est passé de lui. A la place
du syndic nous n’accepterions pas une
telle position ; nous renoncerions plutôt à
la charge qui est bien souvent un lourd
fardeau. Nous ajoutons deux mots seulement; car nous ne voulons pas faire de
la polémique protestante. Ce n’est ni le
lieu ni le moment. S’il y a dans l’Italie
tout‘entière une localité oîi ces sortes de
procé.ssions peuvent amener des frottements fâcheux, c’est la Tour, à cause de
l’étroitesse de sa rue principale et surtout
à cause des deux confessions religieuses
qui sont en présence. Il y a lieu de s’étonner qu'il n’y ait pas eu déjà, à ces occasions, des inconvénients plus sérieux.
Cela parle en faveur du caractère doux
et bienveillant de la population.’ Mais -jl !
ne fabt pas en abuser; il suffit souvent
d’un moment pour tout gâter.
Si nous croyons que ces processions dans
les mes du bourg appartîDS sent è l’es
A
7
-191—
seuce de la religiou, nous dirious à nos
eoréligionnaires n’usez pas do toute votre
liberté et de tous vos droits; faites plutôt
de longs détours pour éviter de rencontrer
lü cortège. Mais il n’en est pas ainsi; uous
sommes au contraire convaincus que de
telles cérémonies s’accomplissent plus
convenablement dans les églises ou dans
leurs plus proches alentours ; on peut
y prier avec (|uel(jue recueillement, ce (|ui
a diflicilement lieu dans ces promenades
à travers les rues et les places.
(¡rhront(|uc plttique.
Italie. La Chambre a adopté, presque sans discussion, les divers chapitres
du budget de la guerre puis s’est occupée
des dépenses pour les fortifications et l’armement. — Le député Cairoli a fait et
développé la proposition du suffrage universel , déjà présenté précédemment par
Crispi et par Soozogno. Cette proposition
ne pourra plus être discutée dans cette
session. Cairoli exclut cependant du suffrage universel ceux qui ne savent pas
lire et écrire. Mais de plus radicaux que
lui trouveront cette exclusion injuste, et
diront que les illéttrés payent aussi les
impôts et ont le droit d’élire ceu.x qui les
établissent. Et alors les grandes villes
nommeront, selon toute probabilité, des
ultra cléricaux ou des rouges, et les campagnes des cléricaux ou des noirs. La
liberté y aura-t-elle gagné? Certainement
non; mais la force brutale du nombre
fera la loi. Les fruits du suffrage universel
en France devraient nous en avoir guéris.
-Qu’on se le dise bien, tout ce qu’il y a
d’intelligent et de libéral dans la Chambre
n’y reparaîtra plus et Cairoli lui-même ne
«era probablement plus réélu. Les partisans du suflà’ago universel disent : l’Italie
-jvec une population de 25.687.000 habitants, n'a que 530.687 électeurs politiques
tiinscrits, deux pour cent, ou vingt pour
umille *. Ce fait ainsi énoncé paraît énorme;
«mais après avoir retranché les femmes, les
nèDfants et les adolescents, il resterae. nviron
Ï6à7 millions. Sur ce nombre, environ deux
jiknillions pourraient être inscrits d’après
lia loi, s’ils voulaient se prévaloir de leur
I jdroit et faire leur devoir. Car notre loi
do suffrage restreint est de fait très largo.
La poi;te est ouverte à l’intelligence et la
taxe à payer pour être électeur est vrai •
meut minime.
Febbare. L’iuondalioii du territoire de
la province do Ferrare prend des proportions effrayantes. Les plus riches campagnes d'Italie sont submergées, et une récolte d’envirou 20 millions est perdue. La
dernière éruption du Vésuve n a rien été
à côté de ce terrible désastre. Le ministre
des travaux publics s’est porté sur les
lieux. La garnison de Ferrare s’est très
bien montrée ; les premiers secours sont
venus rie Ferrare , de Bologne et autres
localités; des souscriptions sonl ouvertes,
mais la misère est trop grande pour qu’il
soit possible de toute la soulager. Le nombre des personnes (|ui ont été obligées
de fuir et de chercher un abri dans les
communées épargnées, et surtout à Ferrare , n’est pas inférieur à 40.007. Quelques-unes ont péri ; plusieurs seront complètement ruinées. Il faut remonter à plus
d'un siècle eu arrière pour trouver un
malheur semblable. La digue qui s’est
rompue n’est pas ancienne , mais tout à
fait nouvelle; construite, il y a cinq ou
six ans, elle n’était en usage (pie depuis
un an environ. Le l’ô, à l’endroit ou la
digue a été rompue, a 400 mètres do largeur et les deux brèches qu’il a faites ont
à peu près cette largeur aussi. Ferrare
a été menacée; cette ville est hors do
danger, les eaux ayant suivi une autre
direction vers la mer Adriatique.
dspagne. La résistance de l’insurrection, partout vaincue, se prolonge cependant , et menace do ne pas cesser de
si tôt. Serrano, que l’on blâmait d’avoir
fait un accord avec les carlistes qui se
soumettaient, a obtenu un vote assez général d’approbation de sa conduite de la
part des Cortès. — Ruiz Zorilla , chef de
l’opposition radicale au ministère et à la
dynastie, a donné sa démission de membre de la Chambre des députés. Cette démission , ainsi que Zorilla lui-rnême le
déclare, ne doit pas être attribuée à une
intention hostile à l’ordre actuel des choses, ni au désir de combattre le gouvernement par des moyens extra-légaux, mais
bien plutôt à un profond dégoût de la vie
politique. — Dans ces derniers jours, l’attention des Espagnols a été attirée sur
les préparatifs et sur les descriptions des
processions qui ont eu lieu à la fête-Dieu
dans toute l’Espagne, depuis la capitale
jusqu’au village le plus insignifiant, beaucoup plus que sur l’insurrection carliste
et sur les questions politiques.
France. L’assemblée nationale continue à discuter la nouvelle loi militaire ;
8
_192_
elle adopte, avec le service obligatoire,
l’abolition de la surrogalion qui,en est
une conséquence. I)e beaux discours ont
été entemlus, de Trochu, de Dupauloup;
mais personne n’a parlé avec plus d’éloi|uencn et d’émotion ([ue M. d’AudiifretPasquier, qui, répondant à Rouher, lui a
demandé où étaient les 1.400.003 fusils».
« Il y a une voix, dit-il aux bonapartistes,
qui doit nous (Tier : Varus rends-moi mes
légions, rendez-nous la gloire de nos pères, rendez nous nos enfants et nos provinces ! » «N’y a-t-il pas. dit il eu linissant, une leçon à tirer de tous nos malheurs? Pour moi la leçon est celle-ci;
c’est i|ue, quand un pays abdiiine ses
libertés, (|uand il abdique le contrôle,
quand il ne sait pas se faire à ces mesures libérales (pii font cpie les affaires de
tout le monde sont les affaires de chacun,
rpiand l(! tiourgeois rentre chez lui et se
croit bien sage, lors(|u’il peut se dire qu’il
UC s’est pas occupé de politique, c’est
qu’il ne sait pas que la politique e.st notre
sang, c’est noire argent, c’est notre honneur... Quand un pays abdique ses libertés et ne sait pas les défendre ; quand il
se met sous la protection d’un homme
procidenticl!.. il en résulte fatalement ce
que vous venez de voir ; la décomposition
et la démoralisation ! » Que Dieu qui aime
ce pays, lui épargne la dernière et la plus
dure des luimilialions, celle de voir jamais ses destinées confiées aux mains qui
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l’ont si mal servi !
Il y a eu lulto entre les ultramontains
et les libéraux au sujet du droit de procession. Les ultramontains prétendent que
c’est là un droit imprescriptible et inaliénable qui existe sans être inscrit dans
aucun code, et malgré les lois contraires
En France en effet, dès les premières années de la révolution de 1789, ont été
prohibées toutes les fonctions religieuses
en dehorà de rcnceintc des Eglises. Mais
déjà dans les diyer.ses périodes de réaction dans notre siècle, les autorités françaises ont fermé un œil sur les infractions
à cette, loi, soit dans les villes, soit dans
les bourgades où le parti clérical prévalait. C’est ce système qui a été adopté par
le Gouvernement do M. Thiers, comme on
le voit par une circulaire adressée par le
ministre de l’intérieur aux préfets, d’après
l'a(juelle est laissée à ces derniers la faculté do permettre les processions, là où
les autorités municipales eu manifesteraient le désir, pourvu qu’il n’y ait pas
à craindre des désordres. — A Marseille,
il y a même eu une démonstration tumultueuse , pareeque la procession n’a
pas eu lieu.
dans la lutte entre les cléricaux et le gouvernement. Namzanowski, grand aumônier, chef du clergé (jatholique de l’armée
prussienne, qui voulait contraindre M.
Lünemanu, aumônier de la garnison de
Cologne à cesser de célébrer l’ofBcc ecclésiastique dans l’église de S.'' Pantaléon
(dont le Gouvernement a autorisé la mise
à la disposition des vieux catholiques),
sous peine d’excommunication, a été désavoué par le ministre de la guerre qui a
déièndu aux aumôniers de lui obéir. On
assure que le Gouvernement profitera sans
retard de ces conflils pour abolir la charge
d’aumôniers catholiques, et pour laisser
aux militaires la liberté d’aller au culte
où ils veulent et s’ils veulent. On s’attend
à ce que ce soit bientôt le tour de l’évêque d’Ermeland (|ui sera privé des revenus
(te la Curie et dont les actes seront déclarés privés de toute valeur devant les
tribunaux et nuis au point de vue civil.
Allemagne. La* retraite momentanée do Bismark n’a pas amené une trêve
liionclatioix oix Bolxême.
D'après un télégramme ]de la Nette freie.
Presse envoyé de Prague, le T juin , les
dommages causés par l’inondation de la
Bohème s’élèvent à la somme énorme de
60 millions de-florins, environ 153 millions de francs.
— Ce même journal contient un article
très remarquable dans lequel il reproche
à la France de se laisser envahir par
l’ultramontanisme. L’agitation cléricale,
dit-elle, est toujours croissante: — «Non
seulement elle enlace les paysans dans
ses filets, mais s’élève aussi jusqu’aux
plus hautes régions de la société , cherche à dominer les pensées et les sentimeols de la population intelligente et à
paralyser toutes les réformes propres à
améliorer la situation à présent malsaine
de la nation. On dirait pres(3ue <jue la
société française cherche, dans le domaine
de l’église, un abri contre les souvenirs
trop vivaces d’un passé récent et contre
l’abaissement présent.
La Nette freie Presse termine en conseillant à la France de se soustraire à la
domination des jésuites, « autrement elle
court à sa ruine morale et éprouvera sut
le terrain intellectuel, comme sur le terrain
économique, de nouvelles défaites, un
Sédan intellectuel. La France est asset
riche et assez grande pour se consoler (if
la perte de deux provinces ; mais une fois
tombée au point de vue do l’instruction,
minée par l’influence^ destructive et la
domination cléricale elle sera à jamais
ensevelie dans la nuit d’une mort intellectuelle ».
E. Malàk Dire(iteur-Géranl.
Pignerol, Impr. Cbiantore.