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Année Cinquième.
26 Décembre 1879
N. 52
LE TÉMOIN
ECHO DES VALLEES VAUDOISES
Paraissant chaque Vendredi
V'ov* m« téxét A.ctrs 1, 8.
SvAMant la vérité avec la charité. Ep. K 15.
-----...... ' Il . K ’ ......... !1 plusieurs niimérris sepii
PRIX D'ABBONÏIISMBNTPAR ANip’“ ® • ;| ris, dsmandês aVint le li'
, ~ ' Four i'Inlérietir ‘•.her. MM. les. rape 11) uent. ohacun.
ijasteurft p^t Iss libraires de Aiiaonces'. ^5 cerjUmes par ligne.
Torre l'ellica. I Les envois d'argent se font par
,, ,.r^ .. . TTi T* T II lettre recommandée <m par
Pour l .Escfeneiir au Bureau d Ad- ^nandats sur le Bureau de reministiation. j rosa Argentina,
Italie
I Tous lîvS pays de l'Unioii
I de peste
; Amérique
I Pour la RÉDACTION adresser ainsi : A la Direction du 7'cwom r Pomaretto (Pinerolo) Italie
i pour r ADMINISTRATION adresser ainsi : A T AdmiiiiatraUcm du Tciuoin, PomarcUo i Pinerolo) Italie.y
iSomm.ait'G
Noël. — Circulaire de la Commission
d'Evangéhsation etc. Une parabole. —
l.e princifie païoD- “ CORilaiice en Dieu.
— Un terrible-songe. — Un verre de trop.
— Annoboe.
NOËL
Un ^'ratid sujet 'le joie
qui sera (el pour tout
la peuple I.UC n, 10.
Hélas ! Combien il s’en l'aul encore
que celle glorieuse parole ail eu son
accomplissement en faveur du peuple
particulier qui a eu les prémices de
ia bonne nouvelle, comme envers tous
les autres peuples auxquels le message
céleste était également destiné ! La
masse du peuple juif ne veut pas se
réjouir d’un salut accompli , et qui
sait si la plupart de ses hommes les
plus intelligents ne rejettent pas maintenant Moïse et les prophètes, ta loi
et la promesse pour se prosterner de*
vatil le veau d’or ? Mais tout comme
au temps de St, Paul, cet apôtre se
donnait lui-même comme une preuve
vivante que Dieu n’atait pas rejeté son
peuple , que ses dons et .sa vocation
étaient sans repentance, ainsi encore,
d’année en année, ces quelques enfants
d’Abraham qui fléchissent le genou
au nom de Celui que leurs pères ont
crucifié, sont des prémices et des
gages assurés d’une abondante moisson d’âmes. Jamais depuis que l’ange
de l’Elernel a annoncé cette grande
nouvelle aux bergers de Bélhlehem, il
ne s’est écoulé une seule année ni
même un seul jour, sans que des représentants du peuple de la promesse
se soient réjouis de son accomplissement.
Et d’un autre côté n’esi-il pas profondément triste que les trois quarts
des habitants de notre terre n’aient pas
encore entendu parler de cette grande
joie, préparée cependant pour eux
aussi ; plus triste encore de savoir
quel, de l’autre quart, un très petit
nombre seulement a goûté celte grande
joie ?
Toutefois ce n’est pas la tristesse
qui doit dominer dans les cœurs des
rachetés, en aucun temps et spécialement en ces jonrs-ci. C’est avant tout
un sentiment de joyeuse reconnaissance pour le grand salut qui leür a
2
élé apporté, pour te don ineffable dont
ils ont élé enrichis, pour celle paix
céleste qu’ils i^oûlcnl dans la communion avec leur Dieu-Sauveur.
Réjouissez-vous leur crie l’apôlre,
je vous le dis encore , réjouissez-vous.
Mais celle joie serait malsaine cl mauvaise, si elle était égoislc. Aussi la joie
chrélienne esl-eiic nécessairement accompagnée et tempérée par une Icndreîcompassion pour ceux (jui sont encore sans Dieu et sans espérance dans
te monde.
Cfju,\ tjiic l'ninour lo plus (endrs
.Mïranuhit, sauvn «¡ans relour,
N’fint'ils point (le pleur« à rfij>RrKlrft
•Sur le mépris d'un tp.l nmoiir ?
Les lieureuses l’amilles qui, le jour
de Noël, se trouvent réunies dans une
chambre bien cliaudc, antour d’un bel
arbre de Noël, peut-être, ayant tout
près d’elles le nécessaire en abondance
et même le superllu , se réjouissent
d’autant mieux de cette abondance
des biens de Dieu, qu’elles auront eu
soin d’apporter quelque soulagement cl
quelque joie dans la maison du pauvre.
Ainsi l’entant de Dieu ne saurait se
réjouir de ce que lui-même a trouvé
un Sauveur, sans se rappeler que celle
grande joie est pour tout le peuple et
pour tous les peuples, et sans assiéger
le trône de grâce en’ laveur de ces
multitudes qui marchent encore dans
les ténèbres et dans l’ombre de la mort.
CiBOULAIRË
de la Commission d’Evangéiisalion de
l'Eglise Vaudoise aux Evangélistes et
autres oiivriers de l'Eglise Vatidoise.
La circulaire ci-après, adressée
par la Corumission d’Evangélisa.
tion de l’Eglise Vaudoise aux
ouvriers qui travaillent sous sa
direction, nous a semblé pénétre'e
d’un si bon esprit et si riche on
Gxcellonts conseils, que nous croirions faire un tort aux lecteurs
du Témoin, on ne la portátil pas,
à leur connaissanee.
Kéd.
Chers frères,
.le viens vous adresser quelques mois
au nom de noire Comilé cl ne feiai
pas de préambule n’ayaiit que peu de
temps. — Je toucliêrai rapidement
aux différentes parties de l’œuvre, me
pei mellant quelques conseils auxquels
chacun pourra aioulor ceux que lui
dicte sa propre expérience ; même ,
le Comilé sera toujours reconnaissant
A ceux d’entre ses ouvriers qui lui
communiqueront leurs idées sur les
meilleurs moyens à employer pour
imprimer à l’œuvre un nouvel élan.
Eglises et Stations. — Je comprends sous ce litre les membres communiants à qui l’on distribue d’une
manière régulière le pain de la Parole
pour les fortifier dans la foi et les t
faire avancer sur le chemin de la perfection.
if) Pas n’est besoin de vous recommander de bonnes préparations, quoique peut-être il ne fût pas superflu
de le rappeler à quelques uns ; on
est facilement tenté quand on n’a de- ^
vant soi qu’un auditoire restreint de
s’imaginer qu’un discours quelconque
plus ou moins bien cousu peut suffire parfaitement. 11 suffira en effet
pour amoindrir encore le nombre déjà
petit, jamais pour l'accroître ; si la
préparation pouvait varier (d’après le
nombre plus ou moins grand d’auditeurs , mon avis serait qu’elle doit
être plus soignée encore pour un
petit que pour un grand auditoire ;
quand on est en petit nombre on est
exposé à de plus grands dangcrsi ainsi
au découragement, et l’on a besoin
d’une nourriture vraiment solide qui
augmente vos forces. Donc: bonne préparation , variété dan.s les sujets, instruction progressive, voilà les moyens
extérieurs, visibles.
3
.419.^».
Les moyens invisibles serónl la communion fionliniielle avec le Sei<inei.ir,
la foi inébranlable en ce Dieu qui aujomarbui comme loujours ne voiU pas
la mort du pécheur, mais sa conversion et sa vie. 11 m’arrive fréqueinmenl de lire ou d’entendre parler de
qpelques-nnes de nos Eglises atteintes
d’une espèce d’assoupissement léthargique de lelle sorte qu’on pourrait
leur dire • sinon • Tu as le nom de
vivre et cependant lu es niorl » — du
moins; «Tu as abandonné ton premier amour». Cliers frères, mcllonsnous en la présence du Seigneur et
demandons-Ini insiammenl de nous
faire connaître, si la tiédeur que nous
(iéplorons ne règne pas dans nos propres cœurs , si , même , nous ne sommes pas, quoique d’une manière inconsciente, la cause de l’apathie sur
laquelle nous gémissons.... J’arrête ma
plume pour ne pas trop m’etendre,
mais que de choses je voudrais vous
dire encore sur cel important sujet!
b) Après l’accroissemenl de la vie
religieuse je vous recommande de ne
pas négliger la vie ecclèsiaslique. Nos
Eglises ont fait de grands pas dans
cette direction, mais il en reste beaucoup à faire avant qu’elles soient arrivées à former un corps bien compacl.
— Que l’on maintienne les meitlenres relations avec les autres dénominations, mais que cliaque menabre
soit bien instruit des devoirs spéciaux
qu’il contracte avec l’Eglise Vaudoise
à laquelle il apparlienl. —- Les contributions, dont je parlerai plus bas,
ne pourront jamais .atteindre le but
vers lequel nous tendons, si un amour
vrai et profond pour l’Eglise ne vient
pas remplacer cet amour si liède, prole.ssé par quelques personnes et réparti également entre toutes les dénominations, lequel ne produit aucun
friiil.
2). Ecoles« — N’oublions jamais
que nos écoles ne doivent pa.s être
de pures succursales des écoles du
mnnicipe ou du gouvernemenl.
Que les examens soient couronnes
de succès, je m’en réjouis ; mais ma
joie diminue par degrés et môme se
dissipe toiiL-â-fait quand je vois les
élèves s’éparpiller è droite et à gauche,
sans qu’aucun d'eux entre dans l’Eglise.
3) Que les Ecoles du Dimaiiche
réclament toute voire ruiention. Elles
sont la vraie pépinière de l’Eglise. —
Soignez avec soliieilnde et avec amour
ces jeunes plantes atin qu’elles deviennent prospères. Mettez loul en œuvre pour rendre ces école.s altrayanies
par des chants variés', des récits, des
journaux illustrés etc. — Mallieni’ à
vous si un enfant trouve votre école
du Dimanche ennuyeuse. 'Vous ne l’aurez certes pas dans l’Eglise, h moin,s
que le Seigneur n’inlervienne direclemenl pour réparer le mal fait par
son serviteur.
i) OBuvre agressÎTC. — J’ai déjà
souvent insisté sur ce poinl. — Vou.s
ne prendrez pas en mauvaise part,
cependant, si j’y louche encore. — Je
sais que plusieurs d’entre voies n’oublient jamais que c’est le poinl principal de votre œuvre ; et cependant,
même de l’Angleterre, il m’est parvenu
des lettres de quelques chers amis qui
se plaignent, disant que le.s ouvriers
de l’Eglise Vaudoise pensent plms à
soigner leurs microscopiques troupeaux
qu’à l’Evangélisation même. — J’ai répondu ,à ces amis comme i! le fallait
mais à vous, je vou.s dis : Mettons à
profil loules les critiques, môme les
plus malveillantes et déployons plus
de zèle. — 11 n’y a personne parmi
vous, j’aime à le croire, qui borne
son activité à la salle de culte et au
Iravail de cabinet. Non , je, me refuse
à croire que des évangélistes vaudois
oublient leur mission et se cristallisent
en petits pasirurs en 32°, .«e contentant d’allendrc les audileurs dans leurs
chapelles.
Voua me direz: ComineiU faire ¡¡\
les auditeurs ne viennent pas ? — On
les eberebe de toutes les manières
possibles ;
a) En proiilant de tontes les occasions qui vous nifiUciiL en conlact
avec des personnes élrangères à la
vérité.
b) En donnanl lieu à des réunions,
à des conversalions dans des familles
évangéliques auxquelles sont invitées
4
'V'W«.#VVWvWWWfcA*VSi V\rt-WWVVWV^
des personnes superstilieuses el incrédules ;
c) Cherchez à développer dans les
membres de voire église l’esprit de
prosélilisme et l'ailes-en tout autant de
missionnaires;
ci) Cherchez à découvrir, par l'entremise des colporteurs, dans quel village ( des environs ) l’on trouve des
personnes bien disposées, essayez de
l'aire connaissance avec elles el d’étendre ainsi l’influence de l’Cvangile;
e) Enfin saisissez avec empressement
les occasions propices pour annoncer
au public une bonne conférence sur
des sujets d’actualité qui commandent
rallenlion.
6) Le Cristimo Evangelico est le
journal de nos Eglises. Le Comité le
fonda pour se rendre au désir des conférences de district. C’était entendu
que chaque évangéliste, que même
chaque membre d'Eglise en état de le
faire aurait coopéré.., el puis?... J'entends critiquer le journal par plusieurs
évangélistes, mais des articles, je n’en
vois point venir.
El cependant, dites moi, croyezvous sérieusement, qu’il y ait un seul
d’entre vous tellement occupé qu’il ne
puisse pas fournir un ou deux articles,
dans l’espace de 365 jours ? Je suis
persuadé que vous ne le croyez pas.
Quant à moi je ne le crois pas. Nous
avons ici une preuve de celle apathie
dont je parlais plus haut. Le journal
compie aujourd’hui 500 lecteurs dans
nos Eglises. Vous semble-t-il chose
inutile que d’avoir l’occasion de donner
une bonne parole , une instruction ,
un conseil, de procurer en un mol
une récréation ou une consolation à
500 personnes? El ce nombre, pourquoi ne chercherez vous pas à l’augmenter ? "
Dans le prochain mois de décembre
souvenez-vous de votre journal , conservez les ancien.s abonnés ,| failes-en
de nouveaux, facilitez la lâche de l’administration à celui qui jusqu’ici a
porté le fardeau le plus lourd, en recueillant el en envoyant le montant
de l’abonneinenl.
Plusieurs d’entre vous ont fait déjà
tout cela et je saisis l’occasion pour
leur en exprimer ma vive reconnni-ssance.
Ils me diront n'avoir lait que leur
devoir; mais par les temps qui courent , cela même mérite des remercîments.
7) GoiitribuUoiis. — Je ne dirai
pas grand chose ; les faits sont à eux
seuls plus éloquents qu’aucun discours.
Durant l’année qui vient de s’écouler
la Grande, Bretagne nous a envoyé
50.000 francs de moins que l’année
précédente. Celte année le plus important de nos Comités auxiliaires a commencé par nous envoyer 500 livres
sterlings de moins ( 12.500 francs ).
Le Seigneur nous a délivrés l’année
dernière d’une manière toul-à-fait miraculeuse. Le fera-t-il celle année?
C’est en lui que le Comité fonde toute
sa confiance. Mais vous le voyez , la
position, humiiinemenl parlant, est
tout autre que brillante. Après-ceci,
je croirais réellement vous oflenscr en
dépensant plus de paroles pour vous
recommander de pousser les contributions el de chercher des moyens nouveaux pour venir en aide à notre
œuvre.
ici encore, je désire exprimer la
reconnaissance du Comité envers les
personnes qui l’ont aidé l’an passé el
3ui se préparent à l’aider cette année
’une manière efficace. Perrnellez-moi
enlr’aulres, de mentionner l’Eglise de
Rome qui compie renouveler le bazar
qui produisit l’année dernière la belle
somme de cinq mille francs.
Si la position financière est difficile,
l’œuvre est encourageante en plusieurs
endroits; la station de Edoto, ci-devant
de l’Eglise libre, a demandé à faire
part de notre Eglise. — A Orbelelio
un groupe de plus de 60 personnes
s’est recommandé à nous el a été accepté.
Le Seigneur semble nous dire; «ne
crains point petit troupeau. Ne craignons donc pas ; les yeux fixés sur
noire Chef, jetons-nous dans la mêlée
avecplusd’ardeurque jamais. «Vaincre
ou mourir, est le cri des soldats qui
s’animent l’un l’autre à se comporter
vaillamment.
5
I5l noos , soldais de Ciirisl, que dirons-nous ? Serail-ii possible que la
gloire humaine et ses allraits pussent,
jeter dans les ;\mes plus de courage
et d’abnégation que la gloire céleste!
Oh ! que Dieu nous baptise à nouveau de Saint Kspril et de l'eu ; qu’il
fasse de nous des inslriimenls toujours
plus ardents et efficaces, qu’il bénisse
abondamment les ouvi iersel son champ
dans lequel il les emploie.
.'igrée?. et participer, à vos Eglises
les salutations chrétiennes et cordiales
des membres du Comité et tout particulièrement de
Votre dévoué
M. P,
line pnntboic.
( Voir /V. 51 ),
(Jiielques autres l èglemenls de compte se tirent d’une manière à peu près
pareille, non sans quelques bienveillants reproches, avec des encouragements à mieux faire. L’un des fermiers
lardait i» venir, quoiqu’il eût été invité
commes les autres. Enfin on fut surpris de le voir arriver au pas tranquille et lent d’une couple de bœufs
efflanqués, traînant une charetle’ disloquée, à moitié remplie de sacs.
G’élail, dit-il, la juste part du maître
qu’il n’avait pas eu le temps d’employer
selon la convention qu’il avait, il est
vrai, acceptée, mais qu’il trouvait absurde. Le maître qui avait plus de
temps et qui en savait plus long que
lui trouverait sans peine un emploi
convenable de sa part de récolte. La
paressa et la grossièreté se lisaient
sur les traits endurcis de cel liomme,
comme elles se sentaient dans son impudent discotirs. — Le maître n’eut
pas l’air d’en être surpris, puisque
c’était précisément la ferme de ce misérable qu’il avait déjà ajoutée à celle
du bon et fidèle administrateur dont
il a été parlé,
« Tn as été infidèle et lâche, lui
dit-il seulement, tu n’aui'as plus l’adminislration de mon bien et ne sera»
plus à mon service ». C’était le condamner au plus complet dénuement
et à la plus affVeiise misère; mais il
eut la bouche fermée car il sentait
bien que la sentence était juste.
S’il a pleuré et gémi ensuite sans
Iroiiver de soulagement, jamais il n’a
o.sé accuser le Maître d’avoir été dur
envers lui.
Mais voici venir un dernier serviteur
ou fermier, quoique, à le voir, on
l’eût plutôt pris pour un grand propriélaire. Il arrive dans une fort jolie
petite voiture, et un domestique prend
soin du cheval pendant qu’il entre
lui-même dans te cabinet du maîlro
pour régler son compte de l’année.
C’est d’un élégant portefeuille qu’il*»
sort la note dont il donne communication avec une aisance peu commune
chez les hommes de sa classe, car il
n’est rien de plu? qu’un fermier, comme
tous les antres, et .sa ferme n’est
meme pas l’une des plus considérables.
Vous trouverez peut-être, monsieur,
que j’ai peu dépensé cette année pour
les objets que vous m’aviez indiqué ;
mais c’est que l’année a été difficile.
croyais, au contraire, que les
recolles avaient été abondantes pour
loi comme pour tes autres ». • Je
ne dis pas non, mais comme ma femme
et ma fille ne pouvaient que rarement
aider aux travaux des champs, il m’a
fallu prendre, une domestique, et cela
coûte cher. Puis il y a eu des dépenses
considérables pour réparer et meubler
une chambre dans notre logement.
Voici CO que c’est, car je sais que je
ne puis rien vous cacher. En allant
au marché, ma femme a fait la connaissance de deux aimables dames qui
lui ont depuis témoigné beaucoup
d’amitié. C’est la femme du Syndic
et celle du secrétaire communal. Elles
sont venues plusieurs fois nous voir ,
ce qui nous a fait beaucoup d’honneur. Mais comme nous avions un peu
honte de les recevoir dans notre cuisine , ma femme a pensé qu’il n’y aurait pas de mal à dépenser quelque
chose pour réparer et meubler la chambre attenante. La première fois que
ces dames sont revenues nous voir,
leurs maris les accompagnaient, et tous
6
ont admiré notre chambre neuve à la
quelle il ne manquait plus qu’une
glace et une pendule qu’il m’a fallu
acheter , car on ne doit pas l'aii’e les
filioses il demi, lit puis un joui- que
j’exprimais quelques scrupules de conscience au sujet de ces dépenses, le
notaire m'a rappelé un proverbe latin
qu’il m’a expliqué et qui porte que
<i cbarité bien ordonnée commence par
soi même ». O’un autre côté notre secrétaire communal, qui m’honorejmaintenant de son amitié , m’a dit qu’aux
prochaines élections, je serai infailliblement nommé conseiller ( pins tard
même syndic,'lu’a-l-il glissé il l’oreille)
et que je pourrais alors faire beaucoup
** de bien autour de moi. Natiirellemenl
quand on est en relalions intimes
avec des messieurs et des dames on
ne peut plus s’habiller tout à fait
comme des paysans et la toilette de
ma femme et de ma iilile m’a coûté
beaucoup d’argent, mais tout cela se
retrouvera plus tard.
Dis-moi, mon ami, iriteriompil le
maître, je vois siir la noie qu’au Jlieii
d’écrire des chiffres, tu n’as inscrit
que des noms. Combien as-lii doniic
à eç pauvre dont la maison a brûlé
avec le peu qu’elle contenait ?
« Voilà, dit le fermier avec un
embarras visible, je n’étais pas trop
à mqn aise en ce moment et n’ai souscrit que pour deux francs; je sai.s
d’ailleurs que dans ces cas là, ,on fait
toujours le mal plus grand qq’il ne
l’esï. » < El à celle vieille femme que
lu nommes ensuite?«. « A celle là
comme elle était presque nus-pieds,
j’ai donné une paire de vieux souliers
déjà bien usés. ». « Et à cel inconnu
déserteur, ou malfaiteur peut-être ,
comme lu "Tobserves ? » « A celui là,
comme il est toujours à craindre que
ces sortes de gens ne fassent quelque
mauvais coup avant de s’éloigner, j'ai
donné un chapeau encore en bon état
et une pièce de cinq francs ».
« Voilà qui sulfil pour la première
partie de la note ; dis-moi maintenant,
au moins très approximalivemenl ,
( mais je connais le chiffre exact ) combien In as dépensé pour satisfaire la
paresse et la vanité do la femme et
la tienne ? ».
Ici l’emhîirra.s du fermier commençait à devenir de l’atigoissc. En vain
cherclia-l-il à insinuer que mainlenani
tout csi horriblement cher, qn’on est
trompé et volé par tout le monde ,
lorsqu'on n’est pas bien au courant
des prix; l’œil du maître fixé sur lui
semljlail lire jusqu’au fond de son
àme. Je pense, dil-i! enfin, que je.
n'ai pas dépensé beaucoup plus de
milie francs, et comme ces depensfis
là ne se renouvellent pas chaque année, je promets.... « Ne promel.s rien,
lui dit le maître, tout en colère, lu
n’auras pins radminisU’atinn de mon
bien.
Infidèle et égoïste in n’as pensé qu’à
loi et aux liens et les seuls intérêts
que lu n’aies pas négligés sont ceux de
la sotte vanité et de Ion ambition,
Tu connaissais mes conditions et c'est
volontairement que tu les a foulées
aux pieds, donnant sujet à plusieurs
de mal pai'ler, même de moi au service duquel ils le savaienlv
l>e principe païen.
11.
Le principe païen, quiesired'ortponr
se passer de Dieu, confondant tes deux
mouvements successifs qni se manifestent dans l’âme humaine, celui qui pro
duil la religion collective et celui qui
produitja religion personnelle, conservant le premier qui correspond à Pidée
de cbrélienlé et supprimant le second
qui correspond à l’idée d’église, assimile la foi de tout le monde, la loi
de la famille et du pays à la foi qui
est conversion. Sons son inllnence la
nation devient l’église, c’est dire assez, que l’église disparaît, et qu’à
cel égard du moins, le.s tendances <lu
monde antique prévalent contre la
grande innovation ecclésiastique de
l’Evangile.
Du moment oiï la nouvelle nai.s.sance
s’elTaçait devant l’eliicacilé du Sacrement, il était impossible que les choses
ne se passassent pas ainsi. Gomme les
7
-423^
auli’tís erreurs', en efl'el, le principe
païen repose sur une portion de vérité
qui fait sa force. La religion collective
a sa i)!acc légilime ici-bas. Il faut bien
se garder de la méconnailre. Nous
commençons tous et nous devoms commencer par être chrétiens, dans une
certaine mesure et dans un certain
sens, à litre héréditaire. Nous commençons tous par croire sur parole,
par croire ce que notre père et notre
mère nous ont enseigné. El non seulement ce christianisme de la famille
est nécessaire, mais le clirislianisme
national ne l’est pas moins,
11 y a, il doit y avoir des peuples
chrétiens, en tant qu’ils se rattachent
il la tradition évangélique, qu’iLs ne
sont ni bouddistes, ni musulman.s.
.lusque-là rien de plus simple; la
Parole de Dieu en se répandant devait
produire ces faits héréditaires et nationaux. Par malheur, le principe
païen, aune bien autre portée. Il prend
le fait béréditaii’e cl national pour le
fait ecclésiastique. Il l'elranche ce qu’il
y a de profondément sérieux dans la
grande question: Crois-tu au Seigneur
Jésus ? Il,, enrôle de telle sorte les
membres de ses prétendues églises,
que l’exception se transforme en règle
et que nul homme ne peut manquer
de déclarer, au moment voulu, qu’il
a senti sa misère et trouvé son Sauveur , qu’il est passé de la mon à la
vie qu’il s’engage dans la société des
Saints !
Une fois entré dans celle voie, on
ne s’arrête plus. En dépit des tristes
remèdes disciplinaires, en dépit des
eathéchuménats, des noviciats, des
examens, des épreuves, des admissions,
des excommunications , l’assimilation
fondatnenlale s’établit toujours mieux.
Décidément, on devient chrétien
comme on devient citoyen, à un âge
donné, selon des formes prévues, avec
line parfaite régularité administrative.
C® Ag. de Gasparin. — Innocent III.
Citnfliuice en Dieu
Vers la lin d'une' chaude journée
d’été, un agriculteur fatigué vient de
se repo.scr un moment ¡ircs de sa compagne qui tricote à l’ombre d’uïi grand
chalaigncr. Ils sont pauvres, mais leur
mariage a cté béni du Seigneur cl ils
sont heureux ensemble. Ils doivent
beaucoup travailler pour avoir du pain.
— Comment ferons-nous, dii la
femme, lorsque los rigueurs de l’hiver
seront venues ? Nous avons tant de
pleine à nouer les deux bonis pondant
la belle saison où Ion travail est bien
Le visage du mari obscurci pendant
quelques inslanis parccquc le.çsîlîf
était devenu soucieux, s’illumimU'lout
â coup.
— Que fais-urlà, ma chère? dit
le mari après un moment.
— Je prépare un bon gilet de maille
t)ien chaud pour notre garçon.
— Le sait-il que lu Iravüilles pour
lui?
—^Non. ^
#s^'NeiSerait-t:e»pas ’bien de %
dire afin qu’il ne *fùl pas soucieux en
pensant aux rigueurs de l’hiver prochain ?
— Lui soucieux?... Le voilà s’amusant dans le verger et aussi heureux
que le jour est long. El si jamais il
pensait à l’hiver il sait très bien qu’il
a une mère pour lui procurer des vêlements chauds et un bon père qui
iravaitte pour lui fournir du pain.
— Dans ce cas, ma chère, il me
semble que l’enfant est bien plus sage
que la mère. Il a pleine confiance en
nous et cela* le rend heureux. N’oiiblionè pas, nous aussi, que nous avons
au ciel un bon Père qui pense à nous,
et la confiance que nous plaçons en
lui nous rendra heureux.
Le soir au culte de famille ils trouvèrent beaucoup d’édification en lisant-í
les belles promesses contenues dans
Mathieu vi, 25 à 34. Lis les souvent,
cher lecteur, elles'le feront du bien.
8
•I ,'■
., IS,-;
iSK'Xr-;
Hu terrible siHige|
Le Rev. G. Tonnent de New Jersey,
dans irAméri(|iie du Nord, rapporte
qu’un jeune homme de sa paroisse
avait pris peu à peu la funeste habitude de s’enivrer. Il rêva une nuit
qu’étant retourné ivre à la maison,
il roula du haut en bas de l’escalier,
se brisa la nuque et alla ouvrir les
yeux en enfer. Epouvanté par ce qu’il
vil et entendit dans l’abîme, il pria
le démon de l’en laisser sortir. Non,
non, répondit Satan, on ne sort pas
d’ici. Nous en voyons entrer des milliei%
mais il n’en sort pas un seul. Le pauvre
jeune homme insista tellement que
^d'Sprès son rêve) jl lui fut permis de
soi'fii', à la condition expresse qu’il
rentrerait en enfer douze mois après.
Tout en faisant des elforls pour s’enfuir, il se réveilla.
Le malin après il alla tout effrayé
raconter le rêve à son pasteur. Celui-ci
lui fit remarquer que c’était une grâce
que d’être hors de l’enfer, et que s’il
ne cessait de s’adonner à l'ivrogprie,
iljnuraifr fin^».par re'®ueillir le frem de
ses èèuvres, et cela pour l’éternité.“
Lejeune homme dit adieu au cabaret
et aux mauvais compagnons qui l’y
avaient conduit, il commença à travailler et devint peu à peu un homme
comme il faut.
Quelques mois après il rencontra de
nouveau de mauvais compagnons qui
se moquèrent de "ses pieuses habitudes
et l’invitèrent à rentrer à ,l’auberge
pour y boire avec les amis. D’abord
il refusa, puis il oublia le solemnel
averlissertient qui lui avait été donné
dans un songe et redevint ivrogne
comme auparavant. , *
Un soii* qu’il rentrait chez lui très
lard, et dans un état de complète
ivresse, il se précipita du haut de l’esça*lier et se brisa le cou. Lorsqu’on vint
son secours, son corps n’était plus
-qu’un cadavre.
El son âme?!,... ' ’ „
Les ivrognes n'hériteront point le
royaume de Dieu. (Cor. vi 10).
Des régislres du pasteur M. Tennenl,
il résulte qu’entré la nuit où le jeune
homme avait eu son terrible songe et
celle où il était inOrl ivre, il s’élail
passé tout juste douze mois........
Quel avertissement solennel!
Un verre de Irop.
C’est peu un verre, nous dira-t-on,
mais quand il est de trop, il peut
avoir des très funestes conséquences.
Le Christian Hérald ndus donne un
exemple frappant h l’appuis de cette
vérité.
Le Duc d’Orléans était le fils ainé
du roi Louis Philippe et l’hériliet^' de
tous les droits que son père pouvait
lui transmellre. Ses qualités était uni*
versellemenl appréciés et il était devenu très populaire. 11 invita un jour
quelques amis à déjeuner avec lui,
lorsqu’il allait quitter Paris pour rejoindre son régiment. 11 lui arriva de
boire un peu trop sans arriver pourlanl
jusqu’à l’ivresse. 11 but un verre dé
trop et perdit l’équilibre lorsqu’il allait
monter en voiture. Sa lêleXrappa contre
le pavé,*el firivé rite-#6*18
porté dans une boutique voisine où
il expira.
Un verre de trop renversa du trône''
la dinaslie des Orléans, amena la confiscation de leurs propriétés cl lança
toute la famille dans l’exil.
Que de mal peut faire un verre de
trop! f
Aiinomtoe.
Chez J. Benech, libraire à La Tour
Pélis ; ■
Paroles et textes tirés ^e PBcrlture Sainte pour chaqueJomv
de Tannée 1880, 1 vol. çan. 1 IV. '
La Sainte Bible« version Segond.'
— Edition de poche/prix fr, 2,0Oj; par
la poste recommandé franco, 3 iV.
Abonnements aux Lectures Illustrées de Lausanne, au prix de 1 75
franco par la poste.
ERNESTftOBKaT, Gérant et Administrateur,
fignerot, Impr. Chiantore et Ma.scarelli.