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*„ année
Octobre 1867.
N.“ lO
L'ÊCHO DES VALLEES
—(NOUVELLE SÉRIE)—
Que toutes les choses qui soui vf^ritables......... occupent
vos pensées — ( Philippiens., IV. 8. )
S0XIM.\1RE — Du culte domestique. — Un exemple et un conseil, ou L'Union
chrétienne de La Tour. — 'Vallées Vaudoises.
DU CULTE DOMESTIQUE
(1)
Mo71 cher Rédacteur,
I
Il a paru dans les numéros de mars et de mai de VEcho des
Vallées deux articles sur le culte public qui ont attiré l’attention.
Le premier, à la vérité, semble friser quelque peu le piymouthisme, et l’on ne s’attendait guère à quelque chose de pareil
de la part de celui qu’on dit en être l’auteur. Le second en
revanche semble être en quelque mesure la réfutation du
premier. Cependant, après les avoir lus attentivement, on voit
que l'auteur s’étant placé à deux points de vue différents, ces
articles, loim de se contredire, se complètent réciproquement.
Ils nous présentent, en effet, d’abord l’idéal du culte chrétien,
et nous disent ensuite ce que le culte pourrait être dans notre
église, prise telle qu’elle est et en vue du progrès qu’elle doit
faire.
(1) Cet article nous est communiqrié avec prière de l'insérer: c’est ce que nous
nous empressons de faire avec le plus grand plaisir, dans l’espérance que l'auteur
ne se fera pas faute de nous adresser'd'a^^s écrits du même genre.
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- 148 —
Mais ces articles demandent une continuation. L’auteur a
promis en effet de traiter le sujet de la prédication dans un
nouvel article ; mais voilà des mois qu’on l’attend en vain.
Qu’il me permette de lui rappeler sa promesse et de lui dire
que ce n’est pas bien d’exercer si longtemps la patience des
lecteurs.
En attendant je me permets de vous adresser des idées sur
un sujet qui touche de très-près à la prédication , dans ce
sens, qu’il met [le prédicateur en état de mieux prêcher, et
qu’il dispose les auditeurs à mieux profiter de la prédication :
je veux dire le culte de famille. — Si vous les jugez dignes
d’occuper une place dans votre journal, je vous saurai gré
de les y insérer ; et dans ce dernier cas, je me permettrais
même d’avertir l’honorable auteur des articles sus mentionnés
que s’il ne se hâte d’accomplir sa promesse, il ne serait pas
impossible que , suivant mes faibles moyens, je n’essayasse de
présenter moi-même quelques considérations sur le sujet en
question. Cela dit, j’entre en matière.
Le culte de famille, on ne saurait en douter, est un puissant
levier de la vie religieuse, une chaîne d’or pour élever les
âmes de la terre au ciel. C’est la manifestation et l’entretien à
la fois , de cette piété qui a les promesses de la vie présente
et de la vie à venir. Il est la goutte d’huile qui s’insinue entre
les rouages compliqués et les engrenages de la machine et
fait que tout marche sans choc et sans bruit. Il dispose les
divers membres de la famille à la bienveillance réciproque,
détruit les frottements pénibles et donne à chacun le sentiment
de sa propre responsabilité et du sérieux de sa tâche journalière.
Il est le plus puissant lien de la vie de famille ; il laisse
dans les inembres qui la composent, ét qui plus tard seront
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- U9
dispersés dans le monde, les souvenirs les plus précieux cl
les plus ineifaçables. il est surtout cette huile qui alimente la
lampe de la vie spirituelle et la fait briller d’une lumière
toujours plus vive et bienfaisante. Le culte de famille prépare les âmes pour le culte public ; il fait désirer le jour béni
où , débarrassées des soucis de la terre, elles pourront s’abreuver à longs traits aux eaux de la grâce par le moyen de
la prédication de la Parole de Dieu, du chant do ses louanges
et de la prière commune.
Là où le culte de famille n’existe pas, les effets que je viens
de décrire ne s’y trouvent pas non plus ; il y en aura l’apparence, une belle contrefaçon peut-être, mais non la réalité.
Ce qui dominera, c’est, enfin de compte, l’égoïsme qui saura
toujours trouver quelque occasion de se manifester au dé-'
triment de l’affection mutuelle ; c’est l’attachement exclusif
aux choses de la terre qui sont toutes périssables ; c’est l’indifférence religieuse qui conduit au doute, puis à l’incrédulité
et à l’endurcissement. Là où n’existe pas le culte de famille,
le besoin du culte public ne se fait pas sentir non plus ; on
abandonne facilement les saintes Assemblées, ou si l’on s’y
rend chaque quinze jours, c’est bien plus par habitude ou
bienséance que par un désir d’édification. De là le peu d’attention ou plutôt la distraction chez la plupart; de là le
sommeil chez plusieurs, de là l’inefficacité de la meilleure
prédication elle-même.
Le culte de famille est-il généralement pratiqué parmi nous?
Qui peut le savoir? Les pasteurs, repondra-t-on sans doute. Il
semble en effet qu’ils devraient le savoir mieux que tout
autre. Cependant il resuite de leurs rapports à la Table que
quelques uns n’en savent rien de positif ; d’autres savent bien
qu’il est pratiqué dans quelques familles, mais n’en peuvent
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— 150 —
dire le nombre. Ce n’est pas, toutefois, qu’ils ne reconnaissent
la haute importance d’une telle pratique , car il en a été
souvent question au Synode , et même , si je ne me trompe,
c’est l’un des objets sur lesquels ils doivent informer l’administration dans leurs rapports annuels. La difficulté paraît
consister pour plusieurs dans la manière de procéder pour
s’assurer si le culte domestique est pratiqué. Je me souviens
d’avoir entendu dire à un pasteur, à ce propos, que la Table
exige une chose impossible; « car, voulez-vous, disait-il, que
j’aille demander à chaque chef de famille de mon troupeau,
s’il y a un culte journalier dans sa maison ? Ce serait par trop
inquisitorial. »
Il n’y a pas de doute que la question , posée de cette manière, est difficile à résoudre, et aussi est-elle d’une très-mince
utilité. L’essentiel n’est pas de savoir combien de familles
pratiquent le culte domestique ; mais c’est que ce culte soit
réellement pratiqué et soit établi où il n’existe pas encore ; et
c’est bien là , je m’assure, le sens , le but de la question qui
est adressée aux pasteurs à ce sujet.
11 s’agit donc, non pas de chercher le moyen de connaître
si le culte de famille est pratiqué, mais bien d’employer le
meilleur moyen pour établir ce culte , et par là la première
question elle-même sera résolue de la manière la plus convenable.
Jusqu’ici le moyen employé pour obtenir ce but important
a été l’exhortation, moyen excellent sans doute, et qui n’a
pas fait défaut. Les pasteurs, ceux du moins que j’ai pu entendre, ont recommandé le culte de famille dans leurs sermons, dans leurs exhortations familières, dans leurs instructions
aux catéchumènes. Mais ce moyen ou n’a pas abouti, ou n’a
produit que de très-minces résultats. Il paraît donc que,
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— 151 —
quelqu’ excellent qu’il soit, il n’est pas le meilleur. Pour que
le culte domestique s’établisse dans une famille, il faut rompre
avec de vieilles habitudes, et en prendre de nouvelles. Or un
discours peut bien faire naître à cet égard des résolutions chez
plusieurs. Ils approuvent ce qui leur est dit; ils veulent le
mettre en pratique ; ils veulent... pendant tout le temps qu’ils
sont dans le temple à entendre votre exhortation, mais de
retour chez eux , c’est l’habitude ancienne qui prévaut ; il n’y
a pas la force nécessaire pour la briser ; les résolutions s’évanouissent et les choses restent comme elles étaient, quoique
l’on conserve la bonne intention de réaliser plus tard ce que
l’on renvoie pour le moment.
Il aurait suiB, dans ce cas, d’un bon coup de main pour
rompre la glace et faire commencer une vie nouvelle dans
plus d’une famille. Le coup de main n’étant pas donné, ces
familles, passent au contraire sous le .souffle de la mort. Or ce
coup de main, voici en quoi il consisterait selon moi. Il faudrait
que chaque pasteur, cessant toute exhortation relative au
culte domestique , se transportât au lundi soir dans la famille
la plus voisine du presbytère, y fît une bonne visite qui se
terminât par le culte. Il demanderait alors la permission de
revenir le soir suivant, ce qu’il ne manquerait pas de faire.
En cas d’empêchement, il enverrait à sa place l’un de ses
anciens les plus capables, qui se seraient associés pour cette
œuvre , puis il y retournerait lui-même. Au bout d’une semaine, en voie ordinaire (les exceptions ne faisant jamais
règle ), le culte domestique serait devenu un besoin. Le pasteur
exhorterait alors le chef de la famille à le continuer en promettant de renouveler de temps en temps sa visite. Ce serait
une forteresse conquise et l’on pourrait alors diriger ses attaques
sur une autre plac(î. Une autre famille du voisinage serait
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— 152
l’objet de la même sollicitude la semaine suivante ; et les
anciens, s’exerçant à cette œuvre importante, fourniraient au
pasteur une assistance toujours croissante. De semaine en semaine le cercle s’agrandirait à mesure qu’on allongerait le
rayon. On reviendrait cependant souvent en arrière pour
fortifier l’habitude nouvellement prise.
De cette manière, je crois pouvoir dire, sans exagération,
qu’en un an le culte domestique pourrait être établi dans quinze
ou vingt familles de chaque paroisse. En peu d’années il y
aurait un grand feu allumé qui alors s’étendrait de proche en
proche sans beaucoup de peine et presque de lui-même. Le
pasteur ne serait plus embarrassé de dire dans combien de
familles le culte domestique est pratiqué: et dans ce commerce
intellectuel et religieux avec les membres de son troupeau,
il ferait provision d’un matériel très-important pour sa prédication. Alors il serait en état de tirer du bon trésor de son
cœur des choses vieilles et des choses nouvelles, qu’il saurait
adapter aux besoins de ses auditeurs. Les choses anciennes,
c’est la doctrine toujours invariablement la même ; les choses
nouvelles, c’est l’expérience de cette doctrine toujours variée
suivant les individualités; c’est la connaissance du cœur de
l’homme, de ses ruses, de ses difficultés, des obstacles qu’il
oppose à une entière soumission choses toujours nouvelles
et qui trouvent un écho profond dans l’âme de l’auditeur qui
se sent ainsi pris à partie , en quelque sorte saisi au collet
sommé de se rendre captif à l’obéissance qui lui est demandée. Dans les lieux où le presbytère est un petit centre de
population, le pasteur compléterait avec fruit le moyen indiqué
en invitant les gens du voisinage à assister au culte du matin
qui aurait lieu chez lui toujours à heure fixe.
Un tel moyen pratiqué avec foi, avec un vif dé.sir du salut
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— 153 —
des âmes, dans chacune des paroisses, produirait certainement
de précieux fruits dans notre Eglise ; le réveil béni de la piété
en serait la conséquence , et les pasteurs seraient les premiers
à en éprouver la bénédiction dans leur propre vie spirituelle,
et dans les bienheureux résultats qu’obtiendrait leur ministère
et en particulier leur prédication.
G. A. E.
UN EXEMPLE ET UN CONSEIL
ou r Union chrétienne de La Tour»
Ainsi qu’on le verra plus loin, la soirée du 7 octobre est venue
nous rappeler que nous avons depuis quatorze ans à La Tour une
Société dite L’Union chrétienne. Quand elle n’aurail pour se recommander que le nom qu’elle porte, celte association ne laisserait pas
que de mériter déjà quelque respect ; des chrétiens se disant tels
parcequ’ils veulent l’être, des chrétiens qui ont réussi à former une
Société en vue d’un but déterminé à poursuivre sérieusement en commun,
c’est presque de l’extraordinaire parmi nous. Non pas qu’il soit impossible de rencontrer des personnes qui fassent profession de christianisme un peu autrement que tout le monde ; mais des amis qui
sentent le besoin d'unir leurs efforts pour une action d’ensemble, des
chrétiens qui se .cherchent, qui sé trouvent, qui finissent par s’entendre, avouons que la chose est plutôt rare dans nos Vallées, et que
l’Union chrétienne a donné là un exemple qu’on pourrait suivre même
dans l’Eglise.
On pourrait en dire autant de sa persévérance. Bien qu’il demeure
toujours vrai que c’est le premier pas qui coûte le plus, on ne saurait
nier qu’il y ait quelque difficulté aussi à maintenir ce qui a été une
fois commencé. — S’il avait suffi d’arriver à se constituer en société
pour que le reste allât de soi , l’Union chrétienne de La Tour n’eût
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probablement pas été la seule à célébrer cette année son 14« anniversaire , et sans quelque gêne dans sa marche , elle ne serait pas
réduite elle-même à compter moins de membres aujourd’hui qu’elle
n’en comptait à son origine. Pour prolonger son existence jusqu’ici,
elle a donc nécessairement eu à lutter contre plus d’un obstacle du
dehors ou du dedans ; elle a du protéger le lumignon de sa vie
contre plus d’un coup de vent, alors même que sa lampe était
pourvue d’huile; et quand l’huile manquait? Avec tout cela l’Union
respire encore, et nous avons une sympathie sincère pour les bonnes
choses qui refusent de mourir. Que l’Union chrétienne de La Tour
profite donc, si elle le peut, des conseils qui lui ont été donnés,
qu’elle se retrempe, qu’elle se régénère tant qu’elle voudra; mais
qu’elle ne se résigne point â s’en aller vers ses père^.
Nous venons de dire incidentellement que le nombre des membres
de l’Union, loin d’avoir augmenté , semble au contraire, aller en diminuant. Il serait peu sage assurément de ne voir dans cette diminution qu’une marque de santé bien entendue. Nous avoûrons même
sans difficulté que nous partageons un peu la crainte de ceux qui
pensent qu’il y a par là, — sans dire l’endroit bien précisément,
— une cause très-réelle de faiblesse ; pour que l’Union, avec tant de
moyens d’influence , continue d’avoir si peu de prise sur les jeunes
gens en particulier, il faut bien croire qu’elle a manqué de quelque
attrait nécessaire. Mais celte réserve faite, nous nous sentons en
pleine liberté d’accorder encore un éloge mérité à l’Union pour
n’avoir pas couru après cette vieille idole qu’on appelle le grand
nombre. Laissons à la paroisse, telle que l’entendent quelques uns,
le malheur de vouloir tout ramasser et tout retenir ; une société qui
veut être, une société qui veut /aire qu'elqusj chose de sérjeux., doit
savoir, dans le choix de ses menibres, préférer,la qualité â la quantité.
— Or voilà précisément ce que pense .â Qet endroit l’Union chrétienne
de La Tour ;
• En octobre 1866, nous dit son rapporteur, notre Société comptait
quarante cinq membres ^effectifs ; elle n’en compte à l’heure qu’il est
que trente cinq, et nous n’avons pu enrégistrer pendant ces douie"
mois que deux admissions nouvelles. — On nous dira qu’en bonne
règle, là oü le combustible diminue. la flamme doit s’affaiblir aussi...
Eh bien, non 1 il n’en a point été de même chez nous; si la Société
s’est privée de quelques unes de ces bûches qui pour avoir trop
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longtemps séjourné dans l’eau sont humides ou pourries , et partant
incapables de produire ni lumière ni chaleur, elle n’a eu qu’à s’en
féliciter •.
Nous aurions plus d’une chose à relever encore dans l’Union chrétienne de La Tour; la régularité avec laquelle se fait la lecture et
l’étude de la Bible dans chacune de ses séances , les divers exercices intellectuels auxquels se livrent ses membres , le dévouement
dont elle fait preuve en continuant d’accompagner au champ du repos
les pauvres décédés à l’hôpital, l’inlérêt qu’elle porte à l’œuvre des
Missions ; mais comme . au dire des Allemands , toutes les bonnes
choses sont au nombre de trois , nous préférons nous en tenir à ce
que nous avons dit, en la louant pour le bon exemple qu’elle nous
donne d’une Société qui veut vivre, et d’une Société qui se respecte.
Ce n’est pourtant pas que le Rapport du 7 octobre . qui nous a
suggéré ces remarques', nous présente FUnion chrétienne comme une
société qui ait lieu d’être complètement satisfaite d’elle-même ; au
contraire ; après nous avoir parlé de ce qu’elle fait, il se hâte de
lui rappeler ce qu’elle devrait faire pour accomplir la mission qu’elle
s’est donnée. — Et ici nous ferons observer que le conseil qu’il
adresse à l'Union pourrait fort bien s’adresser à tous les Vaudois. —
Laissons la parole au Rapporteur ;
• Ou’avons-nous donc fait pendant celte longue ; année ? se demande-t-il ; notre but clairement énoncé dans le 1'' art. de notre
Règlement, à savoir le développement intellectuel moral et religieux de
chaque Sociétaire et du peuple Vaudois tout entier a-t-il été constamment
l’objet de nos préoccupations ? .A-t-il été atteint autant du moins
qu’on aurait pu raisonablement s’y attendre — Tant s'en faut. —
Ce n’est pas une mince tâche que d’avancer le développement intellectuel , moral et religieux d’une population dont le caractère est si
éminemment stationnaire et routinier.
• Le général Beckwilh , dont la mémoire sera toujours vénérée
parmi nous, disait un jour: les Vaudois ont développé dans le passé
les vertus passives : Dieu demande maintenant d’eux les vertus
actives». Eh bien oui! c’est en développant les vertus actives que
nous parviendrons au terme que depuis 14 ans nous poursuivons
sans avoir pu l’atteindre. Ne nous faisons pas d’illusions : si nous
avons de grands privilèges, grande est aussi notre responsabilité.
Pendant de longs siècles , sous une verge de fer , nous avons pu
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nous replier sur nous mêmes ; aujourd’hui que le temps de l’eipansion
est revenu, soyons à la hauteur de notre tâche ; déployons les vertus
actives. Il y a quelque peu d’ordre chez nous, de la bonne volonté ;
mais ce sont là des vertus encore trop passives ; nous avons des connaissances et même des forces pour mieux que cela, et d’ailleurs la
hauteur seule à laquelle nous avons placé notre but , nous oblige â
de plus nobles efforts. Et pour que nul ne dise que c’est l’ouvrage
qui nous manque , permettez que nous fixions en attendant votre
attention sur les trois points suivants qui ont déjà préoccupé tant
de personnes parmi nous :
• I. Par quel moyen fera-t-on cesser ce vagabondage des jeunes
gens , qui dès l’âge de seize ans parcourent les écuries d’un bout â
l’autre de la commune , sans autre profit que de s’enrichir de ces
banalités grossières qu’ils prennent pour de l’esprit î — Ne pourraiton pas les engager amicalement à suivre une école du soir où ils
iraient selon leur goût, développer avantageusement leur intelligence,
ou se livrer à quelques travaux manuels ?
« II. Il y a quelque temps qu’un journal américain contenait ces
mots : « les Vaudois sont les mendiants de la Chrétienté » ; paroles
dures, mortifiantes , mais qui à côté de beaucoup d’exagération contiennent pourtant quelque chose de vrai; et nous nous demandons
avec impatience : quand les Vaudois parviendront-ils à sufBre d’euxmêmes â tous leurs besoins, en entretenant, sans secours étrangers,
leurs hôpitaux , leur culte , leurs écoles ?
« III. Enfin quand pourra-t-on dire des Vaudois qu’ils observent
spirituellement, mais fidèlement, le jour du Seigneur? »
Ces questions, le rapporteur voudrait les recommander â l’Union
chrétienne', et â toute l’Assemblée qui l’écoute. Aux uns il dit : soyez
fidèles à votre devise, constants dans vos efi'orts à poursuivre le huU
en prenant pour règle la Bible, et pour appui Celui qui accomplit sa
force dans la faiblesse ; aux autres qui reconnaissent à la base de
l’Union une idée généreuse et féconde, il dit; aidez-nous de vos
conseils, de votre sympathie, de vos répréheosions, s’il le faut.
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VALLÉES VAUDOISES.
A propos d’un mnrloKe. Le uom des conjoiels ne fait rien à
l’affaire. Une fois le mariage civil célébré, les nouveaux époux, — ils
appartiennent à l'Eglise vaudoise de Torre-Pellice, — se rendirent au
temple pour y demander la bénédiction. Mais n’ayant pas eu l’indispensable précaution de prévenir le pasteur, et celui-ci se trouvant
absent, ils eurent bien de la peine ¿trouver un ministre qui accédât
à leur désir. — Nous nous permettrons de demander à ce propos :
La célébration des mariages étant reconnue comme un acte civil , et
n’ayant du reste jamais été considérée chez nous comme un sacrement, qu’est-ce qui empêche l’ancien, en sa double qualité de chrétien
et de fonctionnaire de l’Eglise, de remplacer le pasteur absent, lorsqu’il s’agit d’appeler sur l’union de deux époux, la bénédiction
d’en-haut ? Nous soumettons le cas à la méditation de nos lecteurs ,
et plus spécialement à celle de nos anciens eux-mêmes.
VIsIleB pastoraleRt Dans le courant du mois d’octobre la Table
a fait simultanément (le dimanche 6) deux visites pastorales dans les
paroisses du Villar et de Boby. Ce sont les premières depuis le Synode. Il est d’usage depuis 1866 que les visites pastorales ordinaires
aient lieu le dimanche, â l’issue du service du malin , car l’on avait
suffisamment constaté que, sur semaine, il était impossible de réunir
les assemblées paroissiales en nombre suffisant. Il ne paraît pas cependant que l’expédient auquel on a eu recours ait fortifié sensiblement
l’esprit public , car au Villar, pour citer un fait. l’assemblée s’est
écoulée au beau moment et n’a été représentée, en dehors du consistoire, que par deux individus. 11 conviendra par conséquent d’examiner
â nouveau les causes soit apparentes , soit secrètes, de cette indifférence générale ; les faits eux-mêmes, qui ont certes leur éloquence,
nous semblent établir, dès l’entrée, que si nous avons une population
désireuse de s’instruire, ainsi que le prouvent les grandes assemblées
du dimanche matin , nous n’avons pas, et nous ne l’aurons pas de
longtemps, une société religieuse homogène, animée de ce sentimeni
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commun de solidarité qui nous pousse « à porter les charges les uns
des autres ». Le prédicateur de l’Evangile est trop souvent, vis-â-vis
de son troupeau, dans la position du prophète de l’ancienne alliance
placé en face d’une foule bariolée et hétérogène ; d’action collective
et d’influence réciproque, il y en a peu ou point. — Cela dil, laissonsnous aller au plaisir de relever le bien que les deux visites pastorales
ont pu constater, soit au Villar soit à Boby.
Dans la première de ces deux paroisses s’est manifesté un progrès
dans le déveulppement de la vie religieuse ; les réunions de prières
sont fréquentées aussi bien que le culte du dimanche matin ; le
nombre des réunions d’édification , pendant l’été , s’est étendu ; la
réunion mensuelle en faveur de l’oeuvre des Missions, a été fort
suivie pendant toute l’année; les genres de dissipation ont diminué;
enfin l’on observe dans nombre de familles et chez une partie de la
jeunesse des symptômes de piété réjouissants, et le pasteur se loue
fort de l’assistance que lui prêtent tous les anciens.
A Boby, nous apprend-on, la paroisse est en voie de progrès pour
l’esprit de bienfaisance chrétienne ; un commencement de vie ecclésiastique s’y manifeste par la formation d’un fonds d’église ; et l’instruction religieuse de l’enfance se poursuit dans six écoles du
dimanche fréquentées par un total de 80 enfants. L’on appréhende
certaines difficultés quant â la repourvue prochaine des écoles de
quartiers, car il y a pénurie de régents. — Ce serait le cas d’examiner
si des régents ne pourraient être remplacés , et même avec avantage,
pas des maîtresses , ainsi que cela ‘se pratique sur une large échelle
dans les écoles élémentaires des Etats-Unis , pour ne pas parler des
quelques essais , fort satisfaisants, qui ont été tentés au milieu de
nous.
Rllcliel Bellion de S‘ Jean, l’un de ces Vaudois établis â Lyon,
dont on a pu lire le nom dans notre N® précédent, vient d’étre
enlevé à sa famille d’une façon bien triste et inattendue. Le 10
septembre , comme il se trouvait au bord du Rhône , un enfant qui
s’amusait avec lui tomba tout à coup dans le fleuve. — Aussitôt
notre brave Bellion se jette à l’eau pour tâcher de le ressaisir. Malheureusement on ne' vit reparaître ni lui ni l’enfant qu’il voulait
sauver et il ne reste aux siens qu’â le pleurer. Quant â nous, outre
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la part sincère que nous prenons au deuil de la famille , nous regrettons vivement de ne pouvoir plus désormais inscrire le nom de
Michel Bellion sur la liste des donateurs pour l’évangélisation de l’Italie.
VIsUeM. Nous avons eu dans le courant de septembre une ou deu.t
visites qu’il faut au moins avoir signalées. — La première a été de
M'' G. Appia. De retour d’Amsterdam. il eut l’heureuse idée de nous
faire part de ce qu’il venait de voir et d’entendre â la grande assemblée de l’Alliance évangélique. — Ce qu’il nous a communiqué
tant de ses impressions que de ses notes a été écouté avec beaucoup
d’intérêt, à La Tour particulièrement. C’était bien le moins que des
cinq ou six Vaudois qui ont eu, pendant l’été, le privilège de franchir
les Alpes , il s'en soit trouvé un qui ait eu pitié de la nombreuse
classe de gens condamnés en quelque sorte à ne rien voir au delà
des étroites limites qui les enferment pour la vie. — L’empressement
qu’on a mis à venir entendre Appia prouve l’accueil que nous
eussions fait à d’autres, s’ils nous avaient estimés dignes de savoir
quelque chose de leurs impressions de voyage.
Quelques dimanches après, c’était M'' Convert de Neuchâtel qui nous
donnait à La Tour une séance sur la Mission au Malabar. Dix ans
missionnaire dans cette partie de l’Inde, M’’ C. a pu apprendre à connaître et le pays et les habitants et tout ce qui se fait pour l’avancement du règne de Dieu dans ces vastes et chaudes contrées. — Il
nous disait entre autres choses, que les deux cents millions d’habitants
qui peuplent l’Inde entière, sont parvenus, en réunissant toute leur
sagesse, à ce triste résultat qu’ils comptent environ trois cents millions
de dieux, grands ou petits, bons ou méchants, — Certes ce n’est point
trop pour remplacer celui qui a créé les cienx et la terre ; mais cela
nous fait voir aussi ce que deviennent les peuples les plus intelligents
dès qu’ils sont livrés à leurs seules ressources
Ouverture des Cours. Les premiers jours d’octobre ont été consacrés aux examens d’introduction â nos divers établissements d’instruction moyenne et secondaire. L’Ecole supérieure des jeunes filles s’est
ouverte avec plus de 75 élèves , le plus haut chiffre où elle soit
encore arrivée, si nous ne faisons erreur. — Sur ce nombre un tiers
environ a été fourni par la nouvelle admission. On a d’autant plus
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lieu de se réjouir d’une telle recrue, que seul aux Vallées, cet établissement se trouve dans la condition normale d’une institution qui
vil presqü’entiërement de ses propres ressources, les élèves qui en
profitent étant tenues à une contribution annuelle d’une soixantaine
de francs.
L’introduction à l’Ecole Normale des élèves instituteurs n’a pas été
moins satisfaisante , et a porté â 44 élèves environ le personnel des
trois classes pour l’année scolaire qui vient de s’ouvrir.
Nous voudrions bien sincèrement avoir quelque chose de semblable
à enregistrer pour le Collège. Mais le malheur veut que notre introduction se réduise cette fois à cinq ou six enfants. D’où cela peut-il
venir? se demande chacun. — La question ne laisse pas que d’offrir
un côté assez sérieux surtout si l’on pense qu’à l’autre bout nous
n’avons eu cette année qu’un seul étudiant à donner à l’Ecole de
Théologie. Les cours ont donc commencé à La Tour et au Pomaret
avec une centaine d’éléves ainsi distribués : à l’Ecole latine du Pomaret une trentaine ; au Collège de La Tour , six à la D® année, —
17 à la 2®, — 20 en 3® et 4® — 15 aux deux années de rhétorique,
— et 10 en philosophie.
En ajoutant les étudiants de l’Ecole de théologie â ceux du Collège,
du Pomaret, de l’Ecole normale et de l’Ecole des jeunes filles, nous
aurions un total de 222 élèves , plus du centième de la population
Vaudoise. — Il est juste de dire que tout ce monde ne vient pas des
Vallées seulement. Au milieu des noms vaudois qui forment la grande
majorité, l’on voit figurer des noms français , des noms suisses , des
noms anglais, des noms allemands, et, pas mal de noms italiens.
— L’enseignement sera donné par dix-huit personnes , dont trois à
Florence et deux au Pomaret.
U» iinnlver8aire4 L’Union Vaudoise de La Tour, dont nous parlons
plus haut, a célébré dans la soirée du 7 octobre son 14® anniversaire.
— Inutile de dire que l’assistance, comme toujours, était nombreuse
et plus patiente qu’à nulle autre réunion. La lecture par l’étudiant
P. Chauvie du rapport dont nous avons transcrit un fragment, un
travail où le président fit voir ce que la jeunesse gagnerait à s’unir
à l’Union Vaudoise, tout cela précédé de la lecture d’un chapitre de
la Bible et entremêlé de chants, fut suivi avec intérêt. Nous serait-il
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permis d’exDrimer notre regret que la seconde partie de la fête ait si
peu ressemblé à la première? — D’une manière générale nous
aimerions à voir la partie religieuse beaucoup plus nettement séparée
des deux autres. Il n’est pas donné à tout le monde au même degré
de passer tranquillement et sans souffrance du grave au gai , du
risible au sérieux ; la transition nous a paru parfois assez brusque
et d’ailleurs nous ne la croyons pas des plus salutaires. — Quant à
la nécessité pour le bureau de ne plus admettre pour ce genre de
soirées aucun travail qui n’ait d’avance été soumis à son approbation,
nous n’avons sans doute plus besoin d’en parler, tant elle est manifeste. — Qu’il le veuille ou non. c’est le bureau qui est responsable
aux yeux du public du mal comme du bien. Or il est certain que
s’il avait pris connaissance de tout en temps utile, l’assemblée n’aurait
pas été dans le cas d’entendre la farce supérieurement détestable qui
ne lui avait que trop déjà été servie une autre fois à pareille occasion.
Et puis, qu’avons-nous affaire de voir constamment arriver l’homme
noir dans ces sortes de fêtes ? — Laissez-nous donc ces gens-là ! —
Ou s’il faut absolument s’occuper d’eux, qu’à nous ne tienne ;
seulement que la guerre soit sérieuse- — Contre une forteresse aussi
formidable que le Cléricalisme, le ridicule est une arme bien misérable ! — Autant vaudrait attaquer à boules de neige notre vieux
Castelus.
Exnniens de Concours. Six Bourses étaient vacantes cette année
au Collège supérieur : deux bourses Campbell de 525 et de 475 francs
et 4 bourses anonymes dites Burgess et Klnnaird de 250 fr. chacune.
Des quinze compétiteurs qui se sont présentés les 9, 10 et 11 octobre,
pour concourir à ces différents subsides , cinq ont obtenu l’objet de
leur désir ; ce sont les étudiants : Albert Malan de La Tour (philosophie)
avec près de 82 centièmes ; Henry Pascal et losué Tron de Massel,
ainsi que Paul long de La Tour, tous les trois de rhétorique, avec
82, 80 et 70 centièmes (1). Quant aux deux bourses Campbell, celle de
475 fr. est échue à Jacques Long de Pramol (rhétorique) qui seul a ob
(1) Ces quatre premières bourses sont toutes de 250 francs chacune ; et le
minimum fixé est de 70 centièmes.
16
— 162 —
lenu le minimum de 80 centièmes fixé par les Tuteurs. — C’est à ces
examens que nous devons le plaisir d’avoir eu pendant trois jours
au milieu de nous notre ami dévoué, le rév'“ Docteur R. Stewart de
Livourne.
Constitution de la paroisse du Périer. La nouvelle paroisse
du Périer est à la veille d’être définitivement constituée Le 27
septembre p. p une convocation provoquée et présidée par la Table
a réuni, au chef-lieu , les délégués de la paroisse de Villesèche {au
nombre de deux ), ceux de la paroisse de Praly ( au nombre de deux
aussi ) et une trentaine d’électeurs de la paroisse de Maneille. Périer,
Traverses , et S' Martin ont déclaré tout de suite qu’ils se considéraient comme appartenant désormais à la nouvelle paroisse. Les
indécis seront mis à même de prendre une décision pendant tout le
temps que resteront ouvertes les listes des électeurs et des membres
de la paroisse. Dès la première moitié de novembre il sera pourvu à
la nomination d’un consistoire. Quant à l’ordre des services religieux,
il a été convenu qu’ils auraient lieu chaque dimanche avant midi, à
Maneille d’abord, au Périer ensuite
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