1
1¥. année
2 Avril 1869
L’ECHO DES VALLEES
FEUILLE HEBDOMADAIRE
Spécialement consacrée aux intérêts matériels et spirituels
de la Famille Vaudoise.
Que toutes les choses qui sont véritables........ eocupent
vos pensées — ( PAiltppiens., IV. 8.)
pBix d’abonnehent :
Italie, ^ domicile (un an. Fr. 3
Suisse.......................
France................» 6
Angleterre , Pays-Bas , Allemagne 8
Vn numéro séparé : 5 cent
Vu numéro arriéré : 10 cent.
BUREAUX D ABONMEMEIIT
Torre-Pellice : Via Maestra,
N.42, (Agenzia bibliografica)
PioRERoL : J. Chlantore Inipr.
Turin :J.J. Tron, via Lagrange
prés le M.
Florence : Libreria Evangelica» via de'Panzani.
ANNONCES : 5 cent, la ligue
ou portion de ligne.
Lettres et envois franco. S‘ adresser pour l’administration
au Bureau à Torre-Pclllce ,
via Maestra N. -tô. —pour la
rédaction : â Mr. A. Recel
Prof. Ò. Torre-Pellice.
SOMMAIRE: — De l’instruction secondaire^ — Histoire Vaudoise: Les colloques.
Chronique locale. — Correspondance.
DE L’INSTRUCTION SECONDAIRE
Parmi les questions à l’ordre du jour du prochain Synode , nous avons dernièrement assigné une des premières
places à la réorganisation des écoles secondaires, et en
particulier du Collège.
Le moment nous semble venu de résumer brièvement les
idées diverses qui ont été, ici même, émises à ce sujet et
d’en tirer une conclusion.
Le débat s’est ouvert en 1867. La hâte insensée d’arriver
à un terme quelconque ,t. c’est-à-dire au premier qui offre
une place, un ga^e-pain, avait poussé à réduire à huit ans
la dur^ des études,' qui était auparavant de diæ. Reviensdra-t-on de ce préji^é réaliste et matérialiste qui nous a
envahis? Cbmpre®drâ-t-on qûe- pour'donner à des enfants
2
— 98 —
de la campagne , dans des conditions peu favorables, une
éducation déjà plus qu’imparfaite, il faut autre chose que
les voies sommaires et les méthodes expéditives ? On s’est
abandonné à l’impatience ; on n’a pas suffisamment résisté ;
on n’a pas lutté pour reprendre ce qu’on a malencontreusement cédé ; et il y a lieu de craindre qu’en réduisant à
huit années le cours des études, on ait fatalement dévié
au point de départ.
C’est sous cette impression que s’est produite, la première,
une proposition de M'' le Prof. J. R. tendant à rendre au
Collège Inférieur les cinq années qu’il'a toujours eues jusqu’à ces derniers temps. Puis, partant du fait qui, pour nous,
ne souffre pas contradiction, qu’il faut aborder l’étude des
langues classiques à un âge où l’intelligence et le corps
seront plus robustes, ftP J. R. estimait que les quatre premières années devaient être une préparation aux classiques
fondée sur l’étude des faits plutôt que des formes. Et encore ici, nous sommes persuadés que la multiplicité des
langues et des grammaires enseignées simultanément à de
tout jeunes gens, est un obstacle des plus sérieux au développement normal de leur intelligence.
Nous avons eu, en second lieu, une proposition de M'le
pasteur J. P. Meille, représentant comme impossible toute
réorganisation, aussi longtemps que le collège manquera
d’une direction et d’une surveillance actives, exercées tout
à la fois par rapport aux élèves et par rapport aux professeürs. On dira qu’à cet effet il y a un Inspecteur, à son
défaut la Table; mais l’expérience a prouvé qu’il faudrait
pour cette charge un homme spécial, pouvant au besoin
remplacer les professeurs dans leurs classes respectives.
— Jusqu’ici, rien de mieux ; nous sentons aussi vivement
3
— fi»—
que M' M. la nécessité d’imprimer à tout l’ensemble des
études cette unité, cette progression régulière et continue
qui est une des conditions indispensables de leur réussite.
Il ne serait pas difficile, je pense, de trouver un homme
autorisé, un représentant de la règle, dont la fonction
principale serait de la faire observer à tout le monde; mais
où est l’homme qui serait en même temps capable de remplacer les professeurs absents et de donner des leçons sur
n’importe quel sujet? Devant une pareille impossibilité , on
comprendra que nous hésitions à accepter, dans toute son
étendue , la proposition de M' M.
Un troisième plan a été exposé par ÂU le pasteur J. J,
Parander. Ici se produit un élément, nouveau, l’idée de la
coordination du Collège et de l’Ecole Normale, en un mot,
de la bifurcation des études. Il y aurait, pour les deux établissements , une école préparatoire commune, de la durée
de trois ans ; puis d’un côté, le collège proprement dit,
de la durée de six ans, et, de l’autre , l’école normale ,
devenue technique , de la durée de deux ou trois ans. —
Nous ne pouvons entrer dans les détails ; cela nous entraînerait trop loin. Quant au principe de la bifurcation, on en
est revenu dans les pays même qui l’avaient d’abord adopté
avec le plus d’entraînement ; son application a été reconnue
nuisible aux études classiques ; et elle amènerait infailliblement chez nous ce triomphe de l’éducation réaliste et matérialiste que nous voulons, à tout prix, empêcher. L’école
préparatoire ne serait plus qu’une école moyenne ; or,
écoles moyennes, écoles techniques, industrielles, professionnelles , sont, et doivent rester, parfaitement étrangères
à la mission éducatrice de notre Eglise. M' P. nous répondra
que son plan « ne fait que donner satisfaction à un besoin
4
- 100 —
légitime que nos jeunes gens commencent à satisfaire ailleurs,
et que l’on satisfera malgré nous et à La Tour même »; peu
nous importe ; si la société civile qui nous entoure sent la
nécessité d’y pourvoir, tant mieux; mais que l’Eglise en
assume la tâche et en prenne le fardeau, c’est une tout
autre question. ( La fin prochainement).
®auboi0e
LES COLLOQUES.
Pour compléter ce que nous avons dit, dans notre dernier numéro , au sujet du rétablissement des Colloques ou
Presbytères, nous transcrivons ici une page de notre historien Jean Léger (vol. I. p. 207);
« Tous les derniers vendredis de chaque mois, s’assemble le Colloque de
la vallée de Luserne, et tous les preppeps vendredis du mois, celui de
PejTouse et S. Martin, — composés de tous les pasteurs, et d’un ou deux
anciens de chaque Eglise. Chaque Eglise reçoit ce colloque à son tour;
chaque Pasteur y prêche aussi à son tour, et sa prédication est sujette
à la censure des assistants; jusques à l’an 1630 elle était sujette à la
censure de tout le peuple.
« Dans ces colloques l’on traite de tous les différends que les Consistoires
n’ont pu vider ; de sorte que rien ne doit être porté à la Congrégation ou
Synode général, que par voie d’appel de ces colloques, ou ce que ces
colloques mêmes y renvoyent ( exemple : — les membres de l’Eglise sont.
au préalable, soumis à l’arbitrage des AnciénS‘dê's"quartiers; si les anciens ne peuvent pas concilier les parties, ils les renvoient aux Consistoires,
qui les obligent à choisir des arbitres ; si enfin le différend ne peut être
vidé de la sorte, l’on en vient aux colloques ). Quant aux Pasteurs, on ne
les reçoit qu’après des examens bien rigoureux, tant de la vie que de la
doctrine ; il faut que les proposons, après avoir été ouis en l’un et l’autre
colloque, tant en latin qu’en français ou en italien, dans deux fois 34
heures rendent encore deux propositions devant le Synode, l’une en français ou italien, et l’airtre en latjn, devant que d’être admis au dit examen ».
Pour plus de clarté, nous citerons enfin la pratique des
Eglises Presbytériennes d’Ecosse , où l’organisation n’a jamais fléchi :
5
— lúl —
On entend f>ar Presbytère ( ou Colloque ) la réunion des pasteurs de toutes
les paroisses comprises dans un district, des professeurs exerçant leur
charrie dans les mêmes limites, pourvu qu’ils soient ministres, et d’un
ancien de chaque paroisse. Les attributions du presbytère sont :
1“) ü’examiuer les proposants, et de leur donner le droit de prêcher
1’Frangí le;
2°) D’examiner les candidats à une paroisse et de leur imposer les
mains ;
3“) De s’assurer si la Parole est prêchée et si, en général, les devoirs du ministère sont remplis lidèlement dans chacune des paroisses ressortissantes ;
4“) De veiller à la conduite de chaque ministre, et, au besoin, de
le censurer, de le suspendre et même de le déposer.
5°) De veiller à la conduite des maîtres d’école, ut supra; et d’inspecter, une fois l’an, les écoles du district;
6°) De juger, en appel, de tous les différends et de toutes les questions que les cours inférieures n’ont pu résoudre ou vider;
7«) De veiller, comme cour civile, à tout ce qui concerne la mainmort ecclésiastique, connue aussi à l’érection et à la réparation des temples et des cures.
Chronique locale.
Torre-r'elllco. Conférences populaires: XI® conf., du 24 mars. —
Mf le Prof. J. D. Charbonnier a achevé son exposition sur Vilygiène populaire, en traitant de la .santé et de la maladie, de la vie et de la mort.
11 a particulièrement insisté sur le danger des inhumations i)récipitées.
— Leçons d’Agronomie. Commençons par rectifier notre résumé de la
première leçon. Là où nous indiquons l’analyse du végétal, il nous efit
fallu distinguer, d’un côté, l’eau ou vapeur d’eau, et l’acide carbonique,
qui se dégagent par la combustion ; de l’autre, les éléments que fournit
l’analyse des cendres, à savoir silice, potasse etc. — Dans sa deuxième
leçon, du 22 mars, le Prof. H. Rollier a parlé tout d’abord des éléments d’une bonne terre. — Les roches de nos montagnes étant essentiellement siliceuses, nos terrains, composés de débris provenant des montagnes qui nous sont le pltis voisines, participent nécessairement de ce
même caractère : ils sont froids, légers, siliceux. Le fond de S' Jean présente des terrains mixtes, alluvions et silices. Ce qui manque donc à nos
terrains, c’est surtout la chaux; car trois éléments principaux concourent
à former un bon terrain cultivable : l’argile, la silice et la chaux. Mais
il en est d’autres encore, par ex. la marne, la potasse, la soude. — Or
quels sont les agens destinés à donner à la plante la nourriture qui lui
est nécessaire ? C’est tout d’abord Vammemiaque, substance des plus précieuses
6
— lOi —
qui rend toutes les autres solubles; ce sont ensuite les débris végétaux qui
constituent ce qu’on nomme Vhurmls\ l’humus contient ce qu’on appelle
ulmine et acide ulmique dont la propriété est de retenir et même de fabri(]uer l’ammoniaiiue pour le céder ensuite aux minéraux nécessaires à la
plante. — Il suit qu’il y a deux moyens de préparer le terrain : par amendement, pour fournir les éléments minéraux; par fumure (humus).
Les amendements consistent à fournir la silice, la chaux et l’alumine. Or,
répétons-le, ce qui manque par dessus tout à nos terrains, c’est la chaux. On
pourra, sans trop de dépenses, y suppléer par un mélange de chaux et de
terreau ; avec 7 ou 8 sacs de chaux, il est possible d’amender, de la sorte, un
champ d’une journée (100 tables, 1\2 hectare) pour un laps de 4 ans. — 2» Un
autre amendement, c’est le gyz ; il est particulièrement propre à la culture
des légumineu.ses, et aux prairies artificielles ; mais il jouit d’une mauvaise
réputation : « s’il enrichit les pères, il appauvrit les flls ». Cela est vrai, mais
cela est vrai de tous les amendements; ils épuiseraient bien vite le terrain,
si on ne les corrigeait par le fumier. — 3° le seiest un troisième amendement;
et le Gouvernement, n’en ignorant pas l'importance', en vend lui-même à 1
franc le myria', mais de telle qualité qu’il ne peut convenir qu’à l’.Ugriculture.
— 4° les cendres, fraîches ou lessivées, contiennent beaucoup de phosphore,
aliment nutritif, et sont excellentes pour la culture des pommes-de-terre. —
5° enfin, la suie contient beaucoup d’ammoniaque et de phosphore ; en outre
elle éloigne les insectes, et attire vivement la chaleur solaire ; 8 sacs de ce
rebut de nos cheminées suffiraient pouf amender 1 journée de terrain. —
Ainsi rien ne se perd dans la nature, et tout rentre dans la circulation universelle, au plus grand profit de l’homme avisé qui sait tirer parti des choses.
La troisième leçon ( les engrais ) fera l’objet d’une notice dans notre pro^
chaine Chronique.
(fTomapon^ânce.
On nous écrit de Oomo, en date du 13 mars,;... .
Un colporteur m'ayant dit que dans quelques villages, au nord du lac de
Còme, on désirait la visite d’un ministre évangélique, je résolus de m’y rendre.
Le lac de Còme, avec les villes élégantes et les montagnes escarpées qui
servent de cadre à ce « bleu miroir des étoiles, » est peut-être le plus pittoresque
de tous les lacs italiens. Une course à bord d’un des six bateaùx qui le sillonnent continuellement est une source de grandes jouissances, alors surtout
que l’on arrive au point où le lac s’étend en une belle et large nappe, et
qu’on voit fuir à l’horizon les trois bras qui se dirigent vers Colico, vers Corno
et vers Lecco. C’est ici que se trouvent les lieux de plaisance qui attirent
chaque été une foule de voyageurs, et qui^se nomment Bellagio, Menaggio,
Tramezzo, Cadenabbia, etc.
Mais le bateau ne s’arrête guère que pour déposer des voyageursetenprendre
de nouveaux ; et on laisse bientôt derrière soi ces Edens où rien ne manque,
semble-t-il, sinon des habitants réconciliés avec Dieu par l’Evangile de Christ,
Sur la plage m’attendait le colporteur qui devait me servir de guide. Je fus
7
— 108 —
bientôt abordé par un de nos nouveaux amis qui me salua en anglais et à
l’anglaise ; et comme je lui exprimais mon étonnement, il me répondit ; «J’ai
» été six ans à Newcastle et mon frère y est encore. Tous les dimanches nous
» nous rendions à l’église méthodiste ; et l’enseignement que nous y avons
I reçu, joint à la bonté du caractère protestant, m’ont tout à fait éloigné de
l’église romaine, pour laquelle, a vrai dire, ma famille n’a jamais nourri
» un attachement bien profond. Vous verrez pourquoi ».
Cet entretien, commencé dans la rue du village, se continua dans la cuisine
de l’auberge , où je m’étais installé immédiatement au coin du feu. Mon intéressant interlocuteur étant sorti un instant, je vis peu après entrer un prêtre
qui vint s’asseoir à mes côtés. Nous nous regardâmes attentivement ; U's petits
coups i]u’it frappait à terre avec sa canne à pommeau d’argent, son air méditatif, me firent présager une controverse imminente. Enfin l’on ouvrit la
bouche pour me demander... le prix de la farine !
Nous sortîmes bientôt, et nous commençâmes à gravir la colline par une
belle route pavée, comme le sont presque toutes celles de la province. J’avoue
que je me sentais humilié en la comparant à part-moi avec nos chemins
vicinaux des Vallées, qui ne sont trop souvent que d’affreuses fondrières. Ce
qui ajoutait encore à mon humiliation c’était l’aspect des maisons de paysans,
toutes plus belles, plus propres et mieux éclairées que chez nous.
Un chasseur ( du moins je le pris pour tel ) nous devança et dit en passant
auprès de mon guide : — Je monte pour votre afiaire. — Très-bien, répondit
le colporteur; et je fus mis bientôt au courant.
— J’allais, me raconta le colporteur , otfrant mes livres è quelques personnes, lorsque le curé m’aperçut et me dit ; « Il faudrait vous brûler vous et vos
livres». — Votre curé, dis-je alors, ne sait pas même le Pater. — Comment
donc ? — Il est dans le Pater : pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés. — Le curé', de garder te silence ; mais
un bigot se chargea de répondre pour lui... en brisant d’un coup de pied ta
boîte des livres hérétiques. Plainte fut portée au préteur de l’éndroit, et
notre chasseur n’était autre que l'huissier, chargé de faire comparaître le
zélote.
Nous rencontrons plus loin un vieillard encore verd, à la figure intelligente
et bonne ; il rebrousse chemin et nous accompagne au crot ( grange où l’on
tient les provisions et sous laquelle se trouve la cave). Là, assis autour du
feu, nous causons, jusqu’à la nuit, de l’Evangile et des moyens de le faire
connaître. Les traités du Df Desanctis et VAmico di casa ont pénétré ici ; et
lorsque je parle de [’Eco délia, Verità, on me charge d’en procurer l’abonnement.
Ce journal les réunira le dimanche , les édifiera, les encouragera, et ils le
feront lire à leurs amis. Quand la chose sera possible , l’on établira une
réunion régulière. Je leur fais pressentir qu’ils seront haïs et persécutés ; le
vieillard ne s’en effraye pas ; il en est ainsi, dit-il, des petits commencements.
La nuit venue, nous montons au village où notre hôte nous hébergera.
C’est là, ou aux environs, que l’on peut voir encore quelques vieilles femmes
affublées de robes de capucins, en vertu d’un vœu contracté par leurs
aieules, lors de la peste de 1630. Mais je trouvai bientôt dans la maison
de notre aimable hôte une relique bien plus intéressante ; datant aussi du
XVIU siècle. C’est une vieille Bible traslatata in italiano da Giovanni Diodati, di nation lucchese, imprimée je ne sais où en 1607 ; le père de l’heureux possesseur actuel l’avait achetée, en Allemagne, d’un professeur de
théologie de Halle, et l’avait transportée chez lui en 1822. Sur une page
blanche du Saint Livre se lisait, écrit de la main du professeur peut-être,
un fragment de lettre, du docte Joseph Scaliger au traducteur, et portant
pour titre : Jos. Scaligeri judidum de interpretatione italica Bibliorum Diodati. « J’ai tiré et tire tous les jours tel profit de votre version que je ne
8
*- 104
» in'en puis défaire, la tenant toujours auprès de moi Le sens de l'Escri» ture y est très-bien exprimé ; les notes comprenant beaucoup en peu de
» paroles; les paroles exquises et conformes à la vérité Hébraïque. — Somme...,
despouillé de passion je pense dire que c’est la meilleure version que
■i nous ayons, et crois que tout homme d’entendement et versé en cette
» matière fera le mesme jugement ; et ne me repentirai jamais d’avoir
» fait ce jugement. Je vous en rendrai plus ample témoignage , et à tout
» autre, quand j'aurai tiré plus avant ».
Sur une autre page une main moins ferme et moins habile avait tracé
les lignes suivantes.' Questa è la Grande parola del iddio nostro Spìrito,
che ne afiranelisre li uomini e benedise l’animo nostro, e ne fa grande acrescimmto in fra li uomini conoscitori di questo Secreto, che a iddio nostro
nel nostro core ; si trota sempre la visione di questa sacra verità e chi
spiega il cuore in questa scrittura arerà in lui (in sè) il regno de’celi. Dans
cette phrase un peu entortillée on peut avoir néanmoins le profond respect
qu’inspirait le saint volume.
Et voilà poimiuoi, cher lecteur , on n’avait pas dans cette famille un
attachement bien profond pour l’Eglise Romaine.
Je m’entretins, le jour suivant, de cette précieuse trouvaille avec un
ami chrétien du Val d’Intelvi. Il faudrait, disait-il, réimprimer cette Bible
avec les notes auxquelles le docte Scaliger rend un si beau témoignage.
— Pourquoi l’imprimerie Claudienne ne s’en chargerait-elle pas? Avec ou
sans notes, en grec ou en latin, traduction Diodiati ou version Martini, la
Bible est et sera toujours pour Rome un épouvantail; et ceux qui ont le
courage d’acheter Diodati seraient sans doute très-heureux de posseder aussi
les notes. Je souhaite que là dove si puote mon idée soit prise en considération.
Le lendemain matin, après avoir prié dans la maison de mon hôte, je
descendis au village ou m’attendait l’agréable vieillard dont javais fait la
connaissance. Là, dans une belle salle que le propriétaire offrait ^atuitemet et avec .joie pour la célébration du culte eu esprit et en vérité, se
trouvaient réunies une douzaine de personnes, presque toutes des femmes.
J’allais commencer, quand mon nouvel hôte, entendant le pas de quelqu’un dans la rue , ouvrit la fenêtre et invita le passant. Celui-ci de s’excuser ; Vergogna, lui fut-il répondu ; « quand on vous a invité à venir
» danser dans cotte môme salle, vous n’avez pas refusé; et vous'ne voulez
» pas entrer maintenant qu’il s’agit d’entendre la Parole de Dieu? Vergogna
» marcia I » Il voulait, à sa manière, contraindre d’entrer, mais n’ayant
pas réussi, il referma la fenêtre.
Je lus alors, après avoir imploré la bénédiction de Dieu, 2 Cor. v.
14-21, et je développai brièvement les principes fondamentaux de l’Evangile ; une prière termina ce culte d’une grande simplicité, le premier culte
évangélique célébré dans ce village. Tous me serrèrent cordialement la
main, et déclarèrent que cela valait mieux que la messe; déclaration que
j’avais lue déjà dans leur attention soutenue et intelligente.
Je partis plein d’espoir. Si, il y a trois siècles, la persécution a étouffé
l’Evangile dans cette Valteline que j’avais en face de l’autre côté du lac.
Dieu va le ressusciter ici et en bien d’autres lieux encore. J’espère que
les lecteurs de l’Echo prendront de l’intérêt à ma petite excursion et je
tes invite à prier Dieu avec moi pour que la lumiere qui vient de s’aliufner ne s’éteigne plus jamais.
Agréez etc. ____
Pignerol, J. Chuhtore Impr.
A. Revel Gérant.
9
IV. année
9 Avril i860.
/V.» 14.
L’ECHO DES VALLEES
FEUILLE HEBDOMADAIRE
Spécialement consacrée aux intérêts matérieis et spirituels
de la Famille Yaudoise.
Que toutes les choses qui sont vérital»Ics............. «couinent
vos pensées — Philippieiiif., IV,
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ou portion de ligne
N.42. (Agenzia bibliografica) ^ Lettres et envois franco. S' a
dresser p«>ur l'administrat on
au Bureau d Torre-PclUce ,
via Maestra N. 42. — pour la
: Libreria Evange^ î rédaction ; i\ Mr. A. Revel
lica, via de'Panzani. \ Prof, a Torre-Pellice
PifiNfîRoL : Chlantore linpr
Turin Tron, via Lagrange
près le N. 22.
Florenck
SOMMAIRE: — De l’instruction secondaire- — VaricUs: (’.e qui manque à l'Italie
pour vivre. — Chronique politique. — Chronique locate. — Correspondance.
DE L’INSTRUCTION SECONDAIRE
( Suite et fin. V. N« 13J.
L’on n’ignore pas que le Synode de 1888 a été saisi d’un [)rojet de réglement pour le Collège, et qu’il s’en est débarrassé, au bout de deux
heures de discussion, en le renvoyant à la Table. Ces renvois, avec recommandation et autorisation , ne veulent pas toujours dire que In corps
exécutif s’y prête volontiers, et qu’il va résolument mettre la maiu à l’œuvre. Dans le cas actuel, par exemple, rien n’a été mis ù l’essai et nous
avons continué de marcher sous le régime d’un provisoire déjà trè.s-long.
Le projet part des bases arrêtées par le Synode de 1863, à savoir que
la durée des études reste fixée à 8 ans; il retranche, dans les deux premières années, l’enseignement du grec et du latin; douue à l’étude de
ces mêmes langues une prépondérance marquée dans les quatre classes
moyennes; accorde aux littératures et aux sciences la place d’honneur dans
les deux classes supérieures ; et recommande enfin, pour toutes les classes,
et, autant que. possible, pour toutes les branches d’étude, l’adoption do
manuels, pour assurer à la méthode le degré d’unité désirable.
A ces principes correspondrait une triple, division :
10
— 106 —
1° L'école préparatoire, de la durée de deux ans, formerait jusqu’à un
certain point un ensemble à part et indépendant; l’enseignement y com■ prendrait, dans ce but, tout ce que les élèves ne seront jamais forcés de
désapprendre, alors même qu’ils n’iraient pas plus loin, à savoir l’italien,
le français, la religion, l’arithmétique, la géographie et l’histoire. A notre
avis l’on devrait fixer absolument, comme condition d’admission, l’âge de
douse ans révolus; car, quand on songe que huit années sufïisent pour
recevoir une éducation secondaire assez complète, on est stupéfait à ta
licnsée que, chez plusieurs élèves, ce cycle peut être parcouru en entier
avant qu’ils aient même atteint l’âge de 16 ou 17 ans. Et puis, qu’on
veuille bien y faire attention; l’école préparatoire, si elle n’est efficacement
protégée par un examen d’admission rigoureux, sera inévitablement envahie par une foule de lilliputiens (lilliputiens au double point de vue du
corps et de l’intelligence ) qui n’auront pas même encore déposé la bavette.
De grâce, qu’on nous épargne ce spectacle !
2" Le Gymnase proprement dit, composé des quatre classes moyennes,
se partagerait naturellement en deux divisions. Dans la première, confiée
à la direction d’un seul professeur (1), comme cela a eu lieu jusqu’à aujourd’hui , l’effort principal porterait sur l’enseignement théorique et pratique de la grammaire latine et de la grammaire grecque, et sur l’étude de
la géographie et de l’histoire anciennes, afin que les élèves admis, en suite
d’un examen sévère, dans la seconde division ( Belles-Lettres ou Rhétorique )
soient efficacement préparés à la lecture et à l’intelligence des classiques.
3“ Les deux classes supérieures, ou le Lycée, devraient, selon nous, se
livrer à la continuation des mêmes études; et, en seconde ligne seulement, à l’étude des sciences naturelles et philosophiques. Ici, plus qu’ailleurs peut-être, les bons manuels abondent, et nous avons de la peine à
comprendre que les élèves perdent un temps précieux à entasser cahiers
sur cahiers, travail purement mécanique, au lieu d’être appelés à former
leur goût et leur jugement par des exercices répétés.
Telle est la manière dont le projet en question fixe le programme de
l’instruction secondaire à ses différens degrés: Toute réflexion faite, il nous
semble qu’en partant de ce qui existe, il serait difficile de mieux répartir
tous les objets du programme dans les classes inférieures {école préparatoire),
moyennes fgymnasej, et supérieures (lycée),
On reconnaît généralement que l'école préparatoire est une nécessité. Mais
en même temps, les conditions d’examen doivent être telles que cette école
ne dévie pas de son but pour devenir une école moyenne ou primaire
modèle. Pour le inême motif, pas de bifurcation, mais enseignement développé et vraiment classique de nos deux langues vivantes.
Au degré supérieur, première division du gymnase, et alors seulement,
commencerait l’étude des laijgues anciennes, qui doit être constanunent
(1) L'éoale préparatoire n’aurait aussi qu’un seul professeur.
11
- 107 —
soutenue par des exercices de thèmes gradués. Il faut en effet exercer à
écrire, non pas pour la chose en soi, mais pour faciliter autant (|ue possible l’intelligence des auteurs. Ce n’est ciu’à ce prix que les élèves seront
suffisamment préparés à entrer dans la seconde division, où il faut, du
reste , qu’ils apportent avec eux la connaissance de l’iiistoirc et de la géographie anciennes.
Nous insistons tout particulièrement sur ces principes; car pour nous
ils sont fondamentaux. Que le projet de règlement puisse être avantageusement modifié sur tel ou tel point particulier, c’est ce dout nous ne doutons pas, et nous ne nous en sommes pas fait faute, en ce qui concerne
l’examen d’admission; mais dans scs lignes principales, il nous [laraît déterminer d’une manière satisfaisante la mesure do nos besoins particuliers
en harmonie avec les besoins généraux. Sans bouleverser ce iiui existe,
il assure à l’ensemble des études l’unité et la progression régulière et
continue qui leur sont indispensables; et à cet égard, il peut nous dispenser d’avoir recours au système de rotation (voir notre nuniéro 8), [lonr
lequel nous aurions un penchant décidé , s’il no nous amenait malheureusement à réduire encore d’une année la courte durée des études.
Mais plus de renvois, plus de délais; plus de provisoire! et qu’on mette,
une bonne fois, la main à la charrue.
Oo qixl niaixqTxe à l'Italie pour* vivre. Cha(iue année
nous sommes obligés d’acheter à l’étranger:
Deux millions de kilogrammes d'huile; — 65 millions do kilogr. deswcre;
— 100 mille kilogr. de fromage; — 4 millions et demi de kilogr. de laine; —
350 millions de kilogr. de blé; — 20 millions de kilogr. de bois à brûler ; —
1 1(2 million de kilogr. de bois à travailler ; — 20 millions de kilogr. de charbon de bois ; — 1 million de kilogr. de farine; —16 millions de kilogr. d’avoiîie ;
— 6 millions de kilogr. de peaux; — 300 mille kilogr. de cire; — 1 li2 million
de kilogr. de semences oléagineuses ; — 6 li2 millions de coton ; — 20 mille chevaux, ânes etc. — 4 mille veaux ; — 13 mille vaches, génisses et taureaux; —
3 mille brebis, agneaux, etc.
En revanche nous laissons exporter 12 millions de kilogr. d’o.s, vendus à vil
prix, alors qu’ils constitueraient un engrais excellent, au point de faire rendre
à un seul hectare quarante hectolitres de blé, tandis que nous n’en produisons,
on moyenne, que 10 par hectare ! — Trois kilogr. d’os vendus à l’étranger
nous font perdre ainsi 300 kilogr. de froment et d’avoine.
Pour nous nourrir et nous vêtir nous no payons pas moins par conséquent
d’îtw milliard aux producteurs agricoles de l’étranger. C’est l’impôt le plus
lourd qu’une nation ait jamais été dans le cas de payer au-dehors.
f Gazzetta di PineroloJ
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— 108 —
Cltroniquc |)olUt(|ue.
Lo projet de loi présente par le député D’Ondes Reggio sur la liberté de
renseignement et des professions a été renvoyé, comme question de principe, à la prochaine discussion d’une loi sur l’instruction secondaire, par
le Comité privé de la Chambre.
Après les vacances de Pâques, qui pour elle se prolongent jusqu’au 12
courant, la Chambre des députés, aura d’abord à s’occuper des budgets
de l’Instruction publique et des Finances, dont les rapports respectifs lui
ont déjà été présentés, par les commissions spéciales désignées à cet effet.
La commission pour l’examen du budget de l’instruction publique, ne
propose que la diminution de cinq mille francs au chiffre de 15.842.000
demandé par le Ministre, tandis que celle des finances a réduit de beaucoup les entrées de ce dicastère que le Ministre portait trop inconsidérément à la somme d’un milliard et quatre vingt trois millions de francs.
Le Municipc d’Ancône est actuellement administré par un commissaire
royal, attendu les démissions que le syndic et la junte, et après eux le
Conseil Municipal tout entier ont donné à la suite des réclamations et des
troubles survenus dans cette ville à l’occasion de la mise en application
de la loi sur l’octroi. Cette espèce de soulèvement qui semble s’être allié
à une agitation Mazzinienne dans toutes les principales villes de notre péninsule , a eu particulièrement son écho à Faenza où le général Escotïier
régent de la préfecture de Ravenne vient de dissoudre la société politique
appelée il progressa.
Les félicitations portées naguère à Trieste par le général Della-Rocca à
l’Empereur d’Autriche de la part du roi d’Italie, et les remercîmens que
le lieutenant Maréchal Mering fut chargé d’en témoigner à ce dernier de la
part de son souverain, attestent entre ces deux familles régnantes en même
temps qu’entre les deux Etats qu’elles gouvernent, des courtoisies et des
cordialités auxquelles nous n’étions guère habitués.
Pendant que la France se prépare à lutter dans les élections générales
qui vont dans deux semaines avoir lieu, contre les candidatures officielles
que le Gouvernement a déclaré ouvertement de vouloir maintenir, les
Cortes de Madrid ont calmement entrepris la discussion de leur projet de
Constitution par lequel elles établissent ta monarchie constitutionnelle avec
la liberté des cultes, et la Chambre des Communes de l’Angleterre a admis
à une très-grande majorité la seconde lecture du bill d’abolition des privilèges de l’Eglise établie de l’Irlande.
L’Exposition universelle que le Gouvernement de la Prusse annonce devoir s’ouvrir l’automne de l’année 1871 dans la ville de Rerlin a mis ime
heureuse fin aux bruits de guerre et d’alliances politiques, que de tous les
côtés de l’Europe l’on ne cessait de répandre pendant ces jours derniers.
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— 1(W
(SKroniquc locale.
Toi^ro-l’ollieo- Conférences pnpalmrcs: XI[« corif., du 31 mars. —
■Mr |p Prof. Nieolini a traité (en italien) le sujet de Vlinfiiène, au point
de vue de la tempérance, de la frugalité et de la [iropreté. Son discours,
tout semé d’Iicureux proverbes et d’intéressantes anecdotes, a été vivement applaudi, et mériterait certainement de prendre place dans la collection si répandue do la Seienza üel popolo. — Il est possible ([ue la saison
•les conférences soit sur le point de se clore ; nous espérons (pi’clle se
rouvrira en automne, avec une ailluencc croissante d’auditeurs, et avec
une nouvelle variété de sujets.
— Leçons d'apronomie. Dans sa troisième leçon (du 29 mars) .Mr le Prof.
Ilollier a traité des engrais téyélaux (lupin, trèfle, sainfoin, luzerne, blé
noir; — bois sec de vigne, poussière de charbon) et des engrais animaux ( poudrettes de chair, de sang, de vers à soie; os; débris de cuir,
de cornes, de laine; — déjections). Parmi les dépouilles d’animaux à utiliser, JD R. a chaudement recommandé l’engrais de hannetons. Que ne
fait-on à ces insectes une chasse assidue, en y employant les enfants de
la maison qui seraient tout heureux de s’amuser de la sorte ! On se débarrasserait des vers blanc, et l’on se procurerait, à bon marché , un
engrais qui vaut do l’or, car il est vingt fois plus riche et plus puissant
que l’engrais des étables.
— Assemblée paroissiale. L’assemblée électorale de la paroisse,, réunie
le 4 avril pour entendre le rapport annuel du Consistoire, s’est ajournée
au 11 courant pour l’examen de ce même Rapport.
Tixr'iii. — Visite pastorale. — Dimanche 4 avril, une délégation delà
Table s’est rendue au sein de la paroisse de Turin , à reflèl d’y procéder à une visite pastorale. — On pense qu’il y a progrès au point de
vue de la vie religieuse, tant à cause de la fréquentation plus régulière
du culte, qu’à cau.se de l’intérêt grandissant pour les œuvres de bienfaisance , pour la visite des pauvres, et pour l’établissement d’œuvres de
charité diverses, dues à l’initiative du Pasteur et du Consistoire. — Cependant il y a des vœux à former pour que beaucoup de protestants ne
se contentent pas d’assister au culte aux seules solennités. Il y a dans la
paroisse, on peut le dire avec reconnaissance envers Dieu, un bon nombre
de familles qui s’eff'orcent de servir le Seigneur: et il y a lieu d’espérer
qu’il y a aussi beaucoup d’âmes ayant des besoins religieux. Il y a pareillement bonne volonté à donner ; preuve en soit, entr’autres, un don tout
récent de fr. cinquante mille, de la part de M*' Long, pour un hôpital. Le
pasteur rend à sa paroisse le témoignage qu'il est reçu , partout et toujours.
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avec bienveillance ; et que l’on écoute avec plaisir ses paroles d’exhortation
au nom du Seigneur. Il y a à cet égard des sujets d’encouragement, et bien
des occasions d’actions de grâce. — L’on rend au pasteur un excellent témoignagne; c’est à lui, après le Seigneur, qu’e.st dû en grande partie le
bien qui se fait dans l’Eglise. Le Consistoire a secondé le pasteur et désire
de mieux faire encore. — Les écoles, entretenues avec la coopération de
la paroisse par la Commission d’Evangélisation, ont fait des progrès. A
Porte-neuve, l’on a 200 élèves; à Porte Palais, 24; à l’école payante, 32.
— Dans les écoles principales, le tiers environ des élèves est catholique.
— Un bel exemple de libéralité chrétienne. On nous mande de Turin, qu’un
membre de l’Eglise Evangélique-Vaudoise de cette ville, M"' Louis Long, ancien
banquier, vient de mettre à disposition du Consistoire de cette Eglise la somme
de cinquante mille francs, destinée à la construction d’un hôpital protestant
qui s’élèvera tout à côté des Artigianclli Valdesi. Une seule condition est mise
à ce don généreux, savoir : qu’aux lits déjà existants ou qui pourraient être
ajoutés encore pour les malades de maladies aigues, ou pour les incurables,
en soient constamment unis quatre autres, deux pour hommes, et deux
pour femmes, destinés à des vieillards que l’âge aurait réduits à l’impossibitité
de pourvoir eux-mêmes à leur subsistance, et qui n’auraient pas de famille
pouvant pourvoir à leurs besoins.
Le fait que nous venons de rapporter nous impressionne et nous touche à
un triple point de vue :
1“ A celui du don en lui-même, et qui, pour notre pays surtout, peut se
dire considérable.
2“ -A cause de la circonstance que le généreux donateur n’a pu attendre,
comme fait le plus grand nombre, que la mort le dépouillât de tout, pour se
dépouiller lui-même d’une partie de son avoir, en faveur d’une œuvre de charité chrétienne ; mais qu’il la fait de son vivant et de manière à pouvoir
prendre lui-même, de concert avec le Consistoire, toutes les mesures destinées
à assurer le plein et exact accomplissement de ses intentions.
3® A cause de l’exemple qui est trop beau, pour que plus d’un des membres
de notre Eglise ne se sente pressé de l’imiter à son tour, dans la mesure des
ressources que le Seigneur aura mises à sa disposition.
'Villar-F'ellice. A l’occasion de la confirmation de M'' Barthélémy
Monnet dans sa charge de Syndic, e.xercée par lui depuis dix ans, un banquet
lui a été offert .mercredi, 31 mars, par quelques uns de ses collègues et par une
quarantaine d’amis, tant du Villar que de La Tour et de Bobbio-Pellice, désireux d’apporter eux aussi, au Syndic confirmé, leur part de félicitations.
Plusieurs personnes ont porté des toast à le Syndic Monnet et ont rendu
bon témoignage au zèle qu’il a constamment déployé dans l’accomplissement
des devoirs de sa charge. Parmi les discours prononcés à cette occasion l’on
a particulièrement applaudi ceux de Messieurs Gay Pasteur, Morrero Curé, et
Bourset Vicaire.
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©orresfonbancc.
A propos (les quokpics lignes que dans noire 12« numéro, nous avons consacrées à une soirée de bienfaisance , nous avons reçu en même temps deux
lettres destinées à nous mettre en garde contre l’envahissement des « plaisirs
mondains ».
L’une de ces épîtres est anonj'me. Sur quoi nous nous permettrons de faire
observer à son auteur que si, dans une (piestion de principe surtout, comme
il l’appelle, il n’a pas osé avoir le courage de son opinion, il n’a pas le droit
non plus d’être pris au sérieux. C’est la seule réponse qu’il mérite.
La deuxième est signée; mena male! Mais faut-il ([u’elle le soit par une personne qui écrivant du fond de l’Italie sur la foi de renseignements peu sêrs
est naturellement portée à l’exagération? Voilà plus de trois ans ([ue se publie
VEcho des Vallées, et tout ce qu’il a pu dire de bien jusqu’ici n’a jamais suscité tant d’intérêt, ou d’antipathie , que n’en a subitement inspiré un tout
petit article de sa Chronique locale.
«Je ne craindrais pas, — nous dit-on, — que cette lettre parût dans votre
journal ». La permission , comme on le voit, n’est pas expresse ; mais nous
avons imaginé de tourner la diiTiculté en employant la forme du dialogue.
DIALOGUE ENTRE L’ECHO DES VALLEES ET SON CORRESPONDANT,
Le CoRRESPOND.iîiT. — «Que la charité soit sincère ! » Et n’intitulez pas votre
article ; Soirée de bienfaisance, mais; Soirée d’amusement; et ne commencez
pas par ces paroles ; « Dans le but de venir en aide à la Société de couture , »
mais dites : « Dans le but de nous amuser, nous sommes venus en aide à la
Société de couture». Il est permis de s’amuser; mais il est défendu de dire
que l’on fait une chose dans un but, tandis qu’on la fait dans un autre.
L’Echo DES Vallées. — Je crois que vous avez raison; et je n’aurais pas
recours à de subtiles distinctions pour me justifier. J’aurais dû dire ; Soirée
musicale et littéraire, et ne point user de termes conventionnels qui ne font
illusion à personne. Cependant ne soyons pas sévères envers des jeunes gens
auxquels vous accordez vous-même le droit de s’amuser; car je doute fort
qu’ils se fussent donné tant de peine, rien que pour divertir leurs parents et
leurs amis. Soyons justes ; et reconnaissons leur aussi le désir d’être utiles à
une société de bienfaisance dont plusieurs d’entr’eux (je veux dire les demoiselles ) font partie.
Le Correspondant. — Ah ! « n’allez point le dire à Gath, et n’en portez point
la nouvelle à Askélon ! » ( 2 Samuel 1,20 : Michée 1,10 ). Lorsque des frères
engagés dans une lutte douloureuse avec des ennemis du dehors et des ennemis du dedans , ont appris que nos demoiselles et nos jeunes gens avaient
joué ensemble une comédie, cela leur a serré le cœur ! Faut-il que l’on
publie tout ce qui se passe sur la montagne d’Israël ?
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L’Echo des Vallées. — J’avoue ne pas comprendre ce langage. 11 sied à
David, au grand poëte hébreu, de commencer ainsi une émouvante complainte
sur la mort de Saiil et de Jonathan ; il sied au prophète Michée de mener ainsi
deuil sur les plaies incurables de son peuple. Vous sied-il également bien de
prêter à un simple divertissement les proportions d’une calamité nationale ?
Plût à Dieu qu’on ne jouât jamais chez nous la comédie que de cette façon !
Le Correspondant. — Faut-il que nous entamions une discussion sur le
danger à se laisser entraîner insensiblement aux plaisirs mondains? Cette
•luestion est plus facile à résoudre par la conscience que par le raisonnement.
Là, comme ailleurs, il faut éviter le formalisme, ne pas prendre l’apparence
])Our la réalité....
L’Echo des Vallées. — Nous voilà de nouveau d’accord ! N’allez donc pas
couler le moucherou et avaler le chameau.
Le Correspondant. — Il y aurait peut être du profit à faire de ce sujet une
étude sérieuse. Mais on étudie cela dans la Bible, et non dans le Misanthrope ;
moins encore dans le Tartufe.
L’Echo des Vallées. — Pour moi, je ne crains pas de vous dire que je l’ai
étudié quelque peu aussi dans les Femmes savantes. Mais comme vous semhlez croire que Molière n’est point assez psychologue, je n’ai aucune peine à
vous suivre sur le terrain de la Révélation. Là au moins nous serons sûrs de
notre fait ; et vous ne récuserez pas le philosophe de l’Ecclésiaste qui dit ;
«A chaque chose sa .saison...; il y a un temps de pleurer et un temps de rire,
un temps de se lamenter et un temps de sauter de joie ». Franchement, pensezvous que nos jeunes gens aient failli à cette règle de l’ordre et de la bienséance ?
Le Correspondant. — Oh ! les frères dont je parlais n’ont pas un seul instant
douté que selon les termes de votre article, tout n’ait été parfaitement convenable. Nous n’en sommes pas aux Vallées, Dieu merci, aux choses inconvenantes.
L’Echo des Vallées. —A la bonne heure ! Je ne sais pourquoi, je me figurais
que certaines personnes étaient blessées précisément de ce que tout s’était passé
d’une manière convenable et comme en famille.
Le Correspondant. — Peut-être pensez-vous aussi que la balle pourrait
retomber sur la personne qui l’a lancée; et que, si elle n’a pas introduit aux
Vallées des plaisirs mondains, elle y a souvent manifesté un esprit mondain.
Si cela est, la personne en question doit se repentir; mais l’erreur de l’un ne
justifia jamais celle d’un autre.
L’Echo des Vallées. — Vous n’êtes pas loin de la vérité. Car si nous ne
pouvons absolument admettre que la personne dont vous parlez eût un esprit
mondain, il nous souvient cependant que c’est elle qui a trouvé la formule des
bals comme il faut, qui ne vaut certes pas mieux que la formule : Soirée de
bienfaisance.
P. S. Nous avons reçu en dernier lieu une lettre en réponse
aux articles intitulés Nos misères. Encore ici, l’auteur n’a pas
voulu décliner sort nom. L'Echo fait savoir une fois pour toutes
que les lettres anonymes sont jetées au panier.
Pignerol, J. ChIantore Impr.
A. Revel Gérant.