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Olnqulèmo annéo.
N. 4T.
55 novembre 18TO.
L’ECHO DES VALLEES
FEUILLE HEBDOMADAIRE
consacrée aux intérêts matériels et spiritneis
de la Famille Vaudoise.
Que toutes les choses qui sont véritables....... occupent
vos pensées — ( Philippiens.t IV. 8.)
PRIX D ABONNEIIENT :
Italie, b domicile (un an) Fr. 3
Suisse.................» 5
France.................» 6
Allemagne..............>6
Angleterre , Pays-Bas . » 8
Un numéro séparé : 5 cent.
Vn numéro arriéré : 10 cent.
BUDEAUX D’aBONNEHENT
Torre-Peì.mcr : Via Maestra,
N.42, (Agenzia bibliografica)
PiGNERoL : J. Clilantore Impr.
Turin :J.J. Tron, via Lagrange
près le N. 22.
F1.0RENCB : Libreria Evangelica, via de’Panzani.
ANNONCES : 5 cent, la ligna
ou portion de ligne.
Lettres et envois franco. S'adresser pour l’administration
an Bureau à Torre-Pellice ,
via Maestra N. — pourla
rédaction: à Mr. A. Revel
Prof, h Torre-Pellice.
Sommaire.
La révision de la liturgie. — Histoire vauduise : La mission bottée au Pragela. — Un
fruit de la mission bottée. — Du besoin de
l'instruction en Italie. — Chronique politique.
L4 RÉVISION DË LA LITURGIE
La liturgie en usage au sein de
notre Eglise étant reconnue, sur
plusieurjs points, inférieure aux
exigences du culte, le Synode
s’est préoccupé, à juste titre , et
à deux reprises, de la nécessité
d’une révision. D’abord, il s’est
fait adresser un rapport sur la
Guida préparée par les soins de
la Commission ¿’Evangélisation ;
puis il a spécialement chargé M.
le pasteur J. P. Meille de la tâche
importante et délicate de la révision.
Dans une question pareille il
convient, croyons-nous , d’éviter
deux extrêmes. Les uns trouvant
bien assez bonne la liturgie én
usage, se contenteraient probablement de la retoucher par ci par
là, sans y introduire d’amélioration
notable; d’autres tendraient visi
blement à substituer au mot révision le mot révolution qui n’est pas
synonyme du premier.
Nous craignons un peu qu’en
demandant l’avis de MM. les Pasteurs et ministres de l’Eglise Vaudoise, et en leur posant un série
de questions surla part qui revient
au chant, à la lecture do la Parole
de Dieu , aux prières et enfin ( et
surtout] à la forme de la liturgie,
— nour ci’aignons un peu, disonsnous , que Mr le pasteur Meille
ne penche vers la dernière alternative.
Disons d’abord ce qui nous
semble désirable dans la réunion.
11 conviendrait de faire au chant
une part plus grande; la chant de
quelques versets d’un psaume ou
d’un cantique remplacerait trèsavantageusement lalecture pendant
■que l’assemblée se forme et se
complète. La voix surmonte le
bruit, et l’activité propre de celui
qui chante contribue à fixer plus
fortement son attention.
Il importe que7a Bible soit bieu
lue; les lecteurs officiels et patentés devraient^* dans'la plupart
2
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des cas , être priés de renoncer à
leur lecture monotone et fatigante,
qui du reste a le grand tort de
se faire juste au moment de la
formation de l’assemblée. Que de
fois un auditeur attardé s’est dit
pour se justifier: Oh! l’on ne fait
encore que lire! Le moment est
donc fort mal choisi, et une lecture inintelligente , ou bien ( cela
peut arriver) le sentiment réel et
secret que le lecteur n’y entend
rien ou ne croit pas à ce qu’il dit,
est une cause de profonde démoralisation. Le choix des lectures,
leur variété, la place qu’elles doivent occuper, la bouche par laquelle elles doivent passer, tout
cela est d’une importance incalculable pour nous qui voulons donner
à la Parole de Dieu la place d’honneur dans le culte , la place centrale. 11 conviendrait donc que la
lecture de la Bible fût supprimée
au commencement du culteet placée
avant le sermon dans la bouche
du pasteur.
Nous irons même plus loin. Dans
le but d’abréger la durée du service , et pour éviter tout retour
de vain formalisme, on devrait,
à l’ordinaire, supprimer aussi la
lecture des dix Commandements et
du Symbole, la réservant à de
certaines époques d’une solennité
particulière. La Guida laisse bien
à l’évangéliste le soin de varier
le culte à cet endroit; et nous savons plus d’une église qui certes
n’est point antinomienne ( les églises
d’Ecosse par exemple ), où le Dé-,
calogue ne se lit,pas, sinon oc..cn.sionBeUement.v I
Nous tonchons I maintenant aùx
points contestables.
Le réviseur semble vouloir arranger les choses de façon que
toute la partie plus essentiellement
Gidte précède la prédication, et
qu’il n’y ait plus , après celle-ci ,
que la récitation de l’oraison dominicale et du Symbole.
Ceci n’est plus une simple révision ; c’est une révolution dans
nos habitudes et dans nos traditions
les mieux établies; c’est un changement de front qui placerait notre
culte vaudois et px'esbytérien sur
la ligne de la Liturgie Anglicane.
Si c’est là ce que l’on veut, il
y aura dans le culte deux parties
distinctes : le rituel et la prédication. Sera-t-il facile de nous arrêter sur la pente du ritualisme?
Cette révolution dans le culte ne
faudra-t-il pas, tôt ou tard, la
compléter par une révolution dans
le système ecclésiastique tout entier? Ne faudra-t-il pas glisser sur
une autre base et se réveiller , un
beau matin, église épiscopale, église
hiérarchiquement organisée? Alors
la transformation sera complète.
Nous exprimons ici des craintes
qui ne sont point chimériques. Que
nous manque-t-il pour être épiscopaux.? La base y est: nos églises
sont des jîflroiscs il n’y a plus qu’à
prononcer le mot de diocèse. Que
nous manque-t-il pour avoir un
clergé, un évêque’? La base y est:
le corps ecclésiastique , le corps
des pasteurs n’attend qu’un président à terme^ou à vie. Peut-on affirmer que cette idée n’a pas flotté
. dans l’air, et ne s’est pas posée
sur lie sol ?, Qulelle germe dans la
Lit!Dj:*gie et nous en aurons bientôt
des nouvelles. c ' i >
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II ri’y a pas d’église qui soit,
plus que la nôtre, rebelle à toute
classification.
Son système paroissial, son corps
des pasteurs trahissent une conception cléricale et épiscopale. Ses
assemblées , sa confédération d’églises sœurs, lui assurent une place
dans le monde presbytérien. Et la
plupart de ses pasteurs sont congrégationalistes ; il y en a même
qui se roidissent contre les décisions synodales , et s’efforcent de
jeter le discrédit sur les institutions presbytériennes, parcequ’elles
les gênent singulièrement dans l’exercice de leur autorité personnelle.
S’il n’y avait un journal....... il
faudrait l’inventer.
^iatoire ©aubobc,
La Mission boUée en l'ragela (i)
raco.\t£e
PAR UN PRÊTRE CATHOLIQUE (2).
Cette relation écrite par un adversaire , pour ne pas dire par un
ennemi déclaré des Vaudois, nous
a paru comme telle être de quelque intérêt, et nous la donnons à
nos lecteurs dans l’espoir qu’ils la
compléteront et la corrigeront par
(1) Quand les missionnaires catholiques
no pouvaient convertir par la persuasion
les chréttens évangéliques, le roi de France, Louis HV, leur prêtait ses dragons.
Delà le nom de Mission boUée. On l'appelle,
aussi quelquefois la Mission dorée à cause
du rôle qu’y jouèrent les pièces d’or.
(2) Ces extraits sont tirés du manuscrit
de l’Abbé Merlin du Sauze, qui fW curé
aux Traverses (Pragela) de l’an 1688 à l’an
1712.
l’Histoire des Vaudois de Pragela
de Muston.
En l’année 1670, le roi Louis
XIV envoya au Pragela une mission de quatre jésuites pour catéchiser les peuples , et les ramener
à la sainte Eglise. Ils établirent
leur domicile à Fenestrelles, où ils
ont fait bâtir une maison et une
église. — Cette maison dépend du
Collège d’Embrun. lis allaient réfutant les prêches des ministres le
long de la vallée.
Quelque temps après, le roi envoya , outre les curés déjà établis
en Pragela, cinq prêtres payés sur
les économats de France, savoir un
au Villar-Dublon , un au Chateaudu-bois, un au Chasteirau de Bourset, un au Villaret, et l’autre à
Fenestrelles. Celui de Bourse! fut
ensuite transféré aux Traverses.
Ce fut le baillif de Briançon qui
reçut la lettre de la part du roi
pour faire ces établissement et tenir
la main à ce que la Vallée de Pragela , qui était toute de la religion
prétendue réformée, ne fît aucune
insulte aux dits curés missionnaires
tous tirés du Séminaire d’Embrun.
Pendant les années 1682, 1683,
1684 et 1685 M. Simon Roude,
prieur de Mentoule a beaucoup travaillé pour évincer les biens ecclésiastiques de son bénéfice , ce que
la cour du parlement de cette province du Dauphiné (1) lui a accordé
sur les titres qu’il a produits pour
prouver l’usurpation des prétendus
réformés. Mais Son but principal
(1} La vallée de Pragela. comme celle
du Cluson ou Quison appartient géographiquement à l’Italie. Mais politiquement
elle se rattachait à la province du Dauphiné , et elle a fait partie de la France
jasqu’en 1713.
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était de détruire l’hérésie et de ramener ces dévoyés au giron de la
sainte Eglise, ce qu’il obtint en leur
faisant ôter leurs charges et offices
pai des arrêts de cour, ordonnant
que les consuls et conseillers fussent catholiques. Il fut pareillement
établi qu’il ne pourrait y avoir que
dix personnes à leurs ensevelissements, lesquels se feraient à l’entrée de la nuit et non plus de jour.
Plusieurs autres mesures furent
adoptées qui les minèrent insensiblement, en sorte que, l’an 1685,
tous les ministres de la vallée furent interdits, le temple de la Rua
rasé de même que les temples des
autres lieux de la vallée (1) à l’exception de celui de Traverses qui
subsista quelque temps encore ; pour
faire baptiser leurs enfants , ils devaient les porter à Misoye de Bourdoisau (?).
Ce fut au commencement du mois
de septembre 1685 que le roi (Louis
XIV) par un arrêt de la Cour enjoignit aux habitants de la Vallée
de Pragela d’embrasser la religion
catholique... Comme cet arrêt ne
leur convenait pas, le roi pour empêcher les tumultes, envoya une
compagnie de dragons, ce qui rassura les ecclésiastiques. Ce fut en
ce temps que les peuples embras-"'
sôrent la religion catholique, apostolique et romaine, à l’exception de
(1) La vallée de Pragela comptait alors
cinq ou six communes avec leurs consuls,
70 villages ou hameaux, et plus de quinze
mille habitants. « Les hérétiques, disent
lés adversaires des Vaudois, y ont dix à
douze grands temples pour-le dimanche,
et plus de soixante petits, oii Ils se réunissent toàs les jours de la sedlaîne; tandis que les Catholiques ont à peine une
église (ce/le de MentoUlle) et quelques
cnapelles tres^lhignées». (Voir JMcston).
quelques uns qui se -retirèrent en
Suisse et en Allemagne.
En l’année 1686 il ne se passa
rien de considérable sinon que le
roi (1) envoya par sa piété six missionnaires de la Société de Sorbonne en cette Vallée, lesquels
ouvrirent leurs missions dans le
temple (vaudois) des Traverses resté
debout. On y célébra l’office divin
pendant plus de vingt mois. C’était
M. d'Atlo qui était supérieur de
cette mission, et M. l’abbé Rop est
resté plus longtemps dans ce pays
que les autres, puisqu’il est mort à
Fenestrelles. On établit aussi des
maîtres d’école catholiques pour
l’instruction de la jeunesse. Moi
(Merlin) n’étant encore que diacre
j’ai enseigné à la Rua; et étant
prêtre à la Michel de la dite année , Mgr. de Pourroy m’envoya
pour être curé aux Traverses, où
m’avaient précédé M. Gallice curé
a Fénils, Pons curé àUsseaux, et
Prin curé à Pourrières.
Ensuite le roi, par sa bonté, fit
un fond de soixante mille livres
pour faire bâtir plusieurs églises
et maisons curiales dans l’étendue
de la vallée , savoir à la Rua, à
Usseaux , aux Traverses , à Pourrières , à Bourse! , à Fenestrelles,
à Chateau-du-bois... S. M. fit de
même agrandir l'église de S‘ Restitut et celle de Fenils à cause des
nouveaux convertis.
1687.— Cependant, comme de
temps en temps quelques nouveaux
convertis, après que le roi eut révoqué l’édit de Nantes, (le 18 octobre 1685) cherchaient tous les
(5) Toujours le roi de France Louis XIV,
dont la vie diraolue n’était pas un secret
pour l’Abbé Merlin.
5
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moyens de vendre leurs meubles et
de s’en aller, sous prétexte de religion, des gardes avaient été placées
aux avenues pour empêcher ces
désertions. Ces gardes furent retirées vers la fin d’août 1687 ; cela
fit ouvrir les yeux à ceux de la
vallée de Pragela , qui, persuadés
qu’il leur était permis de se retirer
librement, s’en allèrent en divers
endroits de la Suisse et de l’Allemagne. — Quelque temps après
plusieurs furent bien aises de profiter des bontés miséricordieuses fü)
du roi pour venir ramasser les blés
qu’ils avaient semés avant de partir.
Dans ce même temps S. A. (le duc
de Savoie Victor Araédéé) entreprit
de faire la guerre aux religionnaires des Vallées de Luserne et de
S. Martin pour les réduire de même
à la religion catholique. Mais ils
ne voulurent lui obéir. Ils aimèrent
mieux quitter leur pays et se retirer dans les bois et les rochers ,
où après avoir resté quelque temps
ils se firent catholiques et reçurent
entretien. Les autres qui furent pris
furent conduits dans les villes du
Piémont pour y être instruits. Mais
comme le nombre était grand , ils
demandèrent (à S. A. le duc de Savoie) qu’il leur fût permis de sortir
de ses états, ce qu’il leur accorda,
leur faisant donner l’étape jusqu’à
Genève ( 1 ). C’étaient principale
(1) Cela est vrai de la bande qui passa
le Mont-Cenis le 27 février 1687. Mais il
est ^certain aussi que des douze mille Vaudois qu’on avait jetés dans les prisons du
Piémont l’année précédente, il n’en était
pas ressorti quatre mille et que d’entre
ces derniers il y en eut des centaines qui
succombèrent au froid et à la faim au
milieu des neiges du Mont Cenis qu’ils
dilrent traverser en pleine mois de décembre. • '*
ment ceux de la vallée de S. Martin.
Pour repeupler cette vallée , le
duc fit venir plusieurs de ses sujets
de Savoie, auxquels il fit vendre les
biens de ceux qui étaient sortis du
Piémont. Les Savoyards acceptèrent, et s’établirent dans la dite
vallée (de S‘ Martin). — Mais leur
établissement ne fut pas de longue
durée, et devait être peu d’années
après , suivi d’étranges tragédies.
Un fruit de la mission bottée.
(1686)
On vient de voir par le récit
même de l’abbé Merlin comment
Louis XIV en révoquant, il y a
deux siècles , l’Edit de Nantes , a
réussi à chasser du Pragelas, comme du reste de ses états, tous ceux
qui professaient la religion de l’Evangile. — Or ces protestants qui
furent ainsi forcés de quitter la
France pour chercher un refuge à
l’étranger, apportèrent partout où
ils furent accueillis de telles habitudes de piété , d’ordre , de travail
et d’industrie qu’ils devinrent en
peu de temps la source d’une vraie
prospérité pour les pays qui eurent
le bonheur de leur donner asile.
— La France au contraire fut tellement appauvrie par cette émigration de ses meilleurs citoyens
qu’elle en ressent encore, après
deux cents ans, les déplorables
conséquences. C’est du moins le
sentiment de plus d’un catholique,
entr’autres celui d’un officier supérieur français qui dans une lettre
sur la bataille de Sédan, s’exprime
en ces termes : yj
« Tous les jours je reconnais davantage l’absurdité politique de cet
6
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acte odieux qui s’appelle la révocation de l’édit de Nantes. C’est lui
qui, eu jetant dans les bras de l’Allemagne une multitude de familles
françaises protestantes prises parmi
l’élite de la nation, a produit ce remarquable mélange de la vivacité
de l’une des races avec la ténacité
de l’autre. Et nous assistons aujourd’hui aux derniers résultats de
ce chef-d’œuvre de la politique de
Louvois ».
Par un étrange retour, cette
même chapelle (à Versailles) où,
du temps de Louis XIV, les prédicateurs de la cour poussaient de
toutes leurs forces le vieux roi aux
persécutions religieuses, se remplit
maintenant chaque dimanche des
protestants de l’armée allemande
qui y célèbrent leur culte durant
le siège de Paris. «Aujourd’hui,
- écrit un chevalier de S* Jean occupé au soin des blessés dans les
ambulances allemandes , à Versailles, - aujourd’hui, des descendants
de ces mêmes réformés expulsés
de France, assistaient à l’exercice
de leur culte sur ces mêmes bancs ;
seulement le grand roi, le fils aîné
de l’Eglise , s’y trouvait remplacé
par le fils du marquis de Brandebourg , recueillant après deux siècles les fruits de la révocation de
l’édit de Nantes, cette merveilleuse
combinaison politique de M™® de
Maintenon et de Louvois. 11 y avait
dans ce fait un rapprochement qui
m’a frappé et que je n’ai pu m’empêcher de vous indiquer en passant.
L’histoire universelle;’dit Schiller,
c’est le jugement universel ».
DU BESOIN DE L’INSTRUCTION
en Italie.
Chose étrange ! 11 fallait le canon
pour faire sentir aux peuples quels
sont les dangers de l’ignorance et
l’abîme qui sépare une nation qui
sait lire d’une nation qui ne lit
pas. — Déjà en 1866 il n’y eut
guère qu’une voix pour reconnaître
que la journée de Sadowa était
avant tout la victoire des maîtres
d’école. L’Autriche elle-même en
fut si convaincue, que son premier
soin, après la défaite, fut d’enlever
aux jésuites et au clergé la direction des écoles pour prendre ellemême en main l’instruction de sa
jeunesse. Dans la guerre actuelle ,
s’il est une explication générale
des évènements qui nous ont frappés
de stupeur, c’est encore la différence de culture intellectuelle chez
les deux nations belligérantes qui
la fournit. D’un côté plus d’élan ,
de l’autre côté plus de réflexion.
Ici l’esprit militaire avec l’amour
de la gloire : là des habitudes de
prévoyance et une grande connaissance de la géographie. Ainsi, pour
la seconde fois, dans l’espace de
quatre ans, la voix du canon est
venue ressusciter la question toujours trop négligée de l’instruction
populaire. — En voici quelques
preuves.
Dans son rapport au Roi au sujet
des élections politiques, le gouvernement italien par l’organe de M.
Lanza s’exprime comme suit : « Le
désir que les représentants de la
nation , ne se sentant point trop
gênés par les votes précédents,
puissent choisir courageusement
de nouvelles t^oies de salut, s’accroît
7
-465
en considération des besoins de
l'instruction publique, dont tous
jusqu'ici nous avons à l’envie prêché l’importance, naais dont maintenant seulement on peut, grâce à
l’expérience , mesurer l’urgence
extrême. Le mot de Wellington ;
« C'est dans les collèges anglais
qu’on a gagné la bataille de Waterloo,» paraissait hyperbolique.
Maintenant on nous a mis sous les
yeux une terrible preuve que les
destinées des peuples et l’issue des
guerres se décident dans les écoles ».
M. Correnti, ministre de l’instruction publique , invité à une réunion électorale de Milan, reprend
ces paroles et les développe à peu
près en ces termes ; Quelques personnes , dit-il, ont blâmé la phrase
du programme ministériel disant
que les victoires se préparent dans
les écoles. C’est pourtant une pensée déjà vieille, exposée par Byron
et Bentham , et que viennent confirmer les terribles évènements
dont une grande partie de l’Europe est actuellement le théâtre.
L’instruction élémentaire doit
être répandue. On doit créer une
sorte d’insurrection contre l'ignorance. Ici, le gouvernement ne
peut que venir en aide ; ce sont
les communes, les associations.,
les particuliers qui ont le plus à
faire. L’instruction supérieure va
mieux; dans les sciences médicales,
physiques et naturelles , il y a un
véritable progrès. Bref, il faut répandre l’instruction et la répandre
vite.
La guerre entre la Prusse et
la France montre qu’un des secrets
des victoires, prussiennes consiste
dans la culture dont les soldats
allemands sont doués, et dans l’ignorance des populations rurales
de la France.
A ces paroles qui expriment le
sentiment du conseil des ministres
et en particulier celui du ministre
de l’instruction publique, ajoutons
celle d’un journal. « L’ignorance
des masses, dit avec raison VItalie
( 19 novembre ), est une spécialité
(les races latines, ou pour mieux
dire, des peuples catholiques. Pour
le constater , il suffit d’observer
que, sans parler des Allemands,
les peuples Scandinaves eux-mêmes
sont plus instruits que les Français,
qui sont les moins ignorants parmi
les Latins. Nous sommes donc,quant
à l’instruction, au dessous de la
Norvège (Je le crois bien !). La
Réforme du xvi® siècle a fait sortir peu à peu les peuples anglosaxons des ténèbres de l’ignorance.
11 est inutile de développer les
raisons de ce fait, que personne
ne conteste. 11 suffit de le rappeler ».
Le journal que nous citons conclut « qu’il faut établir comme
principe fondamental et indéclinable que tous les enfants iront à
l’école ». Il faut à un peuple toutes
les libertés possibles . hors celle
de rester ignorant.
Chrpnt(|ue pUttqttc.
Itg,lle. Le tribunal criminel de première instance de Rome a cmndamné Pietro
Sordi de Zagarolo, qui a blessé trois prêtres, à onze ans de travaux forcés.
La Lientenance du Roi pour Rome et
les provinces romaines a pris possession du
palais du Quiriml et du CoWg<t romain.
8
-46ß
Le premier est destiné à servir de logement pour la maison royale , le second
sera consacré aux écoles lycéales, gymnasiales et techniques. — Le voyage du
Roi et son entrée à Rome, qui avaient
été annoncés pour la fin de novembre,
sont maintenant ajournés, au grand désappointement des Romains. Plusieurs ministres et autres hommes d’Etat ont saisi
l’occasion de l’approche des élections pour
exposer à leurs électeurs leurs vues sur
la nouvelle situation du paj’s; c’est une
heureuse innovation qui ne se perdra plus,
il faut le souhaiter. — La presse italienne
a jugé très sévèrement, mais non sans
justice , les hommes politiques qui ont
déclaré vouloir renoncer à la candidature
pour rentrer dans la vie privée, au moment où le pays a le plus besoin de leur
présence à la Chambre. — De pareilles
retraites, dans les circonstances où se
trouve l’Italie, expliquent bien des choses.
Les Chambres sont convoquées à Florence
pour le 5 décembre; le Collège de Brichéras y sera de nouveau représenté par
le général Brignone, qui a obtenu la presqii’unanimité des suffrages — 428 voix
sur 443 votants. — Malheuresement on a
dû constater que la moitié seulement des
inscrits ont fait acte de présence. Plusieurs peuvent avoir eu de bonnes raisons
de s’abstenir; mais pour un grand nombre
il n’y a eu qu’une négligence coupable.
France. Depuis le rejet de l’armistice, et la reprise d’Orléans sur les Bavarois, les évènements ont été rares. On
assure cependant que les prussiens' sout
rentrés dans la ville de Dijon, qu’ils avaient
évacuée, et qu’ils se sont emparés de la
ville de Troyes. — Garibaldi a transporté
son quartier-général de DÔIe à Autun.
Son fils a livré aux allemands un combat
avantageux à Châtillon. — Paris est toujours cerné par l’ennemi; mais il tient bon
comme il n’a cessé^de faire depuis deux
mois e demi que dure le siège. L’insurrection du 31 octobre ne s’est plus renouvelée, si tant est qu’on puisse le savoir;,
car les copamunications continuent d’être
difficiles et très rares, mômp par la voie
des ballonft,, . ,,i ■ •. „• ■ .[
flussle. La Russie a dénoncé le
traité de 1856, déclarant qu’elle entend
reprendre sa liberté de traverser la MerNoire et d’en sortir avec des bâtiments
de guerre. L’Angleterre et l’Autriche ont
vu cela de mauvais œil, et le gouvernement de Pétersbourg a envoyé des notes
d’un caractère conciliant. Il pourrait bien
sortir de là une nouvelle guerre du côté
de l’Orient.
Espagne. S. A. R. le duc d’Aoste,
ayant accepté la candidature au trône
d’Espagne, et les puissances ayant donné
leur plein assentiment à ce choix , les
Cortès se sont réunies le 16 novembre
pour la nomination de leur roi. Sur trois
cents votants, deux cents environ ont
porté leurs voix sur le prince Amédée. —
Soixante députés ont voté pour la république fédérale. En conséquence de ce vote,
le président des Cortès a proclamé le duc
d’Aoste, roi d’Espagne, et cent coups de
canon ont salué l’heureux évènement.—
Dieu veuille bénir le nouveau Roi, et le
diriger de manière à ce qu’il puisse faire
pour la justice et la liberté en Espagne ,
ce que Victor Emmanuel son Père a fait
en Italie!
ANNONCES
Une jeune Vaudoise ayant suivi
pendant trois ans les cours de l’Ecole supérieure de La Tour et
pouvant fournir les meilleures références, désire se trouver une place
dans une ^onne famille de l’étran
ger, de préférence en Angleterre*
ou en Ecosse. Elle peut enseigner
le français et l’italien, mais ne
connaît pas la musique. ^
S’adresser à M. Michelino, lie.
theol. à La Tour
A. RÉvai, Gérant.
Pignerol, Impr.* Chiaatore.