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LE TEMOIN
ECHO DES VALLÉES VAUDOISES
Paraissant chaque Vendredi
7otis 1JW témoins. Actes 1, 8,
•S'wzi'íiírtí Í» vértié (tMe la cka/rité. Epir. rv, !&'.
O m m a i r* e
Siluation délicate. — Mon âme bénis
l’Eternei, et n’oubiie pas un de ses bienfaits.—Deux amis de l’Eglise yaudoise. —
Missions. - NouveM^s ^eligieusas. — Vgriélés. — Revu0 politique.
Situation délicate
La Société des Missions Evangéliques de Paris, nous paraît
traverser, à ce moment, une période critique. Nous lui souhaitons
de grand cœur d’en sortir sans
rien y perdre de sa noble indépendance et de son prestige chrétien.
La chose ne paraît pas être si
facile. Depuis quelques années,
elle est sollicitée par le Gouvernement français et par ceux que
préoccupe, avant tout, la politique , à porter son activité essentiellement dans les lieux où .son
ceuvfe pourrait aider à consolider
la domination française : au Tonkin, en Tunisie, à Madaga.scar,
au Congo etc. On comprend la po
sition délicate et difficile de.s
honorables directeurs de laSociété.
Autant que personne , mieux que
le grand nombre, ils aiment leur
patrie terrestre et seraient heureux de concourir à sa prospérité
si la chose pouvait se faire sans
nuire aux intérêts supérieurs du
Règne de Dieu. Ils le feraient
d'autant plus volontiers qu’il ne
manque pas de gens prêts à les
accuser de manque de patriotisme,
s’ils ne se prêtent aux vues du
Gouvernement.
«
« A
Mais, d’un autre côté, comme
le disait fort b,ien VEglise Libre
(Août 1886), « une porte ouverte
par le Gouvernement n'est pas nécessairement une porte ouverte
par Dieu ». Or il est de toute
évidence que si Dieu a ouvert
une porte à la Société, c'est bien
celle du Lessouto où elle a moissonné de si beaux fruits. Avec
le Lessouto est venu le Zambèze,
où les Barotsis parlent la langue
des Bassoutos. Aucun calcul hu
4
'll
2
.50
main n’a poussé la Société dans
ces champs de travaiL Seul le
saint désir d’annoncer Christ à
ceux qui périssent dans les ténèbres, a présidé à ces entreprises. Aussi bien, le Comité ne
songe en aucune façon à abandonner les anciens champs de
travail., Seulement, il'a'été amené
à se derhander s’il ne fallait pas
profiter des offres du Gouvernement qui lui offrait, au Congo
français , de traiter les missionnaires protestants de la même
manière que les catholiques. Il
vient de décider, en effet, la fondation d’une mission au Congo et
l’envoi d'une expédition préparatoire à peine il aura trouvé un
homme qualifié pour cette tâche.
"k ★
A cela, nous n’avons rien à objecter, connaissantle zèle chrétien
des directeurs de la Société... Et
pourtant, à la voir accepter l'offre
d’un gouvernement incrédule qui
n’attend d’elle que des services
politiques et qui, dans ce but,
n’accorde de liberté religieuse
qu’à 'des missionnaires dépendant
d’une société française, il nous a
semblé'qu’au lieu de gagner, à
cette espèce d’alliance, elle y perdait aux yeux du monde chrétien.
C'est avec un sentiment tout
semblable que nous l'avons vue se
prêter aux projets d’enquête de
M. de Freycinet dans les affaires
protestantes de Madagascar. Ce.s
projets n’ont heureusement pas eu
de suite, mais la société n’en avait
pas moins mis'un pasteur à la disposition du gouvernement pour
une enquête qui n'avait certes pas
pour but de faciliter et d’encourager l’œuvre entreprise par la
Société des Missions de Londres
dans la grande île africaine.
Hâtons-nous d’ajouter,pour être
juste, que le Comité de Paris a
noblement refusé en 1884, l’invitation que lui adressait le soussecrétaire d’Etat de la Marine et
des Colonies, de « mettre immédiatement à la disposition du gouvernement des pasteurs qui seraient envoyés à Madagascar au
fur et à mesure de la prise de
possession» de la part de l’armée
française.
Ce refus suffirait, à lui seul,
pour nous montrer que la Société
n’est pas disposée à descendre au
rang d’une agence du Gouvernement. Elle a une tâche plus élevée
à remplir. « Les messagers de la
Bonne Nouvelle n’ont reçu de Dieu
d'autre mandat que de faire entendre celle-ci aux pécheurs, par
tout le monde. De cela, on en
conviendra, nos gouvernants ne
se soucient guère». [Egl. TAbreW
août 1886).
Jusqu’à présent, les puissants
engrenages du Gouvernementn’ont
saisi de la Société qu’un lambeau
de vêtement. Nous espérons bien
qu’elle ne se lais.sera jamais prendre la main. Sa carrière a été si
noblement désintéressée par le
passé, son but si dégagé de tout
alliage mondain, qu'elle n'a pas
eu de peine à gagner la sympathie
de chrétiens de nationalités diverses.
Le jour où ses relations avec
le Gouvernement français prendraient un caractère trop intime,
3
.51
elle verrait se refroidir l’intérêt
de ceux qui désirent l'avancement
du règne de Christ, mais n’ont
aucune admiration particulière
pour l’administration coloniale
française.
H. B.
Mon âme bénis l’Iüteriiel,
et n’onblie pas un de ses bienraits
Lire: PS. 103.
Quoique les bienfaits de l’Elernel
ressemblent aux ondes de la grande
mer, qui recouvrent aussitôt celui
qui s’y plonge, nous les oublions,
hélas, bien facilement. — Ou bien,
nous les recevons comme une chose
qui nous est due, et nous ne leur
accordons pas la valeur qu’ils ont.
El pourtant, rien ne rend l’homme
malheureux comme l’ingratitude. Elle
est une marque du péché, semblable
à celle de Caïn, et envenime la vie
qui pourrait être la plus heureuse.
Rien ne va à l’homme ingrat; mécontent de tout et de tous, découragé,
sans confiance en Dieu, il rend, par
dessus tout cela, la vie amère à ceux
qui l’entourent.
Un tonneau défoncé ne gardera pas
une goutte du vin qu’on y verse. Fûtce le meilleur vin, il serait tout
perdu, et le tonneau.n’en deviendrait
pas meilleur. Cl est l’image frappante d’un coeur ingrat.
Mon âme ne sois pas ingrate. Regarde en toi et autour de loi: tous
ces biens, à qui les dois-tu? Qui te
donne l’existencef Qui pourvoit aux
besoins de ton corps en lui donnant
la nourriture, le vêlement et les soins
qui lui sont nécessaires?
A qui dois-tu d’être entourée par
l’affection de tes parents et de les
amis? — Ne l’y trompe pas:
t Toute grâce excellenie et tout don
parfait descendent d’en haut, du Père
des lumières, chez lequel il n’y a ni
changement, ni ombre de variation «
(JaCQ. 1, 17). Tous ces dons te disent
de la part de Dieu: «Je l’ai aimée
d’un amour éternel ». (Jérémie 31, 3).
Que le manque-t-il encore.’’ Ahíje
le sais. Il te faut quelque chose de
plus que les dons de Dieu pour être
vraiment heureuse: il te faut le Donateur, l’Eternel lui-même. Sans lui
lu ne peux jouir de rien... rien...
Eh bien élève les yeux vers les montagnes de la Judée. Distingues-tu cette
colline près de Jérusalem? Elle s’appelle Golgotha. Là, Dieu s’est donné
à toi ! Là, Jésus-Christ a versé son
sang pour le laver de les péchés, et
te procurer la vie éternelle. N’en tendstu pas fa voix qui le dit: Je suis
avec toi ?
Mon âme, si indigne', si froide, si
ingrate approche-toi chaque jour de
Jésus, prie-!e beaucoup, lis avec persévérance sa parole. Il t’enseignera
la reconnaisance si lu te tiens près
de lui !
Mon âme bénis l’Elernel !
D. P.
Deux âmis de l'Eglise Vaudolse
Les six derniers mois nous ont
enlevé deux amis précieux; Georges
Barbour de Bonskeid décédé à Edimburgh, à la fin de janvier et Miss
Lenox décédée à New-York le 7 juillet dernier. Tous les deux étaient
d’anciens amis de notre Eglise et
de son œuvre en Italie. Tous les
deux ont montré jusqu'à la fin de
leur carrière terrestre l’intérêt qu’ils
portaieni à l’avancement du régne
de Christ parmi nous. Le dernier
rapport du Comité d’Evangélisation
contenait encore le don annuel de
frs. 2500 de Miss Lenox. Quant à
Georges Barbour il avait été pendant
longtemps président du Cqmilé d’Edimburgh pour l’Evangélisation en
Italie. Depuis sa jeunesse la cause
de l’Eglise Vaudoise lui tenait à cœur
et ses relations avec le D( Gilly ne
firent qu’accroître son intérêt. Lors
de son mariage, il s’étail proposé
de faire son voyage de noces en
Italie et d’assister au Synode de
4
b2.
1845. Son désir ne put se réaliser
qu’en 1850. Sà générosité pouf touteè
sortes d’œuvres chrétiennes a duré
autant que ses jours. Il avait donné
pohr le fonds Pafeleurs 500 Lsl.
Missions
Expédiliqn du Zambèze.
D’après les dgrnières lettres de
Monsieur Coillard, la situation au
Zambèïe ne sernble pas encore des
plus rassurantes. Le roi LéWartika
continue à faire exercer sés rej)résailles sur les chefs qui s’étalent
rangés du côté de son ennemi.
Dans son insatiable soif de vengeance il n’épargne ni femmes ni enfants, et les ordres sanguinaires
s’exécutent jusqu’aux portes de la
station missionnaire de Sestiéké. «Re
lerumô, c’est l’épée », disent les Zambéziens.
Le vol est à l’ordre du jour! Il
arrive aux missionnaires de rencontrer certains petits chefs crasseux
révêtus de leur linge de corps!
« Plus je vais, plus je crois que
des tribulations nous attendent »,
écrit Mons. C.
Mais sa confiance en Dieu est inébranlable: a Nous sentons toujours
plus le besoin de nous cramponner à
Dieu et-â ses promesses, arrive que
pourra. Si Dieu est pour nous, qui
sera contre nous? Dans un milieu tel
que celui-ci, la présence de ce Sauveur glorifié qui nous a envoyés et
à qui toute puissance est donnée, non
seulement au ciel, mais aussi sur la
terre, donc au Zambèse aussi, est
une glorieuse réalité, nous le sentons.
Soyez donc sans inquiétude à notre
égard».
Au milieu de cet «état de siège»
les missionnaires continuent pourtant
à. être respectés et ils jouissent même
de la haute considération du roi, qui
lâche de cacher ses crimes à leurs
yeux.
Ce qui nous semble de bon augure, c’est que plusieurs sociétés
missionnaires (des américains, tes
méthodistes primitifs et les wesiéyerts)
cherchent à établir des postes sur les
bords du grand fleuve ou de ses affluents, Divers pionniers sont déjà à
l’œuvre. Nos amis C. et Jalla ne seront
plus si seuls.
La santé de la société de Seshéké
est du reste excellente, le pain et le
lait ne manquent pas pour le moment.
Middleton que monsieur G, avait
envoyé avec un wagon à Prétoria (capitale du îranSvaal) poür y éenuuVêler
les provisions était heureusement de
retour au gué de Kazungula ( entre
Leshoraa et Seshéké),
Deux nouveaux missionnaires, MM.
Dardier et Goy se sont embarqués
le 2 février à Londres pour aller rejoindre l’expédition, ie premier eh
'qualité de médecin, le second d’aide
jardinier. Ils rejoindront les Jalla
avant leur arrivée au Zambèze.
Pays des Hottentots. — Amis pasteurs, voulez-vous entendre parler
d’un auditoire que plus d’un d’entre
nous peut envier? Ecoutez ce que
raconte le frère Marx, missionnaire
à Wiltewater, dans le journal de
rUhilé des Frères:
« Quand la cloche sonne pour la
première fois, l’avant-garde des estropiés et des boiteux paraît à la
porte de la chapelle. Un vieillard, du
nom d’Esaïe, arriye en traversant la
montagne, apppyé sur des béquilles.
Jérémie, dont les deux jambes sont
entièrement raides, ne manque jamais
non plus, car il_ aime son Sauveur.
Jean, qui a les jambes croisées, de
sorte qu’on ne s’explique pas comment il peut marcher, tient également à assister à tous les cultes et
semble manger les paroles à mesure
qu’elles sortent de la bouche de son
maître. Cet homme est un des premiers habitants de ’Wittewater et était
autrefois un fripon achevé; mais cela
a complètement changé. La vieille
femme Wilhelmine, négresse aussi
noire que possible, marche littéralement courbée comme une faucille.
André, nôtre doyen d’âge, qui doit
être près de la centaine, se traîne au
5
----53
moyen de deux bâtons. Voilà les plus
réguliers à ia chapelle! Brisée par
l’âge et les infirmités, mais jeune de
cœur et pleine d’affection et d’amour,
cette troupe d’infirmes ne cesse pas
de réjouir mon cœur et me dispose
fort souvent à parler comme je le
dois. Ah! quelle joie devant le Seigneur Jésus-Christ et devant les anges
au sujet de ces misérables et délaissés
de la terre! »
Et quelle joie, ajoutons-nous, de
pouvoir annoncer l’évangile à de tels
pauvres!
D. P.
ilouiocües rcUigteuôce
La mission française et le Congo. ~
Dans sa séance de lundi dernier, à
laquelle assistait la presque totalité
de ses membres, le comité de la Société des Missions de Paris a discuté,
toutes autres affaires cessantes, la
question de la fondation d’une Mission
franpaise au Congo. Un rapport détaillé du directeur de la Société ayant
été lu ainsi que le préavis de la Commission exécutive, le Comité a tout
d’abord affirmé de nouveau sa résolution bien arrêtée de ne retrancher
absolument rien des subsides nécessaires au développement normal de
ses anciens champs de travail.
Les vingt-deux membres présents
ayant été individuellement invités à
exprimer leur avis, il a été unanimement décidé :
1. Que le Comité faisant acte de
foi répondrait affirmaUvement aux
ouvertures qui lui ont été faites pour
la fondation d’une Mission au Congo;
2. D’envoyer au Congo une expédition préparatoire, dès que le Comité aura trouvé l’homme de foi et
d’expérience nécessaire pour cette
tâche.
Les préparatifs pour le quatrième
Concile presbytérien —Londres 4888
— ont commencé. La commission
exécutive de l’Alliance émet le désir
que les Eglises nomment leurs délégués au Concile de Londres cette
année, afin que ces derniers puissent
recevoir programme et autres communications.
Evangélisation en Italie, ie\ est le
titre de la conférence donnée le
mardi 8, par M. le pasteur Pons,
de Naples dans une des salles du
Casino à Genève. Notre journal ayant
eu maintes fois l’occasion d’entretenir
ses lecteurs d’un semblable sujet,
nous ne donnerons qu’un court résumé des paroles du sympathique
orateur.
L’œuvre dont l’Eglise vaudoise des
Vallées a pris la responsabilité est
en bon cnemin; ses progrès sont
lents, mais sûrs. Elle comptait, en
décembre 1886, 421 ouvriers, pasleurs. évangélistes, colporteurs, maîtres d’école, etc.; M Eglises, 38
stations, indépendanimenl des 171
localités plus où moins éloignées des
centres, et visitées à certains intervalles; -1,060 communiants, pour la
plupart anciens, catholiques. Si la
paroisse de Pignerol s’est rattachée
à I’ Eglise-mère, en revanche, le
champ de l’évangélisation compte
quelques nouveaux postes où les
Vaudois s’efforcent de répandre autour d’eux le message du salut; par
exemple en Sicile, près de Naples,
et non loin de la petite cité d’Aoste.
Le colportage, les écoles, les services funèbres, tout leur sert à gagner les âmes plongées dan» l’ignorance,' l’erreur et la superstition. Il
n’est pas jusqu’aux séances apologétique instituées à Naples par M. Pons
lui-même, qui n'aient produit «un
heureux résultat dans le sein de la
population plus éclairée qui s’intéresse aux questions à l’ordre du jour.
M. Pons a terminé en priant ses
auditeurs, et en général tous ceux
qui désirent voir se lever un nouveau
jour sur l’Italie, de ne pas oublier
l’œuvre qui s’y aceoraplit avec de
réelles bénédictions.
M. le pasteur Peter s’est levé ensuite pour adresser la même recommandation et reudi’C témoignage à
6
54
l’excellent esprit dans lequel les Vaudois des Vallées travaillent au bien
moral et spirituel de leurs compatriotes. Nul ne pourrait prendre leur
place, car ils ont tout ce qu’il faut
pour réussir, le sérieux, la foi, la
persévérance , le patriotisme, et notre devoir est de les aider d’une
manière efficace. (Sem. Relig.)
®anétis
le juge (le paix et le pasteur
« Hickorytown » était un poste pénible pour les pasteurs, et ce qui
leur rendait l’existence amère, c’était
la présence du juge de paix. De la
Bible, il y avait deux chapitres qui
convenaient à cet homme: Matth.
X. et Luc X. — Constamment il les
citait et les commentait, — surtout
en présence du pasteur. C’était son
épée de chevet, et il n’était pas peu
fier de ce qu’aucun pasteur n’était
encore parvenu à le réfuter. Généralement, il terminait l’exposé de
ses opinions par ces mots: « Les
pasteurs qui vivent de leur traitement me sont insupportables. Laissezles travailler comme saint Paul et
faire leur chemin comme tous les
autres hojpnêtes gens ».
Il y a dix ans environ, , il fut
question d’ériger un presbytère à
Hickorytown. Tous les membres de
la paroisse avaient opiné favorablement, lorsque notre juge de paix
se leva et, dans un entraînant discours, développa son thème favori:
« Je voudrais bien savoir si saint
Pierre ou n’importe quel apôtre a
jamais eu la jouissance d’un presbytère! Mes chers amis, loin de moi
d’être hostile aux pasteurs; au contraire, je les aime et je les estime.
Mais il faut que les pgsteurs ressemblent aux apôtpes. Où lisons-nous
qu’ils aient porté des habits de drap
fin? qu’ils aient habité une maison
spéciale? Ils n’ont rien eu de semblable! Le Seigneur leur a dit: «Ne
prenez ni or, ni argent, ni cuivre
dans vos ceintures, ni sacs pour le
voyage, ni vêtements de rechange,
ni chaussures, ni bâton. Dans quelque maison que vous entriez, dites
d’abord: « La paix soit sur cette
maison !» Demeurezdans cette maisonlà , mangez et buvez ce qui s’y trouve!
Je vous demandp: Où est-il question
d’un' presbytère? Je vous mets au
défi de me citer un seul passage
mentionnant un presbytère, — ou
de me prouver qu’aujoud’hui nos
pasteurs valent plus et mieux que
les saints apôtres? Si ceux-là ri’onL
pas eu de presbytère, nos pasteurs
n’en ont pas besoin davantage ».
L’argument était sans réplique. Personne ne put ou n’ osa soulever
d’objection. Le presbytère ne fut pas
construit. — De nombreux pasteurs
qui se succédèrent à Hickorytown
dans l’espace de vingt années et qui
ne cessèrent de se plaindre des logements incommodes dont ils étaient
locataires, aucun ne put triompher
de Pargument décisif que notre juge
se plaisait à colporter partout, tant
au Conseil municipal qu’à l’auberge.
Aucun ne ..put ou ne voulut fournir
la preuve qu’il était plus que les
saints apôtres, — partant il n’avait
pas besoin d’un presbytère, aussi
n’en obtint-il pas.
Mais, tant va la cruche à l’eau
qu’a la fin elle se casse. Preuve en
soit notre juge, et voici comme:
A Hickorytown, on vit débarquer
un jour un nouveau pasteur-, M. Salomon, homme modeste, sans prétentions, qui n’avait d’extraordinaire
que sa pauvreté. Avec femme et
enfants, il occupa, non le presbytère,
contre lequel s’était prononcé le juge
de paix, mais un logement d’un loyer
peu élevé, il est vrai, ce qui s’explique par sa situation insalubre son
entourage bruyant et enfin la réputation qu’on lui faisait d’être hanté
la nuit.
C’est là que s’installa ou chercha
à s’installer le pasteur Salomon avec
sa famille. Tous furent atteints de la
fièvre. Sa demande pour l’obtention
d’un presbytère fut accueillie comme
7
55.
celle de ses prédécesseurs. Après diverses lenlalives ¡nfriielueiises, noire
E, le rencontrant dans la rue, l’ala en ces mots :
— Vous voudriez avoir un presbytère? Vous n’avez donç pas lu Matthieu
X? Vous croyez-vous meilleur que les
apôtres?
Le pasteur répondit que telle n’était
pas sa prétention; qu’il y avait beaucoup de vrai, de concluant dans ce
qu’il venait d’entendre, qu’un jour
nouveau ‘s’était fait dans son esprit
sur plus d’un point; il réfléchirait à
ce que venait de lui dire un ami,
puis il ne manquerait pas de lui faire
part du résultat de ses réflexions.
Je laisse à penser quelle fut la satisfaction du ju^e, tout fier d’avoir
converti un pasteur à son opinion.
Mais rit bien qui rit le dernier!
Peu de jours après cet entretien,
notre juge fumait encore sa pipe matinale, quand un formidable coup
retentit à sa porte. Il ouvre, et que
voit-il? le pasteur Salomon et sa famille, rangés sous la véranda.
En guise de borîjour, le pasteur
Salomon élève la main droite et dit;
<5 La paix soit sur cette maison ! *
puis, sans attendre d’autre invitation,
il pénètre dans la maison avec sa
suite. Bien que surpris par l’attitude
grave et digne du pasteur, le ju^e
ne s’arrête pas autrement au procédé
et croit qu’il s’agit simplement d’une
visite pastorale, sous forme, il est
vrai, d’édition augmentée!
L’intention manifeste du pasteur
^tait de passer la journée chez le
juge. La matinée s’écoula en entretiens agréables pendant lesquels les
enfants s’amusèrent comme des princes dans le verger. Après dîner, le
pasteur s’excusa; quelques fonctions
l’appelaient au dehors, mais il serait
exact à Theure du souper. La soirée
se passe, la famille pastorale ne
bouge pas, et le maître de la maison
finit par comprendre. Ils veulent passer la nuit céans! Ainsi fut fait, et
la nuit fut délicieuse pour ces braves'
gens qui, depuis si longtemps, n’étaient plus accoutumés à coucher
dans une demeure et dans des lits
convenables.
Le lendemain, après le déjeuner
et le culte, le pasteur demanda une
chambre solitaire, — une chambre
de prophète; — où il pût passer la
matinée à prier, à lire la Bible et à
méditer. « Je n’ai pas de bibliothèque,
il est vrai, mais à quoi bon? Les
apôtres n’en avaient pas non plus.
Notre entretien de l’autre jour dans
la rue m’a ouvert de nouveaux horizons. Nous ne valons pas mieux, que
les apôtres, aussi ne vais-je avoir rien
de plus ou de mieux que ce qu’ils
avaient eux-mêmes ». Sur quoi, toujours grave et digne, il sortit.
Où voulait-il en venir? C’est ce que
le juge ne soupçonnait pas encore.
Deux, trois, cinq jours se passent.
L’étonnement du juge va en croissant : il y eut, dit-on, plus d’une
scène entre lui et sa femme. Enfin,
après un long débat intérieur, il finit
par prendre la résolution de s’adresser au pasteur lui-même et de lui
demander de l’aviser sur ses intentions.
— Mais, répondit le pasteur Salomon, tout en clignant des yeux, je
compte séjourner sous votre toit tutélaire aussi longtemps que je serai
pasteur à Hickorytown, ainsi que l’a
commandé le Seignéur à ses disciples
dans un chapitre qui vouseslfamilier.
— Quoi ! vous avez renoncé à vouloir habiter un presbytère?
—i Sans doute, et ,|e ne songerai
plus à rien de pareil, car mon intention bien arrêtée, c’est de vivre
à la façon apostolique; — or, vous
savez que les apôtres n’avaient pis
de presbytère.
Le juge de paix parut étonné et
demanda si le traitenqent du pasteur
ne suffisait plus à son entretien et
pourquoi il prenait ainsi ses quartiers chez d’autres familles.
-■ Mon traitement ! Ne savez-vous
pas que les apôtres n’ont pas eu de
traitement? J’ai renoncé au mien.
Demain, je ferai paj't de ma réiolulion à la paroisse. Je ne vaux pas
mieux que les apôtres !
— He, sans doute, voilà qui est
tout-à-fait conforme à la Bible, et
je vais de ce pas trouver mon voisin,
pour que chacun vous accueille à
8
.56
tour de rôle pendant une semaine
dans sa maison.
— Je ne demanderais pas mieux,
mais je ne saurais y consentir. Mes
instructions sont précises : « Dans
quelque ville ou village que vous entriez, informez-vous s’il s’y trouve
quelque homme honorable, et demeurez chez lui jusqu’à ce que vous
partiez». Et saint Luc ajoute; «Demeurez dans cette maison là, mangeant et buvant de tout ce qu’il y
aura. N’allez pas de maison en maison ». Je voudrais bien ne pas vous
être à charge et aller de maison en
tnaison, pour qu’il y eût répartition.
Mais le texte sur ce point est formel.
Je dois rester ici jusqu’au jour où je
quitterai Hickorytown.
Maintenant, seulement, le juge
comprit où le pa.steur voulait en venir
et la. leçon profita. Le pasteur n’eut
plus de peine i faire comprendre à
son hôte qu’un pasteur n’est pas un
apôtre, et pas plus tard que le lendemain, au Conseil Municipal, on
décida l’érection d’un presbytère. Le
juge de paix, cette fois, ne vola
plus contre cette propositicm. Chacun
s’en trouva bien et lui le premier.
(De l'anglais).
politique
Mfaiie. — La crise ministérielle
ne semble pas être près de sa fin.
Ceux qui voudraient, à tout prix,
être délivrés de M‘‘ Déprétis prétendent même qu’il n’a pas encore été
chargé de former la nouvelle administration, Ce doit être une supposition
gratuite, ou une erreur volontaire.
Les informations les plus précises
portent que l’ex-présidenldu Conseil,
d’i>,ccord avec M. Rpbilant, qui aurait
consenti à garder, ou à reprendre,
le porte-feuille des affaires étrangères,Ira vaille activement à s’associer
quelqûes-ims des hommes les plus
notables de la droite , soit au Sénat,
soit à la Chambre. Rien d’étonnant,
du reste, à ce qu’il n’ait pas encore
réussi; quoiqu’il soit à souhaiter que
la crise ne se prolonge pas beaucoup
plus longtemps.
L’ensemble des rapports reçus jusqu’ici sur la sanglante affaire de
Uogalî ne peut pas être considéré
comme satisfaisant, puisqu’on n’explique, ni comment il s’est fait que,
sachant l’ennemi en forces dans le
voisinage, on ait pu négliger les précautions les plus élémentaires pour
ne pas se laisser surprendre, ni comment on n’a pu se servir des deux
mitrailleuses que la colonne emmenait aveh. elle. ~ Que l’on exalte le
moral des soldats, rien de mieux;
mais il est trê.s imprudent de leur enseigner à mépriser l’ennemi qu’ils ne
connaissent pas encore.
Il faut espéreh que le service si
important des reconnaissances se fera
désormais avec beaucoup de soin , par
le moyen des soldats ilaliens, et non
par des alliés peu sûrs, ou par des
traîtres, en sorte que le général en
chef puisse adresser au Ministère
autre chose que des: on dit, ofi croit,
on suppose.
Le Roi a donné Î20 000 francs eu
faveur des familles pauvres des blessés d’Afrique, et le Duc d’Aoste francs
iO 000.
Awtffleierre. — L’amendement
Pai nell à l’adresse du Parlement à la
Reine ayant été repoussé par 100 votes
de majorité il n e.sl' pas impossible
que M. Gladstone recule devant la
perspective d’être battu à son tour,
et qu’il n’arrive pas à temps pour
prendre part à la discussion de l’adresse.
En Allemagne, en Russie et en
France on ne cesse de répéter que
les chances en faveur du maintien de
la paix s’accentuent de jour en jour,
et plût à Dieu que' le vieux dicton se
réalisât pleinement aujourd’hui: si tu
veux la paix, prépare-toi à la guerre.
Car jamais, probablement, les préparatifs de guerre ne se sont faits d’une
manière aussi formidable.
Ernest* Robert , Gérant
Pignerol , Imprim- Chiantore et Mascarelli.