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Olnmuleme année.
IV. 34.
J6 Août ISTO.
L’ECHO DES VALLÉES
FEUILLE HEBDOMADAIRE
Spécialement consacrée aux intérêts matériels et spirituels
de la Famille \audoise.
Que toutes les choses qui sont véritables....... occupent
vos pensées — ( Philxppiens.^ IV. 8. )
PKIX D ABOmKHZIIT
Italie, h domicile ('tm an) Fr. 3
Suisse ........ 5
France................• S
Allemagne H
Angleterre . Pays-Bas . • 8
Un nnmèi‘0 separé : 5 cent.
Un numéro an’iéré ; 10 cent.
BDHEADX D’ABONHnm
ToRRE-Ì’Er.MCE : Via Maestra.
N.42, (Agenzia bibliografica)
PiGNEROL : J. Chlantore Impr.
Turin :J.J. Tron, via Lagrange
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Lettres et envois franco. S'adresser pour l’administratioti
au Bureau à Torre-Pellice ,
via Maestra N. 42.pour la
rédaction ; â Mr. A. Revel
Prof, a Torre-Pellice.
Sommaire.
De IVducation chez les anciens Vaudois
(Sutie et fin). — Frœschwiller et Reischsboffen. — Quelques détails sur la Colonie Vaudoise du Rosario. — Chronique politique. —
Avit. — Souscription pour le Rosario.
__ DE rÉDlICAÎlON
eamne i'entendaiéRt ei la pratiquaient
les aucieas \audois.
(Suite et fin. V. n* 33)
L'éducation doit mettre l’enfant en état de parcourir le plus
heureusement et le plus fructueument possible cettè vie terrestre,
mais elle doit en même temps et
tout particulièrement le préparer
pour la vie éternelle. C’était le
grand but que se proposaient nos
pères dans l’éducation des enfants:
« ils doivent être rendus spirituels à Dieuf •. Les moyens qu’ils
employaient étaient la discipline
(l'autorité et l’exemple ) et l’en^pnement. Quant à la discipline,
ils admettaient que le» parents
doMmjuùreMaMige de leur autorité
pour BipriBer le mal par les châ
iiments corporels: « celui qui aime
son fils , disaient-ils avec l’EccIésiaste, qu’il ne lui épargne point
la verge , afin qu’il s’en réjouisse
à la fin de ses jours. et qu’il ne
heurte point ’ à la porte de son
prochain ». <> Corrige et garde tes
filles, ajoutaient-ils, garde leurs
corps, depeuf qu’elles ne s’égarent,
car, c’est en se faisant voir aux
étrangers que la fille de Jacob fut
corrompue ». Notons, pour éviter
tout malentendu au sujet de la
discipline répressive consistant en
des châtiments corporels , qu’il
s’agit ici, non de l’éducation dans
l’école, mais de l’éducation domestique ; et que, par conséquent,
le précepte relatif à l’empoi de la
verge s’adresse exclusivement aux
parents et non point aux instituteurs ni a aucun enseignant quelque soit son grade. Les parents
seuls ont le droit et le devoir,
selon le cas, d’employer de pareils moyens. Les enfants euxmêmes le sentent parfaitement :
ils se soumettent à la verge lorsque c’est la main paternelle ou
maternelle qni la tient; la corree-
2
-26&
tion alors produit son effet sans
que l’affection des enfants pour
les parents en soit altérée ; mais
iisne subiront jamais de semblables
châtiments à l’école sans en garder une rancune ineffaçable pour
ceux qui les leur infligent; et de
pareils châtiments, au lieu de
produire un vraie soumission , ne
font qu’abrutir les enfants et les
exciter intérieurement à la révolte.
11 y aura crainte servile, soumission apparente, mais au fond du
cœur il y a la rage et la malédiction pour le maître et pour
l’école elle-même. Nous avons été
écolier sous un pareil régime disciplinaire et nous parlons d’après
nos vieux souvenirs. 11 serait grand
temps que cette vérité fût comprise et pratiquée et que le régime
de la verge, si ce n’est du bâton,
fut à jamais banni de tout établissement où l’on élève, non des
singes ou tels autres animaux que
l’on ne dresse que par la frayeur,
mais des êtres humains , doués de
raison et destinés à aimer et à
être aimés.
L’éducation. n’a vraiment atteint son but que lorsque les dispositions et les actes , qu’elle
s’efforce de produire dans les enfants , ont été transformées en habitudes ; car ce qui constitue le
caractère d’une homme ce sont ses
habitudes ; détruire toutes les habitudes mauvaises et en créer .à
la place de bonnes, telle est la
grande œuvre de l’éducation. Nos
pères ne l’ignoraient pas, comme
le montre la sentence suivante
qui nous est encore parvenue d’eux
à travers les siècles : «’ Enseigae
tons fils en la (sraiute du Seigneur,
et aux voies des coûtâmes de la
foi ».
Enfin , ils n’ignoraient pas combien c’est une œuvre difficile;
combien elle exige de patience et
de persévérance. On rencontre parfois, chez les enfants, des natures
telles qu’il semble que toute peine
qu’on leur consacre est en pure
perte , et qu’il vaudrait mieux les
abandonner à eux-mêmes. Telle
n’était pas la manière de penser
de nos pères: « ne désespère point
de ton enfant, disaient-ils, quand
il ne voudra recevoir volontairement ta correction, et s’il n’est
pas si promptement bon ; le laboureur ne recueille pas le fruit
de la terre tout aussitôt qu’il a
semé, mais il attend le temps
opportun ».
Voilà pour la discipline.
Quant à l’autre moyen d’éducation qui est y enseignement, il
était pratiqué » par les anciens
vaudois, sur une large échelle et
dans des proportions que nous ne
comprenons guère de nos jours ,
au moins pour ce qui regarde
l’instruction religieuse. Voici le
témoignage que leur rend un ancien auteur catholique romain et
qui ne peut être, par conséquent,
suspect de particularité en leur
faveur.
Tous les hommes, dit-il, et
les femmes, les petits et les
grands, nuit et jour ne cessent
d’enseigner et d’appr^idre. De jour
le laboureur, en travaillant, enseigne son compagnon ou apprend
de lui; et la nuit, tout le temps
qu’ils peuvent veiller s’emploie à
s’instruire les uns les autres; ils
enseigitentmême sans livres: celai
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-267_
qui a été sept jours disciple, commence à en chercher d’autres à
qui il enseigne ce qu’il a déjà
appris. S’il s’en rencontre quelqu’un qui se veuille excuser sous
prétexte qu’il ne peut pas apprendre par cœur, ils lui disent;
apprends seulement un mot chaque jour, et au bout d’un an
tu sauras déjà plusieurs sentences
et continuant d’année en année tu
feras toujours de nouveaux progrès.
J’ai vu moi-même de mes yeux et
ouï de mes oreilles un de ces
pauvres paysans récitant le livre
de Job tout entier par cœur sans
en manquer un mot, et quantité
d’autres qui savaient au bout du
doigt tout le nouveau Testament ».
Faisons la part du langage quelque peu hyperbolique de cette relation ; il n’en résulte pas moins
que nos ancêtres avaient pour
l'instruction un zèle inconnu parmi
les vaudois de nos jours. Et dans
l’enseignement, comme dans la
discipline, ils usaient de patience,
marchant graduellement et s’adaptant à la capacité du disciple:
« ligne après ligne , commandement après commandement » et
même mot après mot: « apprends
seulement un mot par jour, » disaient-ils aux moins bien doués.
Mais l’enseignement n'était pas
pour eux quelque chose de spéculatif seulement; il devait porter
aussitôt son fruit dans la pratique;
il devait être éducatif, moralisant.
C’est ce qu’observe encore l’auteur
déjà cité: « que s'ils voient quelqu’un qui vive mal, ils le châtient rudement parleur discipline
et lui disent ; les Apôtres n’ont
pas ainsi vécu, et nous qui imi
tons les Apôtres , ne vivons pas
de la sorte ! ».
Transportez-vous, lecteur, par
la pensée dans ces siècles passés,
pour assister aux travaux qui nécessitaient , alors comme aujourd’hui , le concours de plusieurs
personnes , comme par exemple le
laattage du blé. le triage des noix
etc ; recueillez par la pensée les
conversations dont vous auriez
alors été témoin, comparez-les avec
celles dont vous êtes témoin aujourd’hui dans des circonstances
analogues, et dites si nous n’avons
pas grand besoin d’aller nous instruire à l’école de nos ancêtres !
FitŒSCHWIllËR ET REIGHSHOFFEN
Nous trouvons dans la Croix
le récit d’une des batailles qui
viennent de se livrer ; nous le
transcrivons tel quel , car il sert
à montrer toutes les horreures de
la guerre et la nécessité de secours
toujours plus abondants:
Le temps était brumeux et triste, un
brouillard froid se traînait sur les bois et
le long des Vosges, quand le matin du
6 août nous partîmes, avec un courageux voiturier, d’Ingwiller pour Niederbronn, éloigué de trois lieues et demie.
Les beaux villages alsaciens que traverse la route construite par Napoléon le
long de la montagne, étaient encore pleins
de calme. On semblait y croire l’ennemi
bien loin; et tout en ayant préparé les
salles d’école et de mairie'pour les blessés,
on Tavait plus fait comme un devoir qu’en
vue d’un soin qui allait devenir si tôt et
si grandement nécessaire.
A Niederbronn cependant, le canon
avait commencé à se faire entendre depuis
7i heures, et nous nous hâtâmes de partir
pour gagner les hauteurs de Frœschwiller.
4
-268
La route suU d’abord une vallée resserrée jusqu’à Reichshoffen, puis il s’en détache un chemin qui s’élève sur une colline boisée pour redescendre à Woerlh.
C’est au sommet de cette colline dominant toute la plaine de l’Alsace , que
se trouve Frœschwiller, position vraiment stratégique, occupée en 1792 par
Hoche contre Wurmser, et où le maréchal Mac-Mahon avait établi son quartier
général, ayant en face, derrière Wœrth,
le centre de l’armée prussienne qui appuyait sa droite sur les bois de la montagne
et cherchait à étendre sa gauche vers la
ligne ferrée qui va de Haguenau à Niederbronn et Metz.
Les voitures du train, caissons de munitions, charrettes d’approvisionnements,
formaient un long convoi qui montait
lentement la colline. Notre voiture dut
bientôt s’arrêter, et nous gagnâmes à pied
la hauteur, du haut de laquelle se déroulait la bataille.
Il était 9 heures, et l’action paraissait
surtout s’engager à gauche. Abrités derrière les bois, les Prussiens répondaient
à nos mitrailleuses et aux assauts des tirailleurs indigènes par des décharges répétées. En face nos lignes avançaient et
reculaient tour à tour sans mouvement
bien dessiné. A droite, des régiments silencieux attendaient, abrités par les pentes, l’ordre d’agir. Un calme sinistre régnait sur la hauteur, sans cesse interrompu
par le bruit de la fusillade, le sifflement
lugubre des mitrailleuses et le grondement des batteries. Des obus lancés avec
profusion et d’une énorme portée tombaient jusque sur l’arrière de nos rangs.
Mais, grâce à la pluie de la veille, ces
projectiles s’enfonçaient pour la plupart
en terre, à moins de rencontrer des corps
humains. Ils avaient allumé déjà Wœrth
et un hameau qui en dépend : un troisième
village brûlait à l’arrière, et tous faisaient
monter ensemble au-dessus de la fumée
blanche de la poudre leurs tourbillons
noirs et enflammés vers le ciel.
Mais un autre spectacle plus douloureux
encore ne tarda pas à nous ramener à la
mission de paix que nous voulions reinplir. Des mulets attachés les uns aux au
tres, ramenaient en longues files les blessés aux ambulances. Assis, les uns avec
calme, les autres gisants et gémissants
dans les cacolets (sortes de sièges disposés à droite et à gauche des bâts des
mulets), ils étaient escortés de quelques
soldats, pris dans le corps des musiciens.
Quelques voitures à deux roues en amenaient étendus sur un matelas de plus
gravement atteints. Parfois encore, c’étaient deux soldats portant un brancard.
D’autres suivaient à pied, soutenant dans
une main leur bras meurtri ou leur autre
main déchirée.
Chaque division doit avoir son ambulance volante , mais ici, l’une avait été
prise dans l’affaire de Wissembourg; les
autres sans doute n’étaient pas arrivées;
en fait, une seule avait été disposée sous
tente dans une prairie, derrière le chemin montant à Frœschwiller, à une petite
demi-heure du champ de bataille. Bientôt,
le mouvement d’avant ne se dessinant
pas, l’intendance l’avait avec raison repliée sur le village même de Reichshoffen.
De la paille était apportée en hâte dans
les locaux de l’école des Frères, de la
mairie, où l’on avait, sous la direction
dévouée de M. de L., réuni et disposé
une quarantaine de matelas. Mais ces trisstes convois se renouvelaient sans cesse.
Nous nous employâmes de notre mieux,
mais avec le douloureux sentiment de
notre impuissance, à disposer d’autres
locaux dans les auberges, les maisons
particulières. Oh! le lamentable tableau
que celui de ces chambrées de trente ou
quarante blessés, portés tour à tour sur
la paille rapidement étendue sur le sol.
Des femmes du peuple, les unes en larmes, les autres avec une ferme courage,
s’employaient, avec quelques hommes dévoués, à laver les plaies, à étancher le
sang, à donner un peu de viji ou d’eau
firatche aux soldats couchés.
Assez vite les gémissements cessaient,
et le sommeil gagnait la plupart de ces
infortunés harassés par les marches des
jours précédents, par les nuits du bivouac,
par le peu de nourriture et surtout par
les fatigues du combat. Les premières
salles étaient plus soignées; là les méde'
5
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cins commençaient à panser les plaies
avec des bandages; les chirugiens s’apprêtaient à faire leur œuvre. Des secours
plus abondants étaient réunis. Mais ailleurs, quelle navrante insufBsance ! Blaess
resta à peu près seul à aménager une de
ces chambrées, à y déposer la paille, à
y recevoir les ble.ssés, à laver les plaies.
Celles faites par les balles, petites et étroites, n’ont, malgré leur gravité, rien d’affreux. Mais les meutrissures des obus ne
baissent parfois aux membres plus rien
de reconnaissable. Les turcos étaient en
majorité parmi les blessés, et leur courage
se soutenait avec une grande force; je
vois encore l’air martial avec lequel l’un
d’eux, ayant l’épaule percée, et auquel
je disais: «Vous souffrez bien, mon ami! »
me répondait : « Ce n’est rien que cela,
monsieur, ce n’est rien.» Tous recevaient
les moindres soins avec un air de reconnaissance qui, pour n’être souvent que
dans un geste muet, n’en paraissait pas
moins vif.
K deux heures tous les ipeaux étaient
remplis. Heureusement, que de Niederbronn arrivaient des charrettes de paille
sur lesquelles étaient non sans douleurs,
hissés ceux qu’amenaient les mulets. D’autre part l'intendance organisait à la gare
des convois. Mais les cacolets redescendaient sans cesse, avec des malheureux
quittant l’hépital; j’avais reçu de Niederbronn l’avis que tout commençait à être
plein, et je me demandais avec angoisse
vers quels points diriger tous ceux qui
allaient arriver jusqu’à la nuit, quand le
désastre de la journée vint trancher à sa
manière ces préoccupations.
Il était quatre heures et demie. Depuis
plusieurs heures on avait fait redescendre
et renvoyé sur Nierderbronn et Bitche les
voitures et charriots de la suite, quand
le mouvement prit soudain un cours pluscompact et plus rapide. Des cavaliers se
joignirent aux équipages, puis des fantassins; c’étaient des ordonnances effarées,
de petits corps de réserve, de la cavalerie cherchant à galoper au milieu de ce
pêle-mêle; de toutes parts on quitte la
route et la fuite commence ; les portes et
les fenêtres se ferment. la panique se ga
gne , les voilures se renversent; on coupe
les traits des chevaux, on traverse ruisseau, ravin et voie ferrée, on gravit les
hauteurs opposées.
De ces hauteurs la situation apparaissait
dans sa gravité. Des colonnes de fumée
montaient de Frœschwiller; l’ennemi occupait les positions françaises oü se défendaient bravement des régiments courageux, mais les batteries ne continuaient
que sur quelques points. La droite surtout
était débordée, et l’on voyait courir les
pelotons noirs et serrés des prussiens qui
s’étendaient l’un après l’autre en long
éventail pour tourner notre ligne de défense, gagner la voie ferrée et couper la
retraite.
A Niederbronn même, on était encore
calme. On espérait toujours l’arrivée du
corps de Failly, parti l’avant-veille, en
toute hâte, de Sarreguemines. Je visitai
les ambulances, heureux de leur bel aménagement. Les vastes salles de la maison
thermale étaient remplies de lits et de matelas autour desquels s’empressaient des
sœurs de charité, les dames de la ville,
le pasteur, le curé, quelques médecins.
Dans celle des ofliciers, quelques-uns,
déjà pansés, avaient la plume à la main
et faisaient un effort pour écrire : « Mes
chers et bons parents». « Ma bonne femme
chérie... » D’autres me demandaient, avec
un air résolu, quelles nouvelles on avait
do la bataille. Hélas ! elles ne pouvaient
être bonnes! Victorieux sur toute la ligne
à onze heures et demie, nos quarante
mille soldats avaient vu à midi et demi
des troupes fraîches renouveler les forces
adversaires et en porter le nombre au
double du leur.
Il était six heures et demie. Nos soldats
continuaient à traverser la villes, les uns
pour s’engager sur la route de Bitche,
les autres pour gagner le chemin qui longe
la montagne. Je le repris à mon tour, attendant pour quitter le penchant qui domine Niederbronn, d’avoir vu vis-à-vis
de moi descendre, au pas de charge, les
pelotons prussiens sur la ville, tandis que
des colonnes de fumée montaient de quelques maisons de Reichshoffen.
La soirée et la nuit virent les troupes
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traverser les beaux villages de la route,
toujours hospitaliers, prêts à donner la
dernière miette de pain, la dernière goutte
de vin à nos braves soldats épuisés et
désorganisés, mais non démoralisés. Quelques cacolets chargés de blessés ne s’arrêtèrent qu’à Ingwiller, ob les fanfares
des régiments commencèrent à rallier les
soldats. A onze heures et demie du lendemain matin, les campements se formaient
à Saverne, quelques blessés qui avaient
marché jusque-là, pendant huit heures,
y recevaient les premiers soins, et de là,
le premier corps était dirigé sur Phalsbourg.
Le cœur navré de cette succession si
rapide des plus douloureux spectacles, je
me rappelai cette parole de l’Ecriture:
« Humiliez-vous sous la puissante main
de Dieu, et il vous relcvera quand il en
sera temps ».
Quelques détails
sur la Coiouie Vaudoise du Bosario
extraits d’une lettre d'un des colnns.
Après quelques détails d’un intérêt tout privé, le correspondant
continue; « Je dois vous dire aussi
quelque chose de la Colonie. La
paix entre les deux partis, qui
semblait avoir été rétablie par la
venue de M. Lantaret, n’a pas
duré très longtemps, et les choses en sont à peu près au même
point qu’auparavant ». Par forme de digression , le correspondant donne quelques utiles avis
à ceux qui ont l’intention d’aller
s’établir dans la Colonie. « Qu’ils
considèrent bien que s’ils ne' sont
pas doués d’une constitution robuste, et bien armés de bonne
volonté pour le travail, il^viaut
mieux qu’ils restent,en Europe.
Toutefois avec de la patience
de la persévérance on triomphe
de tons les obstacles. Ceux qui
veulent venir ici doivent se munir
de tout ce qu’ils peuvent s’ils veulent s’établir dans une chacra;
qu’ils apportent de bons meubles
et surtout de l’argent pour payer
en partie leur chacra. En général
ceux qui arrivent ici croient acheter du terrain à bon marché, peuplé d’arbres ou couvert de vignobles : il faut bien qu’ils sachent
qu’en arrivant ici comme propriétaires d'un terrain ils le trouvent
tout nu; il n'y a ni maison, ni
arbre , ni fossé , rien , si ce n’est
quelques arbustes qu’ils arrachent
aisément avec la charrue et qui
ne servent qu’à faire du feu. Il
faut donc laisser de côté les cbâteaux-en-Espagne et songer qu’en
arrivant ici ils doivent acheter,
outre le terrain , une charrue, des
bœufs, un cheval, du blé pour
une ou deux années, pour provision de bouche et pour semer, du
maïs, du bois pour la charpente
de leur maison , de la paille pour
la couvrir; qu’il faut entourer sa
propriété d’un fossé large et profond , autrement les animaux du
dehors dévorent leur maïs avant
qu’il soit en épis.
Il faut se construire un four, se
creuser un puits, outre une foule
d’âufres choses d’une importance
secondaire. L’Amériqye n’est pas
un pays où l’on s’amuse en travaillant comme quelques uus pensent ;
il faut au contraire profiter de tous
les instants, caâ* dans Une chacra il
y a toujours quelque chose à faire.
Gotntoe une nouvelle occasion
se présente pour vous envoyer une
lettre , j’en profite, pour vous un
peu plus longuement, persuadé que
7
-271
les nouvelles d’ici vous feront toujours plaisir. — Depuis que j’ai
commencé à vous écrire on a
déjà entrepris quelque chose pour
les nouvelles bâtisses ; je crois que
l’on commence par faire la cure.
Ne pouvant contribuer en argent
ou en blé, je me suis chargé du
transport de mille briques ; je crois
que chacun fera ce qu’il pourra. Je
suis surpris qu’après le retour en
Europe de tant de personnes qui
ont été ici on me demande par lettre des informations sur la Colonie.
Cependant comme la plupart de ces
personnes n’ont pas fait ici un long
séjour et n'ont pu parler , par conséquent , d’après les expériences
qu’ils y ont faites', je crois devoir
donner quelques renseignements.
Je traiterai séparément de différents objets afin qu’on poisse s’en
faire une plus juste idée.
Du terrain. — Le terrain de la
Colonie est noir comme la terre sur
laquelle on a fait du charbon. Cette
terre labourable forme une couche
de 20 à 30centimètres d’épaisseur ;
au-dessous se trouve une couche
de terre grasse rougeâtre peu propre à la végétation. Le sol produit
naturellement des arbustes en abondance ; c’est un bois très cassant :
voilà pourquoi le laboureur use
tant de pantalons lorsqu’il laboure
pour la première fois le terrain.
Le long des rivières se trouvent
aussi des forêts d’arbres à hautes
futaies' peu propres à la construction. Le sol est, pendant toute l’année, recouvert d’herbe et à moins
qu’une forte sécheresse ne vienne
brûlôr le gazon , les animaux trouvent toujours une abondante pâture.
— Des t^Qfirts.^ -7- Les chacres 'de
M. Griot ont mille mètres de longueur sur trois cents de largeur.
Le propriétaire choisit ordinairement le centre pour y fixer sa demeure, tout en lâchant de s’établir
au lieu le plus élevé d’où il puisse
dominer de la vue toute sa propriété. Une moitié de celle-ci est
destiné au labourage et l’autre au
pâturage , et lorsque les champs
sont épuisés on en fait de nouveaux.
11 va sans dire qu’on n’a pas besoin de prés à foin. (A suivre).
dxrontque :poUttc|uc.
France et Alleniaiçn®- Les
journées du 4 et du 6 aoftt ont presque
été éclipsées par celles du 14, du 16 et
du 18. — Le dimanclie 14, c’était la bataille dite de Longeville ou de Borny,
deux petits villages à une lieue de Metz,
laquelle dura de 2 à 7 heures du soir.
Le mardi 10, c’était la bataille de Gravelotte, lutte acharnée qui se prolongea
pendant douze heures consécutives et où
les prussiens finirent par s’emparer de
deux drapeaux, de sept canons et deux
mille prisonniers. — Le jeudi 18, de midi
à neuf heures, une troisième bataille non
loin du bourg de Rezonvillo , qui lui donnera son nom. — D’antres féliciteront les
deux armées de l’héroïsme dont elles ont
fait preuve: nous ne pouvons, quant à
nous, que déplorer encore l’aveuglement
et la légèreté criminelle qui nous a donné
cette guerre. Les résultats obtenus diront
bientôt d’une manière définitive auquel
des de'ux antagonistes sera demeuré l’avantage dans ces rencontres sanglantes
qui ont mis, pense-t-on, près de cent
mille hommes hors de combat. Ce qui
paraît certain c’est que les communications entre Metz et Paris sont interrompues, ce qui donne à croire que les
prussiens auraient effectivement empêché
le Maréchal Bazaine de se retirer sur
Châlons. Quatre petites forteresses ont ouvert leurs portes aux Allemands, et le
roi Guillaume a donné un gouverneur
général à l’Alsace et un autre à la Lorraine.
A Paris," il a été nommé un Comité pour
la défence, et le général Trochu comndènceàinsi sa proclamatiou dn 18 courant:
ans le péril où est le pays, je suis
itié gtmvcmeur'dé Pans efcomman-
8
-272
dant en chef des forces chargées de défendre la capitale en état de siège ».
Les députés continuent à recevoir de
leurs électeurs do nombreuses pétitions
au Corps Législatif tendant à demander
l’enrôlement des séminaristes et autres
religieux dans la même proportion que le
reste des français: « pourquoi, se dit-on,
ces hommes sans famille, en se réfugiant
au séminaire, échapperaient-ils aux obligations (]ue le salut du pays impose aux
citoyens qui laissent derrière eux femme
et enfants ? ».
Quarante mille Allemands ont été expulsés de Paris.
Italie. Un journal f l’Italie J dans sa
chronioue des théâtres, fait en passant
cette observation qui ne manque pas d'à
propos ; « Pendant que le sang coule à
flots sur les rivers de la Moselle, sur les
bords de l’Arno le public consacre ses
loisirs à l'opéra et à la comédie. La distance adoucit les impressions. Qui n’est
pas dans le danger s’en préoccupe moins.
Le monde est ainsi fait que les uns pleurent et les autres rient ». — A la Chambre cependant on n’a guère applaudi ce
monde-là. « Je comprends que chacun
ait ses sympathies, a dit un député, mais
je ne saurais admettre qu’on puisse rire
d’un côté des Alpes quand on pleure de
l’autre côté ». — La Chambre à volé par
216 voix contre 77 les quarante millions
demandés pour l’armement. — Le prince
Napoléon a été vu l’un de ces derniers
jours à Florence. — Cette visite semble
coïncider avec la résolution du Gouvernement d’unir ses eft'orts à ceux de l’Angleterre , de l’Autriche et de la Russie pour
hâter la fin d’une guerre qui n’est bientôt
plus qu’un épouvantable carnage.
Le 20 courant les derniers soldats français ont quitté Rome. Notre gouvernement
aurait bien fait de se borner à leur souhaiter un heureux voyage, à l’imitation
du pape qui a même exprimé le désir de
ne plus les revoir. On a cru plus habile
de ressusciter la malheureuse Convention
de septembre 1864 en s’engageant à protéger contre toute invasion la frontière
pontificale. — Quel est l’état, dit le ministre Mr Visconti Venosta, quel est l’état
qui se déshonore en promettant qu’il
maintiendra l’ordre et la tranquillité dans
son propre territoire? — Sur la déclaration réitérée du président du Conseil que
le ministère est convaincu de la nécessité de profiter de tous les évènements
qui se produiront pour arriver à quelque
bon résultat, la Chambre, par 214 voix
contre 152 et 12 abstentions, approuve
un ordre du jour assez innocent où 'elle
dit avoir confiance que le Cabinet s’occupera de la solation de la queston romaine, selon les aspirations nationales ».
Xloxxxe. A la nouvelle des premiers
désastres de l’armée française, le pape,
qui aime à rire, a prononcé un mot qui
restera. II a dit: « maisilsemble que ces
cOqs (questi GalliJ ne chantent déjà plus si
haut », La Correspondance de Rome citée
avec complaisance par son confrère Le
monde appelle la Prusse « un instrument
des représailles divines, » puis elle ajoute:
« cette puissance protestante a châtié
l’Antriche catholique eu 1866; elle châtie
la France catholique en 1870.... Que les
souverains disparaissent, que les dynasties
s’éteignent, cela importe médiocrement
puisqu’ils périssent par leur faute ». —
La touchante reconnaissance de ces cléricaux ! et comme ces « souverains » et
ces « dynasties» doivent y être sensibles l
Espagne. Le conseil municipale de
Barcelonne à discuté les meilleurs moyens
d’assurer la fréquentation des écoles par
les enfants. Il a été décidé qu’une prime
serait accordée à ceux qui suivront avec
le plus d’assiduité les leçons, ainsi qu’aux
parents qui veilleront le mieux à ce que
leurs enfants reçoivent l’instruction qui
leur est offerte.
AVI:S.
Le 11 juillet, 4 volumes de la Bibliothèque Pastorale étaient enlevés d’une
salle du Collège et portés ensuite à Turin,
ils ont été vendus, le 14, à un libraire
pour une somme insignifiante. Une coïncidence fortuite a amené tout aussitôt leur
découverte et leur recouvrement. Mais ce
n’était point assez : il fallait découvrir le
voleur, et le soussigné y était plus intéressé que personne. Après avoir suivi
longtemps une fausse piste, il a été mis
enfin sur la bonne voie, et l’incident se
trouve maintenant vidé pour ce qui le
concerne. Mais le soussigné n’en ressent
pas moins une vive peine pour avoir porté
ses soupçons sur les deux jeunes gens N.
et C., et il leur exprime ici publiquement
ses regrets, afin que dans le cercle de
leurs connaissances, à La Tour et ailleurs,
ils n’aient point à souflTrir, dans leur réputation , de l'injustice involontahre dont
lis ont été les objets.
La Tour, le 24 août 1870.
A. Revel bibliot^. de ta Bibl. Past.
Souscription pour le Bosario
Report du N. SS . fr. 277 OO
M. Fr. Rostan Evangéliste
L’Eglise de Catania
Un ouvrier (P. L.)
5
15
1
Total fr. 298 00
À. Rével Gérant.
Pignerol, Impr. .Chiantoro.