1
1 '« A N IV E e
1 <E S A V R I E 1 9 4 9
Hi° lO .
fieuUlc M^nsu^Ue
V
SPÉCUIEIHENT CO^SâCBÉE âUX INTÉRÊTS DE LA FAMILLE VALDOISE
» Ilh dion tfu' es l a u d e s . . . »
« Ils disent qu’ il e s t V a u d o is »
Nobla leyczon.
: Histoire vaudoise: Confession des péchés des anciens Vaudois. — Entretiens intimes — Poésie: L’amour du prochain. —
Correspondance. — Nouvelles religieuses. — Nouvelles politiques.
S ommaire
H IS T O IR E V A V D 0 1 8 E
Can/è««<oM Oe» p éch é» €le* ancien » Wantic4»
Poème inédit.
La pièce suivante se trouve parmi les manuscrits vaudois
de la collection du savant Usserius, déposée aujourd’hui à
la bibliothèque du collège de la Ste Trinité à Dublin, Clas. C,
Tab. 5 ,
21 , et ne nous était connue jusqu’ici que par
une traduction quelque peu défectueuse que L éger (1 partie
page 5 7 ), et P errin (2 ™® partie, page 1 78 ) en ont donnée,
mais l’un et l’autre comme d’une composition en prose, cette
forme étant aussi celle sous laquelle elle est écrite dans le ma
nuscrit. Le premier, Mr le pasteur Alexis Muston, à l ’obligeance
duquel nous sommes redevables de cette communication in
téressante, a deviné sous ces dehors d’un écrit en prose, la
forme rythmique, et un poème de plus à ajouter à ces nom
breux poèmes composés il y a cinq à six siècles, par lesquels
2
— 15Ü —
les Barbes vaudois cherchaient à rendre plus faciles à l’intel
ligence et à la mémoire de leurs troupeaux les grandes vérités
du salut. C’est ce poème rendu à sa véritable forme que
nous publions aujourd’hui, accompagné d’une traduction que
nous nous sommes appliqués à rendre aussi littérale et aussi
fidèle que possible. Puissent cette expression et ces élans de
la piété des pères trouver de l’écho chez les enfants, et faire
1 0 Dio de li rey e Segnar de li segnar ! yo me confesso
2 Car yo soy aquel peccador que t’haymot offendu.
0 Mas per la mia mesconoisencza non me poy scusar ,
4 Car tu mo has demoslra qual cosa es ben e mal :
5 Yo entendey la toa poysancza e amie la toa santità ,
6 E conos la toa justicia, e vey la toa bontà.
1 De lo mal lo qual yo hay fayt es per la mia malvesta.
8 Segnor, perdona me e dona me penthnent !
9 Car yo tay despreczia per lo meo grant ardiment,
10 £ non hay cresu a la toa sapiencia, ni a li teo comendametU;
11 Mas li hay trapassa, de que en soy mol dolent.
12 £ non hay temu la toa justicia, ni li teo jujament,
13 Mas hay fayt moti mal dos lo miojovent.
H E non hay hagu amor a la toa grant bointa,
15 Enayma yo desvro, e enayma es comanda,
16 Mas hay trop crecu al demoni per la mia malvesta ;
n E hay ensegu argolh e hay laisa humilita.
18 Si tu non me perdonas yo hay mot mal spleita.
19 Tant es la cubiticia enrayeza al meo cor.
20 £ amo tant avaricia e quiero grant lausor,
21 £ hay poc d'amor ha aquel que di la mia caison :
22 Si tu non me perdonas, la mia arma vay a perdición.
2o L’ira regna al meo cor, car yo non Vliay apaga;
E renvidia me costreng, car yo non hay carita:
23 Segnor, perdona me per la toa bointa !
26 Temeros soy a far ben e forment pereczos,
27 £ ardi a far lo mal e mot enavanezos. (?)
28 Segnor, dona me grada que non, sia de li felloni
29 Yo non te hay regracia lo ben que tu me as fait don,
30 Ne dona per la toa amor ermyma yo desro ni es comanda ;
31 Car yo soy desubidient per la mia malvesta.
52 Segnor, perdona me, car yo non te hay servi (seguf),
33 Mas hay fayt per lo contrari, e t’hay mot offendu.
34 Trop hay servi lo meo cor e la mia miunta. ,
33 En moti van pensier e catio desirier mot me son deleita.
a Tu ;
3
—
155
—
comprendre à plusieurs celte vérité si simple et cependant si
méconnue: que pour qu’un sauveur nous soit véritablement
précieux; pour que quand il nous est annoncé, nous le re
cevions, il faut que le besoin en ait été éveillé en nous par
un vif sentiment de notre misère. Pour qui l ’arrivée du
médecin pourrait-elle être plus douce que pour le malade
qui gémit et soupire sons le poids de son mal? —
t O Dieu des rois et Seigneur des seigneurs! je me confesse à Toi ;
2 Car je suis ce pécheur là qui t’ai inôlt (beaucoup) offensé
3 Mais pour la mienne ignorance (je) ne me puis excuser,
U Car tu m’as démontré quelle chose est bien et mal :
5 J'ai entendu la tienne puissance et oui la tienne sainteté,
6 Cl connu la tienne justice, et vu la tienne bonté.
7 Quant au mal lequel j ’ai fait, c’est par la mienne méchanceté.
8 Seigneur pardonne-moi et donne-moi repentance!
9 Car je t’ai méprisé par la mienne grande hardiesse,
10 Et n’ai pas crû à la tienne sagesse, ni aux tiens commandements;
11 Mais les ai transgressés, de quoi en suis môlt (fteaucoup) déplaisant.
12 Et n’ai pas craint la tienne justice ni les tiens jugements,
13 Mais ai fait beaucoup de mal dès la mienne jeunesse.
14 Et n’ai pas eu amour à la tienne grande bonté,
13 Ainsi que je devrais et ainsi qu’il est commandé;
16 Mais ai trop cru au diable par la mienne méchanceté,
17 Et ai suivi orgueil, et ai laissé humilité.
18 Si tu ne me pardonnes j’ai môlt (beaucoup de) mal acquis (1)
19 Tant est la convoitise enracinée au mien cœur.
20 Et aime tant avarice et cherche tant louange,
21 El ai peu d’amour à (j>our) celui qui dit le mien tort ;
22 Si tu ne me pardonnes, la mienne âme va à perdition.
23 L’ire (colère) règne au mien cœur, car je ne Tai pas apaisée ;
24 Et l’envie me presse (ronge) car je n ’ai (pas) charité :
23 Seigneur, pardonne-moi par la tienne bonté !
26 Timide je suis à faire le bien et grandement paresseux,
27 El hardi à faire le mal, et môlt (beaucoup) diligent (?)
28 Seigneur accorde-moi la grâce que je ne sois pas d’entre les félons
(méchants) !
29 Je ne t'ai pas rendu grâces pour le bien dont tu m’as fait don,
30 Ni donné pour le tien amour ainsi que je devras et qu’il est commandé,
31 Car je suis désobéissant par la mienne méchanceté.
32 Seigneur, pardonne-moi car je ne t’ai (pas) servi ! (suivi?)
33 Mais ai fait le contraire, et t’ai môlt (beaucoup) offensé.
34 Trop ai servi le mien cœur et la mienne volonté.
33 En plusieurs vaines pensées et mauvais désirs môlt (beaucoup)
me suis délecté.
( l) Veut dire; je me suie autre beaucoup de mal.
4
— Í5G —
56
37
38
39
E hay enceca el meo cor e hay m olí pensa ■
Encontra Tu : pensier d’a rour e de grant mahesla ;
E hay cerca motas cozas contra la loa volunta :
Hayas merci de m i, e dona me humilita !
kO Yo hay leva li meo olh forment en van deleit, ( l )
Ui E poc li hay costreil al teo regar dament.
42 J sons de vanitas e a motas retracions, hay donna l ’auviment.
hZ E a ouvrir la ley de disciplina me era encreisament;
44 E n decernir la odor, czo es en Ventendament
48 À qui hay mot arra; car la pudor de m al
46 Me ha maïs deleita que la doezor divina, n i la honor celestial;
47 Car odorant lo m al l'hay senti plus docz,
48 Perche hay obra m oti m al, e laisa de ben plusos,
49
50
51
52
53
54
55
56
57
58
59
60
61
62
63
64
65
66
67
68
69
70
71
72
Mesconnoissent la mia colpa, quierent la altruy caison.
E n m anjar e en beore soy ista m al atempera,
E souvent hay repropia mot enjuriosament.
Deleita hay lo cors e l’esperit hay nafra,
E hay stendu las mias manos per tocar vanament,
E per penre l'autruy e obrar perversament,
E per fe rir lo proyme e fa r desplaczement.
Deleita hay lo cors enzo que yo dic e encara plus ;
E n m oti van deleit me son deleita.
Segnor, perdona me e dona me castita !
M al hay garda lo temp lo qual tu me has dona,
Mas hay segu al m iojovent deleit evaneta;
E hay tengu e mostra mala via,
E mostra mal exemple per ma gran lenjaria :
Poc de ben say en my e li trobo m oti mal.
Yo hay fayt lo teo desplaczer per la m ia malvesta,
E hay condampna la m ia arma, e lo proyme hay fayt ira.
Segnor, garda me, que yo non sia condampna !
Mas hay ama lo proym e per li don tem poral,
E meas li obedi que per li spirital.
E n donar e en recebre non soy ana dreitament,
Mas hay receopu personas segont lom eo placzim ent;
Car yo hay trop ama Vun et l’autre hay agu en irament.
Yo ms soy poc alegra del ben de li bon,
1Z E me soy trop exauta del m al de li fellon.
74 Encara de li m al que yo hay fayt a l temp
75 Que es trapassa, entra en a q u estjom présent,
76 N on hay tant de dolor, n i tant de pentiment,
77 Loqual non sid m ot contra l ’offendament.
78 Souvent hi soy retourna per lo meo defalhiment
19 A l m al que yo hay confessa, de que yo soy mot dolent.
(i) La rime exigerait, en van deleit forment.
5
— 157 —
36
37
38
39
40
41
42
43
44
43
46
47
48
Et ai aveuglé le mien cœ ur, et ai beaucoup pensé
Contre Toi: pensées d’erreur et de grande méchanceté;
Et ai recherché plusieurs choses contre la tienne volonté :
Aie-merci de moi, et donne-moi humilité l
J’ai levé les miens yeux fortement en vaines délectations, •
Et peu les ai contraints (dirigés) vers ton regard.
A sons de vanité et à paroles de médisance ai prêté l’oreille,
Et d’entendre la loi d’instruction m’était chose ennuyeuse;
Dans le discerner l’odeur, c’est-à-dire dans l’entendement
Ici j ’ai môlt (beaucoup) erré, car la puanteur du mal
M’a plus délecté que la douceur divine et l’honneur céleste;
Car odorant le mal (Je) l’ai senti plus doux,
Parquoi (c’est pourquoi) j’ai fait beaucoup de mal, et laissé (en ar
rière) beaucoup de bien,
49 Méconnaissant la mienne faute, cherchant les torts d’autrui.
50 En manger et en boire ai été mal modéré,
31 Et souvent ai reproché fort injurieusement.
52 Delecté ai le corps, et l’esprit ai n av ré,
33 Et ai étendu mes mains pour toucher vanité
34 Et pour prendre le bien d’autrui et agir perversément,
53 Et pour frapper le prochain et faire déplaisir.
36 Delecté ai le (mien) cœur en ce que j’ai dit, et encore plus ;
37 En plusieurs vaines délices (je) me suis délecté.
38 Seigneur, pardonne-moi, et donne-moi chasteté !
39 Mal ai gardé le temps lequel tu m’as donné,
60 Mais j ’ai suivi en la mienne jeunesse délices et vanité;
61 Et ai tenu et montré mauvaise voie,
62 Et montré mauvais exemple par ma grande légèreté:
63 Peu de bien sais en moi, et y trouve beaucoup de mal.
64 J’ai fait le tien déplaisir (ce qui te déplait) par ma méchanceté,
63 Et ai condamné la mienne âme, et le prochain ai irrité:
66 Seigneur, garde-moi, que je ne sois condamné !
67 Plus ai aimé le prochain pour les biens temporels,
68 Et plus lui ai obéi (pour ceux-là) que pour les spirituels.
69 En donner et en recevoir, je ne suis pas allé droitement;
70 Mais ai fait acception des personnes selon le mien plaisir ;
71 Car j ’ai trop aimé l’un, et l’autre ai eu en haine.
72 Je me suis peu réjoui du bien des bons.
73 Et me suis trop exalté du mal des félons (méchants).
74 Encore, du mal que j ’ai fait au temps
73 Qui est passé, jusqu’à ce jour présent,
76 N’ài pas tant de douleur et tant de repentance
77 Laquelle soit beaucoup en comparaison de l’offense (1).
78 Souvent y suis retourné par la mienne faiblesse
79 Au mal que j ’ai confessé, de quoi je*suis fort chagrin.
( i ) C’iî8t-à-dire: L a d ouleur (fue Vèproui'e de ma fa u te tC est pasbeaucoupy elle
est peu de chose comparée à la g ra n d eu r de cette fa u te elle m im e : le non
après loqual est de remplissage
6
—
80
81
82
83
84
85
86
87
88
89
90
91
92
93
94
158
—
Segnor D io! tu sabes tôt ezo que yo hay confessa;
Encara hi a moti mal que yo non hay reconta.
Mas tu sabes li mal pensier e li mal parlament
E las perversas obras que yo fax a temp présent.
Segnor, perdona me, e dona me alongament
Que yo poisa far penitencia en la vita présent;
E dona me tal gracia al temp que es a venir
Que ayre tant lo mal que yo non lo facza p lu s ,
E ame tant las vertucz e las garde al meo cor;
Que yo ame tu sobra tôt, e te terne tant fort
Que yo haya fayt lo teo placzer a ljo r n de la mia mort.
E dona me tal fiancza a ljo r n de jvjam ent,
Que yo non tema demoni, ni autre pavantament,
Ma iste a la toa dreita sencza defalhiment.
Segnor, tôt ayczo sia fayt per lo teo placziment !
Deo gracias ! Amen.
E N TR EX IE K S IKXEIIES
l ’ étebnel règne .
Es. 99 , V. 1.
Voilà bien longtemps, ô Seigneur, que tu m’as fait lire
dans ta Bible cette grande parole, et cependant, c ’est presque
comme si je ne l ’avais jamais entendue, tant l’influence qu’elle
exerce sur ma vie est petite, tant sont fugitives et insuffi
santes les consolations qu’y puise mon âme!
Et pourtant, ô Seigneur! est-il dans ton Écriture une autre
parole dont la méditation , surtout dans les temps où nous
sommes, dût m’être plus douce?— En face des bouleverse
ments extraordinaires qui se sont accomplis depuis un an ;
à la veille de bouleversements peut-être plus grands encore;
quand les souffrances se font chaque jour plus vives, Tincertitude plus profonde , les passions qui poussent les hommes
plus violentes et plus terribles; quand ma patrie s’apprête à
tenter ce suprême effort qui doit décider de sa destinée......
qu’il est doux, du milieu de cet ouragan ténébreux qui nous
emporte, tournant le regard vers les tranquilles régions où Tu
habites , de se dire : « l ’ éternel règne ! les choses merveil» leuses que nous avons contemplées et admirées, c’est sa
» main qui les a faites; son regard est attentif à tout ce qui
7
—
80
81
82
82
83
86
87
88
89
90
91
92
93
94
»
»
»
»
»
»
«
»
159
—
Seigneur Dieu ! tu sais tout ce que j’ai confessé;
Encore il n’y a beaucoup de mal que je n’ai (pas) raconté.
Mais tu sais les mauvaises pensées et les mauvaises paroles
Et les perverses œuvres que je fais au temps présent.
Seigneur, pardonne-moi et donne-moi prolongement (de vie)
Que je puisse faire pénitence (me repentir) en la vie présente;
Et accorde-moi telle grâce au temps qui est à venir
Que je haïsse tellement le mal que je ne le fasse plus,
Et aime tant les vertus, et les garde au mien cœur;
Que j’aime Toi par-dessus tout, et te craigne si fort
Quej’aiefaitton plaisir (ce qui t’est agfréoft/e)aujourdelamiennemort.
Et donne-moi telle confiance au jour du jugement,
Que je ne craigne démon ni autre épouvantemcnt ;
Mais me tienne debout à ta droite sans défaillance.
Seigneur, tout celâ soit fait pour le tien plaisir 1
Loué soit Dieu ! Amen.
se passe ; tout ce qui doit arriver est déjà arrêté dans son
conseil, et ces innombrables multitudes qui s’agitent ,
croyant n’obéir qu’à elles-mêmes: peuples, rois, législateurs,
diplomates, guerriers, prêtres, les méchants et les hommes
de bien , ne sont autre chose que les exécuteurs de ses
desseins éternels ; les instruments de cette volonté qu’en
toutes les circonstances de ma vie j ’ai été eontraint de
proclamer une volonté bonne, parfaite et agréable ! »
Mais qu’il est doux surtout (et ton enfant. Seigneur, par
ta grâce a ce privilège) ; qu’il est doux après avoir adoré ta
puissance et tremblé devant ta Majesté, de pouvoir ajouter
le cœur plein d’une humble confiance: « Cet Être si grand,
» si puissant, si infini que ma pensée en est confondue, cet
» Être c’est mon P ère ! Lui-même s’est proclamé tel. Son
» amour pour moi ( j’en ai pour garantie sang de son F ils!)
» est si immense, si incommensurable, qu’aucun amour sur
» la terre ne pourrait lui être comparé, ni même en donner
» une idée ! La sollicitude pour tout ce qui me concerne est
» si grande qu’elle laisse loin d 'elle, à raille lieues , celle
» que la plus tendre des mères éprouve pour son enfant
» alors qu’il est ' malade ! et sa fidélité est si inébranlable ,
» que les cieux, et des milliers de cieux pareils aux nôtres
» s’écrouleraient plutôt que la parole qu’il a prononcée ne
» pas s’accomplir ! »
L’Eternel règne! Peut-il encore y avoir crainte, incertitude.
8
— i 60 —
obscurité d’aucune sorte pour quiconque a reçu dans son cœur
cette simple mais consolante parole?
O mon Dieu ! regarde et vois de quels précieux bienfaits mon
incrédulité me prive! et Toi qui donnes la Foi, raets-la dans mon
cœur, afin que raffermi, consolé, éclairé par tes promesses,
je puisse à mon tour raffermir et consoler mes frères, et
marcher avec courage dans le chemin que tu m’indiques î
PO ESIE
Mi’awnonr <fw j»ro cA a< n (1 )
Notre prochain, l’aimer comme nous-même,
Telle est la loi que nous a fait Jésus.
Aimer ! aimer ! c’est le bonheur suprême ;
Aim er, sera le bonheur des élus.
Si le malheur réduit à la misère
L ’infortuné qui mendie son pain ,
Souvenons-nous qu’en Dieu c ’est notre frère,
Avec amour ouvrons-lui notre main.
S ’il est couché sur un lit de souffrance.
Craignant la mort ; s’il en sent les terreurs,
D ’un Dieu clément donnons-lui l’espérance,
Tournons ses yeux vers la Croix du Sauveur.
Sans fo i, sans D ie u , s’il végète en ce monde,
Après la mort n’attendant que n éant,
Prions pour lui que la Grâce l ’inonde.
En lui montrant l ’avenir qui l’attend.
Si contre nous il se met en colère;
S ’il nous fait tort, nous parle avec aigreur.
Encore alors, aimons-le comme un frère.
En agissant, parlant avec douceur.
Aimer le monde en retour de sa haine.
Aimer, bénir celui qui nous m audit....
C ’est un écueil pour notre force humaine;
Mais le bonheur, en suivant Jésus-Christ.
(i) Une personne^ à nous inconnue, a bien voulu nous adresser de Turin celte
poésie pour laquelle nous lui offrons ici nos sincères remercimentSi avec
prières que cette communication ne soit pas la dernière que nous recevons de
sa part.
Rèd.
9
—
161
—
CORRESPONDANCE.
Les Appiot — La Tour, le 1er février 1849 (*).
Monsieur le Rédacteur!
Poussé uniquement par le désir d’être utile, et voulant appeler
l’attention de nos compatriotes et surtout de la Vén. Table Vaudoise sur l’exposé plus bas, je vous prie de vouloir bien lui don
ner une place dans le prochain N.® de votre Feuille. J’espère ,
Mr le Rédacteur, qu’appréciant mes vues, vous ne rencontrerez pas
de difficulté à consentir à ma demande etc. etc.
J. H. V ertu.
U E liA C YM NrAS’r i Q V E (1).
« Veux-tu que ton 6U acquière un
» port gracieux , un abord brave , une
constitution robuste ; veux-tu rendre
» ses yeux perçants comme ceux du fau» con; veux-tu que ses jeunes membres
I) défient ceux des chevreuils agiles ? —
» Q u ’il se livre aux exercices gymna» stiques; »
H xm txt.
»
Si grâces à l’intervention de personnes généreuses et charitables,
nos &oles ont été portées à un si haut degré de perfectionne
ment quant à l’instruction , il nous reste , sous le rapport de
l’éducation, plus d’une lacune à combler, parmi lesquelles,
l’absence d’une gymnastique. — L’esprit ayant travaillé, il faut
de toute nécessité qu’il ait quelque délassement, afin de pouvoir
journellement puiser de nouvelles forces. Or, comment la jeunesse
pourrait-elle mieux employer ses loisirs qu’à la culture du corps,
qu’à augmenter la vigueur et l’activité des différents muscles qui
donnent au corps humain sa forme , qu’à se dégourdir, en un
mot ? — Les exercices gymnastiques sont le moyen de parvenir
à ce but ; aussi en Allemagne, en Hollande , en Angleterre , en
France et ailleurs encore , a-t-on senti le besoin de les intro
duire dans les établissements d’instruction, et il n’est pas rare
d’y voir des élèves dont les membres faibles d’abord et sans
(“) Vabondance des matières ne nous a pas permis de publier cette lettre
avant aujourd’hui.
(i) O n appelle gymnasticjue cet art destiné à développer le corps au moyen
d’exercices divers, dont les principaux sont- la iparche, la course, le balance
ment, le saut, l'escalade et la lutte.
10
—
162
—
vigueur musculaire pliaient sous le poids du plus léger fardeau,
acquérir bientôt, par l’effet de ces exercices, une santé robuste
et s’endurcir à la fatigue comme de véritables montagnards. —
Cela étant, pourquoi négligerions-nous parmi nous, Vaudois, un
art si utile ? Nous pensons que la V. 'Table devrait s’occuper de
pareille organisation , sinon au complet, du moins partiellement,
commençant d’urgence par le collège , et l’étendant ensuite aux
écoles paroissiales , une fois la chose devenue possible. Fixer un
mât, un cheval, une échelle, des barres parallèles et horizontales (1),
tout cela ne peut occasionner que des frais minimes, et nul
doute que nos jeunes gens ne prissent plus de goût à ces exer
cices, qu’aux jeux parfois insipides et insignihants auxquels ils se livrent
faute de mieux. Combien d’hommes ne béniraient pas les moments
qu’ils auraient consacrés, étant jeunes, à la gymnastique , si un
danger se présentant, ils réussissaient à y échapper, grâce à l’agi
lité et à la force qu’ils auraient acquises dans ces exercices ?
« Le courage » dit un auteur moderne « est engendré par la
confiance , et la confiance par l’eatercice. » — L’importance des
établissements de gymnastique étant donc ce que nous venons de
dire , nous aimons à espérer que notre administration scholaire
voudra bien prendre en considération notre exposé.
N O W JV B ÏÏiléÆ iS R E I j Æ t i Æ E U S E S
Vallées V acdoises . La collecte en faveur des Missions évangéliques qui
se fait chaque année au sein de l’Église vaudoise, a donné pour l’exer
cice de 18li8—49 les résultats suivants:
Fr. c.
Fr. c.
60 00
Angrogne
57 13
Paroisse de Rora
8 13
Rodoret
Boby
28 05
189 40
La Tour
St Jean
90 00
St Germain 88 76
Maneille
19 90
yniar
13 34
Massel
24 00
Villesèche
25 00
Pomaret
150 50
Moitié du produit d’une
Praly
20 00
vente faite à la Tour 145 00
Pramol
42 24
Produit d’ouvrages faits
Prarustin
212 75
par quelques jeunes
20 00
lilles de St Jean
20 00
Dons divers
Solde en caisse de
9 70
l’année dernière
Total Fr. 1205 90
(i) Noms de differentes machines servant aux exercices de gymnastique.
11
—
163
—
Celte collecte commencée en 1841 avait produit cette première année
fr. 671 19 cent., elle fut de fr. 1188 l’année après; de fr. 1044 85 c.
en 1845 ; de fr. 1036 35 c. en 1844 ; de fr. 1190 63 c. en 1845 ;
de fr. 1097 77 c . en 1846 et de fr. 1359 12 c . en 1847. Si
de la collecte de l'année dernière (47—48) on déduit la quote-part de
Turin qui ne 6gure pas dans celle de cette année (48—49) il en ré
sulte que celle-ci n'aura pas été, malgré la rigueur des temps, de beau
coup inférieure à la précédente, la plus élevée de toutes. Nous nous
réjouissons de ce fait; il prouve que l’importance de l’œuvre à laquelle
ces sommes sont consacrées se fait chaque jour plus sentir au sein de
notre population, et que l’habitude du sacriOce y fait des progrès. Nous
voudrions, comme encouragement à continuer dans celte voie, transcrire
en son entier l'appel si touchant adressé dernièrement parles 14 mission
naires français du sud de l’Afrique à leurs frères d’Europe, mais ne le
pouvant, nous nous bornerons à citer quelques-unes des lignes qui le
terminent : « Chers et bien-aimés frères, ardemment désireux de pré• venir la ruine qui menace une mission que le Ciel a abondamment
• bénie avant que vous n’ayez la douleur d’apprendre que vingt années
• de combats et de prières ont été dépensées inutilement, avant que
• ces âmes éclairées des lumières de la foi, ne soient replongées dans
• les ténèbres du paganisme, avant que le démon ait réussi à écarter de
« cette belle œuvre les serviteurs du Christ qui la dirigeaient . . . . avant
« tout cela nous jetons un cri de surprise et d’allarme, et nous vous
• en supplions au nom du Père, du Fils et du St Esprit, un seul Dieu
• béni éternellement, conservez pour le grand jour des rémunérations
« cette couronne qui vous a été donnée , conservez à nos Eglises le
• précieux point de ralliement qu’elles ont trouvé jusqu’ici dans celte
• œuvre! •
La Gazzetta del Popolo du 6 février dénonçait au public un fait bien
triste, surtout se produisant dans des temps comme ceux où nous sommes
parvenus: Un selibit 'vsndois mort dernièrement à Novara, dut être en
seveli par ses compagnons d’armes dans un champ, l’aurorité ecclésiastique
d’è'TèndrôTt s’opposant à ce qu’il le fût dans T’enceinte du cimetière. — ,
Nous ne savons éprouver quant à nous qu’une profonde compassion pour
les hommes qui manifestent par de tels actes leur zèle pour la gloire de
Dieu. Mais des faits semblables, indignes d’un pays civilisé , outre qu’ ils
jettentde l’inquiétude dans beaucoup de familles, ont ce grave inconvénient de
refroidir considérablement l’ardeur de nos soldats qui partent, et nous
croyons qu’à ces divers titres ils méritent la plus sérieuse attention de
la part du gouvernement. I.a Table .V audoise a réclamé par devers les
Chambres contre une pareille manière de procéder à l’égard de ses res
sortissants; et nous ne doutons pas que les Chambres composées, comme
elles le sont, d’hommes sincèrement libéraux, ne fassent droit à des ré
clamations si justes et si naturelles.
ToscA^E. Des presses Nistri de Pise sortait derrnièrement un petit vo
lume de cent et quelques pages dont l’ histoire est des plus intéressantes,
et fait de sa publication en Italie un véritable événement religieux. Il a
pour titre : Benefizio délia morte di Cristo, et pour auteur A onio P aleario ,
un des savants italiens les plus distingués du xvi siècle, lequel après avoir
été successivement professeur à S ièn e, à Lucques et à Milan, dut à ses
convictions évangéliques, mais surtout à la publication du petit traité dont
nous parlons, d’ètre brûlé à Rome par le St Office (juillet 1570). Quant
à l’écrit lui-mème il fut jugé par la cour romaine si pestilentiel, et la
sainte Inquisition mit un zèle si ardent à le faire disparaître, une sur 1rs
12
—
164
^
quarante mille exemplaires qui en furent publiés en langue italienne, du
vivant de l'auteur, il n’a pas été possible jusqu'ici d’en retrouver un seul,
et que pour l’avoir de nouveau dans cette langue, il a fallu le traduire
de l’anglais. — Une seconde édition de cet ouvrage, vrai livre d’or par
son contenu, ne lardera pas à paraître.
R ome . Le St Office, cet odieux tribunal érigé par les Papes, pour com
primer toute libre manifestation de la pensée religieuse, et qui pendant six siè
cles d’existence, a fait couler des torrents de sang, vient d’être aboli par
un décret de la Constituante romaine, laquelle a en même temps ordonné
qu’une^ colonne destinée à perpétuer l’infamie d’une pareille institution,
serait érigée par le peuple romain en face du palais du St Office. Le gouver
nement en ayant fait visiter les cachots, a fait mettre en liberté tous les
prisonniers qu’ils contenaient. On cite parmi eux un pauvre évêque égyp
tien qui par l’effet de sa longue et étroite captivité, ne savait plus quand
on le sortit, faire usage de ses jambes.
—_ Du programme du Ministère romain, programme que nous n’hésitons
pas à proclamer le plus beau et le plus franchement libéral de tous ceux qui
ont été publiés en Italie, nous extrayons les lignes suivantes comme ayant
plus particulièrement trait à la question religieuse ;
« Libre de toute influence cléricale, l’instruction marchera de pair
> avec la religion élément essentiel, bien plus élément unique d’éducation,
» lorsqu’il ne s’allie pas avec de faux intérêts, lorsqu’il se sépare de
» cette crasse qui le défigure et le souille, la crasse des passions hu» maines, des humaines convoitises que repoussa avec tant d’horreur
» l’auteur de cette religion céleste. En conséquence l’entière extirpation
« du système clérical entre dans notre programme, et le grand avan> tage qu’en retirera la religion, servira plus que tout autre argument
» à manifester la sainteté et la pureté de notre œuvre. La liberté
» des cultes et le respect des opinions, la tolérance, cette tolérance qui
» est la mère de toute vertu sera de tous nos soins le premier ». — Un
tel langage, nous venant de Rome, n’est-ce pas de tous les événements
qui se sont accomplis en Italie depuis un an, le plus extraordinaire et
celui auquel on s’attendait le moins?
— La menace d’excommunication destinée à effrayer les Romains, les
ayant fait rire, et tous les autres moyens de réaction se trouvant épuisés,
les partisans du pouvoir temporel des Papes ont eu recours aux miracles.
11 fallait s’y attendre. Le Costituzionale Romano, organe de ce parti, a
publié à son de trompe comment, un jour que l’on exposait dans une
des églises de Rome le bois de la vraie (?) croix et le voile de Sainte
Véronique (1), la figure de notre Seigneur J-C. qui y est dépeinte se colora
tout-à-coup et fut vue comme vivante au milieu d’une douce lumière.
Mais veut-on savoir comment de pareilles misères sont accueillies en
Italie? Qu’on lise les réflexions que faisait à ce propos le Nazionale de
Florence, un des journaux les plus considérés de la péninsule: « Quand
» en 1831, sous le Pontificat de Grégoire XVI, les troupes pontificales,
» avec la livrée papale et ,1e trirègne sur le casque, précédées des
» drapeaux de sainte Mère Église, au milieu des ewiva au Pape et au
» St Siège, saccageaient les cités rebelles de la Romagne, profanaient
( i) Ce voile, qui n’aurait pas moins de i8oo ans de date, est si nous ne nous trom
pons un mouchoir que, selon la tradition romaine, nne femme de Jérusalem
aurait tendu au Sauveur pour s’en essuyer le visage au moment où, succom
bant sous sa croix, il cheminait vers le Calvaire. C’est dès lors que ce voile
aurait gardé l’empreinte des traits de notre Seigneur ! ! -
13
165
—
—
les églises, dérobaient les vases sacrés, commeUaicnl des obscénilés et
des sacrilèges, non seulement personne ne dit mot, mais au nom du
f'icaire de Jésu s-C h rist , on récompensa avec des médailles et des
croix une si glorieuse entreprise. Le zèle sacerdotal fit silence ,
les images sacrées demeurèrent spectatrices immobiles de si grandes
atrocités ! ........ Et les prodiges du ciel vainement invoqués alors pour
la répressions d’énormités semblables , se manifesteraient aujourd’hui
pour condamner les actions les plus justes et pour la défense de pro
fanes intérêts ? — Allons donc ! qu'ils rougissent une fois, si pourtant
ils en sont capaliles , ces faux chrétiens qui font le Ciel complice
de leurs passions ! Qu’ils se persuadent une fois que ces sacrilèges
attentats n’aident en rien à une cause déjà perdue dans l'opinion
publique, faute d’une bonne raison dont elle puisse s’appuyer, et
qu’ils se détrompent, s’ils croient encore dans le siècle où nous vivons
à l’efficace de certaines armes rendues impuissantes par un long et
et continuel abus! »
XOW JW EM j Mí B S
POEägTgQVBS
INTÉRIELR
P iémont. La guerre a recommencé; par un acte daté de Turin du 12
mars, le ministère au nom du roi Charles Albert dénonçait au FeldMaréchal Radetzki la cessation de l’armistice Salasco et la reprise des
hostilités. C’est une dernière et solennelle épreuve qui doit décider de
l’existence ou de la non-existence de l’ Italie comme nation indépen
dante. Dieu veuille se montrer favorable à cet effort suprême, et cou
ronner de succès le noble dévouement du roi, et le courage de notre
armée ! Cette lutte ne pourra être que sanglante. De grands sacrifices
vont être imposés par elle à la nation; mais quand la cause est bonne,
et quand l’exemple que donnent les chefs est si beau, qui est-ce qui
serait assez lâche et assez vil pour rester en arrière ? Vaudois ! si nos
fils, si nos frères, si nos amis succombent dans cette lu tte , ils suc
comberont comme des hommes libres, pour une patrie libre ! Demandons
au Seigneur qu’ils succombent comme chrétiens , et leur mort sera la
plus belle qu’un homme puisse envier. — Le roi en s’éloignant de Turin,
pour aller rejoindre l’armée a adressé à la Garde Nationale la procla
mation suivante :
AUX SOLDATS DE LA GARDE N ATIONALE !
Au moment de me rendre là où m’appellent l’honneur et le vœu de
mes peuples, il m’est doux de vous manifester combien est grande la
confiance que je place en vous. — L’affectueuse sollicitude avec laquelle
déjà précédemment vous avez veillé à la garde de ma famille, au
maintien de la paix publique, à la défense de la monarchie et des
libertés constitutionnelles, m’assure que vous répondrez avec le même
zèle et la même ardeur au rtouvel appel que je vous adresse. Les con
14
—
166
—
dilions du pays ne sont pas moins solennelles, ni les temps moins dif
ficiles qu’ils ne l’étaient alors. Votre fermeté, votre honneur , votre
fidélité sauront vaincre tout obstacle. Fort de vos bras, mon gouverne
ment pourra maintenir l’ordre p u b lic, compagnon inséparable de la
vraie liberté ! Tout attentat qu’on voudrait commettre contre nos insti
tutions pourra être réprimé avec votre concours. Tranquille de ce côté,
moi qui ai consacré ma vie et celle de mes fils à la cause de l’indé
pendance italienne, je saurai affronter avec joie et périls et fatigues
pour obtenir une paix honorable , et pour que dans peu puissent re
tourner au sein de leurs familles vos généreux frères prêts à com
battre contre l'étranger et à verser leur sang pour la patrie.
Turin le 13 mars 181)9.
C harles A lbert .
— T oscane. Ce pays , après avoir échappé comme par miracle à la
guerre civile dont il était menacé par la fuite soudaine de son prince,
le grand-duc Léopold , vient de procéderà la nomination simultanée de sa Con
stituante et de ses députés à la Constituante italienne. — Chose singulière !
c’est ensuite d’une lettre du Pape qui le menaçait de l’exconiinunication, s'il
apposait sa sanction à la loi votée par les deux Chambres sur la Constituante ita
lienne, que le grand-duc a pris la fuite; et dernièrement tous les jour
naux publiaient une lettre de l’Archevêque , de Pise , par laquelle ce
prélat autorisait les curés de son diocèse à déclarer à leurs paroissiens
respectifs, qu’il ne jugeait pas que le fait de concourir à la nomination
des députes à la Constituante italienne, fit encourir à celui qui y par
ticiperait, la peine de l’excommunication. Essayez d’arranger tout cela
ensemble !
États -R omains. L’assemblée Constituante des États-Romains poursuit
courageusement son œuvre sans se laisser distraire ni par les protesta
tions de Gaëte , ni par les menaces de diplomatie. Nous donnons ci-après
la suite des décrets les plus importants émanés de cette assemblée :
Du 21 février.
AU NOM DE DIEU ET DU PEUPLE
L’Assemblée Constituante
Tous les biens ecclésiastiques de l’État-Romain sont déclarés propriétés
de la République.
La République Romaine dotera convenablement les Ministres du Culte.
Une loi expresse réglera l’application de cette mesure.
Pour l’Assemblée, le Président : G alletti .
Du 25 février.
AU NOM DE DIEU ET DU PEUPLE
L’Assemblée Constituante
DÉCRÈTE :
La jurisdiction des Évêque,' sur les Universités et autres écoles
quelconques de la République, excepté celle des Séminaires épiscopaux,
est abolie.
L’enseignement de l’État est placé sous la dépendance immédiate du
pouvoir exécutif, moyennant le ministère de l’Instruction publique.
Pour l’Assemblée, ie Président; G alletti .
15
—
167
—
Quelques jours après paraissait le décret dont nous avons déjà parlé
aux nouvelles religieuses, portant l’abolition à perpétuité du tribunal du
St Oftice soit Inquisition romaine; le 2 mars, une adresse admirable de
pensées et de langage , à tous les peuples. Ne pouvant reproduire ce
document en entier , nous en donnerons au moins quelques fragments,
qui feront juger du reste :
« Un peuple nouveau se présente à vous, pour vous offrir bienveil• lance, respect, fraternité. — Nomeau se présente à vous ce peuple
» un jour le plus illustre de la terre ! mais entre son antique grandeur
> et sa renaissance actuelle sont mille ans de domination papale! —
» Peuples d’Europe ! Nous nous sommes connus quand le nom du peuple
» de Rome inspirait la terreur: nous nous sommes connus quand notre
» nom inspirait la pitié. Vous pouvez, abhorrer la mémoire de cet âge
• de domination et de force; mais vous ne pouvez nous condamner à
‘ mériter jusqu’au bout la compassion du monde. Qui est celui d'entre
» vous qui choisirait d'être un objet de pitié? L’histoire de l'Italie était
» pleine de sang, et à la Papauté en revenait une part immense. Et
» néanmoins, lorsque la Papauté se mit en avant, et sur le haut de
• la bannière nationale plaça la Croix, le monde vit que les Italiens
» étaient prompts à oublier ses fautes , et la révolution était inaugurée
» au
nom d’un Pape.Mais précisément ici se
montra ce que pouvait et
• ce que ne pouvait
pas la Papauté. Les prédécesseurs du dernier
» régnant avaient été trop prudents pour s’exposer à une telle épreuve,
» et les calamités accumulées sur les peuples furent la mesure de leur
' puissance. Le dernier régnant, le premier, essaya de s’aventurer dans
» celte œuvre, et il voulut s’en retirer, quand il s’aperçut qu’il avait
» révélé une vérité terrible , savoir l’impuissance de la domination Pa» pale à rendre libre, indépendante et glorieuse la nation italienne. Il
» voulut s’en re tire r, mais c’était trop tard. La Papauté s’était jugée
» elle-même. Voilà pourquoi la décadence de la Papauté a suivi de si
» près sa gloire : la gloire de la Papauté était l’aurore boréale qui
» précédait les ténèbres. — Nous avons espéré toutefois ; mais un
» système de réaction fut la réponse que nous reçûmes de la Papauté.
» La réaction succomba. La Papauté d’abord dissimula; puis quand elle
» vit l'attitude calme du peuple, elle s’enfuit. — Provoqués et aban■ donnés à nous-mêmes nous avons accompli une révolution sans
» verser une goutte de sang: nous avons réédifié sans même que se
• fit entendre le bruit de la destruction; nous avons déraciné la domi» nation des Papes, après tant de siècles de souffrances, non par haine
» pour la Papauté, mais par amour de la Patrie. Quand un peuple
» a su accomplir une révolution avec une intention et des moyens
» aussi moraux, ce peuple a démontré tout à la fois qu’il ne méritait
> pas d’étre l’esclave de la Papauté , mais qu’il était digne de se
» gouverner lui-mème, digne de la république! >
Pie IX, le Vicaire de Jésus-Christ, le successeur de St Pierre, le
Père commun des fidèles , qui à ce titre s’est constamment refusé de
prendre part à la guerre contre le plus implacable ennemi de l'Italie,
vient d’invoquer formellement le secours des armes étrangères contre
ses propres sujets, et cela pour être rétabli dans son autorité de
Monarque, sans laquelle, dit-il, son apostolat lui est impossible!
— N aples. Le roi Ferdinand a fait remettre aux Siciliens son ulti
matum, c’est-à-dire, ses dernières propositions d’arrangement. Cet acte
porte la date de Gaëte, et l’on s’en aperçoit. Entr’autres promesses
que fait le Monarque aux Siciliens pour les engager à revenir à lui.
16
168
—
—
se trouve la suivante: que la religion catholique, apostolique et romaine
sera la seule religion de l’État à l’exclusion de toute autre. C’est beau
coup moins de liberté qu’en Turquie et en Chine. — Les Siciliens ont
do reste repoussé cet ultimatum et s se préparent à une nouvelle et
plus sanglante lotte pour soutenir leur indépendance.
— La Chambre des députés renouvelée il y a peu de temps est déjà
dissoute. Q’est le 13 mars que la dissolution a été prononcée ; sans
avis préalable et au moment où de graves interpellations allaient être
adressées au ministère; on ajoute que plusieurs députés auraient été arrêtés.
Cet acte de despote, et non de monarque constitutionnel, a soulevé dans
le pays une profonde indignation.
EXTÉRIEUR
— En F bance le Gouvernement montrait une grande tendresse à l’endroit
du Pape et était même, dit-on, sur le point d’intervenir militairement,
quand certains symptômes lui ayant fait comprendre que la restauration
du St Père pourrait bien être soumise à lu i, il a jugé prudent d’at
tendre encore. Quel parti prendra cette puissance dans la lutte qui
vient de commencer? c’est ce qu’il serait assez difficile de dire. —
L’Angleterre ne se départira probablement pas de sa politique qui est de
laisser autant que possible les nations faire leurs propres affaires. —
L’Autriche n’est pas mal occupée, avec d’un côté les Hongrois qui loin
d’être battus comme on le disait vont chaque jour remportant de nouvelles
victoires, et les Italiens de l’autre. — L’Espagne, ou plutôt la reine
Isabelle, aurait une terrible démangeaison d’intervenir dans les affaires
de Rome , mais il lui mauque pour cela deux choses toutes les deux
très-nécessaires : des vaisseaux et de l’argent. Il y a même des gens qui
disent qu'avant de se mêler d’intervenir dans les affaires d’autrui,
l’Espagne devrait songer à payer les intérêts de sa dette.
NOUVELLES POSTÉRIEURES
P iémont. N os plus belles espérances terrestres se sont évanouies :
la cause de l’indépendance italienne; cette cause chère à tant de cœurs
et soutenue avec tant d’abnégation et d’ héroïsme par le Piémont et par
ses Princes a été encore une fois écrasée! Nos pertes, le deuil public
et privé sont immenses, et nous ne nous sentons pas le courage de les
approfondir pour le moment Une seule pensée, une seule prière remplit
notre cœ ur: • Puisse l’Italie comprendre pourquoi l’Élernel l’a si dou• loureusement frappée ! Puisse-t-elle s’humilier profondément en sa pré« sence, et abandonnant une fois les sentiers qui l’ont conduite à un si
< profond abîm e, se retourner pour toujours vers les témoignages de
« de r Eternel, vers cette parole de D ieu , seule lampe aux pieds des
a nations comme des individus; et seule source efficace de consolations
• pour des malheurs tels que les nôtres! »
ERRATUM .
"
Au N® 9 , pa^e i5i , ligne 4 >
lisez: l’occasion de quelque trouble.
i I
v u i 'i
Ail- ■
I.
Il
h®“
^ cause de
quelque trouble
|. Le Gérant:, JEAN RBVEL.
PigHctol i849i'imp. deiPaul Gbtgbetti.
i