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amioc
Août 1S60.
L’ÉCHO DES VALLÉES
WLVELLE SERIE —
Que toutes les ehuses qui sont véritables,
vos pensées — ( Fhiîippieris.. 1\‘, vS.
ocoupent
SOMMAIRE — Les leçons de la guerre. — l'tineUs ■■ La chaire en pleine air.
Glanures. — Faili divers. — Nouvelles lur/iles. — Qittslitjns luaih-s.
LES LEÇONS DE LA GÜEHRE
Ce n'est ni notre intention ni notre aiTaire de tirer des
évènements dont nous venons d’ètre les témoins , les i>randes
leçons qu’ils sont chargés de donner au.\ peuples. — 11 est
néanmoins tel enseignement élémentaire (|ui s’oiTre de luimême et dont chacun peut, sans plus de ndard , faire son
profit.
Nous n’avons rien à dire de la guerre elh'-mème. sinon
que c’est un horrible fléau. On’un million d’hommes s'arme
contre un autre million , comme nous venons de le voir il
y a deux mois seulement; qu’au moment et à l’endroit donnés , les gros bataillons se courent sus et se heurtent ju.squ’à joncher de corps morts le champ de bataille , c’est un
spectacle à faire frémir ceux-là même qui ne l’ont jamais \u
de leurs propres yeux. — Au moins si l’on entrevoyait à ce
mai un remède prochain , et si l’on pouvait y apporter les
adoucissements dont il serait à la rigueur susceptible ! —
On devrait s'y attendre , vu le temps où nous vivons. Malheureusement, pour toute consolation » l’on nous dit que c’est
là un mal nécessaire ; et quant aux soulagements il paraît
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— 11 i
qu’ils arrivi'iit bien lentement aussi ; car si l’on a vu (à Genève, oct. 1863) des hommes de tous pays s’entendre pour
jeter les bases d’une Convention internationale en vue d’améliorer le sort des soldats blessés ou malades en temps de
ij;uerre , on a pu voir d’un autre côté des Gouvernements
(pii, au milieu de juin dernier, n’avaient pas encore donné
leur adhésion à cette noble entreprise. — Il est vrai que
ces retardataires obstinés s’appellent l’Autriche, le Pape et
le Grand Turc. — La guerre continue donc d’être un châtiment
ù la fois bien sévère et bien humiliant pour l’humanité, — et
certes si jamais les peuples doivent forger des hoyaux de
leurs épées , ce n’est point des hommes que nous viendra ce
bienfait, ni à eux qu’il faut le demander.
De cette première leçon à la deuxième le passage est aisé:
il en coûte cher pour avoir un peu de liberté dans ce monde
¡Nous sommes loin , sans doute, de rendre la liberté responsable de tout le sang qui a coulé sur les champs de bataille. — Sur les huit millions d’hommes environ , que la
guerre aura dévorés de 1792 à la fin de 1866, en Europe
seulement, le despotisme a droit à une forte part, et nul
n’oserait soutenir que les trois à six millions de soldats que
notre Continent tient prêts pour la première rencontre , soient
fous destinés à conquérir ou à conserver la liberté des peuples;
tout bien compté , l’esclavage coûte encore plus cher que
foutes les libertés ensemble.
11 n’en est pas moins vrai que les nations grandes ou petites qui ont besoin de quelque chose de mieux que le repos
et les jouissances matérielles, se doivent préparer à des luttes
sans fin , aussi bien qu’aux plus grands sacrifices. L’Italie en
sait quelque chose ; voyez .ee qu’elle a payé , nous ne dirons
pas depuis vingt ans , mais depuis sept ans seulem(mt pour
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conquérir ses franchises et son indépendance : que de bras
arrachés à l’agriculture et à l’industrie ! que d’intelligences
détournées du commerce et de l’étude ! Que d’argent, que de
sang et de larmes, pour nous donner un peu de liberté,
c’est-à-dire, pour garantir à chacun le moyen de faire son
devoir I — IV’est-il pas étonnant après cela , que vu le prix
de nos libertés, nous soyons encore si loin d’en tirer le parti
que nous devrions en tirer soit pour notre bien, soit pour
celui de nos semblables , qui est encore le nôtre ?
Soyons justes pourtant ; s’il y a eu de grands sacrifices à
faire , Ils n’ont point été supportés en pure perte ; le grain
qui est mort a déjà porté du fruit, et il en portera d’avantage
encore à l’avenir. — Dieu ne vient-il pas de nous accorder
en grande partie ce que nous voulions obtenir, tout en abrégeant les jours de carnage et d’angoisse ? Plus de deux millions de Vénitiens à la veille de se réunir à la famille italienne,
une nouvelle Province ouverte à l’Pvangile , avec pleine liberté à chacun de le recevoir et de le répandre , comme
aussi d’y conformer sa vie , certes c’est de quoi nous montrer reconnaissants.
Reconnaissants à Dieu , voulons-nous dire , et non point
à notre étoile. — La guerre de 1866 aura du moins donné
au peuple cette autre leçon, que pour gagner les batailles .
il vaut encore mieux être fort et prudent que de compter
sur la fortune. — On a beau imputer ses revers à ce qu’on
appelle un concours fortuit de circonstances accidentelles et
imprévues, — succès et revers, tout s’explique désormais
par la force ou la faiblesse, et si vous n’avez pu achever
votre toile , on vous dira sans façon que c’est le fil qui a
manqué. — Ce n’est pas qu’il ne faille faire iine part aux
circonstances même les plus insignifiantes , ni qu’il soit donné
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a aïK'im homme de tout prévoir et de pourvoir à tout au moment voulu ; l’avantage toutefois finit par rester à celui qui
a pris une précaution de plus et commis une faute de moins.
Pour nous en tenir à notre cas il est probable qu’avec plus
de force et moins d’erreurs nous aurions l’Istrie et le Tyrol,
comme aussi l’on peut croire assez raisonnablement que sans
le dévoûment de plusieurs et la sagesse de quelqu’un nous
n’aurions pas la Vénétie.
Quoi donc ! en détrônant la Fortune irons-nous adorer le
Succès et la Force , ou dire avec Turenne que Dieu soit toujours pour les gros bataillons? — Loin de nous cette pensée.
Idole pour idole , inutile de choisir. — Mais plus notre cause
est juste , et plus il faut pour la défendre nous fortifier de
tout ce que Dieu peut nous offrir de vigueur et d’appui. De
la force on en trouve toujours, pourvu qu’on la cherche où
elfe est. Or c’est ici que les derniers évènements sont venus
nous ouvrir les yeux.
>'ous avions cru que la force était « dans les gros bataillons», dans les longs exercices, et la guerre vient de nous
prouver que la force véritable d’un peuple , et par conséquent
de son armée , est avant tout...... dans l'intelligence et l'habi
tude du travail. — Les succès des Prussiens qu’on a été un
moment tenté d’attribuer à l’audace aidée du bonheur , au
fusil à aiguille , il n’y a maintenant qu’une voix pour en faire
honneur à la science des officjers, à l’esprit exercé de ces
soldats « qui savent lire et écrire », et dont l’immense majorité sont d’énergiques et intelligents travailleurs.
L’imprévoyance au contraire, l’inexpérience et l’illusion,
avec leur mère l’ignorance, telle est la cause principale
qu’on assigne aux revers essuyés. Peut-être y a-t-il là quelque exagération dont on pourra revenir ; mais une grande.
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— m
vérité reste au fond ; c’est que pour faire de bons soldats,
le mieux est encore de prendre des hommes, et des hommes
préparés autrement que par d’interminables exercices militaires, ou parles énervantes distractions du théâtre. « Il faut
à l’Italie du travail et du savoir » disait naguère un honorable
député; la jeunesse italienne, disait un autre, doit songer
désormais à étudier et à s’instruire, parceque dans les grandes
comme dans les petites choses, pour réussir, il ne sutïlt pas
de vouloir, il faut pouvoir, et pour pouvoir, il faut savoir.
Le courage même ne saurait tout remplacer chez le militaire : s’il n’avait fallu que l’élan du soldat, l’héroïsme des
chefs, le dévouement et le patriotisme de tous, nous aurions
balayé l’ennemi ; depuis le Prince Royal jusqu’au simple soldat,
tous « ont fait cas de leur vie comme d’une noisette vide », pour
nous exprimer avec un brave du camp opposé. Mais quand,
pour nous consoler du 24 juin ou du 20 juillet, l’on vient
nous dire que si l’ennemi a montré plus d’intelligence, les
nôtres ont fait preuve d’une plus grande bravoure , on n’éprouve aucun embarras à deviner de quel côté doit être demeuré l’avantage. — « C’est l’esprit qui porte le corps » —
disait le Général Beckwith ; c’est l’esprit qui gagne le corps,
nous répètent avec lui les derniers évènements et tous les
amis de notre patrie.
Certes, c’est bien là une de ces idées dont on peut dire
avec Niccolò Tommaseo , qu’elle vaut autant pour un pays
que dix victoires ; — et nous pouvons ajouter que si elle
prend racine, elle produira des résultats qui nous récompenseront de nos pertes les plus douloureuses et de nos plus
pénibles sacrifices.
Qui viendra nous apprendre maintenant que si l’intelligence
fait la force du corps , le plus ferme appui de l’âmc à son
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four se trouve dans une hormQ conscience, nous voulons dire
dans une conscience appuyée elle-même sur sa base naturelle qui est Dieu? — C’est en nous cachant le Dieu de l’Evangile et en endormant la conscience, qu’on a tout endormi
dans notre malheureux pays ; c’est en réveillant la conscience
que nous réveillerons toutes nos forces engourdies. — Rendons à la conscience son essor, en lui montrant le Père de
notre Seigneur Jésus-Christ , en l’appuyant directement sur
ce Rocher, et 7ious aurons donné aux intelligences une impulsion qui remuera des montagnes. — Ce ne serait pas la
première fois que l’Italie aurait gagné à ses désappointements autant que d’autres à leurs plus brillantes victoires.
VARIÉTÉS,
La chaire en plein air.
Le mercredi 15 août des centaines de personnes des deux vallées
du Pélice et de Pérouse étaient de bonne heure en mouvement pour
se rendre sur les hauteurs d’Angrogne à l’endroit nommé Comba-Bibaud.
n’était donc des points les plus opposés qu’on se dirigeait en longues
files sur la montagne convenue; le grand nombre toutefois venait de
Prarustin , de S.‘ Jean, de la Tour ou de la Commune même qui nous
accueillait.
En toute autre occasion la montée de la Tour à Comba-Ribaud eût
paru longue et pénible; mais ce jour-là on avançait sans fatigue comme
sans ennui après les enfants qui marchaient en tête comme pour nous
rappeler que la fête, cette fois, était pour eux essentiellement. — Il faut
dire qu’on ne s’épargnait pas les petites haltes et les causeries: ne
fallait-il pas profiter de cette fine pelouse et de cet ombrage pour
admirer à travers les feuilles des chataigners la superbe vallée que
couronnent la Vachère et le Roux ? — Plus loin , vers la Porte d'Angrogne
pouvait-on passer outre sans plonger son regard sur cette plaine du
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Piémont qui s’étend à vos pieds, et chcrnher à donner k iirs noms à
fies petites villes qui brillaient au soleil du matin? —Enfin quand le
premier de la file venait de découvrir derrière le Friolent la blanche
tête du M.‘ Viso, qui aurait pu ne pas se détourner au moins pour
saluer ce géant des Alpes Cotiennes ? —
Après deux ou trois heures de cette marche agréable ou avait pourtant fini par arriver à la zòne où le chataigner fait place au bouleau,
et déjà l’on apercevait sous un bouquet de mélèzes — les seuls qui
soient restés sur ces hauteurs — l’assemblée qui venait de se former.
Notre léger retard nous valut du moins le plaisir d’entendre à distance
le beau cantique par lequel s’ouvrit la réunion. Cet accord de cent
voix dont les ondes allaient se mêler au frôlement de la brise dans
les branches, était bien propre à mettre en quelque sorte les cœurs
à l’unisson pour toute la journée.
La prière ayant été faite par le pasteur de la paroisse, plusieuis des
ministres de l’Evangile qui étaient là prirent successivement la parole
sur le chap. II de S.‘ Matthieu — M.’’ B. Malau, qui présidait l’assemblée, nous montra la nécessité de donner à nos idées sur la Providence
de Dieu, quelque chose de moins vague, et à notre confiance un
caractère plus filial; — le pasteur de Prarustin ajouta qu’une telle
confiance, en nous délivrant du souci rongeur, ne ferait que nous
fortifier pour le travail et l’action. — M.'' Canton nous rappela cette
vieille vérité si évidente et si mal pratiquée. que nul ne peut servir
deux maîtres, ni vivre à la fois de deux religions sans gâter tous scs
plaisirs, même les mauvais. — Enfin voulant sans doute assaisonner
notre joie du sel qui la préserve, le pasteur de S.‘ Jean nous invitait à no
jamais oublier devant Dieu de quoi nous sommes faits, dussions-nous
sortir de cet examen de nous-mêmes humiliés jusqu’aux larmes et
au jeûne. — Toutes ces allocutions et d’autres encore, que relevaient
d’ailleurs des chants fréquents et soigneusement dirigés par nos Instituteurs, furent pendant deux heures et demie écoutées avec un parfait
recueillement par un auditoire qui ne comptait pas moins d’un millier
de personnes.
Cependant au fond de la vallée midi venait de sonner, et à un mot
du président tout le monde se dispersa qui d’un côté, qui d’un autre,
non toutefois sans se diriger vers les deux ou trois sources qui se
trouvaient heureusement dans le voisinage — Nous abandonnons à
l’imagination du lecteur le soin de se figurer ces fcent groupes réunis
autour de leurs provisions, ainsi que les charmes du repas.
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— 120 —
Dans l'après-midi, de deux à quatre heures, ce fut le tour des enfants des Ecoles du Dimanche — De la circonférence où ils étaient le
matin, ils passèrent au centre et allèrent se ranger bien serrés sur le
gazon , où au nombre de deux à trois cents ils formaient le plus ravissant tableau qu’on se puisse imaginer.
La lecture de la seconde partie du chap. II de S.‘ Luc vint bientôt
recueillir les pensées sur l’Enfant que tous connaissaient. Nous ne
pouvons rapporter ici toutes les paroles d’exhortation qui furent adressées soit aux parents soit au jeune auditoire — » Mettez de bonne heure
vos enfants en relation étroite avec Jésus leur ami, si vous tenez <à
ce qu’ils fassent plus tard votre gloire et votre joie » fut-il dit aux
premiers jtar le pasteur d’Angrogne « Cessez de vous décharger de
votre responsabilité sur le pasteur ou le régent » ajouta M.'' Parander —
Puis, s’adressant aux enfants; « honorez vos Ecoles du Dimanche, leur dit
M." Gay, c’est votre église à vous, mes amis» — « Tout jeunes que
vous êtes, leur dit un autre, vous pouvez faire de grandes choses:
commencez aujourd’hui même une œuvre qui vous rappelle à jamais
CO beau jour » ■— Tels furent quelques uns des conseils adressés à ces
enfants, qui à leur tour soulageaient l’attention par leurs frais cantiques.
Mais ce fut surtout quand on vit un vieillard découvrir ses cheveux
blancs devant cette jeune assemblée que l’intérêt redoubla — M.' le
pasteur Monastier n'avait pas besoin d’assurer ces enfants de l’affection
qu’il leur porte, pour s’empirer de leur âme: les paroles aussi émues
que sérieuses qu’il leur adressa ne sont pas de celles qui laissent
la pensée s’égarer à l’aventure — Je suis au soir de la vie, leur dit-il,
et vous n’êtes encore qu’au matin, — cependant vous pouvez descendre
au tombeau par dixaines avant moi. Aussi je voudrais vous dire que
vous avez grand besoin d’être sauvés au plus tôt — Malgré cet air
d’innocence qui vous fait tant aimer, vous avez en vous ce germe de
la mort qui est le péché; et si vous n’avez quelqu’un qui vous sauve,
vous êtes perdus tout comme les autres pécheurs — Or nous ne voulons
pas être perdus ; nous voulons, — et vous voulez — être avec le
Seigneur Jésus en Paradis ; — voilà pourquoi nous serions si heureux de vous voir aller de bonne heure à celui qui est venu chercher
et sauver ce qui est perdu. — Ce n’est pas le Seigneur Jésus qui vous
repoussera. Lui qui ne demande qu’à vous voir arriver —pour vous
ouvrir ses bras et vous 'bénir — J’ignore si vous l’aimez, mes enfants.
Plais je sais qù'on peut être fort jeune et l’aimer déjà beaucoup ; j'ep
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— 1-21 —
ai ¡lüur preuve une toute petite fille qui est uiaiiiteiiant avec sou Sauveur; et moi-même j’ai connu le Seigneur Jésus dès mon eul'nnce —
Je voudrais pouvoir vous dire que je ne l’ai jamais abandonné: je ne
le puis pas; je crains que vous n’ayez vous-mêmes un jour ou l’aulre
le malheur de Lui tourner le dos — Je ne te veux plus ! Lui direzvous alors tout découragés; mais Lui vous dira: Eh bien, moi je le veux
encore---; et alors si vous faites la paix avec Lui, il vous aimera plus
que jamais, et je suis certain que vous l’aimerez aussi» ---Mais nous
ne saurions citer qu’en les afl'aiblissant tou*tes ces paroles pleines d’une
paternelle émotion; ceux qui ne les ont point entendues ne les trouveraient ici que refroidies, et ceux qui étaient là n’ont pas besoin
qu’on les leur rappelle.
L’Assemblée ne montrait aucune impatience; mais l’ombre s’allongeait, et il fallait laisser à tout ce monde le temps de se retirer avant
la nuit. La prière et un dernier chant vinrent donc clore celte agréable journée.
P. S. Outre la réunion de Comba-Ribaud, il y en a eu, le même jour,
une autre à la montagne du Fin, sur les hauteurs de Rorà, où assistaient une centaine de personnes en grande partie du Villar.
GLANÜRES.
Dans la vie des rois et des peuples comme dans celle des simples
particuliers, il est des moments solennels de danger ou de délivrance,
où le sentiment religieux s’exprime avec plus de vigueur et de naïveté
qu’à l’ordinaire. — Il peut être intéressant d’en saisir alors les diü'érentes manifestations pour les comparer entr’elles et les apprécier. —
Ici c'est un humble recours à la miséricorde de Dieu, là c’est un appel
confiant à sa justice, — plus loin Dieu semble s’éclipser, et la prière
s’arrêter au Saint, à l’Eglise ou même au prêtre. — N’y a-t-il pas
là au moins trois religions? — Qu’on en juge par les exemples suivants --et qu’on choisisse. —
Paa de présomption! En annonçant à la reine la victoire de
Sadova, le Roi Guillaume terminait sa dépêche en disant: » Je remercie
Dieu pour cette faveur qu’il m’a faite • — Depuis, la Gazette de la Croix
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( de Berlin ) a porté à la connaissance du public les détails suivants,
qu’elle transcrit elle-même d’un autre journal, à son jugement, bien
renseigné. —
• Pendant les quatre nuits qui précédèrent le départ du Roi pour
l’armée. Sa Majesté n’avait pas fermé l’œil, parce qu’elle était naturellement dans une agitation terrible. — Les personnes de son entourage qui étaient très-inquiets pour le roi, le prièrent la nuit avant
son départ, de rentrer dans sa chambre à coucher et de chercher à
dormir.— Le roi céda; mais l’offlcier de garde l’entendit marcher vivement pendant une demi-heure dans sa chambre — L’inquiétude l’ayant
poussé à la porte de la chambre, qui était entr’ouverte, il vit S. M.
se jeter â genoux, et implorer pendant trois quarts d’heure, avec la plus
grande ferveur, le Dieu des armées, le Roi des Rois, pour obtenir son
secours contre l’ennemi, et son aide en ces moments diCFicils. » —
Voilà ce que faisait le roi avant la guerre. — Maintenant, ajoute la
Gazette, on nous écrit qu’à la revue qu’il passa sur le Marchfeld, le
31 juillet, le roi se trouvant auprès de quelques prédicateurs de campagne, leur dit à-peu-près ce qui suit: Messieurs, vous vous êtes chargés d’une mission grave et souvent difficile — Je vous en remercie. —
La campagne a été courte mais glorieuse et plus heureuse que personne
n’eût osé l’espérer — Cependant ce n’est pas à notre mérite que nous
devons cela: nous ne le devons qu’à l’assistance miséricordieuse de
Dieu — Je le sais, on a beaucoup prié, à la maison et depuis que
nous sommes en campagne; nous récoltons maintenant le fruit de ces
prières. — Nous devons en remerier Dieu à genoux. —Aussi, pas de
présomption 1 ce n’est pas de l’orgueil qu’il nous faut, mais de l’humilité. — Voilà Messieurs, ce que vous devez prêcher» — (voir V Italie
du 11 août).
I,e camp prussien après la bataille de Sadova ( 3 juillet).
Un officier supérieur, qui avait assisté à la bataille de Sadova comme
simple témoin termine par ces mots son intéressante description : • Le
soir, l’armée prussienne présentait un splendide spectacle — Tout le
front resplendissait de feux de bivouac; et en même temps, de tous
les groupes, on entendait au milieu des blessés et des morts, retentir
par la voix de deux cent mille hommes ces chants religieux et graves
dont l’Allemagne protestante a la spécialité touchante et la majesté *
Ilalit du 15 juillet ).
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I.a eonflance de l’Empereur d’Autriche — semble reposer
essentftîllement sur la justice de Dieu; voici les derniers mots de son
manifeste du 18 juin 1 — • Notre force et notre union ne doivent toute
fois pas être pour nous les seuls motits de confiance et d’espoir. —
Ma confiance, mon espoir sont basés sur quelque chose de plus solide:
j’ai foi dans la justice du Dieu tout-puissant, — que ma Maison a servi
depuis sa fondation , de celui qui n’abandonne jamais ceux qui dans
leur juste cause se confient en Lui. - C’est pourquoi je prie Dieu de
m’accorder son appui et la victoire, et j'exhorte mes péuples â se joindre à moi, et à demander avec moi au ciel de bénir nos armes • —
( Italie du 23 juin. ) —
A Vienne le peuple répondait à son Souverain par l’immense et
brillante procession que l’on sait — Le 2 juillet (la veille de la terrible bataille de Sadova) dès six heures du matin, tout le clergé avec
ses bannières s’était rendu à la cathédrale qui était splendidement
illuminée. Le monde réuni, la processioir-, bravant l’orage, se mit en
marche précipitamment pour se rendre à l’Eglise de S.‘ Etienne en
passant par Notre Dame du Secours. — Les personnages du plus haut
rang suivaient humblement le baldaquin qui protégeait le Cardinal-Archevêque, et s’agenouillaient avec la masse du peuple sous une pluie
battante. — Tout ce monde, avec sa touchante dévotion, en appellet-il, comme son chef, à la justice de Dieu, ou veut-il seulement monter la divine miséricorde ?
En hleasë de Cuslozn — L’Italie à son tour nous offrirait bien
quelque chose de tout aussi caractéristique en fait de religion; bornonsnous au trait suivant que nous raconte M.’ Petrucelli délia Gattina.
Dans une" visite qu’il fit au champ de bataille de Custoza, la nuit du 24
au 25 juin, au milieu de monceaux de cadavres il entendit une voix
de dessous une touffe de pampres et de maïs: « Pitié, s’écriait le
mourant, au nom de la Madonne, pitié » — « Nous allons à lui, ajoute
M.’ P., c’est un bersailler des provinces méridionales qui se meurt et
appelle un prêtre— Nous le relevons, nous le consolons tout en approchant la gourde de ses lèvres — Il me demande s’il est excommunié —
Je le rassure en lui parlant patois — Ma voix le soulage; il me croit» —
Pauvre bersnglieref
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— 12i
FAITS DIVERS.
Meriiières nouvelles des Iles Sandwieli. Tout le monde sait
dans quel état de barbarie se trouvaient les habitants des îles Sandwich non seulement lorsque les navires du capitaine Cook arrivèrent
pour la première fois en vue de leurs côtes en 1648, mais encore lorsque
bien des années plus tard, au commencement de ce siècle de courageux
missionnaires Anglais et Américains se rendirent pour la première fois
au milieu d’eux pour leur porter l’Evangile et la civilisation. Il sera
donc facile à chacun de mesurer la grandeur des progrès qui ont été
faits par ce peuple en lisant les dernières nouvelles qui nous en arrivent en date du 2 iuin. Le Parlement {les Sandwichiens ont maintenant un parlement, comme ils ont un gouvernement, une police et
une a imii istration régulière ) venait de clore sa session durant laquelle
le plus grand accord avait régné entre lui et le gouvernement. Le budget avait été fixé à la somme de 4,300,00ü francs. L’on a voté des
süinin. s f;uur encourager l’agriculture, l’industrie et la marine, ainsi
qu’mii subvention pour établir une ligne de bateaux à vapeur entre
la iMpitalo Honolulu, la colonie Française de Taïti et autres points
de rOcéanie. L’on établit comme en Europe une dotation pour la Couronne. S. M. ne voulait accepter que 25,000 dollars ( 132, 500). Mais les
Chambres trouvant cette demande trop modérée votèrent 35,000 dollars.
Voilà les nouvelles que donnent les journaux politiques de tous les
pays. Les journaux religieux en donnent d’autres plus réjouissantes
encore. Ils parlent d’églises nombreuses et prospères, suffisant non seulement à leurs propres besoins, mais envoyant encore à leurs frais
des missionnaires aux îles voisines où règne toujours l’idolâtrie, d’écoles
bien remplies, d’imprimeries répandant en grand nombre parmi les
peuples des livres religieux et instructifs. La Souveraine de ces îles la
reine Emma a fait l’hiver dernier un voyage en Europe, elle a visité
Florence , et comme chacun sait elle a honoré de sa présence la vente
qui se fait toutes les années au palais Salviati au profit de nos écoles
d¿^ns cette ville , et pour tous ceux qui l’ont vue de près elle a été la
plus éloquente démonstration des heureux effets que l’Evangile produit de toutes manières chez ceux qui l’acceptent. Nous n’hésitons pas
à le dire , les faits auxquels nous avons fait allusion proclament hautement la puissance de la doctrine du salut et l’utilité des missions
évangéliques soit dans le domaine religieux, soit même dans le domaine purement social.
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— k'r) —
Un niillinril ! Les liudgels ile ce temps nous ont rendu ce mot
familier ; peu de gens cependant ont cherché à se rendre compte de
ce que représente ce chiffre formidable de mille millions! — L'n milliard! s’écriait en 1825 , lors de l’indemnité aux émigrés , le général
Foy : « mais savez-vous bien , Messieurs , que depuis la mort de J.
r,. il ne s’est pas écoulé un milliard de minutes ? »
Le général Foy avait raison ; l’année étant de 365 jours 5 heures
et 48 minutes , il n’y avait pas encore en 1825 seize millions d'heures
que J n. était mort , et avant qu’il se soit écoulé un milliard de minutes notre dixneuvièmc siècle aura fait place au vingtième.
L’humanité tout entière avec son âge de six mille ans est loin, bien
loin encore d’avoir vécu quatre milliards de minutes ( Le Nord ).
Ce f|ue peut coûter la superstition« — Un journal des Indes
orientales en publiant le recensement de la population d’Agra fait observer que dans le cours des quatre dernières années il n’y a pas eu
moins de mille enfants dévorés par les loups. — Le gouvernement a
offert des primes aux destructeurs de ces animaux , mais en vain : une
étrange superstition populaire aurait jusqu’ici paralysé les meilleures
mesures Les habitants des campagnes s’imaginent que tout village où
l’on a répandu le sang d’un loup doit devenir désert et- que les mânes des enfants dévorés par l’animal poursuivent l’homme qui l’a tué.
— Cette croyance va si loin que dans quelques parties de l'Inde les
indigènes , quand ils s’emparent d’un loup , se contentent de lui attacher au cou une sonnette par mesure de précaution. — ( L’Italie du
23 juin ).
Forces utilitaires de l’Curope en tS6S.— Une intéressante
brochure récemment publiée à Paris et ayant pour titre : La Guerre
fait monter à six millions d’hommes le total des forces de terre et de
mer dont les divers Etats de l’Europe disposent en temps de guerre.
— C’est au delà du deux pour cent de la population européenne. —
Les forces des Etats qui ont été engagés dans la guerre ( Autriche
651 mille , Prusse 650 m , Confédération Germanique 407 m., Italie
424 ra. ) dépassent deux millions de soldats , dont plus de la moitié
était à la disposition de notre ennemi.
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— 126 —
IsrBëlUes persécutés. — On n’a pas oublié les manifestations hostiles dont les Juifs de Bohème furent, il y a quelques mois seulement,
l’objet de la part de la population tchèque de ce pays. — C’est aux
Principautés Moldo-Valaques à nous donner aujourd’hui un autre
exemple de cette malveillance.— « A Bucharest (nous copions la Revue
des Deux Mondes du 15 juillet) les délibérations de l’Assemblée (des
Chambres ) sur la question des droits civils et politiques à concéder
aux Juifs, ont été le prétexte d’une réelle émeute. — Le 30 juin la
foule hurlant contre les Juifs a assiégé le palais du Gouverment.
Après des efforts infructueux pour dissiper les émeutiers . un ministre
a dû promettre que l’article en faveur des Juifs serait supprimé de
la Constitution , — et il l’a été immédiatement , — ce qui n’a pas
empêché quatre ou cinq mille personnes de se porter sur la Synagogue
et y tout briser ». Et ce sont des gens comme ceux-là qui ont horreur
du gouvernement turc ! — Il nous semble à nous que Gros-Jean
pourrait ici en remontrer à son curé.
Un Joli cadeau. — M.*' le Comte P. Guicciardini vient, dit-on ,
de faire présent au Conseil Communal de Florence ( 20 juillet) d’une
belle collection de livres traitant de la Réforme religieuse au 16.® siècle.
— Ces volumes seront placés dans la Bibliothèque Nationale à la disposition du public.
NOUVELLES LO'-CALES
Eglise de la Tour. — Dans le but d’assurer dans un prochain
avenir à chacune des Paroisses de l’Eglise Vaudoise le degré de liberté qu’elles peuvent raisonnablement désirer, le Synode a invité
chacune d’elles à s’occuper sans retard de la- constitution d’un fonds
spécial destiné à subvenir aux besoins du culte et de l’instruction dans
son sein {Actes du Synode de 1866 §AT.). Ce fonds, est-il-ajouté, sera
alimenté soit au moyen de collectes régulières , soit par des souscriptions volontaires , et administré par le Consistoire. — Nous sommes
heureux de pouvoir annoncer que cette invitation ne restera pas à
l’état de lettre morte. L’Eglise de La Tour vient d'y répondre par l'organe de son assemblée électorale, régulièrement réunie le 26 août à
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2 h. p. m. —Après une discussion assez prolongée, l’on a adopté la
proposition suivante : — • Désirant donner un commencement d’exé
• cutiou à l’art. XV des Actes du dernier Synode, et sentant le besoin
■ d’obéir à un ordre positif de la Parole de Dieu , les membres de
• l’assemblée s’engagent volontairement à faire une souscription aii
• nuellti pour constituer un fonds spécial destiné à subvenir aux ben soins du culte et de l’instruction au sein de cette paroisse. L’assem. blée décidera elle-même de l’emploi de ce fonds. Le Consistoire est
• invité à pourvoir sans délai à l’exécution de la présente résolution ».
— Suivent les signatures.
Tnc-ancc. Ensuite de la demande motivée d’éméritation, en date
du 20 juillet, de M.'' le Pasteur Jean Jacques Bonjour, l’Eglise de S.
Germain se trouve vacante. M.’’ J. J. Bonjour a 37 ans de ministère
actif; pendant plusieurs années il a rempli la charge de Modérateur. —
I. a Table lui a accordé sa demande à dater du premier novembre.
.Vos pasteurs émérites seront dès lors au nombre de 7.
Visite l*as(or»ie. Le 5 août ( dimanche) la 'Table a fait une visite pastorale dans la Paroisse de Rodoret. On a rendu le meilleur
témoignage au zèle , à l’activité, et à la conduite de M.'' le pasteur
J. P. Tron.
Examen de fol. Le 4 septembre aura lieu, par devant le Corps
des Pasteurs réuni au Pomaret , Texameu de foi et eonviclions religieuses de M.'' le Candidat Louis Monastier , élève de la Faculté de
Théologie de l’Oratoire (Genève).
La Uédicaee du nouveau temple érigé au Périer a été , par suite
de retards imprévus , renvoyée au 8 octobre.
En nouveau don de IW.'" l^cnox. Le généreux amis de l’Eglise
Vaudoise, M.''J. Lenox (de New York), a mis à la disposition de la
Table une somme de 1250 francs. Le Table a décidé de réserver 250
fr. pour encourager les Ecoles du Dimanche en concourant particulièrement cette année à l’abonnement du Messager des Ecoles du Dimanche publié à Lausanne par M.''Jaulmes-Cook ; — et de s’adresser au
Comité des traités de Lausanne pour obtenir un choix de 64 traités différents qui seront distribués gratis dans chaque paroisse en proportion
des membres- de l’Eglise.
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.%c«.*idcnt«i. Dans la matinée du 23 juin derniei’, à Pral, Marguerite Roslan née Grill revenait de son chalet du Bô dal Col au hameau
dfs l'ommiers avec une bottée de bois. Arrivée au torrent du Palavat.
elle dut traverser un reste d’avalanche déjà fort diminué vers le milieu jiar un*cours d’eau , et formant au dessus du gouffre une espèce
de ,vûüte. — La neige ayant cédé so8s ses pas, la pauvre femme alla
heurter de la tète contre la pierre et reçut une forte contusion; puis
glissant à la renverse sous une chûte d’eau, elle fut bientôt étouffée.
Un berger qui passa par là peu après ayant eu connaissance de ce
triste accident courut du même pas pour l’annoncer au village voisin.
— De son côté la justice prévenue se transporta sur les lieu.v dès le
lendemain , et donna les ordres pour la sépulture , qui eut lieu le
jour même au milieu d'un grand concours de personnes;— heureusement les trois enfants de la défunte ont encore leur père.
On parle de deux autres accidents , dont l’un arrivé à Rodoret ,
l’autre à Massel ; mais nous en ignorons les circonstances.
l’nc coiiilnmiiatioii pour vol. Une nouvelle plus douloureuse
encore est la suivante ; — Le 3 août comparut devant la Cour d’Assises de Turin le nommé J. B. de S.‘ G. âgé de 22 ans , accusé d’avoir
pendant la nuit du l.r décembre 1865 commis un vol dans la maison
J. D., oû il avait précédemment prêté service en qualité de garçon de
chambre. — Le malheureux inculpé avoua son délit dans pn sque toutes
les circonstances , et la Cour , entendu le verdict des jurés , le condamna à trois ans de réclusion.
QUESTIONS LOCALES.
Képoime à In Qiieslloii «lu iViini. prëeëdent. — Le chef-lieu
de commune où il faut passer entre une prison et un abattoir pour
arriver à la Justice est Torre-Pellice. — Nous savons de bonne source
qu’il a été question plus d’une fois'de transporter ailleurs l’abattoir,
et que le Syndic s’y est employé avec zèle. Mais toutes les tentatives
ont échoué devant l’opiniâtreté du Conseil Communal qui, à une importante mesure hygiénique a préféré le gain qui lui procurait la location. Il ne faut pourtant pas se décourager et renoncer à atteindre
le but désiré ; le salles de l’Hôtel de Ville n’ont-elles pas été transformées par les soins de l'autorité communale ? La métamorphose ac.complie au premier étage pourrait bien un jour s’accomplir au rezde-chaussée, s’il est vrai que les révolutions procèdent de haut en bas.
Pignerol , J. Chiantore Impr.
H. Jahier Gérant.